Mise au point L’hepcidine, l’hormone du fer Hepcidin, the iron hormone Estelle Louiset* L * Laboratoire de différenciation et communication neuronale et neuroendocrine, EA4310, Inserm 413IFRMP 413, université de Rouen, Mont-Saint-Aignan. e fer est un nutriment contribuant au transport de l’oxygène et au transfert d’électrons essentiels à de nombreuses fonctions physiologiques. De par son implication dans la synthèse de l’hémoglobine et de la myoglobine, il est indispensable à la mise en œuvre des échanges gazeux et de la contraction musculaire. Cet ion participe à la défense antibactérienne des organismes. Il intervient également en tant que cofacteur dans la régulation de nombreuses enzymes du métabolisme oxydatif (cytochrome, catalase, myéloperoxydase, xanthine oxydase) et de la prolifération cellulaire (ribonucléotide réductase). En revanche, une surcharge en fer a des effets délétères liés à l’augmen- Fe3+ DCYTB Fe2+ DMT1 Hépatocyte Fe2+ Ferritine Entérocyte HFE TfR1 FPN HEPH FPN Fe2+ Fe3+ Fe3+ TfR2 + Tf-Fe2 + HFE + HJV + infection + IL-6 – faible O2 Hepcidine Tf Fe3+ Tf FPN TfR1 Fe3+ Érythroblaste Hématies Macrophage Figure 1. Régulation de l’homéostasie du fer. L’ion Fe3+ est réduit en Fe2+ par le cytochrome B ferriréductase (DCYTB) avant d’entrer dans les entérocytes via le transporteur transmembranaire (DMT1). Le fer est stocké dans les entérocytes sous forme de ferritine ou exporté par la ferroportine 1 (FPN) dans la circulation. Après oxydation par la ferroxydase hephaestine (HEPH), Fe3+ circule dans le sang grâce à la transferrine (Tf). Tf-Fe2 se fixe à un récepteur de haute affinité (TfR1) exprimé par les érythroblastes et fournit le fer nécessaire à la synthèse de l’hémoglobine. Le Fe3+ des hématies est recyclé par les macrophages. Tf-Fe2 se lie à la protéine de l’hémochromatose (HFE) des entérocytes pour réduire l’absorption intestinale de fer. Tf-Fe2 se lie également à un récepteur de faible affinité (TfR2) exprimé par les hépatocytes. Fe3+ est stocké dans les hépatocytes sous forme de ferritine. Fe3+ contenu dans les hépatocytes ou les macrophages est déversé dans la circulation grâce à la ferroportine 1 sous le contrôle négatif d’une hormone, l’hepcidine, produite par les hépatocytes. La sécrétion d’hepcidine est stimulée par Tf-Fe2, HFE, l’hémojuveline (HJV), une infection ou l’IL-6, mais est inhibée par une hypoxie. ➡ : voie principale ; ➝ : voie minoritaire. 148 tation du stress oxydatif. Il se produit une inflammation des tissus entraînant une mort cellulaire à l’origine de dysfonctionnements d’organes ou du développement de cancers. Le contrôle de l’homéostasie du fer est donc primordial. Le cycle du fer La quantité totale de fer est maintenue entre 2 et 5 g chez l’adulte. Les besoins quotidiens en fer sont principalement fournis par le recyclage du fer contenu dans les érythrocytes sénescents (20 mg/j). Il n’existe pas de système puissant d’élimination du fer, et les pertes quotidiennes sont limitées à environ 1 mg (urine, sueur, fèces). Des pertes massives de fer sont toutefois observées chez la femme au cours des menstruations ou de la gestation via le placenta. Dans des conditions physiologiques normales, seulement 1 à 2 mg de fer est absorbé chaque jour au niveau du duodénum et du jéjunum proximal (figure 1). L’ion Fe3+, présent dans la lumière de l’intestin, est réduit en Fe2+ par le cytochrome B ferriréductase (DCYTB). Le Fe2+ peut alors entrer dans les entérocytes grâce au transporteur transmembranaire de métal divalent (DMT1) localisé au pôle apical des cellules. Le fer est stocké dans les entérocytes par liaison à la ferritine ou exporté par la ferroportine 