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REVUE DE PRESSE
coordonné par
le Pr B. Combe
Discectomie agressive ou limitée :
à chaque technique ses avantages
et ses inconvénients
Commentaire
Les techniques chirurgicales de discectomie pour cure de hernie discale (HD) sont nombreuses.
Deux méthodes principales sont utilisées aussi bien pour la chirurgie ouverte que pour la
microdiscectomie. La première est la technique de discectomie dite agressive (DA), qui
consiste en une ablation de la HD et un curetage important du disque. La seconde, dite
discectomie limitée (DL), consiste en une ablation isolée du fragment discal, avec une
approche très limitée sur l’espace discal.
La DA aurait l’avantage d’entraîner moins de récidives de HD que la DL, mais exposerait
plus aux lombalgies résiduelles. La DL aurait, quant à elle, l’avantage d’entraîner moins de
lombalgies, mais exposerait plus aux récidives de HD.
M.J. McGirt et al. ont fait une revue de la littérature sur la période 1980-2007 pour répondre
à 3 questions : quelle technique fournit le meilleur résultat clinique à 2 ans ? Quelle différence
existe-t-il entre les 2 techniques à long terme ? Quelle technique fournit le taux le plus bas de récidives de HD au même étage ?
Cinquante-quatre études rapportant les résultats de 13 359 patients opérés de HD ont été
retenues. L’incidence de lombalgie ou de radiculalgie persistante au cours des 2 premières
années était de 14,5 % (7 à 16 %) après DL et de 14,1 % (6 à 43 %) après DA. Cependant,
après 2 ans, l’incidence rapportée de récidive de lombalgie ou de radiculalgie était 2,5 fois
plus basse (p < 0,0001) dans le groupe DL (en moyenne 11,6 % [7 à 16 %]) que dans le
groupe DA (en moyenne 27,8 % [19 à 37 %]). A contrario, l’incidence rapportée de récidive
de HD était plus importante (p < 0,0001) dans le groupe DL (en moyenne 7 % [2 à 18 %])
que dans le groupe DA (en moyenne 3,5 % [0 à 9,5 %]).
À court terme (les deux premières années), cette méta-analyse n’a pas mis en évidence de
différence entre les 2 techniques. Mais au-delà de cette période, elle confirme les avantages
et les inconvénients de chacune d’elles à long terme.
M. Marty, Créteil
Des essais prometteurs
avec une nouvelle biothérapie anti-IL-12/IL-23
dans les spondylarthropathies
et les maladies apparentées
L’interleukine 23 (IL-23) suscite beaucoup d’intérêt depuis 2 ans dans de nombreuses maladies
inflammatoires, parce qu’il a été montré une association entre le gène du récepteur de l’IL-23
et le psoriasis, le rhumatisme psoriasique, la maladie de Crohn et la spondylarthrite ankylosante. Rappelons que l’IL-23 est avant tout sécrétée par des cellules dendritiques activées,
des monocytes et des macrophages. Elle stimule l’émergence d’une population de lymphocytes T CD4 pro-inflammatoires sécrétant de l’IL-17, encore appelés lymphocytes TH17. Ces
lymphocytes induisent, entre autres, la sécrétion de TNFα et d’IL-6 ; des études ont récemment
montré leur implication dans des pathologies auto-immunes et inflammatoires, en particulier
la maladie de Crohn. Mais l’IL-23 agit également comme stimulateur de nombreuses cellules
du système immunitaire inné, induisant ainsi la production d’IL-1, d’IL-6 et de TNFα par des
monocytes et des macrophages. Il se trouve que l’IL-23 est composée de deux sous-unités,
dont la p40, sous-unité qui est commune à l’IL-12 et à l’IL-23, l’IL-12 étant également un bon
candidat à un rôle physiopathogénique dans ces maladies, en particulier par sa stimulation
de la voie TH1 et son rôle dans l’immunité innée. Un anticorps monoclonal humain bloquant
la sous-unité p40 a été développé (l’ustekinumab), qui empêche la fixation des IL-12 et IL-23
sur le récepteur 12-Rβ 1, présent à la surface de cellules du système immunitaire.
10 | La Lettre du Rhumatologue • N° 352 - mai 2009
Une certaine contradiction est apparente dans
ces résultats. En effet, quand la discectomie est
limitée, les lombalgies et les radiculalgies sont
moins fréquentes à long terme, mais les récidives
de HD sont plus fréquentes. Cela signifierait-t-il
que ces HD ne seraient pas symptomatiques ? Le
caractère délétère des DA peut être expliqué.
