MISE AU POINT Le pneumologue face au syndrome d’apnées centrales au cours du sommeil The lung specialist and management of central sleep apnea F. Martin* L * Unité des pathologies du sommeil, centre hospitalier de Compiègne. e pneumologue est désormais habitué au diagnostic et à la prise en charge des syndromes d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS). Mais, au vu de la multiplication des patients qui lui sont adressés et qui présentent parfois des pathologies cardio-vasculaires ou neurologiques associées, il est régulièrement confronté au diagnostic et à la prise en charge d’événements respiratoires d’origine centrale. Il peut aussi découvrir ces derniers en explorant des patients suspects de troubles respiratoires obstructifs au cours du sommeil ou les voir apparaître chez des malades qu’il traite pour SAHOS par ventilation en pression positive. Aussi le pneu- Figure 1. Polysomnographie montrant des apnées centrales en dernière partie de nuit (EVENT), entraînant des chutes de la SpO2. 188 | La Lettre du Pneumologue • Vol. XIII - n° 5 - septembre-octobre 2010 mologue doit-il savoir reconnaître ces événements respiratoires d’origine centrale, manier les outils qui permettent leur diagnostic, organiser le bilan étiologique et maîtriser les possibilités thérapeutiques adaptées : tels sont les buts que cette mise au point se propose d’évoquer. À partir de deux cas cliniques, nous aborderons le bilan étiologique, les investigations que la découverte d’un syndrome d’apnées centrales du sommeil (SACS) implique et les possibilités thérapeutiques. Cas clinique n° 1 Monsieur H., 73 ans, est atteint de bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) post-tabagique (intoxication tabagique ayant cessé depuis 5 ans, avec consommation cumulée de 50 paquetsannée). Il pèse 95 kg pour une taille de 178 cm ; son indice de masse corporelle (IMC) est donc de 30 kg/ m2 ; il n’a pas d’antécédents cardio-vasculaires ; il se plaint d’une dyspnée de stade II. L’exploration fonctionnelle respiratoire met en évidence un volume expiratoire maximal par seconde (VEMS) à 60 % de la valeur théorique, et la gazométrie artérielle indique une hypoxémie modérée sans hypercapnie (PaO2 = 68 mmHg, PaCO2 = 45 mmHg). En septembre 2009, cet homme consulte pour des symptômes évocateurs de SAHOS : ronflement chronique, pauses respiratoires nocturnes constatées par son épouse, nycturie et troubles de la vigilance diurne (score d’Epworth à 13). La polygraphie au cours du sommeil confirme l’existence d’un SAHOS sévère Résumé Le syndrome d’apnées du sommeil (SAS) central est moins fréquent que le syndrome d’apnées obstructives. Le pneumologue peut les rencontrer en présence d’une insuffisance cardiaque, au cours de certaines maladies neurologiques et lors de la prise d’opiacés. Il doit reconnaître les 2 grandes catégories de SAS central qui correspondent à des étiologies spécifiques : les hypocapniques (réponses ventilatoires au CO2 augmentées) et les hypercapniques, essentiellement dans les maladies neuromusculaires et au cours du syndrome obésitéhypoventilation. Le pneumologue doit savoir conduire le bilan d’un SAS central avec une polysomnographie, une gazométrie artérielle et la mesure de la réponse ventilatoire au CO2, également un bilan cardiaque (échographie) ainsi qu’une imagerie du tronc cérébral si une cause neurologique est suspectée. Il instaure si besoin les traitements par assistance respiratoire : la ventilation à 2 niveaux de pression dans les SAS centraux hypercapniques et l’aide inspiratoire variable en cas de SAS central hypocapnique. avec index d’apnées-hypopnées (IAH) à 48/heure, tandis que, durant 15 % du temps, la SpO2 est inférieure à 90 %. Un traitement par application d’une pression positive continue (PPC) au cours du sommeil est institué par l’intermédiaire d’un masque nasal, avec un appareil réglé en mode autopiloté grâce à une fourchette de pressions allant de 4 à 15 cm H2O. En octobre, après 1 mois de traitement, on constate une adaptation assez difficile au traitement, avec, cependant, une application quotidienne régulière et une observance moyenne de 5 heures par nuit. L’amélioration clinique est partielle (score d’Epworth à 10), le relevé des données enregistrées par l’appareil nous apprend que la pression efficace pendant 95 % du temps est à 10 cm H2O et l’IAH résiduel à 15/heure. En novembre, la tolérance du traitement nocturne est médiocre, le patient dit se réveiller plusieurs fois en seconde partie de nuit et avoir l’impression que “l’appareil souffle fort”. Il est parfois à nouveau somnolent dans la journée (score d’Epworth à 12), et son épouse constate un sommeil agité et des pauses respiratoires en fin de nuit. On décide de réaliser une polysomnographie sous PPC, qui met en évidence (figure 1) que le sommeil est de qualité médiocre et, surtout, que des apnées centrales surviennent dans le dernier tiers de la nuit, à partir d’une pression nasale supérieure à 8 cm H2O, avec une montée progressive de la pression jusqu’au maximum programmé (15 cm H2O), sans corriger ces apnées (figure 2, p. 190). L’IAH est à 32/heure de sommeil, avec 90 % d’événements d’origine centrale ; la SpO2 est constamment au-dessus de 90 % ; l’index de micro-éveils secondaires aux apnées-hypopnées est de 29/heure de sommeil. Devant ces résultats, le réglage de l’appareil est modifié, passant à une pression constante de 8 cm H2O ; l’amélioration de la tolérance, de l’observance et de la symptomatologie est rapide et le contrôle des données enregistrées par l’appareil témoigne d’une bonne efficacité, avec un IAH résiduel à 7/heure. Cette observation illustre le fait que, chez les patients atteints d’une BPCO associée à un SAHOS, un réglage trop élevé de la pression et un réglage de l’appareil en mode autopiloté lors de l’instauration d’un traitement par PPC peuvent induire des phénomènes apnéiques centraux, surtout en fin de nuit, du fait de l’hyperventilation et de l’hypocapnie. Chez ce type de patients, il convient d’instaurer le traitement en mode à pression fixe et au niveau le plus bas possible. Cas clinique n° 2 Monsieur D., 54 ans, est atteint d’une dystrophie myotonique de Steinert, diagnostiquée en décembre 2008. En 2002, il avait été victime d’un accident vasculaire cérébral ischémique lacunaire, dont il n’a pas gardé de séquelles neurologiques. Il rapporte que, au début de 2009, une polygraphie ventilatoire nocturne aurait été pratiquée en raison de pauses respiratoires au cours du sommeil constatées par son épouse, d’un sommeil de mauvaise qualité et d’une grande asthénie diurne sans véritable hypersomnie. Cette exploration aurait mis en évidence un syndrome d’apnées au cours du sommeil. Un traitement par ventilation nasale nocturne au moyen d’un appareil à double niveau de pressions a été instauré, mais rapidement abandonné en raison d’une mauvaise tolérance et, de ce fait, d’une très faible observance. En juin 2009, le