1 (FPN) située au pôle basal des cellules. Il est à nouveau oxydé en Fe3+ par la ferroxydase hephaestine (HEPH) et véhiculé dans le sang grâce à la transferrine (Tf) jusqu’au site d’utilisation ou de stockage du fer. La transferrine liée à deux atomes de fer va se fixer sur son récepteur de haute affinité (TfR1) exprimé par les cellules consommatrices du fer pour leur fournir les ions nécessaires à leur activité cellulaire, comme la synthèse de l’hémoglobine dans les érythroblastes. Le TfR1 interagit avec d’autres protéines, dont le complexe formé par les protéines de l’hémochromatose (HFE) et la β2-microglobuline, impliqué dans la régulation de l’absorption intestinale du fer. Au niveau du pôle basal des cellules de la crypte de l’intestin, le complexe HFE/β2-microglobuline favorise la captation du fer circulant par stimulation de l’endocytose du TfR1 lié à la transferrine. L’augmentation de la concentration intracellulaire de fer qui en résulte Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 4 - juillet-août 2009 L’hepcidine, l’hormone du fer entraîne une baisse de l’expression des transporteurs DMT1 et de la ferroportine 1, ce qui réduit l’absorption intestinale par les entérocytes. Lorsque le taux circulant de transferrine saturée est élevé, le complexe Tf-2Fe3+ se lie également à un récepteur de moindre affinité, le TfR2, exprimé par les hépatocytes. Le fer pénètre alors dans les hépatocytes pour y être stocké sous forme de ferritine. Le fer contenu dans les hématies est, quant à lui, recyclé par l’intermédiaire des macrophages, qui phagocytent les érythrocytes sénescents et dissocient l’hémoglobine. Le fer est retenu dans les macrophages circulants ou résidents tels que les cellules de Kupffer du foie. Le fer contenu dans les hépatocytes ou les macrophages peut être déversé ultérieurement dans la circulation grâce à la ferroportine 1, en vue d’une nouvelle utilisation. Rôle de l’hepcidine dans l’homéostasie du fer L’hepcidine est une hormone hépatique de 25 acides aminés produite par clivage d’un précurseur de haut poids moléculaire, la préprohepcidine (84 acides aminés) [1]. Le précurseur est codé par le gène HAMP (hepcidin antimicrobian peptide), qui compte trois exons et est localisé chez l’homme sur le chromosome 19. L’hepcidine est riche en acides aminés basiques et contient huit cystéines impliquées dans des ponts disulfures, ce qui favorise la stabilité du peptide dans le plasma et lui confère une structure en épingle à cheveux semblable à celle des peptides de la famille des défensines (figure 2). C.H. Park et al. ont révélé les propriétés antimicrobiennes de l’hepcidine (2). À ce jour, il n’existe pas de dosage plasmatique de l’hepcidine. En revanche, ses métabolites de 20 et 22 acides aminés peuvent être dosés dans les urines, ce qui permet indirectement d’étudier les mécanismes de contrôle de la sécrétion d’hepcidine dans des modèles animaux ou chez l’homme. C. Pigeon et al. ont montré pour la première fois l’existence d’un lien entre l’hepcidine et l’homéostasie du fer (3). En effet, ils ont noté qu’une surcharge en fer stimule l’expression du gène HAMP chez la souris. Chez l’homme, il a été observé qu’une élévation du fer sérique s’accompagne d’une augmentation de la concentration des métabolites de l’hepcidine dans les urines. Par ailleurs, une injection d’hepcidine provoque chez l’animal une chute du fer circulant. L’anémie sévère observée chez les souris transgéniques surexprimant l’hepcidine témoigne de l’importance physiologique de cette hormone dans le contrôle de l’homéostasie du fer (4). L’hepcidine est sécrétée par les hépatocytes en réponse à une