MISE AU POINT
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La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 4 - juillet-août 2005
I
l est difficile de proposer une conduite à tenir bien définie
pour la recherche étiologique d’un nodule solitaire pulmo-
naire ; en effet, les explorations, notamment chirurgicales,
peuvent être limitées par de nombreux facteurs, en particulier la
localisation du nodule, l’état physiologique du malade et ses
comorbidités, ou les valeurs fonctionnelles respiratoires. Le
médecin responsable doit donc faire un choix raisonné entre des
investigations invasives, voire dangereuses (ponction sous scan-
ner, vidéochirurgie, thoracotomie, etc.) et une surveillance atten-
tive, au risque de sous-estimer la probabilité d’un cancer rapide-
ment évolutif. Une assurance supplémentaire dans la démarche
diagnostique peut heureusement nous être apportée par des exa-
mens isotopiques de dernière génération (TEP-scanner, SPECT),
mais ces examens sont parfois peu accessibles, et peuvent induire
en erreur le clinicien dans un nombre limité de cas. Cet article a
pour but de proposer une attitude cohérente dans le bilan étiolo-
gique d’un nodule solitaire pulmonaire, à partir d’une bibliogra-
phie abondante, mais de qualité variable.
ÉTIOLOGIES DES NODULES PULMONAIRES SOLITAIRES
Il n’est pas possible de déterminer avec précision la prévalence
des étiologies des nodules pulmonaires solitaires, car les popu-
lations étudiées correspondent pour la plupart à des séries chi-
rurgicales très dissemblables. En particulier, les séries diffèrent
en termes d’antécédent de cancer et d’exposition aux carcino-
gènes, mais aussi en granulomatoses, parasitoses, etc. Le
tableau I, à titre d’exemple, compare deux études aux résultats
très différents (cette différence étant surtout liée à la proportion
des patients aux antécédents de cancer). Ces publications ont le
mérite de mettre en exergue trois facteurs de risque : l’existence
d’un antécédent de cancer connu, la taille du nodule (seuil à
risque : 1 cm) et l’âge avancé.
LES FACTEURS DE RISQUE DE NODULES SOLITAIRES
MALINS
La recherche de facteurs de risque de néoplasie est un point de
départ essentiel dans la stratégie diagnostique d’un nodule soli-
taire ; en effet, une recherche invasive ne pouvant être proposée
Le nodule solitaire pulmonaire : mise au point
Update on the solitary pulmonary nodules
O. Molinier*, F. Goupil*, F.X. Lebas*
* Département des maladies respiratoires, centre hospitalier général, Le Mans.
© La Lettre du Pneumologue 2005;VIII(3):100-6.
Résumé : La prise en charge du nodule pulmonaire solitaire est complexe et dépend de caractéristiques cliniques ou radiologiques,
comme l’âge, la taille du nodule ou d’une calcification. Il est primordial de déterminer l’éventualité d’un cancer par une analyse
bayésienne, avant de mettre en route des investigations potentiellement dangereuses, dont le risque morbide doit être compensé par
une probabilité significative d’améliorer le pronostic. Nous avons accès à des examens d’imagerie comme le scanner, qui est capable
de déterminer l’allure maligne du nodule par l’analyse du rehaussement iodé, ou la tomographie par émission de positons (TEP),
qui a une valeur prédictive négative élevée, et permet d’éviter une chirurgie inadaptée. Les études de dépistage par scanner à faible
dose ont aidé à améliorer la connaissance et la prise en charge des nodules pulmonaires solitaires, même si leur influence sur la
survie n’est pas prouvée.
Mots-clés : Score de probabilité - TEP - Chirurgie - Surveillance.
Summary: The management of the solitary pulmonary nodule is complex and depends on clinical or radiological characteristics, as
age, size of the nodule or calcification. It’s essential to determine, with a bayesian analysis, the probability of cancer, before initia-
ting a series of potentially dangerous procedures (as transthoracic needle biopsy or surgery), whose morbid risk must be offset by a
significant probability of improvement of prognosis.
We have access to many imaging as CT scan, that is able to determine the malignant appearance of a nodule by the enhancement
analysis or PET scan, that has a very high negative predictive value and can avoid a futile surgery.
Screenings by low-dose computed tomography have permitted to improve the knowledge and the management of the solitary pulmo-
nary nodules, but their influence on overall survival is not proven.
Keywords: Probability score - PET-FDG - Surgery - Follow-up.
.../...
