Hépatite C chronique Des thérapeutiques prometteuses La nouvelle molécule, l’interféron pégylé, constitue un pas en avant dans le traitement de l’hépatite C chronique, qui est aujourd’hui l’une des principales causes d’atteinte chronique du foie. A u vu des résultats de récentes études, l’interféron pégylé associé à la ribavirine apparaît plus efficace que la bithérapie avec l’interféron standard pour soigner l’hépatite C chronique. L’hépatite C est désormais considérée comme une épidémie “silencieuse” parce que les personnes infectées (plus de 500 000 en France) peuvent rester sans symptôme pendant plus de 10 ou 20 ans. Chez la majorité d’entre elles (85 %), la maladie évolue vers la chronicité. Chez 20 % de ces personnes, une cirrhose apparaît finalement et, dans 5 % des cas, une insuffisance hépatique ou un cancer du foie est diagnostiqué. Le traitement de l’hépatite C vise à normaliser les taux d’alanineaminotransférase (ALAT), ce qui est un signe de stabilisation des lésions hépatiques, et à éliminer le virus VHC du sang. L’efficacité thérapeutique doit donc être contrôlée à 6 mois par une technique PCR permettant de détecter la présence ou non d’ARN (acide ribonucléique) viral. En cas de charge virale négative, le patient est considéré comme guéri définitivement de l’infection. Nouveau traitement Jusqu’à présent, le traitement a reposé sur l’association de l’interféron alpha recombinant avec la ribavirine, par voie sous-cutanée. Ce traitement nécessite l’utilisation de la voie injectable et donc le recours à des soins infirmiers pour des malades qui ne désirent pas réaliser eux-mêmes les injections. Par ailleurs, l’infirmier(ère) joue aussi le rôle de conseil et de soutien psychologique. D’autant que les molécules disponibles induisent de nombreux effets indésirables. En début de traitement par l’interféron, la plupart des patients présentent des symptômes pseudo-grippaux et des effets plus tardifs comme la diminution du nombre de cellules sanguines. Des fluctuations de l’humeur et la dépression ont aussi été observées. Quant à la ribavirine, elle ajoute des effets indésirables notables, essentiellement liés à l’anémie de type hémolytique. Comme il n’est pas possible d’augmenter les taux sanguins d’interféron pour éviter d’accroître les effets indésirables, des chercheurs ont mis au point une nouvelle forme d’interféron, l’interféron pégylé, par un processus qui consiste à fixer sur l’interféron une ou plusieurs chaînes de polyéthylène glycol. Par conséquent, l’interféron est protégé contre une absorption, un métabolisme et une élimination rapides, et sa concentration plasmatique prolongée autorise une seule administration par semaine. Récemment, une grande étude internationale, présentée lors du congrès d’hépato-gastro-entérologie à Atlanta, en mai 2001, a confirmé que l’association interféron pégylé-ribavirine permet d’augmenter le taux de réponses virologiques prolongées chez les malades atteints d’hépatite chronique C : il est de 56 % contre 45 % pour la bithérapie standard. L’amélioration la plus significative était pour les patients infectés des virus de génotype 1a et 1b (le génotype 1 étant le plus fréquent), lesquels sont habituellement les plus difficiles à traiter (46 % ver- sus 37 %). Autre enseignement important : grâce à des réponses précoces (dès la 12e semaine de traitement) obtenues avec l’association interféron pégylé-ribavirine, il est possible de savoir au bout de trois mois si un patient peut tirer bénéfice du traitement alors que, avec la bithérapie standard, il faut attendre six mois pour conclure. Pour ce qui est des effets secondaires de ce nouveau traitement, ils ne sont pas plus fréquents et ils seraient légèrement diminués dans le groupe traité par interféron pégylé plus ribavirine. Ludmila Couturier D’après les propos tenus lors des entretiens de Bichat 2001 L’hépatite C reconnue comme maladie professionnelle L’hépatite C est reconnue comme maladie professionnelle si le délai de prise en charge est compatible et en cas d’exposition professionnelle. Le patient doit faire une déclaration auprès de la CPAM, qui ouvrira une enquête administrative et médicale. Le droit a subi une modification administrative, avec certitude de la preuve, fondée sur des présomptions et non pas sur des certitudes. Quant à l’aptitude au travail de ces personnes, le problème se pose surtout pour le personnel paramédical. Le médecin du travail doit évaluer la virémie des patients. Cette évaluation doit également déterminer si les gestes pratiqués sont à haut risque ou non. D’une manière générale, les professionnels atteints par le virus sont maintenus à leur poste de travail avec la recommandation d’observer des règles d’hygiène de base, notamment le port de gants. Professions Santé Infirmier Infirmière - No 31 - novembre 2001 11 Santé publique Pesticides : un domaine sensible L'usage des pesticides en agriculture a crû plus vite que les connaissances à leur égard. Notre santé nécessite