112
Le Courrier de l’Arcol (1), n° 3, octobre 1999
Mise
au point
Rôle du LDL-cholestérol
dans les maladies
cardiovasculaires
Le LDL-cholestérol est un des facteurs de
risque principaux des maladies cardiovascu-
laires. Il est probablement celui qui est le
plus impliqué dans la genèse des cardiopa-
thies ischémiques, et son association avec
les autres grands facteurs de risque cardio-
vasculaires (tabagisme, diabète et hyperten-
sion artérielle) multiplie le risque d’événe-
ments cliniques. De nombreux essais de
prévention primaire et secondaire ont claire-
ment démontré le bénéfice d’une diminu-
tion du taux de cholestérol LDL (LDL-C).
Néanmoins, parallèlement à l’évaluation
quantitative du taux des LDL qui est effec-
tué le plus souvent, il existe une évaluation
qualitative, car ces lipoprotéines de faible
densité présentent une hétérogénéité dans
leur profil de distribution (1, 2). Celle-ci
affecte leur métabolisme et modifie leur
potentiel athérogène.
Hétérogénéité
des LDL en clinique
Les LDL normales présentent une distribution
unimodale (cf. figure Chapman) avec moins
d’un tiers des LDL qui se situent dans les frac-
tions les plus denses (supérieures à 1,039 Sv
de densité). Certaines dyslipidémies sont asso-
ciées avec une modification de la répartition
de ce profil. Cette modification n’est pas ano-
dine, car pour un même taux de LDL-C, les
propriétés des lipoprotéines de basse densité
LDL sont modifiées. L’implication clinique de
cette hétérogénéité dans la répartition des
LDL est importante (3).
Pour cela, il est nécessaire de resituer les
LDL et leur métabolisme au centre du méta-
bolisme des lipoprotéines et ce pour plu-
sieurs raisons : d’une part, parce que les
LDL sont les lipoprotéines qui transportent
majoritairement le cholestérol, et dont la
demi-vie dans la circulation est la plus
longue, et d’autre part parce qu’il existe une
circulation continue des LDL entre la
lumière artérielle et le sous-endothélium,
car les LDL peuvent facilement franchir la
barrière endothéliale. Or, les LDL petites et
denses présentent des particularités qui vont
augmenter leur demi-vie et faciliter leur
passage dans le sous-endothélium (4). De
fait, elles présentent des propriétés qui ren-
forcent leur potentiel athérogène.
Dyslipidémies
et LDL petites et denses
L’hétérogénéité dans la structure molé-
culaire et les propriétés physicochimiques
sont désormais bien établies chez des sujets
normo- ou dyslipidémiques. Mais certaines
dyslipidémies (5) s’accompagnent de façon
préférentielle d’une modification du profil
de répartition des LDL, et présentent une
augmentation du pourcentage de LDL
denses. Il s’agit avant tout des hypertri-
glycéridémies, et il existe une relation entre
l’augmentation du taux de triglycérides et le
pourcentage de LDL denses. Il semble que la
limite de 1,5 g/l voire 1 mmol/l pour
d’autres soit celle au-delà de laquelle le
pourcentage de LDL denses puisse être aug-
menté. En fait, l’hypertriglycéridémie est
liée à l’augmentation des VLDL, lipopro-
téines de très basse densité très riches en tri-
glycérides. En raison d’une hypersynthèse
comme cela existe dans les hypertriglycéri-
démies endogènes qui sont les plus fré-
quentes, les propriétés et la composition de
ces lipoprotéines sont modifiées, et l’en-
semble des modifications qu’elles subissent
aboutiront finalement à des LDL avec une
forte concentration en cholestérol et en pro-
téines. Cette augmentation peut jouer un rôle
dans l’athérogénicité des hypertriglycéridé-
mies. Mais comme plusieurs enzymes (lipo-
protéine lipase, lipase hépatique, CETP,
ACAT) ainsi que des échanges avec d’autres
lipoprotéines vont intervenir, des différences
entre les patients hypertriglycéridémiques
existent. Ces lipoprotéines de basse densité
auront donc un potentiel athérogène dif-
férent. Le pourcentage des LDL petites et
denses peut encore augmenter s’il existe
parallèlement une modification de la syn-
thèse protéinique au niveau de l’apoprotéine
B qui est la protéine constitutive des LDL.