MISE AU POINT
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La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 4 - juillet-août 2005
à tous les malades, il faut sélectionner préalablement ceux dont
le risque morbide encouru lors du geste est compensé par une
chance d’améliorer le pronostic. Ces facteurs de risque sont cli-
niques et radiologiques.
Swensen et al. (3) ont analysé, dans cette étude rétrospective
menée chez 629 patients, les facteurs de risque de malignité d’un
nodule pulmonaire solitaire. Les critères cliniques recherchés
étaient l’âge, le sexe, un antécédent de cancer, l’existence d’une
exposition à l’amiante ou au tabac, une maladie interstitielle ou
obstructive. Les critères radiologiques étaient le diamètre du
nodule, sa localisation, ses bords, l’existence d’une cavitation,
etc. Trois critères cliniques ressortent : l’âge avancé, le statut
tabagique, les antécédents de cancer. Trois critères radiologiques
semblent constituer un risque important de malignité : le dia-
mètre élevé, l’existence d’une spiculation et la localisation dans
les lobes supérieurs.
ÉVALUATION MORPHOLOGIQUE
D’UN NODULE PULMONAIRE
On retient généralement trois aspects radiologiques : la taille,
les contours et les caractéristiques internes.
La taille du nodule, si elle permet d’évoquer un cancer, n’a pas une
valeur diagnostique excellente : en effet, 80 % des nodules bénins
ont moins de 2 cm et 58 % des nodules malins plus de 2 cm (4).
Les bords du nodule, lorsqu’ils sont réguliers, apportent une
probabilité de bénignité de 79 % ; lorsqu’ils sont lobulés, cette
probabilité n’est plus que de 25 % (4). Quant à l’aspect en
“corona radiata” (ou spiculation), sa spécificité pour une lésion
maligne varie de 88 à 94 % selon les études.
Les caractéristiques internes du nodule sont peu spécifiques
comme, par exemple, les cavitations ou les bronchogrammes
aériens. Toutefois, deux aspects sont à retenir :
l’existence d’une densité graisseuse est très nettement en
faveur d’un hamartochondrome (5) ;
une calcification est classiquement associée à une origine
bénigne, sauf dans deux circonstances : lorsque cette calcification
est “amorphe” et diffuse, elle est compatible avec une tumeur
carcinoïde ; lorsqu’elle est excentrée au sein d’une opacité
morphologiquement suspecte, il peut s’agir d’un adénocarcinome
s’étendant à partir d’une lésion granulomateuse ancienne.
CALCUL D’UN SCORE DE PROBABILITÉ CLINIQUE
Cummings et al. ont créé, par une approche bayésienne, une
méthode simple estimant la probabilité de malignité d’un
nodule pulmonaire (6) : l’auteur a fixé une table déterminant
les rapports de probabilité de cancer (LR [likelihood ratios]),
de critères cliniques (âge, tabac) et radiologiques (taille) où
LR correspond au rapport suivant : LR = nombre de nodules
malins ayant cette caractéristique/nombre de nodules bénins
ayant cette caractéristique.
À titre d’exemple : LR taille est de 0,1 si le nodule est inférieur à
1,5 cm ; LR taille est de 29,4 si le nodule est supérieur à 5,3 cm.
De même pour l’âge : LR âge est de 0,1 si l’âge est inférieur à
35 ans ; il est de 5,7 si l’âge est supérieur à 70 ans.
Cardillo (1) Ginsberg (2)
Nombre de patients 429 426
Antécédent de cancer 23 (5,4%) 315 (73,4 %)
Technique chirurgicale Thoracoscopie vidéo-assistée Thoracoscopie vidéo-assistée
en première intention en première intention
Lésions bénignes Étiologies (% nodules) Hamartochondrome : 72 % Hamartochondrome : 7,9 %
Tuberculome : 6,3 % Ganglion intrapulmonaire : 5,9 %
Fibrose : 4,9 % Autres (ganglion, tumorlet, fibrose, etc.) : 31,1 %
Autres (granulomes, etc.) : 2,9 % Total : 44,9 %
Total : 86,2 %
Influence de la taille Taille moyenne : 1,8 cm En l’absence de cancer connu :
du nodule et antécédents Antécédent de cancer : 3 % 69 % des nodules < 1 cm sont bénins
de cancer En présence de cancer connu :
48,6 % des nodules < 1 cm sont bénins
Âge Moyenne : 49 ans NR
Lésions malignes Étiologies (% nodules) Cancer bronchique : 52 (12,1 %) Cancer bronchique : 26 %
Métastases : 7 (1,6 %) Cancer du sein : 6,7 %
Total : 13,7 % Cancer colique : 5,5 %
Autres : 16,9 %
Total : 55,1 %
Influence de la taille Taille moyenne : 2,31 cm En l’absence de cancer connu :
du nodule Antécédent de cancer : 20,3 % 59 % des nodules > 1 cm sont malins
et antécédents En présence de cancer connu :
de cancer 84 % des nodules > 1 cm sont malins
Âge Moyenne : 59 ans NR
NR : non rapporté.
