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P. Giral
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Mauisepoint
LDL petites et denses,
facteur de risque d’athérosclérose
et prise en charge thérapeutique
Ph. Giral*, É. Bruckert*, M.J. Chapman**, G.Turpin*
Rôle du LDL-cholestérol
dans les maladies
cardiovasculaires
Le LDL-cholestérol est un des facteurs de
risque principaux des maladies cardiovasculaires. Il est probablement celui qui est le
plus impliqué dans la genèse des cardiopathies ischémiques, et son association avec
les autres grands facteurs de risque cardiovasculaires (tabagisme, diabète et hypertension artérielle) multiplie le risque d’événements cliniques. De nombreux essais de
prévention primaire et secondaire ont clairement démontré le bénéfice d’une diminution du taux de cholestérol LDL (LDL-C).
Néanmoins, parallèlement à l’évaluation
quantitative du taux des LDL qui est effectué le plus souvent, il existe une évaluation
qualitative, car ces lipoprotéines de faible
densité présentent une hétérogénéité dans
leur profil de distribution (1, 2). Celle-ci
affecte leur métabolisme et modifie leur
potentiel athérogène.
Hétérogénéité
des LDL en clinique
Les LDL normales présentent une distribution
unimodale (cf. figure Chapman) avec moins
* Unités de prévention des maladies cardiovasculaires, service d’endocrinologiemétabolisme (Pr G. Turpin), hôpital PitiéSalpêtrière, Paris.
** INSERM U321, hôpital Pitié-Salpêtrière,
Paris.
Le Courrier de l’Arcol (1), n° 3, octobre 1999
d’un tiers des LDL qui se situent dans les fractions les plus denses (supérieures à 1,039 Sv
de densité). Certaines dyslipidémies sont associées avec une modification de la répartition
de ce profil. Cette modification n’est pas anodine, car pour un même taux de LDL-C, les
propriétés des lipoprotéines de basse densité
LDL sont modifiées. L’implication clinique de
cette hétérogénéité dans la répartition des
LDL est importante (3).
Pour cela, il est nécessaire de resituer les
LDL et leur métabolisme au centre du métabolisme des lipoprotéines et ce pour plusieurs raisons : d’une part, parce que les
LDL sont les lipoprotéines qui transportent
majoritairement le cholestérol, et dont la
demi-vie dans la circulation est la plus
longue, et d’autre part parce qu’il existe une
circulation continue des LDL entre la
lumière artérielle et le sous-endothélium,
car les LDL peuvent facilement franchir la
barrière endothéliale. Or, les LDL petites et
denses présentent des particularités qui vont
augmenter leur demi-vie et faciliter leur
passage dans le sous-endothélium (4). De
fait, elles présentent des propriétés qui renforcent leur potentiel athérogène.
Dyslipidémies
et LDL petites et denses
L’hétérogénéité dans la structure moléculaire et les propriétés physicochimiques
sont désormais bien établies chez des sujets
normo- ou dyslipidémiques. Mais certaines
dyslipidémies (5) s’accompagnent de façon
préférentielle d’une modification du profil
de répartition des LDL, et présentent une
augmentation du pourcentage de LDL
112
denses. Il s’agit avant tout des hypertriglycéridémies, et il existe une relation entre
l’augmentation du taux de triglycérides et le
pourcentage de LDL denses. Il semble que la
limite de 1,5 g/l voire 1 mmol/l pour
d’autres soit celle au-delà de laquelle le
pourcentage de LDL denses puisse être augmenté. En fait, l’hypertriglycéridémie est
liée à l’augmentation des VLDL, lipoprotéines de très basse densité très riches en triglycérides. En raison d’une hypersynthèse
comme cela existe dans les hypertriglycéridémies endogènes qui sont les plus fréquentes, les propriétés et la composition de
ces lipoprotéines sont modifiées, et l’ensemble des modifications qu’elles subissent
aboutiront finalement à des LDL avec une
forte concentration en cholestérol et en protéines. Cette augmentation peut jouer un rôle
dans l’athérogénicité des hypertriglycéridémies. Mais comme plusieurs enzymes (lipoprotéine lipase, lipase hépatique, CETP,
ACAT) ainsi que des échanges avec d’autres
lipoprotéines vont intervenir, des différences
entre les patients hypertriglycéridémiques
existent. Ces lipoprotéines de basse densité
auront donc un potentiel athérogène différent. Le pourcentage des LDL petites et
denses peut encore augmenter s’il existe
parallèlement une modification de la synthèse protéinique au niveau de l’apoprotéine
B qui est la protéine constitutive des LDL.