bilan cardiovasculaire relève une dysfonction ventriculaire gauche sévère avec fonction systolique (fraction d’éjection estimée à 25 %). La coronarographie révèle une sténose partielle monotronculaire de la circonflexe, qui est dilatée et stentée, mais sans que cela entraîne une amélioration de la fonction ventriculaire gauche. En raison de troubles du rythme cardiaque, un stimulateur à double sonde est implanté. Puis, devant la persistance d’une fibrillation auriculaire symptomatique, une cardioversion électrique est pratiquée qui restaure un rythme sinusal. La mesure de la fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) réalisée au décours note une valeur stable de 25 %. Le traitement médicamenteux comporte un anticoagulant oral, des antiagrégants, des diurétiques, du candésartan et un bêtabloquant. Ce patient n’a pas d’antécédents bronchopulmonaires, n’a jamais fumé, sa fonction respiratoire est normale pour son âge ; la gazométrie artérielle mesure une PaO2 normale à 90 mmHg et une hypocapnie modérée (PaCO2 = 35 mmHg). Mots-clés Syndrome d’apnées du sommeil central Ventilation non invasive Insuffisance cardiaque Highlights Central sleep apnea is less prevalent than obstructive sleep apnea. The lung specialist meets them by patients with heart failure, with neurological diseases or chronic opioids use. He has to know the 2 main categories of central sleep apnea respectively related with different underlying conditions: hypocapnic patients (respiratory control system instability and central apnea occurs when PaCO2 falls below the threshold for apnea during sleep), and patients with chronic hypercapnia mainly in the context of neuromuscular disorders or obesity hypoventilation syndrome. The lung specialist has to drive the assessment by recording blood gases, polysomnography and ventilatory responses to CO2, and also cardiologic assessment (cardiac echography), whereas brain imaging if necessary. He uses ventilatory supports for treating central sleep apnea: noninvasive ventilation in hypercapnic patients and servo-assisted ventilation in hypocapnic. Keywords Central sleep apnea Non invasive ventilation Heart failure La Lettre du Pneumologue • Vol. XIII - n° 5 - septembre-octobre 2010 | 189 MISE AU POINT Le pneumologue face au syndrome d’apnées centrales au cours du sommeil Figure 2. Détails des apnées centrales (NAF2P), avec chutes de la SpO2. VTH : mouvements thoraciques ; VAB : mouvements abdominaux. Devant la persistance des troubles du sommeil, de l’asthénie et des troubles de la vigilance diurne (score d’Epworth à 12), une polysomnographie (figure 3) est réalisée, qui témoigne d’un sommeil de mauvaise qualité (index d’efficacité de 57 %), avec réduction du sommeil lent profond et du sommeil paradoxal (SP), épisodes de veille intrasommeil et fragmentation avec fréquents éveils et micro-éveils (64/heure de sommeil). Sur le plan respiratoire, on constate de nombreuses apnées centrales et des épisodes de respiration périodique de type Cheyne-Stokes (IAH à 56/heure, dont 83 % d’apnées centrales). Ces troubles respiratoires entraînent des épisodes répétés de désaturation de l’oxyhémoglobine, la SpO2 étant inférieure à 90 % durant 35 % du temps. Ce patient est atteint d’un SACS dans un contexte d’insuffisance cardiaque sévère, dont le trouble du rythme a été corrigé, et pour laquelle il reçoit un traitement médicamenteux jugé optimal par les cardiologues. On propose l’essai d’une ventilation auto-asservie au cours du sommeil. Celle-ci est d’abord testée pendant la veille (appareil BIPAP autoSV, Respironics®, réglé sur les paramètres suivants : inspiration positive airway pressure [IPAP] maximale = 12 cm H2O, IPAP minimale = 6, expiratory positive airway pressure [EPAP] = 4, fréquence automatique) sous surveillance des paramètres hémodynamiques, cardiaques et respiratoires. Après son instauration à l’hôpital, devant la bonne tolérance, ce traitement est mis en œuvre la nuit à domicile. Après 1 mois de traitement, la situation clinique est stable sur les plans neuromusculaire et cardiaque, la tolérance de la ventilation nocturne est bonne, avec une application quotidienne régulière et une observance moyenne de plus de 8 heures par nuit. Le patient dit avoir retrouvé un sommeil de bien meilleure qualité, être moins asthénique le jour et ne plus avoir de troubles de la vigilance (score d’Epworth à 5). Le relevé des données enregistrées par l’appareil confirme l’amélioration et l’efficacité, avec un IAH résiduel à 15/­heure, mais prouve la persistance d’événements respiratoires, surtout en fin de nuit, avec des épisodes de respiration périodique. Par conséquence, on augmente l’IPAP maximale à 15 cm H2O. Cette observation est typique d’un SACS, dans un contexte d’insuffisance cardiaque évoluée, traité efficacement par ventilation nocturne de type autoasservie avec aide inspiratoire variable. Physiopathologie des apnées centrales (1, 2) Figure 3. Polysomnographie montrant de nombreux événements (EVENT) à type d’apnées centrales dans les deux derniers tiers de la nuit, avec chutes de la SpO2 et fragmentation du sommeil (HYPNO = hypnogramme). 190 | La Lettre du Pneumologue • Vol. XIII - n° 5 - septembre-octobre 2010 Au cours du sommeil, plusieurs stimuli, comme l’hypoxie, une hyperactivité sympathique ou un micro-éveil provoquent une hyperventilation qui peut diminuer la PaCO2 jusqu’au seuil apnéique et engendrer un arrêt (apnée centrale) ou une diminution (hypopnée centrale) des efforts inspiratoires. La PaCO2 augmente alors graduellement jusqu’à une légère hypercapnie qui entraîne une reprise ventilatoire avec ou sans éveil. L’intensité de cette reprise ventilatoire est variable et dépend de la pente de la réponse ventilatoire au CO2 et du niveau de PaCO2 à l’éveil. MISE AU POINT En SP, le phénomène est atténué par la perte de sensibilité des chémorécepteurs. La reprise ventilatoire est moins prononcée, et les changements de PaCO2 ne sont pas suffisants pour générer des pauses respiratoires. Chez un sujet normal, lors de la transition éveilsommeil, il est fréquent de constater quelques événements centraux. À la suite d’un éveil ou d’un micro-éveil, le même phénomène peut survenir au rendormissement. Chez des patients présentant un sommeil très fragmenté (consécutif à des mouvements des jambes, des douleurs chroniques, etc.), on peut observer les salves de quelques événements centraux réactionnels si l’hyperpnée associée au micro-éveil amène la PaCO2 en dessous du seuil apnéique. Reconnaître les troubles respiratoires d’origine centrale Les apnées-hypopnées d’origine centrale sont liées à un défaut de commande des centres respiratoires bulbo-protubérantiels, avec absence ou diminution des efforts respiratoires. Les critères de durée et d’amplitude de débit sont les mêmes que pour les événements obstructifs, mais la distinction se fait par la reconnaissance de l’absence d’effort respiratoire (3). Outre des apnées