La Lettre du Cancérologue • Vol. XVIII - n° 1 - janvier 2009 | 31
DOSSIER THÉMATIQUE
situation a été assez bien clarifiée pour les premières
lignes, plusieurs études et une méta-analyse étant
disponibles (14, 15). La majorité des études plaide
pour une utilisation courte de la chimiothérapie,
et certaines publications considèrent qu’il est
prudent de se limiter à 4 cycles pour le traitement
de première ligne (16). Une étude coréenne publiée
cette année (17) confirme l’absence de bénéfice en
termes de SG à poursuivre la chimiothérapie au-delà
de 4 cycles ; cependant, elle montre un bénéfice en
termes de survie sans progression (SSP) pour les
patients qui poursuivent la chimiothérapie jusqu’à
6 cycles. Ce bénéfice semble bien modeste au regard
de la toxicité additionnelle de ces 2 cycles de chimio-
thérapie supplémentaires, d’autant plus que ceux-ci
semblent limiter la possibilité d’un traitement de
deuxième ligne (17). Cette limitation du nombre
de cycles de chimiothérapie de première ligne pose
naturellement la question d’un éventuel traitement
de maintenance. Le concept de traitement de main-
tenance, c’est-à-dire d’un traitement administré chez
les patients stables ou répondeurs immédiatement
après la première ligne, peut s’ appliquer à la fois à la
chimiothérapie et aux thérapeutiques ciblées.
Le concept et les modalités de la maintenance sont
discutés, certains considérant que les molécules
utilisées dans cette phase doivent être choisies parmi
celles utilisées pendant le traitement initial, d’autres
études choisissant un traitement de maintenance
différent de celui de la première ligne.
Plusieurs études actuellement en cours évaluent
ce concept de maintenance ; elles concernent la
chimiothérapie et les TKI de l’EGFR (étude SATURN,
comparant l’erlotinib à une simple surveillance,
étude IFCT-GFPC 0502, confrontant l’erlotinib à
la gemcitabine en monothérapie ou à une simple
surveillance). Dans une étude japonaise présentée
au congrès de l’ASCO (18), 598 patients atteints de
cancer de stades IIIB ou IV, de performance status
(PS) 0 ou 1 ont été traités soit par 3 cycles de chimio-
thérapie puis géfitinib, soit par chimiothérapie seule.
Il s’agissait majoritairement d’adénocarcinomes
(467 cas). Le traitement le plus fréquemment admi-
nistré était l’association paclitaxel-carboplatine
(64 % et 65 % respectivement dans les 2 groupes).
Dans cette population sélectionnée de patients japo-
nais, le traitement séquentiel par géfitinib améliore
la SSP, mais n’influe pas sur la SG. Les analyses de
sous-groupes sont surprenantes : il n’y a pas d’effet
sur la survie dans le groupe de patients non fumeurs
traités par géfitinib, alors que, contre toute attente,
on en observe un chez les fumeurs, en particulier chez
les porteurs d’adénocarcinomes. L’absence d’effet
viendrait probablement du fait que les patients
reçoivent du géfitinib au moment de la deuxième
ligne thérapeutique dans le groupe chimiothérapie
seule. Le géfitinib a un effet positif sur la SG pour
tous les patients porteurs d’adénocarcinomes, qu’ils
soient fumeurs ou non.
Une autre étude de phase II (FASTACT) [19], réalisée
aussi en Asie, compare un groupe de 78 patients
atteints de cancer de stades IIIB/ IV traités par
6 cycles de gemcitabine et cisplatine suivis d’erlotinib
en cas de progression à un groupe de 76 patients
traités par la même chimiothérapie associée à de
l’erlotinib prescrit de J15 à J28 de chaque cycle puis
en traitement de maintenance jusqu’à progression.
Le groupe traité par l’erlotinib et la chimiothé-
rapie a une meilleure SSP (médiane de 31,3 contre
23,7 semaines ; p = 0,01) et un meilleur taux de
réponse (36,8 % contre 24,4 %).
La maintenance par bévacizumab a fait partie du
schéma de l’étude pivotale ECOG ayant conduit à
l’enregistrement du bévacizumab en première ligne
(20), et c’est surtout pour satisfaire aux modalités
de cette étude d’enregistrement, en l’absence
d’étude randomisée, que s’est imposé le maintien
du traitement antiangiogène jusqu’à progression
ou intolérance.
En ce qui concerne la chimiothérapie, la maintenance
ne peut être qu’une monothérapie, la toxicité devant
être limitée. La vinorelbine a été étudiée, sans que son
intérêt soit mis en évidence dans ce contexte (21) ;
la gemcitabine a montré un avantage en matière de
temps jusqu’à progression (TTP) sans montrer de
bénéfice en termes de SG (22). Deux études ont été
présentées, l’une au congrès de l’ASCO 2007, portant
sur l’utilisation du docétaxel soit en maintenance,
soit au moment de la rechute, l’autre à l’ASCO 2008,
portant sur son utilisation avec le pémétrexed. Dans
l’étude présentée par P. Fidias à l’ASCO 2007 (23), la
prescription de docétaxel immédiatement après un
traitement d’induction chez des patients répondeurs
ou stables après 4 cycles de gemcitabine et cisplatine
permettait d’obtenir une meilleure SSP que dans un
groupe de patients recevant la même chimiothérapie
d’induction, mais auxquels le docétaxel n’était pres-
crit qu’au moment de la progression ultérieure. Le
pémétrexed, quant à lui, a été comparé à un placebo
en monothérapie de maintenance administrée à des
patients contrôlés après 4 cycles de chimiothérapie
à base de platine (sans pémétrexed) dans une étude
ayant pour critère de jugement principal la SSP (24).
Le bénéfice en termes de SSP se révèle très signifi-
catif, avec un HR de 0,599 (0,49-0,73). En revanche,
l’effet sur la SG (données préliminaires) n’atteint pas
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