Tableau I. Étiologies des nodules pulmonaires.
.../...
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La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 4 - juillet-août 2005
À partir de ces valeurs, on peut calculer la probabilité de can-
cer par le rapport : PCa = odds Ca/(1 + odds Ca) où odds Ca
est défini par : odds Ca = LR prévalence x LR âge x LR tabac
x LR taille.
Prenons deux exemples extrêmes :
premier cas : patient de moins de 35 ans, taille du nodule
<1,5 cm, n’ayant jamais fumé : LR taille = 0,1, LR
âge = 0,1, LR tabac = 0,15. Odds Ca = 0,7 x 0,1 x 0,1 x 0,15 =
0,00105.
PCa = 0,00105(0,00105+1) = 0,104 % ;
deuxième cas : patient de 75 ans, taille du nodule : 3 cm,
tabagisme évalué à deux paquets par jour, et jamais sevré :
PCa = 93,1 %.
LES EXAMENS D’IMAGERIE
Radiographie standard et tomodensitométrie
La hiérarchie des examens doit se conformer à deux critères
essentiels : d’une part, la valeur diagnostique de ces examens
et, d’autre part, leur caractère invasif. En effet, il est raison-
nable de commencer par des examens engendrant peu de
morbidité, sauf dans le cas précis où la probabilité clinique de
cancer est forte. Dans cette situation, afin d’éviter un retard par-
fois délétère au patient, la chirurgie apporte le diagnostic et le
traitement.
Si la radiographie standard permet de détecter des signes
pouvant évoquer la malignité (corona radiata), ou la bénignité
(calcification), sa sensibilité ne sera jamais comparable à celle
de la tomodensitométrie. Henschke et al. retrouvaient une sen-
sibilité assez faible de la radiographie, à la fois pour le dia-
gnostic de nodules non calcifiés (30,4 %) et pour le diagnos-
tic de nodules malins (10 % !). Même pour les images de
calcification, le scanner est plus sensible (7).
Le scanner thoracique à haute résolution permet de détecter les
nodules pulmonaires avec une grande sensibilité et de guider
les explorations (ponction sous scanner, vidéothoracoscopie,
etc.). En effet, les coupes millimétriques permettent d’analyser
le nodule avec une densitométrie exacte, en évitant l’effet de
volume partiel. Grâce à l’avènement du scanner spiralé, on
peut effectuer des mesures de nodules en trois dimensions, et
ainsi calculer les variations de volume du nodule avec plus
d’exactitude qu’avec les images bidimensionnelles (8).
Associé à l’injection de produit de contraste, le scanner permet
d’augmenter la sensibilité de détection d’un nodule malin, par
analyse du flux sanguin : avec un seuil de rehaussement fixé à
15 HU, la sensibilité est de 98 % et la spécificité de 58 % (9). Ce
résultat semble donc attester qu’un rehaussement ne dépassant
pas 15 HU prédit fortement la bénignité du nodule (le rehausse-
ment moyen des granulomes et des nodules bénins est de
10 HU). Le scanner dynamique pourrait affiner la démarche dia-
gnostique par l’analyse de la hauteur de pic ou par le rapport
nodule-aorte (10). Enfin, la technique appelée “maximum-inten-
sity-projection” (MIP) correspond, à travers une superposition
d’images axiales, à la projection des organes de plus haute den-
sité dans une image en deux dimensions. Elle sélectionne surtout
les vaisseaux et les nodules pulmonaires, et efface les portions
de faible densité comme les structures aérées. En pratique, elle
permet de différencier les nodules pulmonaires centraux des
vaisseaux qui prennent un aspect tubulé
(figure)
. Selon Gruden
et al. (11), la technique en MIP peut diagnostiquer des nodules
périphériques et centraux des maladies métastatiques passés
inaperçus au scanner conventionnel.
