Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XIII - n° 4 - juillet-août 2009
150
Mise au point
phages et les hépatocytes. Il a été rapporté que l’accu-
mulation de fer dans les entérocytes, consécutive à une
injection d’hepcidine, entraîne une baisse de l’expres-
sion des gènes codant DMT1 et DCytB, induisant une
réduction de l’absorption intestinale de fer (6). Il a par
ailleurs été montré qu’une baisse du taux sérique de fer
ou une hypoxie réprime l’expression du gène HAMP (7).
La réduction du taux circulant de l’hormone qui en
découle permet le rétablissement de la ferroportine 1
à la membrane des entérocytes, des macrophages et
des hépatocytes et, par conséquent, la sortie de fer des
cellules de stockage vers la circulation.
Par analogie avec l’insuline, qui maintient l’homéostasie
du glucose en favorisant son stockage sous forme de
glycogène, A. Pietrangelo considère que l’hepcidine,
en induisant le stockage du fer dans le foie sous forme
de ferritine, est l’hormone clé de la régulation de l’ho-
méostasie du fer (8).
Mécanismes de contrôle
de l’expression de l’hepcidine
De nombreuses données indiquent que les protéines
HFE et TFR2, qui jouent le rôle de senseurs du fer en
détectant l’élévation de la saturation de la transferrine,
inuent sur l’expression du gène HAMP par des méca-
nismes non encore élucidés (9, 10). Bien que l’on ne
connaisse pas exactement la fonction de l’hémojuveline
(HJV), on sait que cette protéine membranaire, expri-
mée au niveau du cœur, du muscle squelettique et du
foie, peut être en partie coupée en présence de faibles
concentrations circulantes de fer. Le fragment soluble
résultant du clivage de HJV passe dans la circulation
systémique et est véhiculé jusqu’au foie, où il active
l’expression de l’hepcidine. Ce fragment de HJV est le
facteur stimulateur le plus puissant de la transcription
du gène HAMP (11).
L’analyse de la région promotrice du gène HAMP a révélé
qu’il n’existe pas de séquence consensuelle correspon-
dant à l’élément de réponse au fer (iron response element,
IRE). Le fer n’exerce donc pas un contrôle de la transcrip-
tion du gène HAMP via une iron response protein comme
il le fait pour les gènes codant le DMT1, le récepteur de
la transferrine et la ferroportine 1. En revanche, des sites
de liaison d’autres facteurs de transcription, tels que les
sites CCAAT/enhancer binding protein α (C/EBPα), Smad-
4, HNF4α (hepatic nuclear factor) et USF-2 (upstream
stimulatory factor 2), ont été identiés dans la région pro-
motrice du gène HAMP chez l’homme et les rongeurs.
La combinaison des approches in vitro et in vivo chez
des souris transgéniques a permis de démontrer que
C/EBPα et Smad-4 stimulent, alors que HNF4α réprime
la transcription du gène de l’hepcidine (12, 13). Il a en
particulier été montré que l’accumulation de fer dans
les hépatocytes augmente la production de C/EBPα, qui
stimule à son tour la synthèse d’hepcidine, engendrant
une baisse de l’eux de fer des macrophages et des
entérocytes, ce qui tend à limiter une surcharge hépa-
tique en fer. Bien que le promoteur du gène humain
contienne plusieurs sites consensuels de liaison du
facteur inductible par l’hypoxie (hypoxy induced fac-
tor, HIF), son absence chez les autres mammifères ne
plaide pas en faveur de son rôle dans le contrôle de la
synthèse de l’hepcidine. Les mécanismes impliqués
dans la régulation de l’expression de l’hepcidine ne
sont donc pas totalement élucidés.
Rôle de l’hepcidine dans la pathogénie
de l’anémie due à une inflammation
L’infection et l’inammation chronique sont connues
pour induire une anémie ferriprive. E. Kemna et al. ont
montré qu’une infection bactérienne ou une injection
de lipopolysaccharide engendre une augmentation de
l’expression du gène HAMP (14). En revanche, aucune
modication de l’expression d’hepcidine n’est observée
chez les souris décientes en récepteurs de l’immunité
innée, les récepteurs Toll like de type 4 (TLR4–/–). Ces
travaux révèlent que l’activation des TLR4 présents à la
surface des hépatocytes est à l’origine de la variation de
l’expression d’hepcidine en réponse à une infection. La
réduction du fer sérique qui en découle prive les agents
pathogènes du fer indispensable à leur prolifération.
Cet eet antimicrobien de l’hormone est renforcé par la
capacité de l’hepcidine à perforer la paroi bactérienne
grâce à sa structure en épingle à cheveux, commune
aux défensines (1).
L’inammation aiguë ou chronique qui s’accompagne
d’une production de cytokines pro-inammatoires,
telles que le TNFα, l’IL-1 et l’IL-6, induit également
une augmentation de la synthèse de l’ARNm codant
l’hepcidine. La surexpression de l’hepcidine dans des
modèles animaux de l’inammation est observée chez
les souris décientes en IL-1 et TNFα, mais elle n’est
pas détectée chez les souris dépourvues d’IL-6 (15).
Des expériences réalisées in vitro et in vivo ont conrmé
l’eet stimulateur de l’IL-6 sur la production d’hepcidine
par les hépatocytes. Par ailleurs, une étude clinique a
montré que le blocage de l’action de l’IL-6 par injection
de tocilizumab, un anticorps capable de piéger l’IL-6
circulant, réduit la sécrétion d’hepcidine et améliore
le bilan hématologique des patients sourant d’une