En effet, des études biomécaniques indiquent
qu’une rupture importante du disque accélère sa
dégradation dégénérative et induit un transfert
des forces de pression sur l’annulus fibrosus et sur
les facettes articulaires postérieures. De plus, une
diminution importante de la hauteur de l’espace
intervertébral secondaire à une DA peut entraîner
des souffrances radiculaires par réduction de la
taille du foramen.
La principale limite de cette analyse est que, sur
l’ensemble des données, très peu de résultats sont
issus d’études randomisées. Les autres limites de
cette étude sont l’hétérogénéité des patients inclus
et la durée variable du suivi entre les études. Les
auteurs rappellent néanmoins que seule une étude
comparative et randomisée pourrait formellement
confirmer ces données et bien caractériser les avantages et les inconvénients de ces 2 techniques.
Référence bibliographique
McGirt MJ, Ambrossi GL, Datoo G et al. Recurrent disc
herniation and long-term back pain after primary lumbar
discectomy: review of outcomes reported for limited versus
aggresive disc removal. Neurosurgery 2009;64:338-44.
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Le développement de l’ustekinumab en thérapeutique paraît très rapide, avec la publication de 4 grands essais multicentriques en 2007 et 2008, dans le domaine du psoriasis et
de la maladie de Crohn (1-4), et plus récemment encore, avec un premier essai dans le
rhumatisme psoriasique périphérique (5).
➤➤ Pour le psoriasis (1), après une première étude de phase II favorable, 2 études de
phase III, PHŒNIX 1 et PHŒNIX 2 (2, 3), ont inclus respectivement 766 et 1 230 patients
atteints d’un psoriasis modéré à sévère, et ayant reçu en sous-cutané soit 45 mg, soit 90 mg
d’uste­kinumab, aux semaines 0 et 4, puis toutes les 12 semaines, soit un placebo. Le critère
principal de jugement était la proportion de patients répondeurs PASI 75 (diminution d’au
moins 75 % du score d’activité du psoriasis nommé PASI) à la semaine 12. Dans PHŒNIX 2,
avec les 2 premières injections d’ustekinumab, la proportion de répondeurs était de 66,7 %
avec 45 mg, et de 75,7 % avec 90 mg, tandis qu’elle n’était que de 3,7 % sous placebo,
les différences avec le groupe placebo étant très significatives. Des proportions quasi identiques ont été notées dans PHŒNIX 1. Dans PHŒNIX 2, il a été observé que, pour les
patients répondeurs partiels (amélioration du PASI de 50 à 75 %), une augmentation de la
fréquence d’injection (toutes les 8 semaines au lieu de toutes les 12 semaines) s’accompagnait d’un gain net de vrais répondeurs à la semaine 28, mais uniquement dans le groupe
90 mg. Cela suggère qu’il peut être nécessaire d’aller jusqu’à ce régime d’administration
de 90 mg toutes les 8 semaines. La tolérance a été bonne, avec une proportion d’effets
indésirables et d’effets indésirables sévères identique dans les 2 groupes ustekinumab et
dans le groupe placebo.
➤➤ Pour la maladie de Crohn, un essai randomisé portant sur 104 patients ayant des
formes modérées à sévères a comparé au placebo, en cross-over, 2 voies d’administration
de l’ustekinumab (s.c. et i.v.), à 2 fréquences d’injection différentes sur 3 semaines (4). Aux
semaines 4 et 6, la proportion de répondeurs était supérieure dans les groupes ustekinumab,
comparativement au groupe placebo (53 % et 30 % ; p = 0,02) ; la différence n’était plus
significative à la semaine 8. La réponse a semblé encore meilleure chez les patients en
échec préalable à l’infliximab.