La tomographie par émission de positons
Cet examen nouveau utilisant la fixation du 2-[F-18] fluoro-2-
désoxy-D-glucose pour mesurer le métabolisme du glucose
dans différents tissus permet de détecter la plupart des cancers.
En oncologie thoracique, il est doublement intéressant :
Sa très grande sensibilité permet d’apporter des arguments
diagnostiques ; il est supérieur, en sensibilité, au calcul de
probabilité bayésien (12), et à la biopsie transthoracique
(tableau II) (13). Toutefois, cet examen pèche en sensibilité
dans trois circonstances : le carcinome bronchiolo-alvéolaire (la
TEP serait négative dans plus de la moitié des cas), la tumeur
carcinoïde et le nodule de taille inférieure à 1 cm. Une étude
très récente (14) a recherché, à partir de 3 912 patients porteurs
d’un cancer bronchique prouvé histologiquement, le taux de
faux négatifs : seuls 0,5 % des patients ne fixaient pas à la
TEP ; parmi ces 20 cas, l’adénocarcinome était prédominant
Figure. Principe des images en MIP.
Images anatomiques
de deux vaisseaux
et d’un nodule,
sectionnées par trois
coupes axiales.
Scanner simple :
impossibilité
d’apprécier
les rapports
entre les nodules
vasculaires
et le nodule solitaire.
Maximum-intensity-
projection :
distingue
les vaisseaux
dans leur continuité,
sans rapport
avec le nodule.
Tableau II. Comparaison TEP et ponction sous scanner (13).
Sensibilité Spécificité Valeur prédictive Valeur prédictive Exactitude
(%) (%) positive (%) négative (%) diagnostique (%)
TEP TDM 100 78 93 100 94
Ponction transthoracique 81 100 100 64 86
MISE AU POINT
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La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 4 - juillet-août 2005
(dont 30 % de bronchiolo-alvéolaires), et le risque de faux
négatifs était étroitement corrélé à la précocité du stade de
Mountain (70 % de stade IA, 25 % de stade IB, 5 % de stade IV).
Cet examen est moins remarquable en spécificité (79 à 100 %),
car certaines pathologies (15), au premier rang desquelles les
granulomatoses, sont fréquemment positives (en Europe, il s’agit
des mycobactérioses, d’aspergillose et de sarcoïdose, en Amé-
rique, de l’histoplasmose et de la coccidioïdomycose).
Cet examen permet d’améliorer le bilan d’extension initial,
en éliminant les chirurgies inadaptées, ou, inversement, en
incluant des patients dans un programme chirurgical dont ils
avaient été exclus dans un premier temps : ainsi, il détecte des
métastases occultes dans 14 % des cas. Associé au scanner, il
évalue de manière fiable l’extension médiastinale, en différen-
ciant notamment les ganglions hilaires (N1) et subaortiques
(N2), une tumeur paramédiastinale d’un ganglion inter-tra-
chéo-bronchique (16). En conclusion, la TEP élimine
21,7 % de thoracotomies chez des patients initialement consi-
dérés comme opérables (17).En revanche, pour les stades pré-
coces (I et II), elle modifie l’attitude thérapeutique dans 13 % des
cas, mais n’influe pas sur le nombre de thoracotomies [car
les quelques stades IIIA sont des mini-N2 qui restent opé-
rables, les métastases viscérales diagnostiquées uniquement à
la TEP étant rares dans cette population] (18).
SPECT
Il s’agit d’une tomographie utilisant un analogue de la
somatostatine (le dépréotide) lié au technétium 99 pour dévoiler
les organes atteints. Blum et al. ont évalué la valeur diagnos-
tique du “SPECT” (19). Sur les 114 sujets porteurs de nodules
inférieurs à 6 cm, la sensibilité était élevée et la spécificité
intermédiaire (tableau III). Ces résultats, presque superposables
à ceux de la TEP, rendent cet examen intéressant, surtout pour
les centres ne disposant pas de la TEP pour des raisons écono-
miques ou géographiques.
LA BIOPSIE
Elle est indiquée quand la probabilité de lésion bénigne est
suffisamment forte pour éviter la chirurgie d’emblée.
