Épigénétique : nouvelle donne en endocrinologie dossier thématique Histones désacétylases et signalisation estrogénique dans le cancer du sein Histone deacetylases and estrogen signalling in breast cancer Nathalie Boulle*,**, Aurélien Linares*, Marion Lapierre*, Vincent Cavailles* »»Les récepteurs des estrogènes (RE) régulent la transcription The estrogen receptor (ER) regulates transcription of specific genes by interacting with multiprotein complexes containing histone acetyltransferase (HAT) and histone deacetylase (HDAC). »»Les RE et leurs corégulateurs transcriptionnels peuvent être RE and their transcriptional coregulators can be modified by acetylation on lysine residues. This post-translational modification controls their ability to interact with DNA and modulate transcription. »»Différentes HDAC sont recrutées directement ou indirectement Different HDAC are recruited directly or indirectly by the RE and regulate the activity and the expression of these receptors in breast cancer cells. de gènes spécifiques en interagissant avec des complexes multiprotéiques qui contiennent des histones acétyltransférases (HAT) et des histones désacétylases (HDAC). par les RE et régulent l’activité de ces récepteurs ainsi que leur expression dans les cellules cancéreuses mammaires. »»Les HDAC sont impliquées à plusieurs niveaux dans la signalisation estrogénique ; leur expression est dérégulée dans les tumeurs du sein. »»Les inhibiteurs de HDAC ont conduit à de premiers résultats prometteurs dans le traitement des cancers du sein avancés, en association avec une chimiothérapie ou avec un traitement hormonal. Highlights P o i nt s f o rt s modifiés par acétylation sur les résidus lysine. Cette modification post-traductionnelle contrôle la capacité des RE à interagir avec l’ADN et à moduler la transcription. Mots-clés : Récepteur des estrogènes – Histone désacétylase – Cancer du sein – Inhibiteur d’histone désacétylase – Thérapie hormonale. Signalisation par les estrogènes et cancer du sein * Institut de recherche en cancérologie de Montpellier ; Inserm, U896, Montpellier ; université Montpellier-1 ; CRLC Vald’Aurelle-Paul-Lamarque, Montpellier. ** Laboratoire de biologie cellulaire et hormonale, CHRU Arnaud-deVilleneuve, Montpellier. 284 Le cancer du sein est un problème majeur de santé publique (lire le rapport de l’INCa sur la situation du cancer en France en 2010 : http://www.e-cancer.fr). Les estrogènes jouent un rôle clé dans la physiologie et la cancérogenèse mammaires. Ils agissent par liaison à des récepteurs spécifiques appartenant à la famille des récepteurs nucléaires, les récepteurs des estrogènes (RE) α et β. Environ 70 à 80 % des cancers du sein infiltrants expriment le REα, ce qui a permis la mise en place de traitements visant à bloquer la signalisation estrogénique (1). Cependant, ces thérapies sont limitées par HDAC are involved at several levels in estrogen signaling and their expression is deregulated in breast tumors. HDAC inhibitors led to promising results in the treatment of advanced breast cancer in combination with chemotherapy or hormonal treatments. Keywords: Estrogen receptors – Histone deacetylase – Breast cancer – Histone deacetylase inhibitor – Hormone therapy. des phénomènes de résistance apparaissant d’emblée, ou au cours du traitement (2). Au niveau moléculaire, la liaison de l’hormone aux RE induit une modification conformationnelle, entraînant leur fixation sur des promoteurs de gènes estrogénosensibles et le recrutement de complexes multiprotéiques (3). Ces complexes sont constitués de différents corégulateurs transcriptionnels (activateurs ou répresseurs) possédant pour la plupart des activités enzymatiques. Par exemple, de nombreuses histones acétyltransférases (HAT) et histones désacétylases (HDAC) sont recrutées par les RE et agissent sur la structure de la chromatine afin de moduler la transcription des gènes cibles. Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 8 - octobre 2011 Histones désacétylases et signalisation estrogénique dans le cancer du sein HDAC et inhibiteurs de HDAC Chez l’homme, 18 HDAC ont été identifiées, classées en 4 familles (I à IV) selon leur degré d’homologie de séquences et la nature de leur domaine catalytique (utilisant le zinc ou le NAD comme cofacteur) [4]. Les HDAC sont impliquées dans divers mécanismes cellulaires généraux tels que la prolifération cellulaire ou l’apoptose mais également dans la différenciation de tissus spécifiques, notamment pour les HDAC de classe II (5). Par ailleurs, de nombreux travaux ont montré qu’audelà des histones, les HDAC avaient des substrats variés (facteurs de transcription, enzymes, cytosquelette, etc.). Les premiers inhibiteurs de HDAC ciblant le domaine catalytique zinc-dépendant ont été développés dès les années 1970 (6). Très rapidement, leur intérêt en tant qu’agents antitumoraux a été mis en évidence dans les tumeurs hématologiques et solides, ce qui a conduit à développer de nouveaux inhibiteurs de structure et d’efficacité variées (7). À ce jour, une centaine d’essais cliniques utilisant ces molécules, seules ou en association avec d’autres traitements, sont en cours dans le domaine du cancer (8). maire normal et les carcinomes mammaires in situ a été mise en évidence, ce qui suggère que les anomalies d’acétylation des protéines constituaient un événement précoce de la cancérogenèse mammaire. Des études réalisées au niveau ARNm et/ou protéines dans des tumeurs du sein invasives ont mis en évidence la présence de certaines HDAC (principalement HDAC 1, 2, 3 et 6) dans les cellules tumorales mammaires, associée pour certaines d’entre elles à une valeur pronostique dans les tumeurs du sein (9). De plus, l’analyse de données issues de puces à ADN a confirmé une dérégulation d’expression de plusieurs HDAC dans les cancers du sein par rapport au tissu mammaire normal (10). Enfin, l’HDAC 6 a été impliquée dans la mobilité des cellules tumorales mammaires ainsi que dans leur prolifération indépendante du support. Les données récentes montrent que les HDAC et leurs inhibiteurs régulent de manière très complexe la signalisation par les estrogènes dans les cellules de cancer du sein. Deux revues récentes (10, 11) développent les différents niveaux de contrôle, détaillés plus loin et illustrés dans la figure. HDAC et cancer du sein HDAC et contrôle de l’activité et de l’expression des RE Dans le cancer du sein, une diminution significative du niveau d’acétylation des histones entre le tissu mam- Par la technique d’immunoprécipitation de chromatine (ChIP), différentes HDAC de classe I ou II ont été Stabilité de la protéine Activité transcriptionnelle Hsp90 Ac REα Hsp90 Ac CoF Ac Ac REα REα Ac HDAC ADN REα miR ? AAAAA Stabilité ARNm ? HDAC DNMT MEF2 Gène REα Transcription Figure. HDAC et signalisation estrogénique. Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 8 - octobre 2011 285 Épigénétique : nouvelle donne en endocrinologie dossier thématique mises en évidence sur des promoteurs cibles des RE, en présence de ligands agonistes ou antagonistes. L’association directe de certaines HDAC (HDAC 1, 4, 5, 6 et 9) avec plusieurs domaines du REα a été démontrée par des expériences d’interaction in vitro et par co-immunoprécipitation. Les HDAC peuvent aussi être recrutées de façon indirecte, par interaction avec les corégulateurs transcriptionnels, qui lient le récepteur en présence d’agonistes ou d’antagonistes estrogéniques. Plusieurs HDAC appartenant à des classes différentes ont été impliquées dans la régulation de l’activité transcriptionnelle des RE (10). Ainsi, la surexpression de HDAC 1 inhibe l’activité transcriptionnelle estradiol (E2)-dépendante du REα. Une approche par siRNA dans les cellules cancéreuses du sein