et hypopnées centrales peuvent exister des apnées mixtes (début de type central, fin de type obstructif) et la respiration de type CheyneStokes, qui est une ventilation avec augmentation progressive du volume courant (crescendo) suivi d’un decrescendo de ventilation terminé par une apnée ou une hypopnée centrale (figure 4). Comment apprécier l’effort respiratoire ? Le signal de référence pour la mesure de l’effort respiratoire est la pression œsophagienne (les variations de la pression intrathoracique reflètent celles de l’effort respiratoire), mais la pose d’une sonde œsophagienne est une méthode invasive qui ne peut pas être utilisée en routine. Aussi, l’enregistrement des mouvements du thorax et de l’abdomen par des jauges de contrainte correctement positionnées constitue-t-il le signal le plus utilisé pour approcher l’effort respiratoire. L’absence totale de mouvements thoracique et abdominal au cours d’une apnée indique son origine centrale. Certains polygraphes évaluent les variations de la Figure 4. Aspect typique d’une respiration périodique (dite de Cheyne-Stokes). NAF2P : respiration nasale ; VTH : mouvements du thorax ; VAB : mouvements de l’abdomen. pression sus-sternale qui persistent lors des apnées obstructives (ce signal ne permet pas de typer les hypopnées). Il est plus difficile de différencier les hypopnées centrales et les hypopnées obstructives. On associe la persistance d’un effort inspiratoire à l’existence d’un décalage ou d’une opposition de phase des signaux thoracique et abdominal, à l’apparition d’une limitation inspiratoire du flux nasal (le signal inspiratoire reste arrondi lors d’un événement central alors qu’il devient plutôt carré lors d’un événement obstructif) [4], à l’intensité croissante du ronflement ou à une augmentation inspiratoire du temps de transit du pouls (TTP) [figure 5]. Le TTP est le temps s’écoulant entre l’ouverture de la valve aortique (en pratique, l’onde R sur l’électrocardiogramme) et l’arrivée (détectée par l’oxymètre au doigt) de l’onde de pouls en périphérie. Cette durée est inversement proportionnelle à l’intensité de la pression artérielle qui constitue la pression motrice de l’onde de pouls. La pression artérielle baisse à l’inspiration de manière proportionnelle à la quantité d’effort respiratoire. Figure 5. Hypopnées de type central (NAF2P = respiration nasale ; VTH = mouvements thoraciques ; VAB = mouvements abdominaux). La Lettre du Pneumologue • Vol. XIII - n° 5 - septembre-octobre 2010 | 191 THELIN 100 MG, COMPRIMES ENROBES. DENOMINATION : THELIN® 100 mg, comprimés enrobés. COMPOSITION : 100 mg de sodium sitaxentan. FORME PHARMACEUTIQUE : Comprimés enrobés jaunes à orange en forme de gélule, marqués en creux « T-100 » d’un côté. DONNEES CLINIQUES : • Indications thérapeutiques : Traitement de l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) dans le but d’améliorer la capacité à l’exercice chez les patients en classe fonctionnelle III (classification l’OMS). L’efficacité du traitement a été démontrée dans l’HTAP primitive et l’HTAP associée à une connectivite. • Posologie et mode d’administration : Voie orale. Le traitement sera initié et surveillé uniquement par un médecin expérimenté dans la prise en charge de l’HTAP. Dose recommandée : 100 mg une fois par jour avec ou sans aliment et à tout moment de la journée. En cas de détérioration clinique malgré un traitement par Thelin pendant au moins 12 semaines, d’autres traitements devront être envisagés. Dans certains cas un traitement de 12 semaines supplémentaires peut être envisagé. L’augmentation des doses n’apporte pas de bénéfice au regard des effets secondaires attendus, notamment en terme d’hépatotoxicité (voir Mises en garde spéciales et précautions d’emploi). Insuffisance hépatique : Thelin est contre-indiqué chez les patients présentant une augmentation des transaminases hépatiques avant la mise en route du traitement [> 3 x la limite supérieure de la normale (LSN)] ou une augmentation de la bilirubine conjuguée > 2 fois la valeur limite supérieure de la normale (LSN) avant la mise en route du traitement (voir Contre-indications). Insuffisance rénale : Aucun ajustement de dose n’est nécessaire chez les patients présentant une insuffisance rénale. Enfant et l’adolescent (< 18 ans) : Utilisation non recommandée. Sujets âgés : Aucun ajustement de dose n’est nécessaire chez les patients de plus de 65 ans. Patients prenant d’autres médicaments utilisés dans le traitement de l’HTAP : La prudence est recommandée en cas d’administrations concomitantes. • Contreindications : Hypersensibilité au principe actif ou à l’un des excipients. Insuffisance hépatique légère à sévère (classification de Child-Pugh A-C). Augmentation des transaminases avant la mise en route du traitement [aspartate aminotranférase (ASAT) et/ou alanine aminotransférase (ASAT) > 3 x LSN]. Augmentation de la bilirubine conjuguée > 2 x LSN avant la mise en route du traitement. Traitement concomitant par la ciclosporine A. Allaitement : • Mises en garde spéciales et précautions particulières d’emploi : Efficacité de Thelin en monothérapie non établie chez des patients atteints d’HTAP en classe fonctionnelle IV (classification NYHA/OMS). En cas de détérioration de l’état clinique, envisager un relais par un traitement recommandé au stade sévère de la maladie (ex : époprostenol). Fonction hépatique : Des altérations de la fonction hépatique peuvent être associées à l’existence d’une HTAP. La classe pharmacologique des antagonistes des récepteurs de l’endothéline est associée à la survenue d’altérations de la fonction hépatique. L’augmentation des transaminases ALAT et/ou ASAT, associée à la mise en route d’un traitement par Thelin peut apparaître à la phase précoce ou plus tardive après initiation du traitement par Thelin, puis sa progression est lente et généralement décrite comme asymptomatique. Anomalies généralement réversibles lorsque modalités de surveillance et d’interruption de traitement sont respectées. Possibilité de régression spontanée lors de la poursuite du traitement. Le mécanisme de la toxicité hépatique n’est pas entièrement documenté. Une attention particulière doit être portée lors de l’initiation du traitement par sitaxentan chez les patients ayant dû interrompre un traitement antérieur par d’autres antagonistes de récepteurs de l’endothéline en raison d’anomalies des enzymes hépatiques. Les transaminases hépatiques ALAT et/ou ASAT sériques doivent être mesurées avant l’initiation du traitement par Thelin puis régulièrement tous les mois. Initiation de Thelin contre-indiquée chez des patients présentant une élévation des transaminases supérieure à 3 fois la limite supérieure de la valeur normale (LSN) avant la mise en route du traitement ou une élévation de la bilirubine conjuguée supérieure à 2 fois la LSN. Recommandations en cas d’élévation des taux sériques d’ALAT et/ou d’ASAT après initiation du traitement : Les modalités de surveillance et de modifications éventuelles du traitement sont fonction du niveau d’augmentation des transaminases hépatiques : > 3 et ≤ 5 × LSN : Confirmez par un nouveau bilan hépatique. En cas d’augmentation confirmée, la décision d’arrêter ou de poursuivre le traitement par Thelin doit être envisagée en fonction du cas clinique. Poursuivre la surveillance par une mesure des taux sériques au moins une fois toutes les 2 semaines. Si retour des taux sériques à leur valeur de base, il peut être envisagé de reprendre le traitement selon les modalités du schéma de traitement initial. > 5 et ≤ 8 × LSN : Confirmation par un nouveau bilan hépatique. En cas d’augmentation confirmée, arrêt du traitement et surveillance des taux de transaminases au moins toutes les 2 semaines jusqu’à normalisation. Si retour des taux à leur valeur de base avant initiation du traitement alors réintroduction du traitement envisageable selon les modalités décrites ci-dessous. > 8× LSN : Interruption du traitement, pas de réintroduction de Thelin envisageable. En cas d’élévation symptomatique des taux (nausée, vomissements, anorexie, fièvre, douleurs abdominales, ictère ou léthargie ou fatigue inhabituelle) ou association à une élévation de la bilirubine totale > 2 x LSN, le traitement devra être interrompu et l’administration de Thelin ne doit pas être reprise. Réintroduction de Thelin : Envisager une réintroduction uniquement si les avantages potentiels du traitement dépassent les risques encourus et lorsque les valeurs des taux sont revenues à leur valeur de base. Avis d’un hépatologue recommandé. Se conformer aux recommandations détaillées à la rubrique Posologie et mode d’administration lors de la réintroduction. Contrôle des taux sériques dans les 3 jours suivants la réintroduction, puis 2 semaines plus tard et ensuite adaptation du rythme selon les recommandations mentionnées ci-dessus. Insuffisance hépatique préexistante : Contre-indication chez les patients présentant une élévation des transaminases hépatiques avant le début du traitement (> 3 x LSN) ou une élévation de la bilirubine conjuguée (> 2 × LSN) avant l’initiation du traitement. Hémorragie : Risque accru d’hémorragie chez les sujets traités (principalement épistaxis et hémorragie gingivale). Antagonistes de la vitamine K : Risque d’augmentation des concentrations plasmatiques des AVK (tels que warfarine, acénocoumarol et fenprocoumon). Médicaments inhibiteurs des transporteurs des anions organiques (OATP) : Si l’administration concomitante avec des OATP puissants (statines, inhibiteurs de la protéase, antituberculeux) ne peut être évitée, surveillance étroite afin de parer à la survenue d’effets indésirables dont le risque est majoré du fait de l’augmentation attendue des concentrations plasmatiques en sitaxentan. Agents contraceptifs oraux : Thelin augmente l’exposition systémique aux oestrogènes par conséquent risque thromboembolique augmenté notamment en cas de consommation tabagique. Envisager le traitement par des AVK conventionnellement utilisé dans le traitement de l’HTAP. Grossesse : Risque potentiel de tératogénicité. Traitement non initié chez les femmes en âge de procréer sans méthode de contraception fiable. Effectuer un test de grossesse si nécessaire. Maladie veino-occlusive pulmonaire : Cas d’oedème pulmonaire mettant en jeu le pronostic vital du patient rapportés avec des vasodilatateurs (principalement la prostacycline) utilisés chez des patients atteints d’HTAP associée à une maladie veino-occlusive pulmonaire. La survenue de signes cliniques évocateurs d’un oedème pulmonaire aigu après administration de Thelin doit faire évoquer une maladie veino-occlusive pulmonaire sous-jacente. Concentration en hémoglobine : Cas rapportés de diminution, dose-dépendante, du taux d’hémoglobine associés à l’administration de Thelin, la plupart des cas ont été observés au cours des premières semaines de traitement et les valeurs des taux d’hémoglobine se sont stabilisés après 4 semaines de traitement. Contrôles recommandés de la concentration : avant l’initiation du traitement, après 1 et après 3 mois, puis tous les 3 mois. En cas de diminution significative des taux, conduire des investigations adaptées afin de déterminer la cause et la conduite thérapeutique à envisager. Excipients : Présence de lactose, ne pas administrer aux patients atteints de problèmes héréditaires rares d’intolérance au galactose, de carence en lactase de Lapp ou de malabsorption de glucose-galactose. • Interactions avec d’autres médicaments et autres formes d’interactions : Effet inhibiteur de Thelin sur le CYP2C9, et, dans une moindre mesure, sur les CYP2C19, CYP3A4/5 et CYP2C8. En cas d’association avec le sitaxentan sodique, risque d’augmentation des concentrations plasmatiques des médicaments métabolisés par le CYP2C9. Le risque d’interactions cliniquement significatives est peu probable avec les médicaments métabolisés par le CYP2C19 ou le CYP3A4/5. Il est présumé que le sitaxentan sodique soit un substrat des protéines de transport d’OATP. Effets d’autres médicaments sur Thelin : Les inhibiteurs des transporteurs des anions organiques (OATP) : Augmentation de la Cmin d’un facteur 6 et de l’ASC de 67% du sitaxentan lors d’une association avec la ciclosporine A. Association contre-indiquée avec la ciclosporine A. Préconiser une surveillance étroite chez les patients Cibler L’HTAP Tourné vers l’avenir prenant d’autres inhibiteurs des OATP (tels que atorvastatine, ritonavir, rifamycine). Fluconazole (inhibiteur du CYP2C19, du CYP2C9 et du CYP3A4/5) : Pas d’effet sur la clairance du sodium sitaxentan lors de l’administration concomitante de Thelin et de fluconazole. Kétoconazole (substrat et inhibiteur du CYP3A4/5) : Pas de modification cliniquement significative de la clairance du sodium sitaxentan ou du kétoconazole lors de l’administration concomitante avec Thelin. Nelfinavir (substrat du CYP3A4/5, du CYP2C19) : Pas de modification cliniquement significative de la clairance du sodium sitaxentan ou du Nelfinavir lors de l’administration concomitante avec Thelin. Effets de Thelin sur d’autres médicaments : Warfarine (AVK, substrat du CYP2C9) : lors de l’administration simultanée de Thelin, augmentation de 2.4 fois l’exposition systémique à la S-warfarine. En cas d’administration de sitaxentan chez des sujets traités par warfarine, l’effet anticoagulant thérapeutique (mesuré selon l’International Normalised Ratio (INR)) est atteint avec des doses plus faibles de l’anticoagulant. De même, une augmentation de l’effet anticoagulant des analogues de la warfarine, tels que acénocoumarol, fenprocoumon et fluindione, est attendu. Chez les patients en cours de traitement par Thelin, il est recommandé d’initier le traitement par AVK à la dose la plus faible possible. Chez les patients en cours de traitement par les AVK, il est recommandé de diminuer le traitement AVK lors de