La ponction transthoracique a une sensibilité variant de
80 à 95 % si la situation du nodule est périphérique. Les
mauvais candidats sont porteurs d’une lésion centrale, de
diamètre inférieur à 1,5 cm ou d’une cavitation (23). Les
complications les plus notables sont le pneumothorax (pou-
vant compliquer jusqu’à 30 % des ponctions, mais nécessi-
tant un drainage dans seulement 15 % des cas), et l’hémor-
ragie [rarement grave] (24). Enfin, l’ultrasonographie pour-
rait permettre d’améliorer la valeur prédictive négative de
la biopsie transthoracique et prévenir une chirurgie futile
dans un nombre important de cas [64 %] (25).
Les nodules sont rarement visibles en fibroscopie bron-
chique, mais, sous amplificateur de brillance, cette tech-
nique, associée à un brossage distal, permet d’apporter le
diagnostic dans 60 % des cas (26). De même, une fibrosco-
pie bronchique avec biopsies ou brossages distaux, guidée
par le scanner, permet de diagnostiquer des nodules malins
dans 69 % des cas (27). L’ultrasonographie endobron-
chique sous amplificateur de brillance, pratiquée par des
opérateurs entraînés, a une sensibilité, une spécificité et
une exactitude diagnostique supérieures à celles de la
fibroscopie faite sous amplificateur de brillance seule (28).
Enfin, la navigation électromagnétique est une technique
de repérage des petites lésions périphériques qui pourrait
augmenter la sensibilité des biopsies transbronchiques,
surtout si un scanner thoracique tridimensionnel est effectué
au préalable (29).
LA CHIRURGIE
Lorsque la présomption de cancer est grande, ou si des exa-
mens n’ont pas permis d’apporter des arguments formels éli-
minant un cancer (comme les résultat d’une TEP), on propo-
sera une chirurgie, plutôt par thoracoscopie vidéo-assistée. En
effet, cette dernière engendre une morbidité très faible (30), à
l’inverse de la thoracotomie, dont les complications postopéra-
toires immédiates seraient estimées entre 20 et 44 %, et dont la
mortalité à 30 jours serait de 3 à 6 % (31) ; ces derniers résul-
tats sont toutefois à pondérer sérieusement, car la population
étudiée était à risque cardiorespiratoire et âgée. La durée de
séjour pour une thoracotomie est estimée à 7,8 jours, contre
4,6 jours pour la thoracoscopie chirurgicale (30). Celle-ci a une
sensibilité et une spécificité maximales si la distance du nodule
à la plèvre est inférieure à 5 mm et le diamètre supérieur à
1cm (32). Le risque de conversion en thoracotomie est
toutefois grand, estimé à 25 %.
APPORTS DES ÉTUDES DE DÉPISTAGE
ET DE SURVEILLANCE
La majorité d’entre elles utilisent le scanner spiralé à faible
dose. Leur principal défaut concerne les populations
d’études, qui, regroupant, pour la plupart, des patients exposés
Sensibilité Spécificité Valeur prédictive Valeur prédictive
(%) (%) positive (%) négative (%)
SPECT Blum (19) 96,6 73,1 92,4 86,3
Bury (20) 100,0 88,0 94,0 100,0
TEP-scan Dewan (21) 95,0 80,0 90,0 89,0
Gupta (22) 93,0 88,0 92,0 95,0
Tableau III. Valeur diagnostique de la TEP et du SPECT.
177
La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 4 - juillet-août 2005
aux carcinogènes et asymptomatiques, ne sont pas parfaitement
identiques à celles rencontrées en pratique courante.
