La lettre de l’hépato-gastroentérologue - n° 3 - vol. VII - mai-juin 2004 131
DO S S I E R T H É M A T I Q U E
publiés avec des résultats mitigés. Dans un premier temps, elles
ont permis d’obtenir environ 25 % de réponses complètes histo-
l ogiques. Trois études ont ap p o rté quelques éléments de réponses.
L’étude de Walsh ( 9 ) c o n c e rnait 113 p a tients atteints d’un adéno-
carcinome du tiers inférieur de l’œsophage,dont 58 avaient reçu
une ra d i o t h é rapie préopérat o i re de 40 Gy en q u i n z es é a n c e s , a s s o -
ciée à une ch i m i o t h é r apie concomitante par 5-fl u o ro - uracile et cis-
platine. Le taux de réponse complète histologique était de 25 % .
La survie globale était signifi c a t i vement améliorée, avec 32 % des
patients survivant à 3 ans. Mais l’une des faiblesses majeures de
cet essai était le taux de survie à 3 ans des patients opérés sans
traitement adjuvant, particulièrement faible, puisqu’il atteignait
seulement 6 %.
L’essai 8805 de la Fondation francophone de cancérologie diges-
t i ve (FFCD) et de la E u ropean Orga n i z ation for Research and Tre a t -
ment of Cancer ( E O R TC) a permis de randomiser 282 p at i e n t s
parmi lesquels 143 avaient reçu une radiothérapie préopératoire de
37 Gy en dix séances associée à une chimiothérapie concomitante
par du cisplatine délivré au premier et au vingt-deuxième jour du
traitement (2). L’irradiation se déroulait en deux séries de 5 jours
chacune, séparées par 15 jours d’interruption. Le taux de réponse
complète histologique était de 26 %. La ra d i o ch i m i o t h é r apie conco-
mitante a permis d’apporter un bénéfice significatif en survie sans
rechute à 3 ans de 28 % à 40 %, ainsi que l’amélioration significa-
tive du contrôle local, du taux de résection complète et de la sur-
vie spécifique. En revanche, la survie globale n’était pas modifiée,
et la mortalité postopératoire était même majorée à 12 % dans le
groupe “expérimental”, alors qu’elle était à 3 % dans le groupe de
référence traité par chirurgie exclusive.
E n fi n , la FFCD a publié un autre essai (9102) portant sur
259 patients qui avaient reçu une radiochimiothérapie concomi-
tante à base de 5 fl u o ro - u racile et de cisplatine en pre m i è re et
troisième semaines de traitement (10). L’irradiation avait permis
de déliv rer 46 Gy en 23 séances. L’option de l’irra d i a tion par
deux séries de 15 Gy séparées par une interruption de 15 jours
avait été supprimée de l’essai en raison de son efficacité infé-
rieure lors du rapport de l’analyse intermédiaire. Une évaluation
de la réponse était effectuée pour décider de la randomisation du
t raitement ultérieur (en cas de réponse tumorale partielle ou com-
plète) par chirurgie ou par un complément d’irradiation de 20 Gy
en 10 séances dans le lit tumoral. Ces patients étaient atteints de
tumeurs classées T3 ou T4, N0 ou N1. La survie globale n’était
pas significativement différente dans les deux groupes de traite-
ment, mais les décès postopératoires à trois mois étaient signifi-
cativement plus fréquents (9 %) que dans le groupe de radiochi-
m i o t h é rapie ex cl u s ive (1 %). En reva n ch e,dans ce dernier gro u p e
de pat i e n t s , le nombre des hospitalisations et le re c o u r s à une pro-
thèse œsophagienne après le traitement étaient plus fréquents.
RADIOTHÉRAPIE ET RADIOCHIMIOTHÉRAPIE
EXCLUSIVES
Pour les patients dont l’état général ne permet pas d’envisager
une ch i ru r gie ou qui présentent une tumeur inex t i r p abl e, des séri e s
h i s t o riq ues d’irra d i a tion ex cl u s ive ont conclu à des résultat s
m é d i o c r es de 0 à 10 % de surv ivants à 5 ans. Il faut noter les
ex c eptions que représentent les patients inopérables port e u rs d’un
cancer intra muqueux ou d’un cancer envahissant la sous-
muqueuse (classé Tis ou T 1 ) ; les taux de survie spécifique à 5 a n s
étaient respectivement de 81 % et 64 % (11).
Pour les patients inopérabl e s , comme le sugg é raient plusieurs
études de phase I I , la ra d i o ch i m i o t h é rapie concomitante est supé-
rieure à la radiothérapie exclusive. Plusieurs essais de phase III,
dont le plus célèbre est l’essai 8501 du Radiation Therapy Onco-
l ogy Gro u p ( RTO G ) , l’ont ensuite démontré. Cet essai ( 3 , 4 )
regroupait 121 patients séparés en deux groupes. Le groupe de
référence recevait une irradiation de 64 Gy en 32 séances. Dans
le groupe “ ex p é r i m e n t a l ” , une ra d i o t h é r apie de 50 Gy en
25 séances était délivrée en association avec une chimiothérapie
concomitante par 5-fl u o ro - u racile et cisplatine en pre m i è re et
cinquième semaine. Le 5-fl u o ro - u racile était administré à la dose
de 1 000 mg/m
2
par jour du premier au quatrième jour et le cis-
platine à la dose de 75 mg/m
2
au premier ou au deuxième jour
du cy cl e. Cette association de ra d i o ch i m i o t h é rapi e était suiv i e
par la même chimiothérapie pour deux autres cycles, en huitième
et onzième semaine. Dans ce dernier gro u p e , il existait un
meilleur taux de contrôle à 2 ans de 53 % contre 30 % , et un
meilleur taux de survie globale à 2 ans de 42 % contre 10 %. À
plus long term e, la survie globale était signifi c at ivement amé-
liorée dans le groupe de radiochimiothérapie concomitante, avec
27 % de survivants à 5 ans contre 0 %, et une médiane de survie
de 14 mois contre 9 mois.
Un essai intergroupe nord-américain a tenté un essai de phase III
qui comparait le meilleur bras de radiochimiothérapie de l’essai
RTOG 8501 à un nouveau bras expérimental de radiochimiothé-
rapie où la dose d’irradiation s’élevait jusqu’à 64,8 Gy. L’ana-
lyse intermédiaire n’a montré aucune différence dans les résul-
t ats en termes de survie et de contrôle local. Cep e n d a n t ,
onze décès thérapeutiques ont été rapportés dans le bras expéri-
mental, et l’essai a été interrompu (12).
Plusieurs essais de phase II ont testé l’association concomitante
de radiothérapie et de paclitaxel (13). Actuellement, le meilleur
i n d ex thérapeutique semble avoir été obtenu par l’associat i o n
d’une ra d i o t h é rap ie classique à une ch i m i o t h é r apie heb d o m a-
daire à base de paclitaxel (45 à 60 mg/m
2
par semaine) et de cis-
platine.
TECHNIQUE D’IRRADIATION
Sur le plan technique, les volumes et les doses de radiothérapie
indispensables pour le meilleur contrôle local et la meilleure sur-
vie ne sont pas défi n i t ive ment établis. En ce qui concerne le
volume tumoral, l’irradiation semble s’orienter vers une défini-
tion du lit tumoral par les techniques de tomodensitométrie, au
mieux complétée par une image rie fusionnée de tomographie par
émission de positrons (TEP). En raison essentiellement des infil-
trations tumorales sous-muqueuses, des marges de sécurité sont