T47D a également montré le rôle de HDAC 2 dans la régulation de l’expression et de l’activité du REα. Par ailleurs, une étude récente du laboratoire d’Olson révèle que les HDAC de classe II agissent comme des modulateurs importants du REα (12). En effet, HDAC 5 et HDAC 9 répriment l’activité transcriptionnelle du REα et participent à la régulation de son promoteur. L’HDAC 7, une autre HDAC de classe II, semble jouer un rôle unique dans la répression E2-dépendante de l’expression des gènes. Par ailleurs, l’HDAC 4 régule négativement la transactivation du REα en présence d’E2 ou d’anti-estrogènes, et l’HDAC 6 participe aux effets non génomiques des estrogènes en interagissant avec la forme membranaire du REα. Enfin, concernant les HDAC de classe III, une étude a montré que l’invalidation du gène SIRT1 était associée à une diminution de l’expression du REα. Acétylation des RE et corégulateurs transcriptionnels Le REα et plusieurs corégulateurs transcriptionnels (par exemple RIP140/NRIP1, TIF2 ou PGC1α) sont des protéines acétylées, ce qui illustre la complexité des effets pouvant résulter de la modulation du niveau d’acétylation en réponse à l’inhibition des HDAC (10). Cette modification post-traductionnelle contrôle différents paramètres tels que la stabilité et la localisation subcellulaire de la protéine, ou encore sa capacité à inter­ agir avec d’autres molécules (ADN, ligands ou autres protéines). Deux groupes ont décrit l’acétylation du REα sur différentes lysines (K266/K268 et K302/K303) situées dans le domaine de liaison à l’ADN et dans la région charnière de la protéine. L’acétylation des lysines K302/303 semble diminuer la réponse du REα au ligand, et celle des résidus K266/268 augmente la liaison à 286 l’ADN du récepteur et son activité de transactivation ligand-dépendante. Cependant, les enzymes impliquées sont peu connues (rôles de p300 et SIRT1 démontrés in vitro) et le rôle de cette modification reste encore relativement flou. Inhibiteurs de HDAC et signalisation estrogénique Dans différents modèles cellulaires exprimant le REα (sein, endomètre, ovaire, etc.), le traitement par inhibiteurs de HDAC à large spectre (TSA, SAHA ou LBH589) conduit à une diminution très marquée de l’expression du REα au niveau de l’ARNm et de la protéine (13). Le même type de régulation est obtenu avec le sirtinol (inhibiteur des HDAC de classe III), mais pas avec des inhibiteurs sélectifs des HDAC de classe II. Les mécanismes impliqués sont variés et font intervenir des régulations à la fois transcriptionnelles et post-transcriptionnelles. De manière intéressante, les HDAC 5 et 9 inhibent la transcription du gène REα par compétition sur son promoteur avec le facteur de transcription MEF2. Différents micro-ARN pourraient également intervenir, car plusieurs d’entre eux ciblant l’ARNm REα sont régulés par les inhibiteurs de HDAC. La diminution d’expression du REα sous l’effet d’inhibiteurs de HDAC semble également d’origine post-traductionnelle, impliquant notamment la protéine chaperon Hsp90 (l’hyper­acétylation de Hsp90 diminue son association avec le REα, conduisant ainsi à l’ubiquitination et à la dégradation du récepteur) ou l’ubiquitine ligase CHIP (C-terminal Hsc70 interacting protein). Enfin, les HDAC modulent l’activité transcriptionnelle des RE. En effet, dans des modèles de cellules cancéreuses humaines transfectées de manière stable avec un gène rapporteur piloté par un élément de réponse aux estrogènes, l’inhibition des HDAC augmente le potentiel de trans­ activation des REα et des REβ et fait apparaître une activité agoniste des anti-estrogènes liée à l’inhibition de l’expression du REα. Inhibiteurs de HDAC et réponse aux anti-estrogènes Un point important en termes de retombées thérapeutiques potentielles concerne l’effet des inhibiteurs de HDAC sur la réponse de cellules cancéreuses mammaires aux anti-estrogènes (11). Le traitement de cellules MCF-7, sensibles ou insensibles au tamoxifène, par un inhibiteur de HDAC (FK228) inhibe la prolifération Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 8 - octobre 2011 Épigénétique : nouvelle donne en endocrinologie dossier thématique mises en évidence sur des promoteurs cibles des RE, en présence de ligands agonistes ou antagonistes. L’association directe de certaines HDAC (HDAC 1, 4, 5, 6 et 9) avec plusieurs domaines du REα a été démontrée par des expériences d’interaction in vitro et par co-immunoprécipitation. Les HDAC peuvent aussi être recrutées de façon indirecte, par interaction avec les corégulateurs transcriptionnels, qui lient le récepteur en présence d’agonistes ou d’antagonistes estrogéniques. Plusieurs HDAC appartenant à des classes différentes ont été impliquées dans la régulation de l’activité transcriptionnelle des RE (10). Ainsi, la surexpression de HDAC 1 inhibe l’activité transcriptionnelle estradiol (E2)-dépendante du REα. Une approche par siRNA dans les cellules cancéreuses du sein T47D a également montré le rôle de HDAC 2 dans la régulation de l’expression et de l’activité du REα. Par ailleurs, une étude récente du laboratoire d’Olson révèle que les HDAC de classe II agissent comme des modulateurs importants du REα (12). En effet, HDAC 5 et HDAC 9 répriment l’activité transcriptionnelle du REα et participent à la régulation de son promoteur. L’HDAC 7, une autre HDAC de classe II, semble jouer un rôle unique dans la répression E2-dépendante de l’expression des gènes. Par ailleurs, l’HDAC 4 régule négativement la transactivation du REα en présence d’E2 ou d’anti-estrogènes, et l’HDAC 6 participe aux effets non génomiques des estrogènes en interagissant avec la forme membranaire du REα. Enfin, concernant les HDAC de classe III, une étude a montré que l’invalidation du gène SIRT1 était associée à une diminution de l’expression du REα. Acétylation des RE et corégulateurs transcriptionnels Le REα et plusieurs corégulateurs transcriptionnels (par exemple RIP140/NRIP1, TIF2 ou PGC1α) sont des protéines acétylées, ce qui illustre la complexité des effets pouvant résulter de la modulation du niveau d’acétylation en réponse à l’inhibition des HDAC (10). Cette modification post-traductionnelle contrôle différents paramètres tels que la stabilité et la localisation subcellulaire de la protéine, ou encore sa capacité à inter­ agir avec d’autres molécules (ADN, ligands ou autres protéines). Deux groupes ont décrit l’acétylation du REα sur différentes lysines (K266/K268 et K302/K303) situées dans le domaine de liaison à l’ADN et dans la région charnière de la protéine. L’acétylation des lysines K302/303 semble diminuer la réponse du REα au ligand, et celle des résidus K266/268 augmente la liaison à 286 l’ADN du récepteur et son activité de transactivation ligand-dépendante. Cependant, les enzymes impliquées sont peu connues (rôles de p300 et SIRT1 démontrés in vitro) et le rôle de cette modification reste encore relativement flou. Inhibiteurs de HDAC et signalisation estrogénique Dans différents modèles cellulaires exprimant le REα (sein, endomètre, ovaire, etc.), le traitement par inhibiteurs de HDAC à large spectre (TSA, SAHA ou LBH589) conduit à une diminution très marquée de l’expression du REα au niveau de l’ARNm et de la protéine (13). Le même type de régulation est obtenu avec le sirtinol (inhibiteur des HDAC de classe III), mais pas avec des inhibiteurs sélectifs des HDAC de classe II. Les mécanismes impliqués sont variés et font intervenir des régulations à la fois transcriptionnelles et post-transcriptionnelles. De manière intéressante, les HDAC 5 et 9 inhibent la transcription du gène REα par compétition sur son promoteur avec le facteur de transcription MEF2. Différents micro-ARN pourraient également intervenir, car plusieurs d’entre eux ciblant