l’initiation de Thelin. Dans tous les cas, surveillance régulière de l’indice INR. Ajustement de la dose requise d’AVK par paliers très progressifs. Une surveillance inadaptée de l’INR peut exposer le patient à un risque d’augmentation incontrôlée de l’exposition à l’AVK à l’origine d’un risque hémorragique avec pronostic vital engagé. Contraceptifs oraux (substrat du CYP3A4/5) : lors de l’association avec Ortho-Novum 1/35 (1 mg de noréthindrone/0,035 mg d’éthinyloestradiol), des augmentations de l’exposition systémique à l’éthinyloestradiol et à la noréthindrone de respectivement 59 % et 47 % ont été retrouvées.Cependant, pas d’observation de modification de l’activité anti-ovulatoire du contraceptif. Sildénafil (substrat du CYP3A4) : lors de l’administration concomitante d’une dose unique de 100 mg de sildénafil et de Thelin, une augmentation de la Cmax et de l’ASC∞ de sildénafil de respectivement 18 % et 28 % ont été retrouvées. Possibilité d’un retentissement plus sévère si l’effet vasodilatateur résultant atteint un seuil délétère pour le patient. Pas de nécessité d’ajuster la dose de sildénafil lors de l’association. Nifédipine (substrat du CYP3A4/5) : Pas de variation cliniquement significative de la clairance de la nifépidine en cas d’administration de faibles doses de Nifédipine avec Thelin. Risque d’augmentation de l’exposition systémique en cas d’administration de doses plus élevées de Nifédipine non exclu. Oméprazole (substrat du CYP2C19) : lors de l’association avec Thelin, augmentation de 30% de la surface sous la courbe des concentrations plasmatiques (AUC0-24) non cliniquement significative. Digoxine (substrat de la p-glycoprotéine) : Pas de modification de la pharmacocinétique de la digoxine. Risque d’interaction avec substrat du CYP 2C8 non exclu. • Grossesse et allaitement : Grossesse : Thelin ne doit pas être utilisé en cours de grossesse sauf en cas de nécessité absolue, si aucune alternative thérapeutique n’est disponible. Allaitement : Les femmes traitées par Thelin ne doivent pas allaiter. Femmes en âge de procréer : Le traitement ne devra pas être initié chez les femmes en âge de procréer sans méthode de contraception fiable. Si nécessaire, un test de grossesse devra être effectué. • Effets sur l’aptitude à conduire des véhicules et à utiliser des machines : Un effet indésirable connu est la sensation vertigineuse qui risque d’influer sur l’aptitude à conduire ou à utiliser des machines.• Effets indésirables : Description générale : La sécurité de Thelin a été évaluée lors d’études cliniques chez plus de 1200 patients présentant une hypertension artérielle pulmonaire ainsi que par les données de pharmacovigilance rapportées depuis la mise sur le marché. A la dose utilisée durant les essais comparatifs contre placebo menés chez des patients présentant une hypertension artérielle pulmonaire, les effets indésirables les plus fréquents rapportés comme au moins possiblement liés au traitement par Thelin étaient : céphalées chez 15 % des patients, oedème périphérique (9% des patients) et congestion nasale (9 % des patients). Dans chaque groupe de même fréquence de survenue, les effets indésirables sont présentés par ordre de sévérité croissante. Les fréquences de survenue sont désignées comme : très fréquent (≥1/10), fréquent (>1/100, <1/10), peu fréquent (>1/1 000, ≤ 1/100), rare (>1/10 000, ≤ 1/1 000) et très rare ( ≤ 1/10 000). Effets indésirables : Affections hématologiques et du système lymphatique : Peu fréquent : Diminution de l’hémoglobine (résultant rarement en une anémie), diminution de l’hématocrite. Affections du système nerveux : Très fréquent : céphalée. Fréquent : insomnie, étourdissements. Affections vasculaires : Fréquent : saignements des gencives, rougeurs de la face. Affections respiratoires, thoraciques et médiastinales : Fréquent : congestion nasale, épistaxis. Affections gastro-intestinales : Fréquent : nausée, constipation, douleur épigastrique, vomissements, dyspepsie et diarrhée. Affections hépatobiliaires : Fréquent : Augmentation des transaminases hépatiques (ALAT et ASAT), augmentation de la bilirubine (associée à l’augmentation des ALAT et des ASAT hépatiques). Rare : Hépatite symptomatique. Affections de la peau et du tissu sous-cutané : Rare : rash cutané (de types variés). Affections musculo-squelettiques et systémiques : Fréquent : crampes musculaires. Troubles généraux et anomalies au site d’administration : Fréquent : fatigue, oedème (le plus fréquemment périphérique). Investigations : Fréquent : augmentation de l’INR (lors de l’administration concomitante d’AVK), allongement du temps de prothrombine (lors de l’administration concomitante d’AVK). Elévation des transaminases hépatiques : L’élévation des taux sériques d’ALAT et/ou d’ASAT est liée au sodium sitaxentan. Lors d’études de phases 2 et 3 menées avec le sitaxentan administré par voie orale chez des patients présentant une hypertension artérielle pulmonaire, une élévation des taux d’ALAT et/ou d’ASAT > 3 LSN a été observée chez 5 % des patients sous placebo (N=155) et 7 % des patients traités par 100 mg de Thelin (N=887). L’élévation du taux d’ALAT > 5 LSN était de 4 % (36/887) dans le groupe traité par sitaxentan 100 mg une fois/jour et de 0,6 % dans le groupe sous placebo (1/155). La population des sujets traités par sitaxentan incluait également des patients (N=53) qui avaient arrêté un traitement antérieur par un autre antagoniste des récepteurs des endothélines en raison d’anomalies de la fonction hépatique. Ces sujets présentent un risque accru de développer une augmentation des ALAT et/ou des ASAT >3 x LSN (19 %, N= 10/53). La plus grande prudence est requise chez ces patients si un traitement par sitaxentan est initié. Diminution de l’hémoglobine : La diminution moyenne globale de la concentration en hémoglobine chez les patients traités par Thelin était de 0,5 g/dl (variation à la fin du traitement par rapport à la valeur de base). Lors d’études comparatives contre placebo, des diminutions significatives de l’hémoglobine (diminution de > 15 % par rapport à la valeur mesurée en début d’étude et un taux concentration inférieure à la valeur limite inférieure de la normale) ont été observées chez 7 % des patients traités par Thelin (N = 149) et 3 % des patients sous placebo (N = 155). Une diminution de la concentration en hémoglobine d’au moins 1 g/dl a été observée chez 60 % des patients traités au Thelin contre 32 % de patients sous placebo. Expérience depuis la mise sur le marché : Les évènements indésirables rapportés depuis la mise sur le marché sont similaires à ceux rapportés au cours des études cliniques. Des cas d’élévation simultanée des transaminases (ALAT et/ou ASAT) > 8 × LSN et de bilirubine conjuguée >2 × LSN ont été rapportés avec l’administration de sodium sitaxentan. La surveillance régulière des transaminases et de la bilirubine est requise compte tenu du risque d’évolution vers une