Le Courrier de la Transplantation - Volume V - n
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1 - janvier-février-mars 2005
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Éditorial
Prélèvement d’organes sur cœur arrêté
*Hôpital Européen Georges-Pompidou, 75015 Paris.
**Hôpital Canalejo, La Corogne, Espagne.
"
J.C. Chachques*, A. Juffe**
L’
utilisation de donneurs d’organes avec cœur arrêté
(non-heart-beating donors [NHBD]) est une contribu-
tion importante au problème de la disponibilité d’organes
pour les patients en liste d’attente de transplantation. En plus
des difficultés liées aux problèmes légaux et éthiques de la
transplantation, certains risques, parmi lesquels des maladies
systémiques et des personnes ayant des tests biologiques
positifs pour certaines maladies virales, limitent le nombre de
donneurs.
Le prélèvement d’organes sur des personnes en arrêt cardiaque
est historiquement à l’origine des transplantations. Cette tech-
nique était utilisée de manière systématique dans les années
1970, avant l’acceptation du concept de mort cérébrale, qui
ouvrira la voie pour le développement des programmes de trans-
plantation d’organes. La pratique de prélèvements sur cœur
arrêté a continué dans certains pays comme le Japon, où le
concept de mort cérébrale n’a été accepté qu’à partir de 1999.
Plusieurs raisons ont bloqué le développement des pro-
grammes pour utiliser les organes à partir de NHBD.
Jusqu’aux années 2000, la communauté médicale avait consi-
déré que les organes prélevés à partir de NHBD étaient sous-
optimaux, et qu’ils comportaient des déficits fonctionnels
importants. Par ailleurs, des problèmes d’ordre légal, éthique
et logistique doivent être résolus pour utiliser les organes de
donneurs en arrêt cardiaque. Plusieurs publications récentes
ont montré de bons résultats quant aux transplantations effec-
tuées en utilisant des reins et des foies provenant de donneurs
en arrêt cardiaque, avec un taux d’efficacité comparable aux
transplantations réalisées à partir de donneurs à cœur battant.
CLASSIFICATION DE DONNEURS D’ORGANES
Le groupe de Maastricht a défini quatre catégories de don-
neurs d’organes avec cœur arrêté.
Les types I et II sont définis comme “donneurs non contrô-
lés”, et incluent des personnes chez lesquelles la mort car-
diaque est survenue de manière subite, généralement à l’exté-
rieur de l’hôpital (type I) ou dans le service d’urgences
(type II). Dans ces cas, l’équipe de transplantation n’est pas
prête, et un délai important est donc nécessaire pour complé-
ter les démarches légales afin de procéder à la donation. Le
temps “d’ischémie chaude” est alors généralement prolongé.
Les types III et IV sont définis comme “donneurs contrôlés”.
Dans le type III, toute assistance vitale est interrompue suite à
une maladie terminale. Ainsi, des organes peuvent être préle-
vés après arrêt cardiaque, une autorisation préalable du malade
ou d’un proche étant nécessaire. Dans ce cas, l’équipe de
transplantation est prête, le donneur étant hémodynamique-
ment stable avant l’arrêt cardiaque ; la période “d’ischémie
chaude” est courte. Les aspects légaux et éthiques doivent être
clairement établis. Cette approche est courante aux États-Unis.
Le type IV inclut des patients présentant un arrêt cardiaque
après avoir été déclarés en mort cérébrale. L’équipe médicale
doit attendre l’arrêt cardiaque. Ces patients souffrent fré-
quemment d’une longue période d’instabilité hémodyna-
mique avant l’arrêt cardiaque. Ce type de donneur est la prin-
cipale source de donneurs d’organes au Japon, même après
que la loi autorisant le prélèvement chez des patients en mort
cérébrale ait été promulguée.
MOMENTS CRUCIAUX
Il existe trois moments décisifs dans le prélèvement avec
cœur arrêté : l’arrêt cardiaque, le diagnostic de mort, le prélè-
vement d’organes.
Entre ces moments, des laps de temps variables s’écoulent
selon le type de donneur.
$Chez les “donneurs contrôlés”, le laps de temps entre
l’arrêt cardiaque et le diagnostic de mort n’est que de
quelques minutes. Le laps de temps entre le diagnostic de
mort et le prélèvement d’organes peut être très court chez ces
patients.
$Chez les “donneurs non contrôlés”, le laps de temps entre
l’arrêt cardiaque et le diagnostic de mort est généralement
très long (autour de 30 minutes), car des manœuvres de réani-
mation cardiopulmonaire sont réalisées. Pour le type I, le