élévation des taux sériques de fer. L’hormone circulante se lie à la ferroportine 1, le transporteur du fer qui assure la sortie de l’ion principalement au niveau des entérocytes et des macrophages, et dans une moindre mesure au niveau des hépatocytes (figure 1). La liaison de l’hepcidine à la ferroportine 1 initie l’internalisation du complexe moléculaire formé, puis sa dégradation dans les lysosomes, ce qui réduit les flux de fer (5). L’hepcidine, sécrétée à la suite d’une augmentation des taux sériques de l’ion, inhibe la sortie du fer des cellules dans lesquelles il est stocké, ce qui tend à abaisser la concentration de fer dans la circulation systémique et à augmenter sa rétention dans les entérocytes, les macro- A B C ATG Exon 1 Exon 2 Exon 3 5’ 3’ del148-151 93delG R56X R59G C70R G71D C78T 5’UTR+14 G>A D C70R G71D C78T Figure 2. Structure de l’hepcidine. L’hepcidine est riche en acides aminés basiques et compte huit cystéines (A) impliquées dans des ponts disulfures (orange) qui lui confèrent une structure en épingle à cheveux (B) semblable à celle des peptides de la famille des défensines. C : des mutations du gène HAMP affectent la région 5’ non codante ou les exons 1, 2 ou 3. D : des mutations ponctuelles de l’exon 3 modifient la structure primaire de l’hepcidine et induisent la perte d’un pont disulfure. Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 4 - juillet-août 2009 149 Mise au point phages et les hépatocytes. Il a été rapporté que l’accumulation de fer dans les entérocytes, consécutive à une injection d’hepcidine, entraîne une baisse de l’expression des gènes codant DMT1 et DCytB, induisant une réduction de l’absorption intestinale de fer (6). Il a par ailleurs été montré qu’une baisse du taux sérique de fer ou une hypoxie réprime l’expression du gène HAMP (7). La réduction du taux circulant de l’hormone qui en découle permet le rétablissement de la ferroportine 1 à la membrane des entérocytes, des macrophages et des hépatocytes et, par conséquent, la sortie de fer des cellules de stockage vers la circulation. Par analogie avec l’insuline, qui maintient l’homéostasie du glucose en favorisant son stockage sous forme de glycogène, A. Pietrangelo considère que l’hepcidine, en induisant le stockage du fer dans le foie sous forme de ferritine, est l’hormone clé de la régulation de l’homéostasie du fer (8). C/EBPα et Smad-4 stimulent, alors que HNF4α réprime la transcription du gène de l’hepcidine (12, 13). Il a en particulier été montré que l’accumulation de fer dans les hépatocytes augmente la production de C/EBPα, qui stimule à son tour la synthèse d’hepcidine, engendrant une baisse de l’efflux de fer des macrophages et des entérocytes, ce qui tend à limiter une surcharge hépatique en fer. Bien que le promoteur du gène humain contienne plusieurs sites consensuels de liaison du facteur inductible par l’hypoxie (hypoxy induced factor, HIF), son absence chez les autres mammifères ne plaide pas en faveur de son rôle dans le contrôle de la synthèse de l’hepcidine. Les mécanismes impliqués dans la régulation de l’expression de l’hepcidine ne sont donc pas totalement élucidés. Mécanismes de contrôle de l’expression de l’hepcidine L’infection et l’inflammation chronique sont connues pour induire une anémie ferriprive. E. Kemna et al. ont montré qu’une infection bactérienne ou une injection de lipopolysaccharide engendre une augmentation de l’expression du gène HAMP (14). En revanche, aucune modification de l’expression d’hepcidine n’est observée chez les souris déficientes en récepteurs de l’immunité innée, les récepteurs Toll like de type 4 (TLR4–/–). Ces travaux révèlent que