insuffisance hépatique grave pouvant engager le pronostic vital. PROPRIETES PHARMACOLOGIQUES : • Propriétés pharmacodynamiques : Classe pharmaco-thérapeutique : autres antihypertenseurs : Code ATC : C02KX03 : DONNEES PHARMACEUTIQUES : Durée de conservation : 24 mois. Précautions particulières de conservation : A conserver à une température ne dépassant pas 25 °C. NUMERO AU REGISTRE COMMUNAUTAIRE DES MEDICAMENTS : EU/1/06/353/001-002-003-004-005. PRESENTATION ET NUMERO D’IDENTIFICATION ADMINISTRATIVE : THELIN, 100 mg, comprimés enrobés, boîte de 28 comprimés : n° 34009 379 171 7 9. CONDITIONS DE PRESCRIPTION ET DE DELIVRANCE : Liste I. Médicament soumis à prescription hospitalière réservée aux spécialistes et/ou aux services spécialisés en pneumologie, en cardiologie ou en médecine interne. Inscrit sur la liste de rétrocession avec prise en charge à 100%. Agréé aux collectivités. EXPLOITANT : PFIZER SAS – 23-25 avenue du Docteur Lannelongue – 75014 PARIS – Tel (information médicale) : 01 58 07 34 40. ® : marque déposée. DATE DE REVISION D’AMM : 05/07/2010. Version n°001 – 07/10 TLY040 - 06/10 - Tous droits réservés Pfizer - © Pfizer SAS 2010 au capital de 38 200 euros - RCS Paris 433 623 550 Locataire gérant de Pfizer Holding France. Antagoniste puissant et très sélectif de l’ETA MISE AU POINT Le pneumologue face au syndrome d’apnées centrales au cours du sommeil Quand l’effort respiratoire augmente, la pression artérielle et la pression pleurale baissent à l’inspiration et le TTP augmente alors que la différence inspiration-expiration s’accroît. Au cours des apnéeshypopnées centrales, les variations d’effort respiratoire sont réduites, voire nulles. Il en est de même pour les variations de pression pleurale et de pression artérielle, et la variation inspiration-expiration du TTP est également réduite (5). On peut aussi apprécier indirectement ce même phénomène sur le “pléthysmogramme” : l’enveloppe de l’onde de pouls (courbe, dont l’acquisition est réalisée par le seul oxymètre, disponible sur la plupart des systèmes d’enregistrement polygraphiques) ne varie pas au cours des événements d’origine centrale, à l’inverse des apnées-hypopnées obstructives. À partir de ces données polysomnographiques avec appréciation des efforts respiratoires, le SACS se définit par plus de 10 apnées-hypopnées centrales par heure, associées ou non à une respiration de Cheyne-Stokes. Si des événements obstructifs sont également présents, on parle de SACS quand il y a plus de 50 % d’événements centraux, et de syndrome d’apnées mixtes du sommeil lorsque les événements centraux sont en nombre significatif mais non majoritaires (< 50 %). Comment conduire le bilan étiologique d’un syndrome d’apnées centrales ? Clinique Les symptômes du SACS ne sont pas spécifiques. Comme chez les patients atteints de SAS obstructif, on peut retrouver une somnolence diurne. Cette somnolence est souvent absente chez les patients en insuffisance cardiaque qui se plaignent plutôt de fatigue et de dyspnée. Au cours du SACS, les éveils nocturnes avec sensation d’étouffement et les plaintes d’insomnie sont plus fréquents. Il faut s’assurer aussi de l’absence de prise de médicaments à retentissement neurologique central, tels les opiacés. L’interrogatoire doit rechercher des signes d’appel cardio-vasculaires et neurologiques. Les gaz du sang constituent l’étape importante suivante, car la valeur de PaCO2 orientera fortement vers une étiologie, permettant de distinguer les SACS non hypercapniques des SACS hypercap- 194 | La Lettre du Pneumologue • Vol. XIII - n° 5 - septembre-octobre 2010 niques, 2 groupes aux implications thérapeutiques différentes. Sur le plan cardio-vasculaire, une échographie cardiaque et un dosage du pro-brain natriuretic factor (pro-BNP) sont recommandés. En effet, des patients peu symptomatiques peuvent présenter une insuffisance cardiaque diastolique à l’origine d’un SACS. Lorsque ces examens sont normaux, on recherche une anomalie neurologique en procédant à un examen neurologique complet et, selon avis spécialisé, en utilisant une imagerie par résonance magnétique (IRM) cérébrale incluant le tronc cérébral afin de rechercher des anomalies neurologiques centrales et/ou des centres respiratoires. En l’absence d’étiologie à l’issue de ce bilan, on est en présence d’un SACS idiopathique. Étiologies des syndromes d’apnées centrales Syndromes d’apnées centrales du sommeil non hypercapniques ◆◆ Syndrome d’apnées centrales du sommeil associé à l’insuffisance cardiaque Au cours de l’insuffisance cardiaque, les anomalies respiratoires lors du sommeil sont fréquentes. On retrouve, dans de grandes séries, un tiers de patients indemnes de pathologies respiratoires nocturnes, un tiers de patients souffrant d’un SACS et un tiers de patients ayant un SAS obstructif. Une respiration de Cheyne-Stokes peut être observée. La période de cette ventilation instable est plus longue (60 à 90 secondes) que pour les autres formes de SACS (idiopathique). Chez ces patients, l’hyperventilation est chronique du fait de la stimulation des mécanorécepteurs intrapulmonaires par le subœdème. Ainsi, hypocapniques à l’éveil, ces patients ont également une réponse ventilatoire au CO2 exagérée et réagissent fortement à toute élévation de PaCO2 par une hyperpnée qui induira une nouvelle apnée centrale perpétuant le cycle. Un bas débit cardiaque amplifie le processus, puisque la PaCO2 ajustée parvient moins rapidement aux chémorécepteurs d’où une phase d’hyperpnée prolongée et donc de surcorrection (6). Le SACS est d’autant plus fréquent que l’insuffisance cardiaque systolique est sévère mais il peut cependant survenir en cas d’insuffisance cardiaque diastolique. Le plus souvent, il s’agit d’insuffisances cardiaques évoluées. Le diagnostic devra être porté à distance d’un épisode aigu (coronarien, par exemple) ou de MISE AU POINT décompensation. Le tableau clinique est atypique. Souvent, ces patients ne ronflent pas, ils se plaignent d’un sommeil de mauvaise qualité, peu réparateur, avec de fréquents éveils, et d’une fatigue diurne plutôt que d’une hypersomnie. La gazométrie artérielle diurne est en faveur d’une hyperventilation avec hypocapnie de repos et alcalose respiratoire compensée. L’oxymétrie nocturne peut orienter en montrant des désaturations répétées au cours du sommeil, mais c’est la polygraphie ventilatoire ou la polysomnographie avec appréciation des efforts respiratoires qui permettra de poser le diagnostic selon les critères décrits plus haut. Les insuffisants cardiaques les plus à risque de SACS sont les hommes, âgés de plus de 65 ans, avec hypocapnie (PaCO2 < 35 mmHg) et fibrillation auriculaire (7). ◆ Syndrome d’apnées du sommeil et insuffi sance rénale sévère On rencontre des SAS chez 50 à 70 % des insuffisants rénaux terminaux ; il peut s’agir à la fois de SAHOS et de SACS. Dans ce cadre, les troubles respiratoires sont induits par l’augmentation de la réponse