Urgences Coma hypopituitaire en endocrinologie, diabétologie et maladies métaboliques

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Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (IX), n° 6, novembre/décembre 2005
Urgences
en endocrinologie, diabétologie
et maladies métaboliques
en endocrinologie, diabétologie
et maladies métaboliques
Coma hypopituitaire
Pituitary coma
J.M. Kuhn*
Définition
Qu’elle soit révélatrice ou non de
l’affection, la décompensation aiguë
d’une insuffisance antéhypophysaire
résulte de la carence plus ou moins
profonde en glucocorticoïdes, en
raison du déficit corticotrope, en
hormone thyroïdienne secondaire à
l’insuffisance thyréotrope et en hor-
mone de croissance.
Cadre de survenue
Quelle que soit la cause de l’insuffi-
sance antéhypophysaire, la décom-
pensation aiguë est la résultante de
la conjonction de deux facteurs
simultanés :
l’effondrement de la sécrétion
hormonale antéhypophysaire ;
un stress de forte intensité (infection
aiguë, intervention chirurgicale, etc.).
Diagnostic positif
Le coma hypopituitaire, terme évo-
lutif d’une insuffisance antéhypo-
physaire non traitée, emprunte sa
symptomatologie à la défaillance
surrénalienne et au coma myxœdé-
mateux :
il s’agit d’un coma calme, profond,
flasque ;
sans signe de localisation neuro-
logique.
Il s’associe à :
une pâleur des téguments ;
une hypothermie ;
une bradycardie ;
une hypotension artérielle.
L’hypoglycémie, conséquence du
déficit en glucocorticoïdes et en
GH, peut être marquée. L’hypona-
trémie de dilution, par sécrétion
inappropriée d’hormone antidiuré-
tique secondaire au déficit cortico-
trope, est moins marquée que dans
les décompensations aiguës des
insuffisances surrénaliennes pri-
maires. L’hyperkaliémie est le plus
souvent absente. À ce stade, un pré-
lèvement pour mesure du cortisol et
de la T4 libre plasmatique aura été
effectué, puis le traitement initié.
Les résultats viendront respecti-
vement confirmer le diagnostic.
La démarche diagnostique devra éga-
lement identifier le facteur causal de la
décompensation. Celui-ci peut en effet
nécessiter un traitement spécifique.
Cela est particulièrement vrai pour
l’apoplexie hypophysaire suspectée
sur la précession au tableau précédent
d’une symptomatologie évocatrice
d’hypertension intracrânienne et de
troubles visuels. L’imagerie neuro-
radiologique confirmerait l’hématome
intrasellaire, qui peut nécessiter la
réalisation rapide d’une intervention
neurochirurgicale de décompression.
Par ailleurs, la décompensation sera
favorisée par un stress ou par une
infection aiguë quelconque ou
encore par un non-respect des règles
de prévention.
Conduite à tenir
La thérapeutique d’urgence de la
défaillance hypophysaire aiguë repose
sur la compensation des pertes hydro-
électrolytiques, sur l’instauration
d’une substitution hormonale et sur
le traitement spécifique de l’affec-
tion déclenchante.
La spoliation hydroélectrolytique
et
les troubles métaboliques associés
doivent être corrigés par l’apport
intraveineux de soluté glucosé enri-
chi en électrolytes. L’apport liqui-
dien est adapté à l’importance de la
déshydratation et à l’intensité du
syndrome de sécrétion inappropriée
d’hormone antidiurétique. La quan-
tité de liquide à apporter est en
moyenne de 2 à 3 litres dans les
24 premières heures. Dans un souci
d’efficacité et compte tenu des
troubles de conscience, la voie
d’abord ne peut être qu’intravei-
neuse. L’apport en électrolytes est
adapté à la correction de l’hypona-
trémie en ayant présent à l’esprit
que la compensation en hydrocorti-
sone tarira la sécrétion inappropriée
d’hormone antidiurétique, et est donc
en soi un facteur de restauration d’une
normonatrémie.
L’apport quotidien de base en gluco-
corticoïdes
est de 100 mg, admi-
nistrés de façon optimale par voie
intraveineuse continue à la seringue
autopousseuse. La posologie pourra
être rapidement réduite et le relais
pris par la forme orale. L’adjonc-
tion de minéralocorticoïdes n’est
pas justifiée. La substitution en
hormone thyroïdienne repose sur
l’administration orale de T4 (avec
toutes les précautions d’usage adap-
tées à l’état clinique et à l’âge du
patient) une fois le déficit cortico-
trope compensé et le patient
“réveillé”. Il est en effet rarissime
que l’intensité des symptômes du
coma hypopituitaire nécessite la
mise en route d’une substitution en
hormone thyroïdienne suivant les
* Service d’endocrinologie, diabète et maladies
métaboliques, CHU de Rouen.
Troisième partie : Hypophyse-Surrénales
modalités du coma myxœdémateux
(lire : Métabolismes Hormones Dia-
bètes et Nutrition 2005[IX];4:117-9).
L’affection causale
doit être dépistée
et traitée par une thérapeutique spé-
cifique. Il peut s’agir d’antibiotiques
si le processus causal est infectieux,
d’une intervention neurochirurgicale
de décompression en cas d’apoplexie
hypophysaire.
Prévention
Le traitement préventif de la
décompensation aiguë repose sur
deux principes essentiels :
l’éduca-
tion du patient
et l’application de
règles thérapeutiques simples.
Le patient atteint d’insuffisance
hypophysaire doit avoir acquis les
notions suivantes :
nécessité d’une adaptation de la
dose quotidienne de la substitution
en glucocorticoïdes aux conditions de
la vie courante. Il doit avoir compris
le besoin d’un accroissement transi-
toire de la posologie en cas de stress
ou d’affection aiguë quelconque:
passage à la forme injectable si les
troubles digestifs rendent la prise
orale impossible ;
port d’une carte spécifique men-
tionnant le traitement substitutif
suivi et sa posologie;
nécessité d’informer l’anesthé-
siste en cas d’intervention chirurgi-
cale programmée ;
traitement hormonal substitutif
pris quotidiennement et ad vitam.
Les règles thérapeutiques simples
comportent :
un apport alimentaire sodé quoti-
dien normal (150 à 200 mmol/24 h)
en sachant que l’insuffisance hypo-
physaire ne représente pas une
contre-indication absolue à l’instau-
ration d’un régime désodé ;
une modulation de la posologie de
la substitution en glucocorticoïdes
en fonction d’éventuelles asso-
ciations médicamenteuses parti-
culières responsables d’induction
enzymatique ;
un passage à la forme injectable
lorsque des circonstances prévi-
sibles seront un obstacle à la prise
orale.
Références
Gaillard RC. Pituitary gland emergencies.
Baillieres Clin Endocrinol Metab 1992;6:57-75.
Kuhn JM, Lefebvre H, Folope V. Insuffisance
hypophysaire. Encyclopédie Médico-chirurgicale,
Endocrinologie 2005.
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