l’activation des TLR4 présents à la surface des hépatocytes est à l’origine de la variation de l’expression d’hepcidine en réponse à une infection. La réduction du fer sérique qui en découle prive les agents pathogènes du fer indispensable à leur prolifération. Cet effet antimicrobien de l’hormone est renforcé par la capacité de l’hepcidine à perforer la paroi bactérienne grâce à sa structure en épingle à cheveux, commune aux défensines (1). L’inflammation aiguë ou chronique qui s’accompagne d’une production de cytokines pro-inflammatoires, telles que le TNFα, l’IL-1 et l’IL-6, induit également une augmentation de la synthèse de l’ARNm codant l’hepcidine. La surexpression de l’hepcidine dans des modèles animaux de l’inflammation est observée chez les souris déficientes en IL-1 et TNFα, mais elle n’est pas détectée chez les souris dépourvues d’IL-6 (15). Des expériences réalisées in vitro et in vivo ont confirmé l’effet stimulateur de l’IL-6 sur la production d’hepcidine par les hépatocytes. Par ailleurs, une étude clinique a montré que le blocage de l’action de l’IL-6 par injection de tocilizumab, un anticorps capable de piéger l’IL-6 circulant, réduit la sécrétion d’hepcidine et améliore le bilan hématologique des patients souffrant d’une De nombreuses données indiquent que les protéines HFE et TFR2, qui jouent le rôle de senseurs du fer en détectant l’élévation de la saturation de la transferrine, influent sur l’expression du gène HAMP par des mécanismes non encore élucidés (9, 10). Bien que l’on ne connaisse pas exactement la fonction de l’hémojuveline (HJV), on sait que cette protéine membranaire, exprimée au niveau du cœur, du muscle squelettique et du foie, peut être en partie coupée en présence de faibles concentrations circulantes de fer. Le fragment soluble résultant du clivage de HJV passe dans la circulation systémique et est véhiculé jusqu’au foie, où il active l’expression de l’hepcidine. Ce fragment de HJV est le facteur stimulateur le plus puissant de la transcription du gène HAMP (11). L’analyse de la région promotrice du gène HAMP a révélé qu’il n’existe pas de séquence consensuelle correspondant à l’élément de réponse au fer (iron response element, IRE). Le fer n’exerce donc pas un contrôle de la transcription du gène HAMP via une iron response protein comme il le fait pour les gènes codant le DMT1, le récepteur de la transferrine et la ferroportine 1. En revanche, des sites de liaison d’autres facteurs de transcription, tels que les sites CCAAT/enhancer binding protein α (C/EBPα), Smad4, HNF4α (hepatic nuclear factor) et USF-2 (upstream stimulatory factor 2), ont été identifiés dans la région promotrice du gène HAMP chez l’homme et les rongeurs. La combinaison des approches in vitro et in vivo chez des souris transgéniques a permis de démontrer que 150 Rôle de l’hepcidine dans la pathogénie de l’anémie due à une inflammation Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 4 - juillet-août 2009 L’hepcidine, l’hormone du fer inflammation chronique (16). Les études mécanistiques ont révélé que l’effet stimulateur de l’IL-6 sur la régulation du gène HAMP est relayé par les facteurs de transcription smad4 et stat3. Globalement, ces données indiquent que l’augmentation de la synthèse d’hepcidine, induite par l’activation des TLR4 et/ou la production d’IL-6, joue un rôle crucial dans l’établissement de l’anémie ferriprive au cours de l’infection et/ ou de l’inflammation par le biais des actions inhibitrices de l’hormone sur l’absorption intestinale de fer et la libération du fer stocké dans les macrophages et les hépatocytes. La rétention du fer dans les cellules de stockage