Dans l’hyperapobêtalipoprotéinémie normo-
cholestérolémique décrite par Sniderman en
1980, la composition des LDL est modifiée
avec un rapport protéine/cholestérol aug-
menté (6). Dans l’hyperlipidémie familiale
combinée (7),il semble que plusieurs méca-
nismes soient intriqués, mais alors que l’ex-
pression phénotypique de cette dyslipidémie
est variable (hypercholestérolémie isolée,
hypertriglycéridémie, dyslipidémie mixte),
on retrouve presque constamment une aug-
mentation des LDL petites et denses (8, 9). Il
existe donc plusieurs origines aux LDL
petites et denses, mais l’augmentation des
triglycérides est très fréquemment retrouvée,
quoique parfois très modérée. Cette hétéro-
généité des particules a donc un déterminis-
me multifactoriel génétique. Il existe aussi
une composante métabolique, car le diabète
est souvent associé avec des LDL petites et
denses.
* Unités de prévention des maladies cardio-
vasculaires, service d’endocrinologie-
métabolisme (Pr G. Turpin), hôpital Pitié-
Salpêtrière, Paris.
** INSERM U321, hôpital Pitié-Salpêtrière,
Paris.
LDL petites et denses,
facteur de risque d’athérosclérose
et prise en charge thérapeutique
Ph. Giral*, É. Bruckert*, M.J. Chapman**, G.Turpin*
P. Giral 6/02/03 17:05 Page 112
113
Le Courrier de l’Arcol (1), n° 3, octobre 1999
Mise
au point
Diabète
et LDL petites et denses
Parallèlement à l’hyperglycémie et à l’hy-
perinsulinémie, l’anomalie métabolique la
plus fréquemment retrouvée chez les dia-
bètes de type 2 est l’hypertriglycéridémie.
Celle-ci est extrêmement variable et corres-
pond à plusieurs états pathologiques ; l’as-
sociation d’une hypertriglycéridémie endo-
gène préexistante à la survenue du diabète
étant assez fréquente. Elle rend parfois dif-
ficile a posteriori l’individualisation entre la
véritable hypertriglycéridémie mineure
endogène et l’hypertriglycéridémie accom-
pagnant un diabète. L’augmentation du taux
des triglycérides (TG) est donc l’anomalie
la plus communément retrouvée chez les
diabètes de type 2. Celle-ci est principale-
ment liée à une augmentation des VLDL.
Cette augmentation étant elle-même multi-
factorielle avec une surproduction de
VLDL, une diminution de la clairance méta-
bolique des particules riches en TG, une
diminution de l’activité de la lipoprotéine
lipase et aussi une modification de la com-
position en apoprotéines. L’ensemble de ces
anomalies favorise l’augmentation du taux
de triglycérides et la modification du profil
de répartition des LDL qui tend à augmen-
ter le taux des LDL petites et denses.
Métabolisme post-prandial
et LDL petites et denses
Il ne faut pas perdre de vue que l’étude des
lipoprotéines s’effectue chez des sujets à
jeun. Or, il existe des variations importantes
de la lipémie en période post-prandiale avec
une cinétique des triglycérides extrêmement
variable entre les individus. Au cours de la
période post-prandiale, il existe des
échanges entre les remnants, les HDL et les
LDL. Ces anomalies étant encore amplifiées
dans les états d’insulinorésistance.
Même si le profil des LDL varie d’un sujet à
un autre, dans la grande majorité des cas, les
patients présentant un pourcentage élevé de
LDL petites et denses ont aussi une hyper-
triglycéridémie, et l’ensemble des études
montrent que l’accentuation marquée de l’hé-
térogénéité dans les hypertriglycéridémies se
corrige avec la baisse du taux de triglycérides.
Rôle des LDL denses
dans l’athérosclérose
Il peut être suspecté sur deux types d’argu-
ments : expérimentaux et épidémiologiques.
Les arguments expérimentaux sont ceux qui
permettent de montrer que ces LDL petites et
denses sont plus facilement oxydables, plus
fortement liées aux glycosaminoglycanes,
pénètrent plus facilement dans l’intima arté-
rielle et présentent un catabolisme ralenti du
fait d’une liaison moins forte au récepteur
ApoB/E (voir article précédent).