Leur objectif est multiple (tableau IV) :
déterminer le taux de nodules non calcifiés. La prévalence des
nodules varie de 5,1 % à 51,4 %. Ces différences dépendent du
degré de résolution du scanner, mais aussi de l’origine géogra-
phique de certaines populations (les populations américaines étu-
diées étaient porteuses d’un nombre d’histoplasmoses non négli-
geable). Ce taux ne varie pas avec l’âge, contrairement au cancer
bronchopulmonaire. La valeur prédictive positive du scanner à
faible dose (c’est-à-dire la proportion de nodules correspondant
à un cancer) est faible, surtout chez les patients âgés de moins de
50 ans. Elle dépend beaucoup du profil des populations étudiées
(âge, exposition aux carcinogènes ou plutôt à certaines maladies
infectieuses pouvant simuler une néoplasie…). Les valeurs de la
sensibilité et de la spécificité ne peuvent être qu’approximatives,
car il n’est pas possible d’avancer le nombre exact de faux néga-
tifs dans ces études ;
déterminer la prévalence du cancer bronchique dans une popu-
lation définie. Selon les études, elle est de 0,4 à 2,7 %. Ces
variations s’expliquent par la différence d’âge et de consomma-
tion tabagique entre les populations d’étude ;
évaluer l’incidence annuelle du cancer pulmonaire : elle est
faible, variant de 0,07 à 0,4 % ;
diagnostiquer le cancer à un stade précoce : le scanner est effi-
cace puisqu’il diagnostique des stades IA dans 80 % des cas, alors
que ce stade ne représente que 7 % des cancers bronchiques hors
dépistage. Les adénocarcinomes sont de loin les plus fréquents
(54,5 à 94,6 % selon les études), et il n’y a pas d’arguments convain-
cants pouvant expliquer la différence entre ce taux très élevé d’adé-
nocarcinomes et celui, très inférieur, retrouvé en pratique courante ;
diminuer la mortalité par cancer bronchique et la mortalité glo-
bale. Cet objectif ultime sera difficile à atteindre compte tenu
de l’absence de randomisation initiale dans l’ensemble de ces
études. Pour espérer diminuer la mortalité du cancer bronchique,
il faut non seulement augmenter le nombre de patients opérables,
mais aussi diminuer celui de patients inopérables. En l’absence
de cette dernière condition, on ne fait qu’augmenter le nombre
de cancers bronchiques diagnostiqués sans diminuer le nombre
total de décès liés à cette pathologie ;
définir une attitude diagnostique et thérapeutique en fonction
de la taille du nodule et des facteurs de risque.
Une étude a évalué l’association du scanner à faible dose et
de la TEP-TDM chez des patients à risque (38) : les critères
de sélection pour une biopsie diagnostique comprenaient la
taille > 2 cm, et, pour les lésions suspectes de plus de 7 mm,
l’analyse du rehaussement iodé (> 30 UH) et la positivité de la
TEP. Les autres nodules étaient suivis annuellement. Cette atti-
tude a permis d’opérer tous les nodules cancéreux, au prix de
6interventions pour lésion bénigne sur 27 au total. À noter que
l’analyse du rehaussement iodé ne s’est pas révélée inférieure à
la TEP en termes d’exactitude diagnostique.
ATTITUDE PRÉCONISÉE
DEVANT UN NODULE PULMONAIRE SOLITAIRE
Ost et al. (39) ont défini un algorithme thérapeutique inspiré
de ces études de dépistage. Dans un premier temps, il ont
exclu ceux dont les valeurs fonctionnelles respiratoires ne
sont pas compatibles avec un geste curateur (VEMS < 0,8,
VO2max <15ml/kg/mn) et les nodules stables depuis deux ans
ou calcifiés.
Il ont proposé :
la thoracoscopie vidéo-assistée pour tout nodule suspect
s’accompagnant d’une probabilité de cancer élevée, c’est-à-dire
PCa>60%;
une batterie d’examens comprenant selon les cas la TEP, le
scanner avec étude du rehaussement iodé, la ponction
transthoracique, voire la bronchoscopie pour tous les cas de
probabilité intermédiaire (10-60 %) ;
la surveillance par scanner à haute résolution à 3, 6, 9, 12, 18
et 24 mois pour tout patient ayant un score de probabilité infé-
rieur à 10 %, ou pour lequel l’ensemble des examens précités
sont revenus négatifs.
Toutefois, dans deux circonstances, l’attitude proposée par Ost
et al. n’est pas valable :
Tableau IV. Résultats des études de dépistage et de surveillance des nodules pulmonaires.
Nombre Âge Tabagiques Prévalence Valeur Incidence Stade IA Adéno- Décès
de patients (%) nodules non prédictive annuelle (%) carcinomes par cancer
calcifiés (%) positive (%) du cancer (%) (%)
Henschke (7) 1 000 60 100 23 2,7 NR 81,5 78,6 NR
Médiane : 67 ans
Sone (33) 5 483 40 46,1 5,1 0,4 0,4 91,3 82,6 1
moyenne : 64 ans
Diedrich (34) 817 40 100 43 1,3 NR 45,5 54,5 3
médiane : 54 ans
Nawa (35) 7 956 50 62,1 26,4 0,45 0,07 57 94,6 NR
Sobue (36) 1 611 40-79 86 11,5 0,87 0,30 69,2 76,9 NR
Swensen (37) 1 520 50 96,7 51,4 1,38 0,25 59,1 68,2 1
moyenne : 59 ans
NR : non rapporté
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