induite par l’hepcidine explique également l’hyperferritinémie observée au cours du processus inflammatoire. E. Nemeth et T. Ganz suggèrent que le développement d’antagonistes de la ferroportine 1, le récepteur de l’hepcidine, pourrait fournir des outils pharmacologiques pour le traitement de l’anémie observée dans l’inflammation chronique (17). Tableau I. Manifestations cliniques des hémochromatoses héréditaires. Organes Manifestations cliniques Foie Altération enzymatique, fibrose, cirrhose, hépatocarcinome Cœur Cardiomyopathie, arythmie Pancréas Hyperglycémie, diabète Hypophyse Hypogonadisme, impuissance, aménorrhée Thyroïde Hypothyroïdisme Articulations Arthralgie Peau Pigmentation Fe3+ Hépatocyte DCYTB Fe2+ DMT1 Fe2+ FPN Ferritine Entérocyte HFE TfR1 HEPH Les mutations inactivatrices de gènes codant des protéines impliquées dans le contrôle de l’homéostasie du fer engendrent une hémochromatose héréditaire qui induit une accumulation de fer dans le foie, les arti­ culations, le cœur et les organes endocrines (hypophyse, pancréas, thyroïde) [tableau I]. Ces mutations affectent les gènes codant les protéines senseurs du fer, HFE, TfR2 et HJV, ainsi que l’hepcidine et la ferroportine 1 (figure 3). Sur le plan biologique, la saturation de la transferrine devient supérieure à 45 % et la ferritinémie s’élève à plus de 300 µg/l chez l’homme ou 200 µg/l chez la femme. L’expression clinique de l’hémochromatose dépend des atteintes génétiques (tableau II). Les mutations affectant HFE et TfR2 provoquent des hémochromatoses modérées d’apparition tardive qui génèrent principalement un dépôt de fer au niveau hépatique, alors que celles touchant HJV et l’hepcidine sont responsables des formes juvéniles et sévères de la maladie associées à un hypogonadisme et à des troubles cardiaques. L’analyse génétique des mutations du gène HAMP a révélé que la mutation 54UTR+14G>A de la région 5’ non codante crée, en amont de l’exon 1, un nouveau codon d’initiation de la traduction qui allonge la taille du précurseur et induit un décalage de la phase de lecture. Les délétions observées dans les exons 1 et 2 génèrent aussi des décalages du cadre de lecture. Les différentes substitutions ponctuelles de l’exon 3 affec- + Tf Fe2 + HFE + HJV – faible O2 Fe2+ Fe3+ Rôle de l’hepcidine dans la pathogénie de l’hémochromatose héréditaire Fe3+ FPN TfR2 Tf Fe3+ Hepcidine Tf FPN TfR1 Fe3+ Érythroblaste Hématies Macrophage Figure 3. Perturbation de l’homéostasie du fer dans l’hémochromatose héréditaire. Des mutations inactivatrices des gènes codant HFE, l’hémojuveline (HJV), le récepteur de la transferrine (TfR2) ou l’hepcidine altèrent le fonctionnement d’un des éléments de contrôle de l’homéostasie du fer. Chaque mutation induit une réduction de la sécrétion d’hepcidine maintenant l’absorption intestinale et le relargage du fer par les macrophages à des niveaux élevés, ce qui favorise le stockage du fer dans le foie. Des mutations inactivatrices du gène codant la ferroportine 1 engendrent une perte de sensibilité du récepteur de l’hepcidine empêchant la transduction du signal inhibiteur de l’hormone sur l’absorption intestinale de fer et sur la sortie des macrophages, ce qui augmente le stockage hépatique du fer malgré des taux plasmatiques d’hepcidine élevés. ➡ : voie principale ; ➝ : voie minoritaire. Tableau II. Génétique des hémochromatoses héréditaires. Gène Chromosome HFE 6p21.3 HJV 1p21 HAMP 19q13.1 Protéine Âge Manifestations Transmission d’apparition cliniques HFE Récessive 30-50 ans Hépatique Articulaire Hémojuveline Récessive 20-30 ans Cardiaque Endocrine Hepcidine Récessive 20-30 ans Cardiaque Endocrine TfR2 