Épidémiologie
des maladies cardiovasculaires
et LDL petites et denses
En ce qui concerne l’épidémiologie, il
existe une grande variabilité dans l’âge de
survenue du premier accident coronarien
pour un taux de cholestérol similaire entre
différentes populations. À l’échelon indivi-
duel, le taux de cholestérol est faiblement
prédictif de la survenue d’un événement, et
même si le taux de LDL-C permet une
meilleure prédiction, on constate une gran-
de disparité. Au sein des familles d’hyper-
cholestérolémie familiale, il existe des
variations considérables dans l’expression
de la maladie, quel que soit le niveau de
cholestérol. Vingt pour cent des hétérozy-
gotes ne présentent pas d’infarctus du myo-
carde avant 60 ans, malgré une
hyperLDLémie. En cas d’hypertriglycéridé-
mie, même en tenant compte de la relation
inverse avec le cholestérol HDL (HDL-C),
la survenue des événements en fonction du
LDL-C n’est pas très précise.
Quelques études épidémio-cliniques ont
directement corrélé athérosclérose et hété-
rogénéité des LDL. Il s’agit essentiellement
d’études cas-témoins qui montrent de
manière concordante une augmentation des
coronaropathies chez les patients avec un
profil de LDL denses dont le risque relatif
est augmenté d’un facteur allant de 3 à 4,5.
L’étude faite par Austin en 1988 (10) a mon-
tré un risque relatif d’infarctus de 3 quand il
existe une prépondérance de “LDL anor-
males” : essentiellement plus petites, plus
denses, plus chargées négativement.
Néanmoins ce profil de LDL s’accompagne
d’une hausse des triglycérides et d’une bais-
se du HDL, et n’est pas un facteur de risque
indépendant dans cette étude. Ces LDL sont
plus fréquemment rencontrées chez l’hom-
me que chez la femme, avec une différence
intersexe significative. L’étude appelée
“The Quebec Cardiovascular Study”
a débuté en 1973 sur une cohorte de
4637 hommes de 35 à 64 ans (11). En 1985,
un bilan lipidique a été effectué chez
2443 d’entre eux ainsi qu’une évaluation de
leurs différents facteurs de risque. Les sujets
ayant présenté un accident cardiovasculaire
ont été appariés sur de nombreuses variables
(âge, IMC, tabagisme, consommation d’al-
cool) avec des sujets sans accident. La
mesure de la taille des LDL sur gel de poly-
acrylamide a permis de montrer que le
risque d’accident coronaire était 3,6 fois
plus important en cas de présence de LDL
denses et petites et ce de façon indépendan-
te des autres facteurs de risque associés
(diabète, médicaments, pression systolique
et histoire familiale d’accident vasculaire,
HDL-C, taux de triglycérides).
Perspectives thérapeutiques
Plusieurs axes thérapeutiques peuvent être
envisagés suivant trois logiques :
antioxydants ;
régime et prise en charge des facteurs asso-
ciés ;
hypolipidémiants.
Antioxydants
Il est assez logique d’utiliser les antioxy-
dants, car une des propriétés délétères
des LDL petites et denses est leur capacité
à s’oxyder facilement dans le sous-endo-
thélium. Les antioxydants sont des groupes
de substances hétérogènes qui interfèrent
avec les métabolismes oxydatifs. De très
nombreux composés sont antioxydants,
mais il existe probablement une grande dif-
férence entre un effet antioxydant dans une
éprouvette (ou sur une réaction chimique
dessinée sur du papier) et ce qui se passe
réellement dans le sous-endothélium. En
général, on distingue les antioxydants
hydrophiles et lipophiles ; ce sont ces der-
niers qui seraient les plus intéressants car ils
circulent fixés sur les lipoprotéines. Une des
substances les plus étudiées in vitro est la
vitamine E qui est fixée sur les LDL et qui,
dans les modèles in vitro, se révèle un
P. Giral 6/02/03 17:06 Page 113
114
Le Courrier de l’Arcol (1), n° 3, octobre 1999
Mise
au point
excellent protecteur de l’oxydation des
LDL. Plusieurs études ont été réalisées afin
de confirmer (ou d’infirmer) les potentiali-
tés thérapeutiques de la vitamine E. Une
étude de prévention (étude CHAOS) sur
2002 patients coronariens a montré que la
supplémentation par 400 ou 800 UI de vita-
mine E entraînait une réduction significative
des infarctus non mortels.