Dans l’hyperapobêtalipoprotéinémie normocholestérolémique décrite par Sniderman en
1980, la composition des LDL est modifiée
avec un rapport protéine/cholestérol augmenté (6). Dans l’hyperlipidémie familiale
combinée (7), il semble que plusieurs mécanismes soient intriqués, mais alors que l’expression phénotypique de cette dyslipidémie
est variable (hypercholestérolémie isolée,
hypertriglycéridémie, dyslipidémie mixte),
on retrouve presque constamment une augmentation des LDL petites et denses (8, 9). Il
existe donc plusieurs origines aux LDL
petites et denses, mais l’augmentation des
triglycérides est très fréquemment retrouvée,
quoique parfois très modérée. Cette hétérogénéité des particules a donc un déterminisme multifactoriel génétique. Il existe aussi
une composante métabolique, car le diabète
est souvent associé avec des LDL petites et
denses.
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Diabète
et LDL petites et denses
Rôle des LDL denses
dans l’athérosclérose
Parallèlement à l’hyperglycémie et à l’hyperinsulinémie, l’anomalie métabolique la
plus fréquemment retrouvée chez les diabètes de type 2 est l’hypertriglycéridémie.
Celle-ci est extrêmement variable et correspond à plusieurs états pathologiques ; l’association d’une hypertriglycéridémie endogène préexistante à la survenue du diabète
étant assez fréquente. Elle rend parfois difficile a posteriori l’individualisation entre la
véritable hypertriglycéridémie mineure
endogène et l’hypertriglycéridémie accompagnant un diabète. L’augmentation du taux
des triglycérides (TG) est donc l’anomalie
la plus communément retrouvée chez les
diabètes de type 2. Celle-ci est principalement liée à une augmentation des VLDL.
Cette augmentation étant elle-même multifactorielle avec une surproduction de
VLDL, une diminution de la clairance métabolique des particules riches en TG, une
diminution de l’activité de la lipoprotéine
lipase et aussi une modification de la composition en apoprotéines. L’ensemble de ces
anomalies favorise l’augmentation du taux
de triglycérides et la modification du profil
de répartition des LDL qui tend à augmenter le taux des LDL petites et denses.
Il peut être suspecté sur deux types d’arguments : expérimentaux et épidémiologiques.
Les arguments expérimentaux sont ceux qui
permettent de montrer que ces LDL petites et
denses sont plus facilement oxydables, plus
fortement liées aux glycosaminoglycanes,
pénètrent plus facilement dans l’intima artérielle et présentent un catabolisme ralenti du
fait d’une liaison moins forte au récepteur
ApoB/E (voir article précédent).
Métabolisme post-prandial
et LDL petites et denses
Il ne faut pas perdre de vue que l’étude des
lipoprotéines s’effectue chez des sujets à
jeun. Or, il existe des variations importantes
de la lipémie en période post-prandiale avec
une cinétique des triglycérides extrêmement
variable entre les individus. Au cours de la
période post-prandiale, il existe des
échanges entre les remnants, les HDL et les
LDL. Ces anomalies étant encore amplifiées
dans les états d’insulinorésistance.
Même si le profil des LDL varie d’un sujet à
un autre, dans la grande majorité des cas, les
patients présentant un pourcentage élevé de
LDL petites et denses ont aussi une hypertriglycéridémie, et l’ensemble des études
montrent que l’accentuation marquée de l’hétérogénéité dans les hypertriglycéridémies se
corrige avec la baisse du taux de triglycérides.