ventilatoire au CO2 et favorisés par les troubles métaboliques (acidose métabolique, urémie, etc.) [8]. ◆ Instabilité du sommeil liée à l’altitude Lors d’un séjour prolongé à très haute altitude, l’hypoxémie induit une hyperventilation chronique et une hypocapnie. On se trouve alors, au cours du sommeil, dans une situation d’instabilité de la ventilation qui peut conduire à des apnées centrales et à une ventilation périodique. ◆ Syndrome d’apnées centrales idiopathique Entité rarement retrouvée, le SACS idiopathique est un diagnostic d’exclusion qui n’est retenu qu’après avoir éliminé le diagnostic d’insuffisance cardiaque ou de maladie neurologique. La somnolence est un symptôme habituel de ces patients, alors qu’ils sont moins souvent en surcharge pondérale et ronfleurs que les patients atteints de SAHOS. Le mécanisme est mal compris, mais la majorité des patients sont hypocapniques avec une réponse au CO 2 augmentée. Le cycle ventilatoire est plus court que dans la respiration de Cheyne-Stokes cardiaque (20 à 40 secondes), les désaturations sont moins sévères, le micro-éveil survient à la fin de l’apnée centrale et non pas au milieu de l’hyperventilation comme chez l’insuffisant cardiaque. Mais, comme chez ce dernier, les apnées apparaissent plutôt au cours des stades I et II du sommeil lent. ◆ Syndrome d’apnées du sommeil complexe Des apnées centrales peuvent apparaître ponctuellement au cours du SAHOS. Les événements centraux sont alors minoritaires et découlent des phénomènes obstructifs, du fait de l’instabilité ventilatoire induite par le SAHOS (9). Sur le tracé polygraphique peuvent ainsi être observées une apnée obstructive suivie d’une reprise ventilatoire (hyperventilation), puis d’une apnée centrale. Le syndrome d’apnées complexe est une entité de description récente (10). Il concerne des patients se présentant lors de la poly(somno)graphie diagnostique comme atteints de SAS obstructifs prédominants et chez qui l’on voit apparaître des apnées centrales sous traitement par PPC (11). Le même phénomène a été décrit ponctuellement lors du traitement d’un SAHOS par orthèse d’avancée mandibulaire (12) ou après une chirurgie mandibulaire (13). La prévalence, initialement estimée, à partir de données rétrospectives, à 15 %, est probablement plus proche de 5 %. Un SAS complexe devra donc être suspecté chez un patient intolérant à sa PPC, surtout si cette dernière est réglée en mode autopiloté et que les pressions maximales sont élevées. Le diagnostic nécessite une poly(somno)graphie de contrôle sous PPC. Annoncez vous ! me Une deuxiè e ratuit insertion g pour és les abonn Contactez Valérie Glatin au 01 46 67 62 77 ou faites parvenir votre annonce par mail à [email protected] Syndromes d’apnées centrales du sommeil hypercapniques ◆ Hypoventilation centrale congénitale idiopathique (14) Il s’agit du syndrome d’Ondine, maladie rare (1 cas pour 200 000 naissances), caractérisée par une absence congénitale de contrôle central de la respiration et par une atteinte diffuse du système nerveux autonome. C’est une maladie génétique, à transmission autosomale dominante, liée à une mutation du gène PHOX2B. Son pronostic est grave, mais, grâce à des prises en charge multidisciplinaires coordonnées, de plus en plus de malades atteignent l’âge adulte. La maladie entraîne une hypoventilation alvéolaire durant le sommeil, avec une hypoxémie et une hypercapnie importantes, entraînant une polyglobulie, une hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) et un cœur pulmonaire. Pendant le sommeil, le rythme respiratoire est presque normal, mais le volume courant diminue. ◆ Atteinte du tronc cérébral Les lésions du tronc cérébral peuvent toucher les centres respiratoires, et, par là, la commande ventilatoire. C’est le cas des accidents vasculaires de cette région, des La Lettre du Pneumologue • Vol. XIII - n° 5 - septembre-octobre 2010 | 195 MISE AU POINT Références bibliographiques 1. Eckert DJ, Jordan AS, Merchia P, Malhota A. Central sleep apnea: pathophysiology and treatment. Chest 2007;131(2):595-607. 2. Boutin I, Saint-Raymond C, Borel JC, Tamisier R, Lévy P, Pépin JL. Conduite à tenir devant un syndrome d’apnées du sommeil central. Rev Pneumol Clin 2009:65:261-72. 3. Sleep-related breathing disorders in adults: recommendations for syndrome definition and measurement techniques in clinical research. The Report of an American Academy of Sleep Medicine Task Force. Sleep 1999;22(5):667-89. 4. Hosselet JJ, Norman RG, Ay a p p a I , R a p o p o r t D M . Detection of flow limitation with a nasal cannula/pressure transducer system. Am J Respir Crit Care Med 1998;157:1461-7. 5. Argod J, Pépin JL, Lévy P. Differentiating obstructive and central sleep respiratory events through pulse transit time. Am J Respir Crit Care Med 1998;158(6):1778-83. 6. Pépin JL, Chouri-Pontarollo N, Tamisier R, Lévy P. CheyneStokes respiration with central sleep apnoea in chronic heart failure: proposals for a diagnostic and therapeutic strategy. Sleep Med Rev 2006;10:33-47. 7. Sin DD, Fitzgerald F, Parker JD, Newton G , Floras JS, Bradley TD. Risk factors for central and obstructive sleep apnea in 450 men and women with congestive heart failure. Am J Respir Crit Care Med 1999;160(4):1101-6. 8. Beecroft JM, Pierratos A, Hanly PJ. Clinical presentation of obstructive sleep apnea in patients with end-stage renal disease. J Clin Sleep Med 2009;5(2):115-21. 9. Salloum A, Rowley JA, Mateika JH, Chowdhuri S, Omran Q, Badr MS. Increased propensity for central apnea in patients with obstructive sleep apnea: effect of nasal continuous positive airway pressure. Am J Respir Crit Care Med 2010;181(2):189-93. 10. Morgenthaler TI, Kagramanov V, Hanak V, Decker PA. Complex sleep apnea syndrome: is it a unique clinical syndrome? Sleep 2006;29(9):1203-9. 11. Yumino D, Bradley TD. Central sleep apnea and Cheyne-Stokes respiration. Proc Am Thorac Soc 2008;5:226-36. Le pneumologue face au syndrome d’apnées centrales au cours du sommeil tumeurs, des pathologies infectieuses (encéphalites), des syringobulbies et syringomyélies, de certaines pathologies dégénératives et des lésions post-traumatiques. Une malformation d’Arnold-Chiari peut aussi être suspectée : de cette pathologie de la charnière occipito-cervicale avec descente au-dessous du trou occipital et des amygdales cérébelleuses peut résulter un tableau d’encéphalopathie hypercapnique sans signe neurologique évocateur (15). ◆◆ Traitements morphiniques À cause des effets dépresseurs de la commande respiratoire centrale des opiacés, leur utilisation prolongée ou en aigu peut engendrer des apnées centrales. C’est fréquent chez les patients qui utilisent des opiacés et la sévérité est dose-dépendante, quasi constante pour des posologies de 200 mg équivalent morphine. L’aspect polysomnographique est caractéristique, différent de celui de la respiration de Cheyne-Stokes, à type de dysrythmie respiratoire ou de respiration