Mais d’autres études de prévention primo-
secondaire avec la vitamine E ne semblent
pas confirmer cet effet préventif de la vita-
mine E (étude GISSI et étude HOPE) (12) ;
elles ne permettent plus de valider l’utilisa-
tion de la vitamine E en clinique. D’autres
molécules antioxydantes naturelles sont
connues (bêtacarotène, vitamine C, autres
antioxydants physiologiques [flavonoïdes]
compris dans les fruits et les légumes verts),
et les études épidémiologiques de population
montrent que les consommateurs de ces
substances semblent avoir une moindre inci-
dence d’événements cardiovasculaires, mais
il n’existe aucune étude d’intervention en
prévention primaire contre placebo qui
permettent de suggérer leur application en
thérapeutique. Enfin, d’autres substances
pharmacologiques (dont le probucol) sont
des antioxydants puissants qui circulent
fixés sur les LDL. Ils sont efficaces dans des
modèles animaux d’athérosclérose, et chez
l’homme ils peuvent entraîner une régres-
sion des xanthomes cutanés et tendineux, et
permettent, en association avec les statines,
une amélioration de la fonction endothéliale
coronaire. Néanmoins, les résultats cliniques
des traitements par antioxydants restent
encore insuffisants et peu convaincants mal-
gré leurs effets potentiellement intéressants.
Régime et prise en charge des facteurs
associés
La deuxième logique de la prise en charge
des patients présentant une augmentation
des LDL petites et denses repose sur une
diététique appropriée ainsi que sur une prise
en charge active des facteurs associés. En
effet, l’examen clinique peut mettre en évi-
dence des associations à la présence des
LDL petites et denses, comme une surchar-
ge pondérale androïde (facio-cervicotroncu-
laire) pouvant aggraver le risque athéroma-
teux ; une hypertension artérielle dans 30 %
des cas et de type héréditaire dans le cadre
de l’hypertension dyslipidémique familiale.
De plus, il existe une association fréquente
de l’hyperlipidémie familiale combinée
avec d’autres facteurs de risque (diabète,
hypertension, obésité), ce qui contribue à
aggraver le processus de l’athérosclérose.
Les LDL sont plus petites et plus denses
chez la femme ménopausée, et le traitement
hormonal substitutif peut modifier cet ano-
malie de répartition. L’effet des régimes est
complexe et probablement variable suivant
les individus. Les LDL riches en acides gras
polyinsaturés sont plus oxydables (tableau
IA) et particulièrement les acides gras en ω3
(huiles de poissons), mais il existe de nom-
breuses variables qui peuvent modifier cette
“oxydabilité” comme la richesse de l’ali-
mentation en antioxydants naturels et la
combinaison même des acides gras sur les
LDL, par exemple, l’enrichissement des
LDL en acides gras monoinsaturés les ren-
dent moins oxydables (tableau IB) ; en par-
ticulier, les LDL des habitants du pourtour
de la Méditerranée qui contiennent 20 %
d’acide oléique de plus que les LDL
améri-
caines sont
moins sensibles à l’oxydation et
moins attractantes pour les
monocytes/macrophages (alors que leur
concentration en vitamine E est similaire).
C’est peut-être aussi à ce niveau que réside
l’un des intérêts du
régime méditerra-
néen.
Cliniquement, la perte
de poids en cas de sur-
charge pondérale ou
d’obésité reste une des
variables
la plus
perti-
nente pour abaisser
le
taux de triglycérides
et de LDL-C en cas
de dyslipidémie
mixte. Une des parti-
cularités diététiques
du régime recom-
mandé est qu’il est
nécessaire non seule-
ment de diminuer les
matières grasses satu-
rées, mais aussi de
réduire les sucres
simples (et fermentés
comme l’alcool !)
générateurs d’hyper-
triglycéridémie chez
ces patients.
Hypolipidémiants
Il n’existe pas de thérapeutique spécifique
des LDL denses. L’analyse de l’ensemble
des données montre toutefois que les médi-
caments hypotriglycéridémiants ont l’effet
le plus net sur cette fraction. Le traitement
médicamenteux qui agit contre le défaut
métabolique de l’hyperlipidémie familiale
combinée est l’acide nicotinique. Il diminue
l’afflux d’acides gras libres vers le foie et
stimule la lipoprotéine lipase. Par consé-
quent, il réduit la formation de VLDL et
secondairement des LDL, et inhibe la sur-
production hépatique de l’apolipoprotéine
B100. Les doses nécessaires se situent entre
1,5 à 3 g/j, et il faut les augmenter progres-
sivement pour éviter les effets secondaires à
savoir le flush et les gastralgies. La sur-
veillance des transaminases hépatiques, de
la glycémie et de l’uricémie est nécessaire.