Épidémiologie
des maladies cardiovasculaires
et LDL petites et denses
En ce qui concerne l’épidémiologie, il
existe une grande variabilité dans l’âge de
survenue du premier accident coronarien
pour un taux de cholestérol similaire entre
différentes populations. À l’échelon individuel, le taux de cholestérol est faiblement
prédictif de la survenue d’un événement, et
même si le taux de LDL-C permet une
meilleure prédiction, on constate une grande disparité. Au sein des familles d’hypercholestérolémie familiale, il existe des
variations considérables dans l’expression
de la maladie, quel que soit le niveau de
cholestérol. Vingt pour cent des hétérozygotes ne présentent pas d’infarctus du myocarde avant 60 ans, malgré une
hyperLDLémie. En cas d’hypertriglycéridémie, même en tenant compte de la relation
inverse avec le cholestérol HDL (HDL-C),
la survenue des événements en fonction du
LDL-C n’est pas très précise.
Quelques études épidémio-cliniques ont
directement corrélé athérosclérose et hétérogénéité des LDL. Il s’agit essentiellement
d’études cas-témoins qui montrent de
manière concordante une augmentation des
coronaropathies chez les patients avec un
profil de LDL denses dont le risque relatif
est augmenté d’un facteur allant de 3 à 4,5.
L’étude faite par Austin en 1988 (10) a montré un risque relatif d’infarctus de 3 quand il
existe une prépondérance de “LDL anormales” : essentiellement plus petites, plus
denses, plus chargées négativement.
Néanmoins ce profil de LDL s’accompagne
113
d’une hausse des triglycérides et d’une baisse du HDL, et n’est pas un facteur de risque
indépendant dans cette étude. Ces LDL sont
plus fréquemment rencontrées chez l’homme que chez la femme, avec une différence
intersexe significative. L’étude appelée
“The Quebec Cardiovascular Study”
a débuté en 1973 sur une cohorte de
4 637 hommes de 35 à 64 ans (11). En 1985,
un bilan lipidique a été effectué chez
2 443 d’entre eux ainsi qu’une évaluation de
leurs différents facteurs de risque. Les sujets
ayant présenté un accident cardiovasculaire
ont été appariés sur de nombreuses variables
(âge, IMC, tabagisme, consommation d’alcool) avec des sujets sans accident. La
mesure de la taille des LDL sur gel de polyacrylamide a permis de montrer que le
risque d’accident coronaire était 3,6 fois
plus important en cas de présence de LDL
denses et petites et ce de façon indépendante des autres facteurs de risque associés
(diabète, médicaments, pression systolique
et histoire familiale d’accident vasculaire,
HDL-C, taux de triglycérides).
Perspectives thérapeutiques
Plusieurs axes thérapeutiques peuvent être
envisagés suivant trois logiques :
• antioxydants ;
• régime et prise en charge des facteurs associés ;
• hypolipidémiants.
Antioxydants
Il est assez logique d’utiliser les antioxydants, car une des propriétés délétères
des LDL petites et denses est leur capacité
à s’oxyder facilement dans le sous-endothélium. Les antioxydants sont des groupes
de substances hétérogènes qui interfèrent
avec les métabolismes oxydatifs. De très
nombreux composés sont antioxydants,
mais il existe probablement une grande différence entre un effet antioxydant dans une
éprouvette (ou sur une réaction chimique
dessinée sur du papier) et ce qui se passe
réellement dans le sous-endothélium. En
général, on distingue les antioxydants
hydrophiles et lipophiles ; ce sont ces derniers qui seraient les plus intéressants car ils
circulent fixés sur les lipoprotéines. Une des
substances les plus étudiées in vitro est la
vitamine E qui est fixée sur les LDL et qui,
dans les modèles in vitro, se révèle un
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excellent protecteur de l’oxydation des
LDL. Plusieurs études ont été réalisées afin
de confirmer (ou d’infirmer) les potentialités thérapeutiques de la vitamine E. Une
étude de prévention (étude CHAOS) sur
2 002 patients coronariens a montré que la
supplémentation par 400 ou 800 UI de vitamine E entraînait une réduction significative
des infarctus non mortels.