7q22 Récepteur de la transferrine 2 Récessive 30-50 ans Hépatique SLC40A1 2q32 Ferroportine Dominante 40-50 ans Hépatique Articulaire Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 4 - juillet-août 2009 151 Mise au point tent la structure primaire de l’hepcidine, supprimant un pont disulfure et/ou déstabilisant sa structure en épingle à cheveux (figure 1C). Toutes les mutations du gène HAMP ont pour conséquence une perte d’expression de la forme biologiquement active de l’hepcidine. Les patients porteurs d’une mutation affectant HFE présentent des taux bas ou normaux d’ARNm du gène HAMP dans les biopsies de foie et des métabolites de l’hepcidine dans les urines (18, 19). Les métabolites urinaires de l’hepcidine sont extrêmement faibles, voire indétectables, dans les formes juvéniles d’hémochromatoses héréditaires (20). De même, un déficit en hepcidine a été observé chez les souris déficientes en HFE, TfR2 ou HJV (18, 21). Dans tous ces cas, la faible production d’hepcidine, qui est anormalement basse au regard de la surcharge en fer, contribue à maintenir élevés à la fois l’absorption intestinale de l’ion (8 à 10 mg/j) et son relargage par les macrophages, ce qui favorise le stockage du fer dans le foie. À l’inverse, il a été rapporté que des patients porteurs d’une mutation (162delVal) induisant une perte de fonction du récepteur de l’hepcidine, la ferroportine 1, présentaient des taux élevés de métabolites urinaires de l’hepcidine (22). Toutefois, l’insensibilité des récepteurs à l’hepcidine ne leur permettait pas de maintenir le fer à un niveau physiologique, ce qui a entraîné l’apparition d’une hémochromatose. Les patients souffrant d’une hémochromatose sont traités à vie par des saignées d’environ 400 ml répétées toutes les deux semaines en début de traitement. Ces saignées, qui visent à réduire le stockage du fer dans le foie, doivent permettre de faire diminuer le taux de saturation de la transferrine (< 30 %) et la ferritinémie (< 50 µg/l). Malheureusement, ces saignées engendrent une faiblesse chez certains patients, les contraignant à espacer les ponctions. De plus, les phlébotomies répétées induisent une hypoxie qui renforce l’inhibition de la production d’hepcidine, aggravant d’autant la surcharge en fer. Au vu du déficit en hepcidine constaté au cours des hémochromatoses héréditaires, les patients qui ne présentent pas une insensibilité à l’hepcidine pourraient voir leur état fortement amélioré par des injections d’hepcidine ou par l’absorption de l’un de ses analogues (8). Hepcidine et obésité L’obésité sévère, qui engendre un état inflammatoire caractérisé par une élévation de la CRP, du TNFα et de l’IL-6 circulants, s’accompagne d’une baisse de la saturation de la transferrine (68 % des obèses ont un taux de saturation < 25 %) et d’une anémie (hémoglobine < 8 mmol/l chez un quart des obèses). Une étude clinique menée par S. Bekri a montré que le tissu adipeux sous-cutané des patients obèses exprime anormalement le gène HAMP (23). La transcription du gène codant l’hepcidine dans le tissu adipeux est corrélée à l’indice de masse corporelle, alors que son expression hépatique n’est pas affectée par la surcharge pondérale. Les auteurs démontrent également que l’expression anormale de l’hepcidine dans les adipocytes est initiée par la production locale d’IL-6. Selon S. Bekri, l’hepcidine peut être considérée comme une adipokine dont l’augmentation de la production en cas d’obésité sévère réduit l’absorption intestinale de fer, engendre une baisse du fer sérique et une anémie. Les auteurs recommandent d’inclure un bilan du fer dans le suivi des patients obèses. Conclusion