Les formes à libération retard sont mieux
supportées, mais elles ne sont pas commer-
cialisées en France !
Le deuxième groupe des médicaments est
celui des fibrates. Leur mode d’action est à
présent élucidé et fait intervenir l’activation
du PPAR-α(peroxisome proliferator-acti-
A. Comparaison de l’oxydabilité et de la taille des LDL chez
20 sujets hypertendus traités sous régime enrichi en huile de maïs
et en huile de poisson (d’après Suzukawa M. et coll. J Lipid Res
1995).
Paramètres Avant Après Après
lipidiques régime régime régime
“huile de maïs” “huile de poisson”
LDL-cholestérol 3,95 ± 1,34 3,81 ± 1,25 4,10 ± 1,26*
Taille des LDL 12,42 ± 0,35 12,49 ± 0,34 12,58 ± 0,34**
Taille de latence 57,9 ± 9,4 57,9 ± 10,8 43,1 ± 7,5*
* différent de la valeur de base et du régime huile de maïs
** différent de la valeur de base
B. Comparaison de l’oxydabilité et de la taille des LDL chez
18 hommes volontaires sains sous régime riche en graisses poly-
insaturées (huile de tournesol) et graisses monoinsaturées (huile
d’olive) (d’après Carmena R. et coll. Atherosclerosis 1996).
Paramètres Après Après p
lipidiques régime riche en régime riche en
polyinsaturés monoinsaturés
LDL-cholestérol 3,36 ± 0,87 4,08 ± 1,13 < 0,001
Taille des LDL 0,39 ± 0,06 0,41 ± 0,07 < 0,01
TBARS 581 ± 363 757 ± 384 < 0,01
Tableau I.
P. Giral 6/02/03 17:06 Page 114
115
Le Courrier de l’Arcol (1), n° 3, octobre 1999
Mise
au point
vated receptor). Les PPARs sont des récep-
teurs nucléaires apparentés aux récepteurs
des hormones stéroïdes (superfamille des
récepteurs des hormones stéroïdes). Les
réponses de l’activation des PPARs sont
nombreuses et concernent le métabolisme
des acides gras et la régulation des cycles
cellulaires. La lipolyse est augmentée grâce
à une augmentation de l’activité de la LPL.
Par l’intermédiaire de cette augmentation,
l’hydrolyse des triglycérides est augmentée
et leur taux est donc diminué. D’autre part,
les fibrates entraînent une augmentation de
l’ApoAI et des HDL. Leur tolérance est
meilleure que celle de l’acide nicotinique.
Les fibrates, comme le ciprofibrate et le
fénofibrate, ont fait l’objet d’études exten-
sives concernant leur capacité à normaliser
les profils des LDL chez des patients pré-
sentant une dyslipidémie mixte et des LDL
denses (13) (tableaux II et III). Néanmoins,
il n’existe aucune étude d’intervention avec
ces deux fibrates qui montre une efficacité
clinique préventive des accidents corona-
riens. En revanche, le gemfibrozil a entraîné
une diminution de l’incidence des accidents
coronariens et de la mortalité dans une
étude de prévention primaire, la “Helsinki
Heart Study” à la dose de 1 200 mg/j (14).
Dans cette étude les patients qui ont eu le
plus de bénéfice sont ceux qui avaient une
hypertriglycéridémie et un HDL-C bas, un
profil caractéristique de l’hyperlipidémie
familiale combinée. Ce même produit
entraîne une baisse de la récidive des événe-
ments coronariens dans une étude de pré-
vention secondaire (étude VA-HIT) chez des
patients avec un taux de LDL inférieur à
1,60 g/l et avec un taux bas de HDL-C infé-
rieur à 0,4 g/l (15). En revanche, l’étude de
prévention secondaire BIP réalisée avec le
bézafibrate n’a pas montré de bénéfice glo-
bal. Plusieurs études de prévention sont en
cours dans des populations à risque (diabé-
tiques) comportant des dyslipidémies athé-
rogènes avec des LDL petites et denses.