Mais d’autres études de prévention primosecondaire avec la vitamine E ne semblent
pas confirmer cet effet préventif de la vitamine E (étude GISSI et étude HOPE) (12) ;
elles ne permettent plus de valider l’utilisation de la vitamine E en clinique. D’autres
molécules antioxydantes naturelles sont
connues (bêtacarotène, vitamine C, autres
antioxydants physiologiques [flavonoïdes]
compris dans les fruits et les légumes verts),
et les études épidémiologiques de population
montrent que les consommateurs de ces
substances semblent avoir une moindre incidence d’événements cardiovasculaires, mais
il n’existe aucune étude d’intervention en
prévention primaire contre placebo qui
permettent de suggérer leur application en
thérapeutique. Enfin, d’autres substances
pharmacologiques (dont le probucol) sont
des antioxydants puissants qui circulent
fixés sur les LDL. Ils sont efficaces dans des
modèles animaux d’athérosclérose, et chez
l’homme ils peuvent entraîner une régression des xanthomes cutanés et tendineux, et
permettent, en association avec les statines,
une amélioration de la fonction endothéliale
coronaire. Néanmoins, les résultats cliniques
des traitements par antioxydants restent
encore insuffisants et peu convaincants malgré leurs effets potentiellement intéressants.
Régime et prise en charge des facteurs
associés
La deuxième logique de la prise en charge
des patients présentant une augmentation
des LDL petites et denses repose sur une
diététique appropriée ainsi que sur une prise
en charge active des facteurs associés. En
effet, l’examen clinique peut mettre en évidence des associations à la présence des
LDL petites et denses, comme une surcharge pondérale androïde (facio-cervicotronculaire) pouvant aggraver le risque athéromateux ; une hypertension artérielle dans 30 %
des cas et de type héréditaire dans le cadre
de l’hypertension dyslipidémique familiale.
De plus, il existe une association fréquente
de l’hyperlipidémie familiale combinée
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avec d’autres facteurs de risque (diabète,
hypertension, obésité), ce qui contribue à
aggraver le processus de l’athérosclérose.
Les LDL sont plus petites et plus denses
chez la femme ménopausée, et le traitement
hormonal substitutif peut modifier cet anomalie de répartition. L’effet des régimes est
complexe et probablement variable suivant
les individus. Les LDL riches en acides gras
polyinsaturés sont plus oxydables (tableau
IA) et particulièrement les acides gras en ω3
(huiles de poissons), mais il existe de nombreuses variables qui peuvent modifier cette
“oxydabilité” comme la richesse de l’alimentation en antioxydants naturels et la
combinaison même des acides gras sur les
LDL, par exemple, l’enrichissement des
LDL en acides gras monoinsaturés les rendent moins oxydables (tableau IB) ; en particulier, les LDL des habitants du pourtour
de la Méditerranée qui contiennent 20 %
d’acide oléique de plus que les LDL américaines sont moins sensibles à l’oxydation et
moins
attractantes
pour
les
monocytes/macrophages (alors que leur
concentration en vitamine E est similaire).
C’est peut-être aussi à ce niveau que réside
l’un des intérêts du
régime méditerraTableau I.
néen.
Cliniquement, la perte
de poids en cas de surcharge pondérale ou
d’obésité reste une des
variables la plus pertinente pour abaisser le
taux de triglycérides
et de LDL-C en cas
de
dyslipidémie
mixte. Une des particularités diététiques
du régime recommandé est qu’il est
nécessaire non seulement de diminuer les
matières grasses saturées, mais aussi de
réduire les sucres
simples (et fermentés
comme l’alcool !)
générateurs d’hypertriglycéridémie chez
ces patients.