l’ARNm REα sont régulés par les inhibiteurs de HDAC. La diminution d’expression du REα sous l’effet d’inhibiteurs de HDAC semble également d’origine post-traductionnelle, impliquant notamment la protéine chaperon Hsp90 (l’hyper­acétylation de Hsp90 diminue son association avec le REα, conduisant ainsi à l’ubiquitination et à la dégradation du récepteur) ou l’ubiquitine ligase CHIP (C-terminal Hsc70 interacting protein). Enfin, les HDAC modulent l’activité transcriptionnelle des RE. En effet, dans des modèles de cellules cancéreuses humaines transfectées de manière stable avec un gène rapporteur piloté par un élément de réponse aux estrogènes, l’inhibition des HDAC augmente le potentiel de trans­ activation des REα et des REβ et fait apparaître une activité agoniste des anti-estrogènes liée à l’inhibition de l’expression du REα. Inhibiteurs de HDAC et réponse aux anti-estrogènes Un point important en termes de retombées thérapeutiques potentielles concerne l’effet des inhibiteurs de HDAC sur la réponse de cellules cancéreuses mammaires aux anti-estrogènes (11). Le traitement de cellules MCF-7, sensibles ou insensibles au tamoxifène, par un inhibiteur de HDAC (FK228) inhibe la prolifération Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 8 - octobre 2011 Histones désacétylases et signalisation estrogénique dans le cancer du sein tumorale des cellules et abolit également la résistance au tamoxifène. Cette resensibilisation ne semble pas limitée au tamoxifène : elle est également observée avec les inhibiteurs d’aromatase. Les mécanismes impliqués dans cette resensibilisation aux thérapies hormonales sont encore peu connus et pourraient impliquer le blocage de l’activation de PAK1, qui joue un rôle dans la signalisation par les facteurs de croissance. Réexpression du REα par les inhibiteurs de HDAC Le second point important concerne la régulation de l’expression du REα dans les cellules cancéreuses mammaires qui n’expriment pas ce gène. Différentes études ont en effet montré que le traitement de ces cellules par la TSA ou par l’acide valproïque (VPA) permettait la réexpression de l’ARNm du Reα, et ce, de manière synergique avec des inhibiteurs de l’ADN méthyltransférase tels que la 5-aza-2’-désoxycytidine. La réactivation de l’expression du gène REα est associée à une réorganisation de la structure de la chromatine au niveau du promoteur et semble couplée à la perte du récepteur à l’EGF (EGFR). L’association de la TSA et du 5-aza-dC, un inhibiteur des DNMT, restaure la sensibilité au tamoxifène dans la lignée cellulaire mammaire MDA-MB 235 REα négative. D’autres mécanismes peuvent être impliqués : diminution de l’expression d’EGFR et des voies de signalisation associées, ou encore augmentation de l’expression de l’aromatase. Conclusion L’analyse des liens entre HDAC et RE met en évidence des niveaux d’interaction multiples et complexes, et des effets opposés sur l’expression du REα dans les cellules cancéreuses mammaires exprimant ou non le récepteur. Plusieurs questions importantes restent à résoudre afin de mieux apprécier ces dialogues au niveau transcriptionnel : quels sont les rôles précis des différentes isoformes des HDAC ? Les HDAC régulentelles la signalisation estrogénique indépendamment de leur activité catalytique ? Quel est leur rôle exact dans les tumeurs du sein résistantes aux thérapies hormonales ? Malgré ces questions qui restent encore sans réponse, les inhibiteurs des HDAC ont conduit à de premiers résultats très prometteurs dans le traitement des cancers du sein avancés, en association avec une chimiothérapie ou un traitement hormonal (tamoxifène ou inhibiteurs de l’aromatase) [14]. Plusieurs essais cliniques sont en cours dans ce domaine. Cependant, des études complémentaires seront nécessaires pour définir les meilleures associations thérapeutiques ainsi que les biomarqueurs permettant d’identifier les patientes les mieux à même de bénéficier de ces nouvelles thérapies combinatoires (15). ■ Références 1. McGuire WL, Horwitz KB, Pearson OH, Segaloff A. Current 6. Minucci S, Pelicci PG. Histone deacetylase inhibitors and induced modulation of anti-estrogen therapy. Cancer Lett 2009;280:184-91. status of estrogen and progesterone receptors in breast cancer. Cancer 1977;39:2934-47. the promise of epigenetic (and more) treatments for cancer. Nat Rev Cancer 2006;6:38-51. 