Les statines peuvent être utilisées dans le
traitement des dyslipidémies mixtes. Alors
qu’au début de leur commercialisation, l’in-
dication préférentielle de cette nouvelle
classe médicamenteuse était les hypercho-
lestérolémies familiales, l’ensemble des
études cliniques a permis une extension jus-
tifiée des indications. Toutes les statines
présentent les mêmes indications à savoir
les hypercholestérolémies et les dyslipidé-
mies mixtes. Leur principale propriété est
d’abaisser le LDL-C, et cette baisse est
dose-dépendante et peut varier en fonction
des doses de 20 à plus de 50 %. L’efficacité
des statines sur les triglycérides est indiscu-
table, mais beaucoup plus variable et infé-
rieure à celle des fibrates. Dans les dyslipi-
démies mixtes, les statines entraînent aussi
une baisse significative des triglycérides
entre 15 et 30 %. En revanche, les statines
ne modifient pas ou peu la distribution des
particules LDL (16). Néanmoins, du fait de
la baisse importante du LDL-C, les statines
entraînent une baisse de toutes les LDL, y
compris donc de la concentration des LDL
denses. De nombreuses études cliniques
ayant inclus des patients dyslipidémiques
comprenant aussi des dyslipidémies mixtes
ont montré l’efficacité clinique (baisse de la
morbidité coronarienne) de certaines sta-
tines (pravastatine et simvastatine) (17, 18).
Des études cliniques sont en cours afin
d’étendre ces résultats aux autres statines.
Association statines
-fibrates
“Sur le papier”, cette
association semble très
intéressante dans les dyslipidémies compor-
tant des LDL petites et denses, car elle addi-
tionne les effets de ces
deux classes thérapeu-
tiques, à savoir la
baisse des LDL avec
les statines et la modi-
fication
de leur répar-
tition avec les fi-
brates. Le problème
est celui d’une pos-
sible addition d’ef-
fets indésirables avec
un risque de myolyse
augmentée. En fait, il
semble que ce type
d’effets secondaires
graves soit limité aux
patients en insuf-
fisance rénale poly-
médicamentée. Cette
association doit donc
être réservée aux
patients qui présen-
tent une dyslipidé-
mie sévère et un
risque cardiovas-
culaire important
justifiant ce risque
thérapeutique poten-
tiel. Néanmoins, la
preuve de cette
meilleure efficacité seraient les résultats
d’une étude clinique qui montreraient des
résultats cliniques significatifs chez les
patients recevant l’association statines-
fibrates.
Intérêt diagnostique
des LDL petites et denses
Ce serait d’avoir une meilleure spécificité
du risque cardiovasculaire lié aux para-
mètres lipidiques. En effet, le cholestérol
total sérique n’est pas un bon marqueur de
risque cardiovasculaire, car bon nombre de
patients qui vont présenter une maladie
cardiovasculaire ont un taux de cholestérol
dit “normal”, c’est-à-dire non différent du
taux moyen de ceux qui n’ont pas de mala-
die cardiovasculaire. D’autre part, tous les
patients dyslipidémiques n’ont pas obliga-
toirement une maladie cardiovasculaire.
Celle-ci peut apparaître à un âge différent.
Même si les études épidémiologiques ont
montré qu’en moyenne, le taux du choles-
térol des patients ayant présenté un événe-
Paramètres Avant Après p
lipidiques traitement traitement
Cholestérol 296 ± 47 250 ± 25 0,063
Triglycérides 233 ± 50 156 ± 65 0,055
HDL-C 39 ± 5 40 ± 6 NS
LDL-C 211 ± 43 179 ± 19 NS
Lp(a) 14 ± 7 15 ± 10 NS
Fraction 1 173 ± 37 103 ± 28 0,0065
Fraction 2 233 ± 39 261 ± 81 NS
Fraction 3 497 ± 185 617 ± 101 NS
Fraction 4 703 ± 211 403 ± 208 0,037
Fraction 5 238 ± 62 110 ± 34 0,0065
Tableau II. Paramètres lipidiques avant et après traitement (100 mg
de ciprofibrate). Les valeurs avant traitement sont obtenues sous
régime et poids stables (régime anticholestérol standard). Les
concentrations des différentes sous-fractions sont exprimées en mg
pour 100 ml.