Hypolipidémiants
114
Il n’existe pas de thérapeutique spécifique
des LDL denses. L’analyse de l’ensemble
des données montre toutefois que les médicaments hypotriglycéridémiants ont l’effet
le plus net sur cette fraction. Le traitement
médicamenteux qui agit contre le défaut
métabolique de l’hyperlipidémie familiale
combinée est l’acide nicotinique. Il diminue
l’afflux d’acides gras libres vers le foie et
stimule la lipoprotéine lipase. Par conséquent, il réduit la formation de VLDL et
secondairement des LDL, et inhibe la surproduction hépatique de l’apolipoprotéine
B100. Les doses nécessaires se situent entre
1,5 à 3 g/j, et il faut les augmenter progressivement pour éviter les effets secondaires à
savoir le flush et les gastralgies. La surveillance des transaminases hépatiques, de
la glycémie et de l’uricémie est nécessaire.
Les formes à libération retard sont mieux
supportées, mais elles ne sont pas commercialisées en France !
Le deuxième groupe des médicaments est
celui des fibrates. Leur mode d’action est à
présent élucidé et fait intervenir l’activation
du PPAR-α (peroxisome proliferator-acti-
A. Comparaison de l’oxydabilité et de la taille des LDL chez
20 sujets hypertendus traités sous régime enrichi en huile de maïs
et en huile de poisson (d’après Suzukawa M. et coll. J Lipid Res
1995).
Paramètres
lipidiques
Avant
régime
LDL-cholestérol 3,95 ± 1,34
Taille des LDL
12,42 ± 0,35
Taille de latence 57,9 ± 9,4
Après
Après
régime
régime
“huile de maïs” “huile de poisson”
3,81 ± 1,25
12,49 ± 0,34
57,9 ± 10,8
4,10 ± 1,26*
12,58 ± 0,34**
43,1 ± 7,5*
* différent de la valeur de base et du régime huile de maïs
** différent de la valeur de base
B. Comparaison de l’oxydabilité et de la taille des LDL chez
18 hommes volontaires sains sous régime riche en graisses polyinsaturées (huile de tournesol) et graisses monoinsaturées (huile
d’olive) (d’après Carmena R. et coll. Atherosclerosis 1996).
Paramètres
lipidiques
LDL-cholestérol
Taille des LDL
TBARS
Après
régime riche en
polyinsaturés
Après
régime riche en
monoinsaturés
p
3,36 ± 0,87
0,39 ± 0,06
581 ± 363
4,08 ± 1,13
0,41 ± 0,07
757 ± 384
< 0,001
< 0,01
< 0,01
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Tableau II. Paramètres lipidiques avant et après traitement (100 mg
de ciprofibrate). Les valeurs avant traitement sont obtenues sous
régime et poids stables (régime anticholestérol standard). Les
concentrations des différentes sous-fractions sont exprimées en mg
pour 100 ml.
vated receptor). Les PPARs sont des récepteurs nucléaires apparentés aux récepteurs
des hormones stéroïdes (superfamille des
récepteurs des hormones stéroïdes). Les
réponses de l’activation des PPARs sont
nombreuses et concernent le métabolisme
des acides gras et la régulation des cycles
cellulaires. La lipolyse est augmentée grâce
à une augmentation de l’activité de la LPL.
Par l’intermédiaire de cette augmentation,
l’hydrolyse des triglycérides est augmentée
et leur taux est donc diminué. D’autre part,
les fibrates entraînent une augmentation de
l’ApoAI et des HDL. Leur tolérance est
meilleure que celle de l’acide nicotinique.
Les fibrates, comme le ciprofibrate et le
fénofibrate, ont fait l’objet d’études extensives concernant leur capacité à normaliser
les profils des LDL chez des patients présentant une dyslipidémie mixte et des LDL
denses (13) (tableaux II et III). Néanmoins,
il n’existe aucune étude d’intervention avec
ces deux fibrates qui montre une efficacité
clinique préventive des accidents coronariens. En revanche, le gemfibrozil a entraîné
une diminution de l’incidence des accidents
coronariens et de la mortalité dans une
étude de prévention primaire, la “Helsinki
Heart Study” à la dose de 1 200 mg/j (14).
