de pr e r e v u e

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r evue
de pre
Des matrices
de collagène augmentent
la survie de cellules
souches transplantées
et contribuent à l’amélioration
fonctionnelle de cœurs
ischémiques
L
a transplantation de cellules souches
en cardiologie est actuellement en
plein développement pour traiter les
cardiomyopathies d’étiologie ischémique, ainsi que les non ischémiques.
Cependant, ce procédé est limité par la
faible viabilité des greffons. Des techniques visant à augmenter la survie des
cellules transplantées en utilisant des
matrices de collagène associées à des
facteurs de croissance ont été proposées,
inspirées par les avancées d’une nouvelle
discipline : l’ingénierie tissulaire.
Dans cet article expérimental, les auteurs
utilisent un modèle de transplantation
cardiaque hétérotopique chez le rat, le
working heart, qui permet d’évaluer
fonctionnellement les résultats de techniques de réparation des infarctus utilisant la thérapie cellulaire associée aux
matrices en collagène et aux facteurs de
croissance. Les cellules choisies sont des
cardiomyoblastes H9c2 (American Type
Culture Collection) “transduits” par un
vecteur lentiviral afin qu’ils expriment la
luciférase de luciole et la protéine fluorescente verte (GFP). Des rats Lewis
ont subi une ligature de l’artère coronaire gauche induisant un infarctus de
la paroi antérieure du ventricule gauche.
Les cœurs ont été prélevés et restaurés ex
vivo grâce aux cellules H9c2 génétiquement marquées. Des études comparatives
ont été réalisées en associant :
✓ Des matrices tridimensionnelles de
collagène (Gelfoam® [GF]) produites à
partir de peau de porc.
✓ Des matrices sous forme de gel
(Matrigel® [MG]) provenant de sarcomes
de souris. Ce matériel est constitué de
protéines extracellulaires composées de
laminine et de collagène type IV.
✓ Le facteur de croissance endothélial
vasculaire (VEGF) [vascular endothelial
growth factor].
✓ Le facteur de croissance de fibroblastes (FGF) [fibroblast growth
factor].
la restauration de grands infarctus du
myocarde par des approches d’ingénierie tissulaire.
Cinq groupes ont été créés. Groupe 1 :
cellules diluées en suspension saline ;
groupe 2 : cellules semées sur une
matrice de collagène (Gelfoam ® ) ;
groupe 3 : cellules semées sur GF/
Matrigel® (GF/MG) ; groupe 4 : cellules
semées sur GF/MG/VEGF (10 µg/ml) ;
groupe 5 : cellules semées sur GF/MG/
FGF (10 µg/ml). Les cœurs ont alors
été réparés ex vivo et ensuite transplantés en région abdominale chez des
rats receveurs syngéniques (modèle de
cœur fonctionnel). Les contrôles ont
subi un infarctus suivi de l’implantation de GF ou d’une injection saline.
La survie des cellules a été évaluée en
utilisant la bioluminescence optique à
J1, J5, J8, J14 et J28 en postopératoire.
À 4 semaines, la fraction de raccourcissement et la fraction d’éjection ont été
déterminées en utilisant respectivement
l’échocardiographie et l’imagerie par
résonance magnétique. Les caractéristiques du greffon ont été évaluées par
immunohistologie.
Commentaires. Le développement de
nouveaux médicaments a amélioré le
pronostic de l’insuffisance cardiaque.
Cependant, malgré un traitement
médical idéal, un pourcentage significatif de malades évolue vers une progression de l’insuffisance cardiaque, et ces
malades sont candidats à une thérapie
plus invasive (transplantation cardiaque,
assistance mécanique circulatoire, cœur
artificiel). Le traitement consistant à
transplanter des cellules souches vivantes
dans le myocarde pathologique ainsi
qu’à injecter des facteurs de croissance
(angiogéniques et/ou myogéniques)
entraînerait un processus de régénération capable de réduire la fibrose ventriculaire survenue lors d’un infarctus du
myocarde. Ces approches deviennent
progressivement de nouvelles voies
thérapeutiques de la défaillance ventriculaire postischémique. Le développement
de la biologie cellulaire et moléculaire
associé maintenant au développement
de nouveaux biomatériaux offerts par
l’ingénierie tissulaire permet d’envisager
l’application clinique à large échelle de
ces stratégies.
Résultats. Les signaux bioluminescents
à J5, J8 et J14 étaient plus élevés pour
les greffons à base de GF comparativement aux simples injections de H9c2
(p < 0,03). Les signaux étaient plus
élevés pour les greffons GF/MG que
pour GF seul (p < 0,02). Des cellules
H9c2, GFP positives et fusiformes, ont
été trouvées intégrées dans les zones
limitrophes d’infarctus à J28. La fonction
ventriculaire gauche des cœurs implantés
avec les greffons à base de collagène
était meilleure qu’avec les contrôles
(p < 0,05). Le VEGF ou le FGF n’ont
pas amélioré davantage la viabilité du
greffon ni la fonction cardiaque.
Conclusions. Les matrices de collagène augmentent la survie précoce des
cardiomyoblastes après transplantation
dans les cœurs ischémiques et mènent à
une fonction VG améliorée. Une optimisation plus avancée de la conception du greffon devrait rendre efficace
240
J.C. Chachques, Paris
Kutschka I et al. Collagen matrices enhance survival
of transplanted cardiomyoblasts and contribute to
functional improvement of ischemic rat hearts. Circulation 2006;114(Suppl. 1):I167-73.