2. Massarweh S, Schiff R. Unraveling the mechanisms of endo- 7. Witt O, Deubzer HE, Milde T, Oehme I. HDAC family: what crine resistance in breast cancer: new therapeutic opportunities. Clin Cancer Res 2007;13:1950-4. are the cancer relevant targets? Cancer Lett 2009;277:8-21. 3. Heldring N, Pike A, Andersson S et al. Estrogen receptors: 8. Tan J, Cang S, Ma Y, Petrillo RL, Liu D. Novel histone dea- factor 2 and class II histone deacetylases control a gender-specific pathway of cardioprotection mediated by the estrogen receptor. Circ Res 2010;106:155-65. cetylase inhibitors in clinical trials as anti-cancer agents. J Hematol Oncol 2010;3:5. 9. Weichert W. HDAC expression and clinical prognosis in cetylase inhibition and estrogen signalling in human breast cancer cells. Biochem Pharmacol 2004;68:1239-46. how do they signal and what are their targets. Physiol Rev 2007;87:905-31. 4. Yang XJ, Seto E. HATs and HDACs: from structure, function and regulation to novel strategies for therapy and prevention. Oncogene 2007;26:5310-8. 5. Haberland M, Montgomery RL, Olson EN. The many roles of histone deacetylases in development and physiology: implications for disease and therapy. Nat Rev Genet 2009;10:32-42. human malignancies. Cancer Lett 2009;280:168-76. 10. Linares A, Dalenc F, Balaguer P, Boulle N, Cavailles V. Manipulating protein acetylation in breast cancer: a promising approach in combination with hormonal therapies? J Biomed Biotechnol 2011;2011:856985. 11. Thomas S, Munster PN. Histone deacetylase inhibitor Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 8 - octobre 2011 12. Van Rooij E, Fielitz J, Sutherland LB et al. Myocyte enhancer 13. Margueron R, Duong V, Castet A, Cavailles V. Histone dea14. Munster PN, Thurn KT, Thomas S et al. A phase II study of the histone deacetylase inhibitor vorinostat combined with tamoxifen for the treatment of patients with hormone therapy-resistant breast cancer. Br J Cancer 2011;104:1828-35. 15. Stimson L, La Thangue NB. Biomarkers for predicting clinical responses to HDAC inhibitors. Cancer Lett 2009;280:177-83. 287 Histones désacétylases et signalisation estrogénique dans le cancer du sein tumorale des cellules et abolit également la résistance au tamoxifène. Cette resensibilisation ne semble pas limitée au tamoxifène : elle est également observée avec les inhibiteurs d’aromatase. Les mécanismes impliqués dans cette resensibilisation aux thérapies hormonales sont encore peu connus et pourraient impliquer le blocage de l’activation de PAK1, qui joue un rôle dans la signalisation par les facteurs de croissance. Réexpression du REα par les inhibiteurs de HDAC Le second point important concerne la régulation de l’expression du REα dans les cellules cancéreuses mammaires qui n’expriment pas ce gène. Différentes études ont en effet montré que le traitement de ces cellules par la TSA ou par l’acide valproïque (VPA) permettait la réexpression de l’ARNm du Reα, et ce, de manière synergique avec des inhibiteurs de l’ADN méthyltransférase tels que la 5-aza-2’-désoxycytidine. La réactivation de l’expression du gène REα est associée à une réorganisation de la structure de la chromatine au niveau du promoteur et semble couplée à la perte du récepteur à l’EGF (EGFR). L’association de la TSA et du 5-aza-dC, un inhibiteur des DNMT, restaure la sensibilité au tamoxifène dans la lignée cellulaire mammaire MDA-MB 235 