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Thérapeutique
Quelle évolution pour la science ?
Il serait inconcevable de parler du médicament
de demain sans parler du génie génétique, véri-
table révolution scientifique. Étant donné l’im-
portance des moyens mis en jeu dans le monde
(plus de 20 milliards de francs), on peut prévoir
que, vers 2005, le génome humain devrait être
connu dans sa totalité, tout en sachant qu’il n’est
pas immuable. Il restera à identifier les rôles
exacts de chacun de ses composants, ce qui sauf
acquisition de techniques nouvelles, demandera
bien vingt nouvelles années de recherche. On
sait qu’un grand nombre de maladies ont pour
origine des défauts génétiques, sans que l’on
sache toujours s’il s’agit d’un ou de plusieurs
gènes. Des premiers essais sur l’homme permet-
tent de prévoir des résultats contre certains can-
cers et contre les maladies cardiovasculaires. On
peut attendre aussi la préparation de vaccins, en
particulier contre la grippe, le sida, le palu-
disme. Un des domaines qui doit également sus-
citer beaucoup d’espoirs correspond aux mala-
dies du système nerveux dont on connaît la
vulnérabilité, que l’on ne sait pas reconstituer
aujourd’hui, et dont les désordres s’appellent :
Parkinson, Alzheimer, sclérose latérale amyotro-
phique, maladie de Huntington...
Les biotechnologies sont également connues
depuis longtemps comme un moyen important
de production de médicaments (antibiotiques,
acides aminés). Elles sont précieuses quand
elles permettent la production de principes ac-
tifs naturels sans les effets secondaires ; parfois
dangereuses quand ces mêmes principes actifs
naturels sont obtenus par extraction (hormones
de croissance, vaccins, insuline, érythropoïé-
tine...), et parfois en quantité trop infinitési-
male. Dans les cinq ans qui viennent, plus de
200 produits nouveaux issus des biotechnolo-
gies entreront dans leur phase d’expérimenta-
tion clinique, avec des promesses de résultat,
en particulier dans les domaines du cancer et
des vaccins.
Où en est la thérapie cellulaire ?
Elle a déjà montré le bénéfice que l’on peut en
attendre en matière de transfusion et de trans-
plantation. Il ne s’agit pas de médicaments selon
les définitions officielles, mais il faut les traiter
comme tels, ne serait-ce qu’au plan de la sécu-
rité d’emploi. La transplantation de cellules vé-
gétales chez le rat montre que les cellules conti-
nuent à sécréter leur principe actif, puis
s’organisent et se différencient dans l’organisme
animal. Ces transplantations permettent de faire
progresser la connaissance des xénogreffes,
voire l’inoculation directe de médicaments dans
l’organisme. Mais on ne voit pas cependant,
dans l’état actuel de nos connaissances, com-
ment ce type de thérapeutique pourrait être mis
à la disposition de l’officine.
Qu’en est-il de la chimie combinatoire ?
On suppose que la nature, à partir de quelques
éléments chimiques, a su les combiner pour
produire une gamme considérable de protéines.
Il était donc tentant pour l’homme de l’imiter
une nouvelle fois en réalisant à partir d’éléments
organiques simples, comme des acides aminés,
des cétones, etc., des ensembles complexes dont
on peut attendre une activité pharmacologique.
C’est la chimie combinatoire, qui suscite elle
aussi des espoirs importants. Déjà, des sub-
stances actives ont été identifiées dans le do-
maine de la coagulation sanguine, par exemple.
Quant à la piste des enzymes, elle est promet-
teuse. D’après les travaux de Bernard Roques,
certains inhibiteurs d’enzymes spécifiques lais-
sent de grands espoirs dans le domaine de
l’analgésie, dans le traitement de la maladie de
Hurler, etc.
Que deviennent les méthodes
traditionnelles ?
Elles n’ont pas dit leur dernier mot. La cohabita-
tion des méthodes aléatoires et des recherches
plus ciblées en fera encore longtemps des
concurrentes à vrai dire complémentaires tant
nous sommes encore loin de maîtriser tous les
paramètres des maladies, de leur étiologie, et
tous les facteurs qui permettraient de les vaincre
définitivement. La connaissance croissante de
sites récepteurs permettra également une re-
cherche plus ciblée, donc plus rapide, que celle
que nous avons connue jusqu’alors. Pour identi-
fier les cibles, l’informatique, comme dans la chi-
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