Le Courrier de la Transplantation - Volume VII - n
o 1 - janvier-février-mars 2007
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revue
de pr e
Les bronchopathies
chroniques
obstructives
E
lles représentent presque 20 % des
indications de transplantation pulmo-
naire en France et concernent une popula-
tion ayant un fort passé de tabagisme.
Les auteurs ont comparé la fréquence
de survenue de cancers bronchopulmo-
naires chez les patients ayant eu soit une
transplantation monopulmonaire, soit une
transplantation bipulmonaire. Chaque groupe
comporte 131 patients, les transplantations
ayant été effectuées entre 1992 et 2005. L’âge
moyen des patients, l’exposition au taba-
gisme (49,5 paquets-année dans le groupe
monopulmonaire versus 47 paquets-année
dans le groupe bipulmonaire), les indications
des transplantations (75 % d’emphysème), et
le sexe ne diffèrent pas d’un groupe à l’autre,
de même que le protocole d’immunosuppres-
sion. La durée du suivi a été la même dans
les deux groupes.
Des cancers primitifs bronchopulmonaires
sont survenus chez 6,9 % des patients
ayant eu une transplantation monopulmo-
naire, contre 0 % chez ceux ayant eu une
transplantation bipulmonaire (p = 0,002).
Le scanner prétransplantation ne montrait
pas d’anomalie et l’examen histologique du
poumon explanté ne révélait pas de lésion
suspecte. Ces cancers sont apparus 52,3 mois
en moyenne après la transplantation. À part
un patient atteint de fibrose pulmonaire
primitive, tous les patients atteints de ces
cancers étaient emphysémateux. Tous ces
cancers sont apparus sur le poumon natif.
Une analyse statistique a montré que les
facteurs de risque de survenue d’un cancer
bronchopulmonaire étaient l’âge, une
exposition au tabagisme de 60 paquets-
année et le type de transplantation.
Dans une analyse univariée, le risque le
plus signi catif est la réalisation d’une
transplantation monopulmonaire avec un
risque relatif (RR) de 4,31 (95 %), avec un
intervalle de con ance (IC) de 3,30-5,63 ;
p < 0,001). Dans l’analyse multivariée, la
transplantation monopulmonaire demeure
le risque le plus important : RR de 5,306 ;
p < 0,0001, IC de 4,012-7,019.
Cette étude diffère des publications précé-
dentes qui rapportent une incidence de
cancers bronchopulmonaires de 0 % à
2,5 %. Comme le soulignent les auteurs,
cette incidence plus élevée peut re éter
une durée de suivi plus longue dans cette
publication que dans les articles antérieurs
(plus de 5 ans), les cancers ayant ainsi eu
le temps d’apparaître.
Aucune explication de cette différence
n’est donnée, si ce n’est, évidemment,
la présence d’un poumon natif dans la
transplantation monopulmonaire.
On sait aujourd’hui que la survie actua-
rielle est meilleure après transplantation
bipulmonaire et de nombreuses équipes de
transplantation ont ainsi tendance à privi-
légier la transplantation bipulmonaire,
même pour emphysème. Cet article, s’il est
con rmé par d’autres publications, donne
une raison supplémentaire à la réalisation
d’une transplantation bipulmonaire de façon
préférentielle.
P. Chevalier, Paris
Dickson RP, Davis RD, Rea JB et al. High frequency of
bronchogenic carcinoma after single-lung transplantation.
J Heart Lung Transplant 2006;25(11):1297-301.
Parésies gastriques
après transplantation
pulmonaire
C
e sont des complications sévères car
elles exposent aux pneumopathies de
déglutition, prolongent le séjour en réani-
mation, gênent la reprise d’une alimenta-
tion normale chez des patients souvent déjà
dénutris et recevant une corticothérapie à
forte posologie, et modi ent l’absorption
des immunosuppresseurs.
Cet article de nos collègues nantais est inté-
ressant car il compare d’une part la vidange
gastrique de 30 patients atteints de mucovis-
cidose par rapport à 53 volontaires sains et,
d’autre part, la vidange gastrique des mêmes
30 patients avant et après 13 transplantations
cardiopulmonaires et 17 transplantations
pulmonaires bilatérales (5,8 ± 2,6 semaines).
La vidange gastrique est étudiée par scinti-
graphie de vidange soit aux liquides, soit aux
solides, avec appréciation du temps nécessaire
pour obtenir une vidange de 50 % (T
50
) ou du
pourcentage de vidange à la deuxième heure
(RR2) ou à la troisième heure (RR3) lorsque
le délai de vidange est trop important. Avant
transplantation, sur les 30 patients, seuls 10
ont une scintigraphie de vidange normale.
Chez les 20 autres, la vidange après ingestion
de solides est fortement retardée par rapport
au groupe contrôle (160,86 ± 59,21 minutes
versus 75,43 ± 15,13 minutes (p < 0,00001).
Quatre de ces 20 patients ont aussi en préo-
pératoire un trouble important de vidange
aux liquides.
En post-transplantation :
Par rapport au groupe contrôle, le retard à
l’évacuation des liquides est nettement plus
long et le retard à l’évacuation des solides
est tel qu’il interdit l’évaluation du T50 chez
24 patients sur 30. RR2 et RR3 sont nette-
ment supérieurs chez ces 30 patients.
Si l’on compare chez les 30 patients
la vidange gastrique avant et après la
transplantation, la vidange aux liquides est
signi cativement prolongée (p < 0,0001),
et RR1 et RR2 sont augmentés signi cati-
vement (p < 0,0001).
Fait important, les temps de vidange
gastrique en prétransplantation ne sont
en aucun cas prédictifs de ce qui peut se
passer en postopératoire. L’état nutritionnel
du patient en préopératoire, jugé soit par le
poids, soit par l’indice de masse corporelle,
soit par le taux de pré-albumine ou de RBP
(retinol binding protein), ne préjuge en rien
de l’évolution postopératoire.
Le traumatisme vagal lié à la chirurgie est
souvent cité. La bilatéralité des lésions est
possible dans cette étude mais, comme
le soulignent les auteurs, des parésies
gastriques ont aussi été signalées en cas
de transplantation unilatérale, et le méca-
nisme de ces parésies n’est sûrement
pas univoque. Les anticalcineurines ne
semblent pas être en cause.
La fréquence du retard à l’évacuation
nécessite une surveillance particulière
des patients transplantés a n de dépister
ces parésies le plus tôt possible. Même
si aucune corrélation ne ressort entre les
résultats de la scintigraphie en préopé-
ratoire et en postopératoire, cet examen
devrait faire partie du bilan prégreffe.
P. Chevalier, Paris
Bodet-Milin C, Querellou S, Oudoux A et al. Delayed
gastric emptying scintigraphy in cystic brosis patients
before and after lung transplantation. J Heart Lung
Transplant 2006;25(9):1077-83.
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