➤➤ L’essai dans le rhumatisme psoriasique a inclus 146 patients ayant au moins 3 articulations douloureuses et gonflées, et au moins 1 plaque de psoriasis de 2 cm (5). Soixanteseize patients (groupe 1) ont reçu 4 injections sous-cutanées d’ustekinumab à 1 semaine
d’intervalle, suivies d’une injection de placebo aux semaines 12 et 16 (­cross-over), et
l’autre groupe (groupe 2) a suivi un schéma inverse, débutant par le placebo. La dose
était de 90 mg pour les 17 premiers patients du groupe 1, puis de 63 mg pour tous
les autres (réduction due à des modifications dans la préparation du produit). La durée
moyenne du rhumatisme psoriasique était d’un peu plus de 5 ans ; 60 % des patients
avaient connu l’échec préalable d’au moins 1 traitement de fond, 16 % d’un immunosuppresseur autre, et 27 % d’un agent biologique (dont un anti-TNFα pour plus de la
moitié d’entre eux) ; 20 % des patients recevaient un traitement concomitant par du
méthotrexate. La proportion de répondeurs ACR 20 à la semaine 12 a été de 42 % dans
le groupe 1 versus 14 % dans le groupe 2 (p = 0,0002). Des différences significatives
étaient également observées avec les réponses ACR 50 et ACR 70. Le cross-over était en
faveur d’une efficacité du même ordre de grandeur pour la réponse ACR 20, peut-être
légèrement inférieure pour la réponse ACR 70. Tous les critères secondaires d’évaluation
rhumatologique (HAQ, réponse EULAR, appréciation globale, etc.), ainsi que le psoriasis
lui-même, ont été significativement améliorés à la semaine 12 dans le groupe actif,
comparativement au placebo. La tolérance a été bonne là encore, avec une proportion
de patients ayant connu au moins 1 effet indésirable de 61 % dans le groupe 1 versus
63 % dans le groupe 2 – pas d’événement grave dans le groupe 1 contre 4 % dans le
groupe 2 à la semaine 12 –, les infections ayant touché respectivement 36 % et 30 %
des patients, sans infection sérieuse dans chacun des groupes.
P. Claudepierre, Créteil
Commentaire
Ces études confirment le potentiel très intéressant
de cette molécule anti-IL-12/IL-23 dans cette sphère
d’affections. Les développements en cours vont
pouvoir préciser le dosage optimal de la molécule,
ainsi que sa fréquence optimale d’injection, et bien
entendu sa tolérance à plus long terme.
Références bibliographiques
1. Krueger GG, Langley RG, Leonardi C et al.; CNTO 1275
Psoriasis Study Group. A human interleukin-12/23 monoclonal antibody for the treatment of psoriasis. N Engl J Med
2007;356:580-92.
2. Leonardi CL, Kimball AB, Papp KA et al. PHOENIX 1
study investigators. Efficacy and safety of ustekinumab, a
human interleukin-12/23 monoclonal antibody, in patients
with psoriasis: 76-week results from a randomised, doubleblind, placebo-controlled trial (PHOENIX 1). Lancet 2008;
371:1665-74.
3. Papp KA, Langley RG, Lebwohl M et al.; PHOENIX 2
study investigators. Efficacy and safety of ustekinumab, a
human interleukin-12/23 monoclonal antibody, in patients
with psoriasis: 52-week results from a randomised, doubleblind, placebo-controlled trial (PHOENIX 2). Lancet 2008;
371:1675-84.
4. Sandborn WJ, Feagan BG, Fedorak RN et al.; Ustekinumab
Crohn’s Disease Study Group. A randomized trial of ustekinumab, a human interleukin-12/23 monoclonal antibody, in
patients with moderate-to-severe Crohn’s disease. Gastro­
enterology 2008;135:1130-41.
5. Gottlieb A, Menter A, Mendelsohn A et al. Ustekinumab, a
human interleukin-12/23 monoclonal antibody for psoriatic
arthritis: randomised, double-blind, placebo-controlled,
cross­over trial. Lancet 2009;373:633-40.
La Lettre du Rhumatologue • N° 352 - mai 2009 | 11
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coordonné par
le Pr B. Combe
Inhibiteurs de l’interleukine 1 en intra-articulaire
dans l’arthrose : une étude décevante.
Histoire à suivre…
On sait que l’interleukine 1 (IL-1) est probablement impliquée dans la physiopathologie
de l’arthrose et/ou de ses manifestations cliniques, et qu’une étude française avait évalué
la tolérance d’une injection intra-articulaire d’anakinra dans l’arthrose du genou, avec
des résultats rassurants en termes de tolérance, et encourageants en termes d’efficacité (1).