Fractions Avant Après Valeur
de LDL traitement traitement de p
Fraction 1 280 ± 4,9 278 ± 5,7 NS
Fraction 2 269 ± 6,3 268 ± 6,8 NS
Fraction 3 257 ± 5,2 263 ± 7,2 NS
Fraction 4 249 ± 2,4 258 ± 6,2 0,0095
Fraction 5 249 ± 1,9 257 ± 5,8 0,0067
Tableau III. Évaluation de la taille des particules LDL avant et après
traitement par 100 mg de ciprofibrate. La taille est exprimée en
Angströms.
P. Giral 6/02/03 17:06 Page 115
116
Le Courrier de l’Arcol (1), n° 3, octobre 1999
Mise
au point
ment coronarien est supérieur à celui de
ceux qui sont restés indemnes, du fait de la
répartition des taux dans la population géné-
rale, la majorité des patients présentant une
coronaropathie ont un cholestérol dans les
limites de la normale. Par exemple, dans
l’étude MRFIT qui a porté sur plus de
300 000 hommes, 69 % des décès corona-
riens durant les 6 ans de suivi sont apparus
chez des patients ayant à l’inclusion un cho-
lestérol total (CT) compris entre 4,71 et
6,83 mmol/l ; de même, dans l’étude de
Framingham, 40 % des sujets qui ont pré-
senté un infarctus du myocarde avaient un
taux de cholestérol compris entre 2 et
2,5 g/l. Dans l’étude PROCAM, 60 % des
patients ayant présenté un événement coro-
narien ont un cholestérol compris entre 2 et
2,5 g/l, 12 % d’entre eux ayant présenté un
événement coronarien avaient, lors de leur
entrée dans l’étude, un taux de cholestérol
total 2 g/l. Le LDL-C est un meilleur pré-
dicateur, mais qui reste encore insuffisant.
La recherche et la mise en évidence d’une
augmentation du taux de LDL denses pour-
raient être encore de meilleurs marqueurs de
risque au sein des populations normocholes-
térolémiques et aussi hypercholestérolé-
miques. Il existe plusieurs méthodes de
mise en évidence des LDL denses qui repo-
sent sur les ultracentrifugations ou sur les
électrophorèses après des préparations spé-
cifiques. Ces méthodes sont lourdes et en-
core peu applicables en routine (rappelons
que le LDL-C n’est même pas mesuré en
routine, et qu’il est simplement calculé par
la formule de Friedwald). Il n’est donc pas
envisageable, en dehors de protocoles de
recherche, d’utiliser ce marqueur en méde-
cine quotidienne. Néanmoins, il est pos-
sible, dans certaines situations cliniques, de
penser que les patients présentent une pro-
portion anormale de LDL petites et denses ;
il s’agit plus particulièrement des patients
qui présentent un syndrome X métabolique
qui associe des troubles du métabolisme
glucidique, une obésité, une hypertension
artérielle, une hypertriglycéridémie. C’est
en fait répéter que même si l’élévation du
LDL-C, et plus particulièrement des LDL
petites et denses est le premier facteur de
risque des maladies coronariennes, l’abais-
sement du risque cardiovasculaire en pré-
vention primaire au travers de la baisse du
LDL-C et de ses fractions les plus athéro-
gènes ne se manifestera de façon tangible
que chez les patients qui présentent un
risque cardiovasculaire élevé qui est aussi
dépendant des autres facteurs de risque.
Références
1. Shen M.M.S., Krauss R.M., Lindgren F.T., Forte
T.M. Heterogeneity of serum LDL in normal human
subjects. J Lipid Res 1981 ; 22 : 236-44.
2. Chapman M.J., Laplaud P.M., Luc G., Forgez P.,
Bruckert É., Goulinet S., Lagrange D. Further reso-
lution of the LDL spectrum in normal human plas-
ma : physicochemical characteristics of discrete
subspecies separated by density gradient ultracen-
trifugation. J Lipid Res 1988 ; 29 : 442-58.
3. Gardner C.D., Fortmann S.P., Krauss R.
Association of small low density lipoprotein par-
ticles with the incidence of coronary artery disease
in men and women. JAMA 1996 ; 276 : 875-81.
4. Steinberg D., Parthasarathy S., Carew T.E., Khoo
J.C., Witztum J.L. Modifications of low-density lipo-
protein that increase its atherogenicity. N Engl J
Med 1989 ; 320 : 915-24.
5. MacNamara J.R., Campos H., Ordovas J.M.,
Peterson J., Wilson P.W.F., Schaefer E.J. Effect of
gender, age and lipid status on LDL subfraction dis-
tribution. Results from the Framingham offspring
study. Arteriosclerosis 1987 ; 7 : 483-90.