Dans cette étude les patients qui ont eu le
plus de bénéfice sont ceux qui avaient une
hypertriglycéridémie et un HDL-C bas, un
profil caractéristique de l’hyperlipidémie
familiale combinée. Ce même produit
entraîne une baisse de la récidive des événements coronariens dans une étude de prévention secondaire (étude VA-HIT) chez des
patients avec un taux de LDL inférieur à
1,60 g/l et avec un taux bas de HDL-C inférieur à 0,4 g/l (15). En revanche, l’étude de
prévention secondaire BIP réalisée avec le
bézafibrate n’a pas montré de bénéfice global. Plusieurs études de prévention sont en
cours dans des populations à risque (diabétiques) comportant des dyslipidémies athérogènes avec des LDL petites et denses.
Les statines peuvent être utilisées dans le
traitement des dyslipidémies mixtes. Alors
qu’au début de leur commercialisation, l’indication préférentielle de cette nouvelle
classe médicamenteuse était les hypercholestérolémies familiales, l’ensemble des
études cliniques a permis une extension justifiée des indications. Toutes les statines
présentent les mêmes indications à savoir
les hypercholestérolémies et les dyslipidémies mixtes. Leur principale propriété est
tionne les effets de ces
deux classes thérapeutiques, à savoir la
baisse des LDL avec
Cholestérol
296 ± 47
250 ± 25
0,063
les statines et la modiTriglycérides
233 ± 50
156 ± 65
0,055
fication de leur réparHDL-C
39 ± 5
40 ± 6
NS
tition avec les fiLDL-C
211 ± 43
179 ± 19
NS
brates. Le problème
Lp(a)
14 ± 7
15 ± 10
NS
est celui d’une posFraction 1
173 ± 37
103 ± 28
0,0065
sible addition d’efFraction 2
233 ± 39
261 ± 81
NS
fets indésirables avec
Fraction 3
497 ± 185
617 ± 101
NS
un risque de myolyse
Fraction 4
703 ± 211
403 ± 208
0,037
augmentée. En fait, il
Fraction 5
238 ± 62
110 ± 34
0,0065
semble que ce type
d’effets secondaires
graves soit limité aux
Tableau III. Évaluation de la taille des particules LDL avant et après patients en insuftraitement par 100 mg de ciprofibrate. La taille est exprimée en fisance rénale polymédicamentée. Cette
Angströms.
association doit donc
Fractions
Avant
Après
Valeur
être réservée aux
de LDL
traitement
traitement
de p
patients qui présentent une dyslipidéFraction 1
280 ± 4,9
278 ± 5,7
NS
mie sévère et un
Fraction 2
269 ± 6,3
268 ± 6,8
NS
risque
cardiovasFraction 3
257 ± 5,2
263 ± 7,2
NS
culaire
important
Fraction 4
249 ± 2,4
258 ± 6,2
0,0095
justifiant ce risque
Fraction 5
249 ± 1,9
257 ± 5,8
0,0067
thérapeutique potentiel. Néanmoins, la
preuve de cette
d’abaisser le LDL-C, et cette baisse est
meilleure efficacité seraient les résultats
dose-dépendante et peut varier en fonction
d’une étude clinique qui montreraient des
des doses de 20 à plus de 50 %. L’efficacité
résultats cliniques significatifs chez les
patients recevant l’association statinesdes statines sur les triglycérides est indiscufibrates.
table, mais beaucoup plus variable et inférieure à celle des fibrates. Dans les dyslipidémies mixtes, les statines entraînent aussi
une baisse significative des triglycérides
Intérêt diagnostique
entre 15 et 30 %. En revanche, les statines
ne modifient pas ou peu la distribution des
des LDL petites et denses
particules LDL (16). Néanmoins, du fait de
la baisse importante du LDL-C, les statines
Ce serait d’avoir une meilleure spécificité
entraînent une baisse de toutes les LDL, y
du risque cardiovasculaire lié aux paracompris donc de la concentration des LDL
mètres lipidiques. En effet, le cholestérol
denses. De nombreuses études cliniques
total sérique n’est pas un bon marqueur de
ayant inclus des patients dyslipidémiques
risque cardiovasculaire, car bon nombre de
comprenant aussi des dyslipidémies mixtes
patients qui vont présenter une maladie
ont montré l’efficacité clinique (baisse de la
cardiovasculaire ont un taux de cholestérol
morbidité coronarienne) de certaines stadit “normal”, c’est-à-dire non différent du
tines (pravastatine et simvastatine) (17, 18).