pourtant recherches et précautions dans ce domaine. A vec plus de 100 000 tonnes épandues par an, la France est le deuxième utilisateur mondial de pesticides, derrière les ÉtatsUnis. « Toutes les difficultés actuelles en matière de sécurité alimentaire, y compris pour les pesticides, proviennent du fait que l’on dispose de peu d’études », souligne André Aschieri, auteur d’un rapport parlementaire sur les substances toxiques et de La France toxique aux éditions La Découverte. La recherche progresse tout de même dans ce domaine sensible. Les agriculteurs Avant les consommateurs, les agriculteurs sont les premiers touchés parce qu’ils manipulent les pesticides et les épandent. La Mutualité Sociale Agricole (MSA) a lancé un réseau de toxicovigilance en 1991, puis l’a généralisé en 1997. Médecins du travail et techniciens de prévention de la MSA enregistrent incidents, effets indésirables liés à l’emploi de phytosanitaires, et empoisonnements d’agriculteurs. Mille dossiers, centralisés à l’Institut national de médecine agricole (INMA) de Tours, ont été recueillis depuis 1991. « Un médecin toxicologue expertise les dossiers pour vérifier s’il existe une relation de cause à effet entre le toxique et l’effet indésirable notifié », précise le Dr Elisabeth Marcotullio (1). Ce lien a été établi pour les deux tiers de ces mille dossiers. Les cultures les plus concernées sont les céréales, la vigne et l’horticulture. Les troubles frappent les muqueuses et la peau (40 % des cas étudiés), le système digestif (34 % des cas), le système respiratoire (20 %), l’ensemble de l’organisme à travers des troubles généraux comme des maux de tête (24 %). Plus de deux victimes sur 12 trois ont dû consulter un médecin après l’incident. Parmi les paysans de cette banque de donnée MSA, 13 % ont dû être hospitalisés à cause de l’utilisation de produits phytosanitaires, et 27 % ont dû arrêter leur travail. Les consommateurs Au-delà de ces effets à très court terme, les effets des pesticides à moyen et long termes ne sont pas étudiés par ce réseau MSA. Ces produits sont abondamment utilisés dans la culture des céréales, des fruits et des légumes. On les retrouve même dans l’eau que nous buvons. Or, les dangers des pesticides peuvent se traduire par une toxicité à moyen terme. « Celle-ci regroupe les effets survenant plusieurs mois ou années après une intoxication massive aiguë ou une exposition prolongée à des doses faibles », explique le Dr Marie-Antoinette Gingomard (1). Il s’agit, pour les hommes, d’infertilités, d’anomalies des testicules et de malformations du pénis. Pour les femmes, des avortements spontanés lors de la grossesse, des enfants prématurés, de petite taille et de petit poids, font partie des effets indésirables. A ces maladies et accidents qui touchent la vie, il faut ajouter les cancers et les atteintes neurologiques parmi les troubles à moyen terme incriminés. Le lien entre infertilité masculine et pesticides a été prouvé à l’échelle d’un pays (2). Pour cela, le taux des pesticides dans le sang a été étudié chez l’ensemble des hommes infertiles d’Israël. On retrouve bien, chez ces hommes, de fortes concentrations de deux types de pesticides (insecticides organochlorés et polychlorés-biphényl). Professions Santé Infirmier Infirmière - No 31 - novembre 2001 « L’évident effet de ces substances sur la détérioration de la qualité du sperme apparaît dans de nombreuses études », ajoute plus largement le Pr Marco Maroni, du Centre international Pesticides et sécurité, à Milan, même si des études restent à mener (3). Les fertilisants n’arrangent pas les choses. « En ce qui concerne les troubles de la reproduction, dit le Dr Gingomard, la responsabilité d’un fumigant, le dibromochloropropane est reconnu pour provoquer des stérilités masculines. » Plusieurs études ont aussi montré que les pesticides favorisent une anomalie congénitale des testicules (non-descente des testicules ou cryptorchidie). Des recherches menées montrent également une augmentation significative des malformations congénitales du pénis. Ces dangers concernent aussi la grossesse et la mère. Une augmentation du nombre d’accouchements prématurés et d’avortements avec rétention placentaire est constatée chez des femmes présentant de forts taux de pesticides dans le sang (taux plasmatiques d’organochlorés et de PCB) (4, 5). Des synthèses américaines de plusieurs études (6) montrent le rôle des pesticides sur les naissances d’enfants de petit poids et de petite taille chez des femmes de régions agricoles arrosées de pesticides. La contamination de l’eau par des herbicides est aussi incriminée. Elle entraîne des retards de croissance du fœtus, selon une étude américaine menée dans l’Iowa. Toujours à cause des pesticides, les travaux agricoles des femmes entraîneraient des malformations de l’enfant selon une étude finlandaise. Les risques des expositions à des substances aux effets xénoestrogéniques ne sont pas exclus. Celles-ci provoqueraient des chan-