REα négative. D’autres mécanismes peuvent être impliqués : diminution de l’expression d’EGFR et des voies de signalisation associées, ou encore augmentation de l’expression de l’aromatase. Conclusion L’analyse des liens entre HDAC et RE met en évidence des niveaux d’interaction multiples et complexes, et des effets opposés sur l’expression du REα dans les cellules cancéreuses mammaires exprimant ou non le récepteur. Plusieurs questions importantes restent à résoudre afin de mieux apprécier ces dialogues au niveau transcriptionnel : quels sont les rôles précis des différentes isoformes des HDAC ? Les HDAC régulentelles la signalisation estrogénique indépendamment de leur activité catalytique ? Quel est leur rôle exact dans les tumeurs du sein résistantes aux thérapies hormonales ? Malgré ces questions qui restent encore sans réponse, les inhibiteurs des HDAC ont conduit à de premiers résultats très prometteurs dans le traitement des cancers du sein avancés, en association avec une chimiothérapie ou un traitement hormonal (tamoxifène ou inhibiteurs de l’aromatase) [14]. Plusieurs essais cliniques sont en cours dans ce domaine. Cependant, des études complémentaires seront nécessaires pour définir les meilleures associations thérapeutiques ainsi que les biomarqueurs permettant d’identifier les patientes les mieux à même de bénéficier de ces nouvelles thérapies combinatoires (15). ■ Références 1. McGuire WL, Horwitz KB, Pearson OH, Segaloff A. Current 6. Minucci S, Pelicci PG. Histone deacetylase inhibitors and induced modulation of anti-estrogen therapy. Cancer Lett 2009;280:184-91. status of estrogen and progesterone receptors in breast cancer. Cancer 1977;39:2934-47. the promise of epigenetic (and more) treatments for cancer. Nat Rev Cancer 2006;6:38-51. 2. Massarweh S, Schiff R. Unraveling the mechanisms of endo- 7. Witt O, Deubzer HE, Milde T, Oehme I. HDAC family: what crine resistance in breast cancer: new therapeutic opportunities. Clin Cancer Res 2007;13:1950-4. are the cancer relevant targets? Cancer Lett 2009;277:8-21. 3. Heldring N, Pike A, Andersson S et al. Estrogen receptors: 8. Tan J, Cang S, Ma Y, Petrillo RL, Liu D. Novel histone dea- factor 2 and class II histone deacetylases control a gender-specific pathway of cardioprotection mediated by the estrogen receptor. Circ Res 2010;106:155-65. cetylase inhibitors in clinical trials as anti-cancer agents. J Hematol Oncol 2010;3:5. 9. Weichert W. HDAC expression and clinical prognosis in cetylase inhibition and estrogen signalling in human breast cancer cells. Biochem Pharmacol 2004;68:1239-46. how do they signal and what are their targets. Physiol Rev 2007;87:905-31. 4. Yang XJ, Seto E. HATs and HDACs: from structure, function and regulation to novel strategies for therapy and prevention. Oncogene 2007;26:5310-8. 5. Haberland M, Montgomery RL, Olson EN. The many roles of histone deacetylases in development and physiology: implications for disease and therapy. Nat Rev Genet 2009;10:32-42. human malignancies. Cancer Lett 2009;280:168-76. 10. Linares A, Dalenc F, Balaguer P, Boulle N, Cavailles V. Manipulating protein acetylation in breast cancer: a promising approach in combination with hormonal therapies? J Biomed Biotechnol 2011;2011:856985. 11. Thomas S, Munster PN. Histone deacetylase inhibitor Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XV - n° 8 - octobre 2011 12. Van Rooij E, Fielitz J, Sutherland LB et al. Myocyte enhancer 13. Margueron R, Duong V, Castet A, Cavailles V. Histone dea14. Munster PN, Thurn KT, Thomas S et al. A phase II study of the histone deacetylase inhibitor vorinostat combined with tamoxifen for the treatment of patients with hormone therapy-resistant breast cancer. Br J Cancer 2011;104:1828-35. 15. Stimson L, La Thangue NB. Biomarkers for predicting clinical responses to HDAC inhibitors. Cancer Lett 2009;280:177-83. 287