Cette étude de tolérance a donc été logiquement suivie par une étude randomisée en
double aveugle comparant les résultats d’une injection intra-articulaire unique de placebo et
ceux d’une injection intra-articulaire d’anakinra, à la dose de 50 ou 150 mg, chez les sujets
atteints de gonarthrose symptomatique (2). Malheureusement, cette étude est négative :
il n’y a eu aucune différence entre les groupes, en ce qui concerne le critère de jugement
principal (variation du score WOMAC global entre l’inclusion et 4 semaines), mais aussi
en ce qui concerne les autres critères de jugement (domaines douleur, fonction et raideur
de l’indice WOMAC à 4, 8 et 12 semaines, WOMAC global à 8 et 12 semaines, qualité de
vie, pourcentages de répondeurs). Les auteurs, bien qu’ils soient évidemment déçus par
ces résultats, y voient toutefois des motifs d’encouragements : en effet, lors de l’évaluation
réalisée 4 jours après l’injection, il existait une amélioration quasi significative du score de
douleur dans le groupe anakinra 150 mg, par rapport au groupe placebo (p = 0,051). Or,
la demi-vie de l’anakinra est, on le sait, très courte (d’où les injections journalières dans la
polyarthrite rhumatoïde). Le fait qu’une et une seule des analyses secondaires soit proche
de la significativité n’est donc peut-être pas dû au hasard. Une autre explication pourrait
être une efficacité clinique de l’inhibition de l’IL-1, mais, compte tenu de la courte demi-vie
de la molécule, cette efficacité serait de trop faible durée pour être détectée après 4 et, a
fortiori, 8 et 12 semaines.
J.F. Maillefert, Dijon
Commentaire
Au moment où l’on commence à envisager l’utilisation de biothérapies dans l’arthrose (3), cette
étude ouvre la porte à d’autres travaux, utilisant
un inhibiteur de l’IL-1 de demi-vie plus longue, ou
utilisant un système permettant une distribution
plus continue.
Un autre élément intéressant est représenté par
l’effet placebo. On note que le score WOMAC
global était amélioré d’environ un tiers à 4 semaines
versus l’inclusion dans le groupe placebo. Il s’agit
de la traduction d’un phénomène connu et récemment mis en évidence par l’équipe de M. ­Doherty :
l’effet placebo est très important dans l’arthrose,
en particulier lorsque le produit est administré par
voie injectable (4).
Cela explique que les résultats très prometteurs de
certaines études ouvertes ne soient pas toujours
confirmés par les études comparatives randomisées.
Nous en avons un exemple ici, tout comme nous
en avons eu un autre tout récemment avec les
injections d’acide hyaluronique dans la coxarthrose,
pour lesquelles deux études randomisées se sont
révélées négatives (celle de P. ­Richette et al. [5],
avec environ un tiers de répondeurs à 3 mois dans
les groupes placebo et traitement actif, et celle
de Atchia et al. [6]). Méfions-nous donc des résultats d’études d’un niveau de preuve insuffisant, et
particulièrement dans l’arthrose.
Références bibliographiques
1. Chevalier X, Giraudeau B, Conrozier T et al. Safety study of
intraarticular injection of interleukin 1 receptor antagonist
in patients with painful knee osteoarthritis: a multicenter
study. J Rheumatol 2005;32:1317-23.
2. Chevalier X, Jerosch J, Goupille P et al. Single, intra-articular
treatment with 6 ml of hylan G-F 20 in patients with symptomatic primary osteoarthritis of the knee: a randomised,
multi-centre, double-blind, placebo-controlled trial. Arthritis
Rheum 2009;61:344-52.
3. Lane NE, Schnitzer TJ, Smith MD et al. Tanezumab relieves
moderate to severe pain due to osteoarthritis (OA) of the
knee: a phase 2 trial. October 28, 2008. Presentation 1989.
San Francisco: American College of Rheumatology, 2008.
Abonnez-vous en ligne !
www.edimark.fr
Bulletin d’abonnement
disponible page 35
12 | La Lettre du Rhumatologue • N° 352 - mai 2009
4. Zhang W, Robertson J, Jones AC, Dieppe PA, Doherty M.
The placebo effect and its determinants in osteoarthritis:
meta-analysis of randomised controlled trials. Ann Rheum
Dis 2008;67:1716-23.
5. Richette P, Ravaud P, Conrozier T et al. Effect of hyal­
uronic acid in symptomatic hip osteoarthritis: a multicenter,
randomized, placebo-controlled trial. Arthritis Rheum
2009;60:824-30.
6. Atchia I, Reed M, Kane D et al. Efficacy of a single ultrasound guided injection in hip osteoathritis. Osteoarthritis
Cartilage 2008;16(S4):S18.
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