taux moyen de ceux qui n’ont pas de malaDes études cliniques sont en cours afin
die cardiovasculaire. D’autre part, tous les
d’étendre ces résultats aux autres statines.
patients dyslipidémiques n’ont pas obligatoirement une maladie cardiovasculaire.
Celle-ci peut apparaître à un âge différent.
• Association statines-fibrates
Même si les études épidémiologiques ont
“Sur le papier”, cette association semble très
montré qu’en moyenne, le taux du cholesintéressante dans les dyslipidémies comportérol des patients ayant présenté un événetant des LDL petites et denses, car elle addiParamètres
lipidiques
Avant
traitement
115
Après
traitement
p
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ment coronarien est supérieur à celui de
ceux qui sont restés indemnes, du fait de la
répartition des taux dans la population générale, la majorité des patients présentant une
coronaropathie ont un cholestérol dans les
limites de la normale. Par exemple, dans
l’étude MRFIT qui a porté sur plus de
300 000 hommes, 69 % des décès coronariens durant les 6 ans de suivi sont apparus
chez des patients ayant à l’inclusion un cholestérol total (CT) compris entre 4,71 et
6,83 mmol/l ; de même, dans l’étude de
Framingham, 40 % des sujets qui ont présenté un infarctus du myocarde avaient un
taux de cholestérol compris entre 2 et
2,5 g/l. Dans l’étude PROCAM, 60 % des
patients ayant présenté un événement coronarien ont un cholestérol compris entre 2 et
2,5 g/l, 12 % d’entre eux ayant présenté un
événement coronarien avaient, lors de leur
entrée dans l’étude, un taux de cholestérol
total 2 g/l. Le LDL-C est un meilleur prédicateur, mais qui reste encore insuffisant.
La recherche et la mise en évidence d’une
augmentation du taux de LDL denses pourraient être encore de meilleurs marqueurs de
risque au sein des populations normocholestérolémiques et aussi hypercholestérolémiques. Il existe plusieurs méthodes de
mise en évidence des LDL denses qui reposent sur les ultracentrifugations ou sur les
électrophorèses après des préparations spécifiques. Ces méthodes sont lourdes et encore peu applicables en routine (rappelons
que le LDL-C n’est même pas mesuré en
routine, et qu’il est simplement calculé par
la formule de Friedwald). Il n’est donc pas
envisageable, en dehors de protocoles de
recherche, d’utiliser ce marqueur en médecine quotidienne. Néanmoins, il est possible, dans certaines situations cliniques, de
penser que les patients présentent une proportion anormale de LDL petites et denses ;
il s’agit plus particulièrement des patients
qui présentent un syndrome X métabolique
qui associe des troubles du métabolisme
glucidique, une obésité, une hypertension
artérielle, une hypertriglycéridémie. C’est
en fait répéter que même si l’élévation du
LDL-C, et plus particulièrement des LDL
petites et denses est le premier facteur de
risque des maladies coronariennes, l’abaissement du risque cardiovasculaire en prévention primaire au travers de la baisse du
LDL-C et de ses fractions les plus athérogènes ne se manifestera de façon tangible
que chez les patients qui présentent un
risque cardiovasculaire élevé qui est aussi
dépendant des autres facteurs de risque. ■
Références
1. Shen M.M.S., Krauss R.M., Lindgren F.T., Forte
T.M. Heterogeneity of serum LDL in normal human
subjects. J Lipid Res 1981 ; 22 : 236-44.
2. Chapman M.J., Laplaud P.M., Luc G., Forgez P.,
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