ataxique (16). ◆◆ Maladies neuromusculaires Dans ce contexte, la commande ventilatoire peut être abaissée ou conservée, mais la qualité de l’effecteur ne permet pas d’assurer une ventilation efficace et des apnées centrales peuvent survenir. Ce peut être le cas au cours de myasthénies, de scléroses latérales amyotrophiques, de poliomyélites ou de myopathies. ◆◆ Le syndrome obésité-hypoventilation Le syndrome obésité-hypoventilation (SOH) est défini par une obésité (IMC > 30 kg/m2) et par une hypercapnie artérielle diurne non expliquée par ailleurs (PaCO2 > 45 mmHg). Le SOH entraîne de larges plages d’hypoxie et d’hypercapnie nocturnes, très souvent associées aux apnées obstructives d’un SAHOS. Les apnées centrales sont le plus souvent marginales dans ce cadre (17, 18). Comment traiter les syndromes d’apnées centrales ? Traitement du facteur étiologique ou des facteurs aggravants La première étape dans la prise en charge du SACS consiste, quand cela est possible, à traiter la cause ou les facteurs aggravants. Par exemple, la suppression ou la réduction des doses d’opiacés peut diminuer, voire supprimer les apnées centrales. De même, dans l’insuffisance cardiaque, l’optimisation du traitement médical ou la resynchronisation cardiaque 196 | La Lettre du Pneumologue • Vol. XIII - n° 5 - septembre-octobre 2010 peut réduire significativement les apnées centrales et la respiration de Cheyne-Stokes. La prise en charge hygiéno-diététique est essentielle pour un contrôle durable de l’hypoventilation de l’obèse. Effets de la position corporelle ? Une étude récente (19) a montré que la position latérale au cours du sommeil réduisait très significativement l’IAH centrales chez les patients insuffisants cardiaques. Outre son effet sur les voies aériennes supérieures, le décubitus latéral améliorerait la réserve pulmonaire en oxygène en décubitus latéral. La réponse ventilatoire au CO2 pourrait également être modulée par la position corporelle. Stimulants ventilatoires et médicaments modifiant le seuil apnéique L’acétazolamide engendre une acidose métabolique et modifie la réponse ventilatoire au CO2, diminuant ainsi le seuil apnéique et réduisant les apnées centrales. Son action semble aussi efficace chez le patient insuffisant cardiaque. La théophylline augmente la commande respiratoire et la contractilité cardiaque, et peut améliorer la respiration de Cheyne-Stokes, mais comme son maniement est difficile et ses effets indésirables nombreux, notamment les arythmies cardiaques, ce traitement n’est pas recommandé, en particulier chez l’insuffisant cardiaque. Traitement du syndrome d’apnées centrales du sommeil hypercapniques Dans les situations de SACS hypercapniques, le traitement de choix est la ventilation non invasive à deux niveaux de pression, qui va pallier la réduction de la commande ventilatoire et/ou l’atteinte des muscles respiratoires. Traitement du syndrome d’apnées centrales du sommeil hypo- ou normocapniques hors insuffisance cardiaque Le traitement des patients présentant un SACS idiopathique a été peu étudié. Des expériences limitées d’inhalation de faible concentration de CO2 ou d’augmentation de l’espace mort ont pu permettre une MISE AU POINT stabilisation de la ventilation, mais la question de leur faisabilité et de leur innocuité à long terme se pose. L’utilisation d’une ventilation de type autoasservie semble engendrer un bon contrôle de ces événements (20). Traitement du syndrome d’apnées centrales du sommeil associé à l’insuffisance cardiaque La première étape du traitement consiste à obtenir une prise en charge optimale de l’insuffisance cardiaque par les moyens médicamenteux et autres (la stimulation biventriculaire avec resynchronisation, en améliorant la fonction cardiaque, peut guérir certains patients de leur SACS). Si, malgré cela, en dehors d’une déstabilisation cardiaque aiguë, le SACS persiste, il convient de proposer une prise en charge par assistance ventilatoire, et ce même si le niveau de preuve de l’efficacité de ce traitement sur la mortalité et sur l’évolution de l’insuffisance cardiaque est encore faible. En revanche, le traitement par PPC n’est pas recommandé et pourrait même être délétère chez certains patients (l’étude CANPAP a montré une surmortalité initiale sous PPC) [21, 22]. Si, toutefois, on fait un essai de PPC pour traiter un SACS dans un contexte d’insuffisance cardiaque (dans les populations étudiées, on a observé des patients répondeurs à la PPC – l’IAH se normalisait et un tel traitement était justifié – et des patients non répondeurs [20, 21]), il ne faut pas utiliser de PPC autopilotées qui sont contre-indiquées, mais appliquer une pression constante modérée et tenter de l’augmenter progressivement sur plusieurs semaines. Actuellement, l’assistance respiratoire la plus souvent proposée pour traiter le SACS, dans ce contexte, est l’aide inspiratoire variable, aussi dénommée “autoasservie” (23). Ce mode ventilatoire ajuste le niveau d’aide inspiratoire, cycle respiratoire après cycle respiratoire. Si des événements obstructifs sont associés, on ajoutera un niveau de pression expiratoire positive suffisant pour stabiliser les voies aériennes supérieures (situation de SAS mixtes). Ce mode ventilatoire est plus efficace et mieux toléré que la PPC pour corriger les événements respiratoires nocturnes (24). L’étude randomisée européenne SERVE-HF est en cours, pour évaluer l’effet d’une telle prise en charge sur la survie des insuffisants cardiaques porteurs d’un SACS. En dehors de l’insuffisance cardiaque, ce même mode ventilatoire dit “autoasservi” peut également être utilisé dans des situations physiopathologiques proches : SACS hypo- ou normo-capniques propre à certaines maladies neurologiques et, surtout, syndrome d’apnées du sommeil complexes (25). L’oxygénothérapie nocturne réduit les anomalies respiratoires centrales associées à l’insuffisance cardiaque (26). Elle améliore la qualité du sommeil des patients et leur qualité de vie. Bien que moins efficace que l’aide inspiratoire variable, elle peut être proposée aux sujets âgés atteints d’insuffisance cardiaque évoluée et souffrant d’un SACS, pour lesquels l’application d’une assistance ventilatoire est difficile. Conclusion Le SACS est rare comparativement au SAHOS, mais il accompagne souvent une insuffisance cardiaque évoluée, certaines maladies neurologiques ou une prise d’opiacés. Son diagnostic repose sur la poly(somno)graphie avec des outils capables de mesurer les efforts respiratoires. Le traitement par assistance respiratoire utilise la ventilation à deux niveaux de pression dans les cas de SACS hypercapniques, et l’aide inspiratoire variable en cas de SACS hypocapniques. ■ 12. Gindre L, Gagnadoux F, Meslier N, Fleury B, Gustin JM, Racineux JL. Apnées centrales induites sous traitement par orthèse d’avancée mandibulaire. Rev Mal Respir 2006;23(5):477-80. 13. 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