Complexité temporospatiale des interactions
conduisant à l’établissement d’une
tolérance : le système immunitaire
en 4D
D
e nombreux travaux expérimentaux
ont démontré qu’il était possible
d’induire la survie indéfinie d’un greffon
allogénique vascularisé par l’induction
d’un état de tolérance chez le receveur murin. Par la suite, l’analyse des
Le Courrier de la Transplantation - Volume VI - n o 4 - octobre-novembre-décembre 2006
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de pre
mécanismes par lesquels ces protocoles
“d’induction de tolérance” fonctionnent
a souligné le rôle de différentes populations cellulaires, parmi lesquelles les
cellules dendritiques (CD), responsables
de la présentation des alloantigènes, et
les cellules T régulatrices induites
(Treg), qui contrôlent la réponse alloimmune.
particulièrement louable au moment où
de très nombreux travaux se contentent
d’une approche in vitro rendant difficile
l’extrapolation au vivant. Il est ainsi
extrêmement intéressant de constater
que les mêmes DC qui, localisées dans
le ganglions, induisent une tolérance,
sont responsables du rejet quand elles
migrent dans la rate.
Le travail d’Ochando et al., publié
récemment dans Nature Immunology,
est remarquable car il constitue une
formidable synthèse de la complexité
temporo-spatiale des interactions cellulaires conduisant à l’établissement d’une
tolérance.
Ce qui se passe dans le ganglion reste
mystérieux, mais les auteurs démontrent
néanmoins le lien entre la présence des
DC plasmocytoïdes et l’induction (TGFβ
dépendante) de cellules T régulatrices
(CD4+ CD25+ foxp3+ CCR4+) à
partir des lymphocytes T CD4+ CD25naïfs.
Les auteurs utilisent le modèle de transplantation cardiaque hétérotopique
chez la souris (Balb/c=>C57BL/6),
dans lequel une survie indéfinie des
greffons est observée si le receveur
est préalablement traité par des splénocytes du donneur et par un anticorps
anti-CD40L. Les auteurs démontrent
que cet état de tolérance est dépendant
de la sous-population des DC plasmocytoïdes, capables d’infiltrer le greffon
pour se charger en alloantigènes et
d’acquérir un phénotype tolérogène.
Ce dernier résulte non seulement de leur
capacité à présenter les alloantigènes
dans un contexte peu immunogénique
(lorsqu’elles arrivent à maturité, les DC
plasmocytoïdes augmentent leur expression de MHC II, mais pas de CD80 ni
de CD86), mais aussi (et surtout) de
l’acquisition d’un ensemble de ligands
(CD62L, ICAM1, LFA1, VLA4), qui
vont favoriser leur migration par voie
sanguine (et non lymphatique !) vers
les ganglions lymphatiques. En effet,
les auteurs démontrent que, plus que
le phénotype, c’est l’endroit où les
DC plasmocytoïdes vont migrer qui
détermine dans quel sens la réponse
immunitaire va pencher (rejet versus
tolérance). Cet effort pour intégrer la
réponse immunitaire dans l’espace est
En conclusion, ce travail, dont les
conclusions s’appuient sur une masse
impressionnante d’expériences, souligne
la nécessité d’intégrer la réponse immunitaire dans l’espace pour comprendre les
mécanismes conduisant à l’établissement
d’une tolérance immune. Ce concept
selon lequel l’endroit où se développe
la réponse immune conditionne sa nature
est particulièrement important au moment
où des résultats récents suggèrent que le
greffon est lui-même est un site d’initiation de l’allo-immunité.
O. Thaunat, Paris
Ochando JC, Homma C, Yang Y et al. Alloantigen-presenting plasmacytoid dendritic cells mediate tolerance to
vascularized grafts. Nat Immunol 2006;7(6):652-62.
Influence de l’exercice
sur les cellules Treg
Cet engouement est vraisemblablement lié
au fait que les immunologistes ont cru voir
dans cette population cellulaire le Graal de
la tolérance et le moyen de la manipuler.
Si de nombreux travaux ont souligné le
potentiel des populations régulatrices
(puisque les “vieilles T CD4+CD25+”
ont fait des petits), on trouve également
dans cette littérature de merveilleuses
perles, et je ne résiste pas au plaisir de
partager avec vous la dernière en date.
Une équipe de Taïwan vient de rapporter
une étude stupéfiante dans le Br J Sports
Med.
Les conclusions de ce travail sont
formelles : 12 semaines d’exercices
assidus de tai-chi-chuan induisent une
augmentation significative des cellules
Treg circulantes.
Plusieurs questions restent ouvertes :
✓ Est-ce que ces résultats sont reproductibles avec d’autres types de sport
(kung-fu, ping-pong, etc.) ?
✓ Est-ce que l’augmentation observée
est plus importante chez les “ceintures
noires” que chez les débutants ?
✓ Est-ce que cette augmentation fait
courir un risque plus grand d’infection
et/ou de tumeur ?
✓ Un traitement antirejet à base d’exercices de gymnastique chinoise dans la
cour des hôpitaux est-il envisageable
chez les patients transplantés ?
Gageons que la vigueur des recherches
dans le domaine des Treg saura nous
fournir rapidement les réponses à ces
questions.
O. Thaunat, Paris
D
ans le domaine de l’immunologie, les
cellules Treg font incontestablement
figure de superstars. Une simple recherche
MedLine suffit pour s’en convaincre : plus
de 21 000 références sont indexées dans
MedLine sous ce mot-clé.
241
Yeh SH, Chuang H, Lin LW et al. Regular tai chi
chuan exercise enhances functional mobility and
CD4CD25 regulatory T cells. Br J Sports Med 2006;
40(3):239-43.
Le Courrier de la Transplantation - Volume VI - n o 4 - octobre-novembre-décembre 2006
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