L’hepcidine est une hormone hépatique qui joue un rôle crucial dans le contrôle de l’homéostasie du fer. Les mécanismes cellulaires impliqués dans le contrôle de la sécrétion d’hepcidine ne sont pas totalement élucidés. Toutefois, on sait que l’hypoxie inhibe sa libération par les hépatocytes, alors que de nombreux facteurs comme TLR-4, IL-6, HFE, HJV ou TfR2 la stimulent. La surexpression ou le déficit en hepcidine sont associés à des troubles du métabolisme du fer observés au cours d’une infection, d’une inflammation chronique, des hémochromatoses héréditaires ou d’une obésité sévère. La compréhension des mécanismes de contrôle de la sécrétion d’hepcidine ouvre de nouvelles perspectives de traitement des pathologies liées à des surcharges en fer ou d’une anémie associée à une inflammation. ■ Prochain dossier thématique à paraître en octobre 2009 “Comment gérer un diabète lors de troubles cognitifs ?” Coordination : Anne Vambergue (Lille) 152 Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 4 - juillet-août 2009 L’hepcidine, l’hormone du fer Références 1. Verga Falzacappa MV, Muckenthaler MU. Hepcidin: iron- 9. Kawabata H, Fleming RE, Gui D et al. Expression of hepcidin hormone and anti-microbial peptide. Gene 2005;364:37-44. is down-regulated in TfR2 mutant mice manifesting a phenotype of hereditary hemochromatosis. Blood 2005;105:376-81. 2. Park CH, Valore EV, Waring AJ, Ganz T. Hepcidin, a urinary antimicrobial peptide synthesized in the liver. J Biol Chem 2001;276:7806-10. 3. Pigeon C, Ilyin G, Courselaud B et al. 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Elle s’inscrit dans une véritable démarche d’éducation du patient, car l’observance joue un rôle clé dans le dispositif et permet ainsi au médecin d’adapter le traitement. Pour surveiller leurs glycémies, les patients disposent d’un système d’autosurveillance glycémique constitué d’un lecteur de gly- cémie, de réactifs associés, d’un stylo autopiqueur à changer tous les ans et de lancettes conçues pour un usage unique. Une étude montre que 40 % des patients ne suivent pas les recommandations de leur médecin en termes de fréquence de test (1). En effet, certains patients diabétiques n’hésitent pas à réutiliser leurs lancettes plusieurs fois avant de les jeter, oublient de changer leur stylo autopiqueur chaque année, ou bien effectuent le prélèvement avec la lancette sans l’aide d’un stylo. Une mauvaise utilisation du matériel de prélèvement (réutilisation des lancettes, stylo défectueux) conduit à une augmentation de la douleur lors du prélèvement et à une augmentation du risque d’infection, ce qui constitue un véritable frein à l’observance de l’autosurveillance glycémique. Afin de sensibiliser les patients diabétiques au bon usage des lancettes, LifeScan, leader en Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 4 - juillet-août 2009 France dans le domaine de l’autosurveillance glycémique, lance en pharmacie une campagne nationale sur le thème : “Bon usage et bonnes pratiques de prélèvement capillaire”. La campagne LifeScan “Autosurveillance glycémique & prélèvement capillaire” s’articule autour de trois outils mis à la disposition des pharmaciens pour sensibiliser les patients diabétiques aux risques de la réutilisation de lancettes souillées : ✓✓ une brochure d’éducation patient pour renforcer le message lors de la délivrance ; ✓✓ une affiche destinée à l’équipe officinale ; ✓✓ un ordonnancier conseil pour faciliter l’éducation des patients au comptoir. CP Référence 1. Burge MR. Lack of compliance with home blood glucose monitoring predicts hospitalization in diabetes, Diabetes Care 2001;24(8):1502-3. 153