6. Sniderman A., Brown G., Stewart F., Cianflone K.
From familial combined hyperlipidemia to
hyperapoB : unravelling the overproduction of hepatic
apolipoprotein B. Cur Op Lipidol 1992 ; 3 : 137-42.
7. Goldstein J.L., Schrott H.G., Hazzard W.R.,
Bierman E.L., Motulsky A.G. Hyperlipidemia in
coronary heart disease II. Genetic analysis of 176
families and delineation of a new inherited disorder,
combined hyperlipidemia. J Clin Invest 1973 ; 52 :
1544-68.
8. Austin M.A., Brunzell J.D., Fitch W.L., Krauss
R.M. Inheritance of low density lipoprotein subclass
patterns in familial combined hyperlipidemia.
Arteriosclerosis 1990 ; 10 : 520-30.
9. Dejager S., Bruckert É., Chapman M.J. Dense
low density lipoprotein subspecies with diminished
oxidative resistance predominate in combined
hyperlipidemia. J Lipid Res 1993 ; 34 : 295-308.
10. Austin M.A., Breslow J.L., Hennekens C.H.,
Buring J.E.,Willett W.C., Krauss R.M. LDL subclass
patterns and risk of myocardial infarction. JAMA
1988 ; 260 : 1917-21.
11. Lamarche B., Tchernof A., Moorjani S., Cantin
B., Dagenais G., Lupien P.J., Després J.P. Small,
dense low density lipoprotein particles as a predic-
tor of the risk of ischemic heart disease in men.
Prospective results from the Quebec Cardiovascular
Disease Study. Circulation 1997 ; 95 : 69-75.
12. GISSI-Prevenzione Investigators. Dietary sup-
plementation with n-3 polyunsaturated fatty acid
and vitamine E after myocardial infarction : results
of the GISSI-Prevenzione trial. Lancet 1999 ; 354 :
447-55.
13. Bruckert É., Dejager S., Chapman M.J.
Ciprofibrate therapy normalises the atherogenic low
density lipoprotein subspecies profile in combined
hyperlipidemia. Atherosclerosis 1993 ; 100 : 91-102.
14. Frick M.H., Elo O., Haapa K. et coll. Helsinki
Heart Study : primary-prevention trial with gemfi-
brozil in middle-aged men with dyslipemia. Safety of
treatment, changes in risk factors, and incidence in
coronary heart disease. N Engl J Med 1987 ; 317 :
1237-45.
15. Rubins H.B., Robins S.J., Collins D., Fye C.L.,
Anderson J.W., Elam M.B., Faas F.H., Linares E.,
Schaefer E.J., Schectman G., Wilt T.J., Wittes J.
Gemfibrozil for the secondary prevention of coro-
nary heart disease in men with low levels of high-
density lipoprotein cholesterol. Veterans Affairs
High-Density Lipoprotein Cholesterol Intervention
Trial Study Group. N Engl J Med 1999 ; 341 : 410-
8.
16. Bredie S.H.J., de Bruin T.W.A., Demaker P.N.M.,
Kastelein J.J.P., Stalenhoef A.F.H. Comparison of
gemfibrozyl versus simvastatin in familial combined
hyperlipidemia and effects on apolipoproteins-
B-containing lipoproteins, low density lipoprotein
subfraction profile, and low density lipoprotein oxi-
dizability. Am J Cardiol 1995 ; 75 : 348-53.
17. Sheperd. J et coll. Prevention of coronary heart
disease with pravastatin in men with hypercholeste-
rolemia. N Engl J Med 1995 ; 333 : 1301-7.
18. Sacks F.M., Pfeffer M.A., Moye L.A., Rouleau J.L.,
Rutherford J.D., Cole T.G., Brown I., Warnica J.W.,
Arnold J.M.O., Wun C.C., Davis B.R., Braunwald E.
The effect of pravastatin on coronary events after myo-
cardial infarction in patients with average cholesterol
levels. N Engl J Med 1996 ; 335 : 1001-9.
vous intéresse ?
Votre avis nous intéresse
Rendez-vous sur le site de l’Arcol...
...le forum des lecteurs est à votre disposition http://www.arcol.asso.fr
P. Giral 6/02/03 17:06 Page 116
1 / 5 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !