Votre mensuel en santé et en sécurité
Vol 9, n
o
8 Octobre 2012
OFFENSIVE CONTRE LA SILICE CRISTALLINE
Le joli sable de la plage est bourré de silice cristalline
(quartz). Sans danger, car inerte. C’est quand on la fait
éclater qu’elle devient poussière et flotte dans l’air en
minuscules particules invisibles, se dépose dans les
poumons, s’y incruste et engendre la silicose, la fibrose
chronique; elle prédispose au cancer du poumon et deviens
insidieuse. On ne rit donc pas avec cette fine poussière, qui
reste six heures en suspension. Et si on ne nettoie pas le sol
où elle se dépose, qu’elle soit sèche ou dans les résidus du jet
de sables à l’eau, elle se remet à flotter au moindre courant
d’air. En respirent non seulement ceux qui en produisent,
mais tous les autres qui passent pas là sur le chantier.
Des dizaines de milliers de travailleurs y sont encore
exposés. Sur les chantiers de constructions, notamment. Il
reste encore beaucoup de sensibilisation à faire, d’autant plus
que plusieurs corps de métier en produisent : maçons,
poseurs de céramique, plombiers, électriciens, menuisiers et
tous ceux qui percent, scient ou polissent le béton, d’une
façon ou d’un autre, ou tout matériau contenant du sable.
René Mathieu, technicien en hygiène du travail au Centre de
santé et de services sociaux (CSSS) Jeanne-Mance, Albert
Pearson, agent de prévention sécurité pour l’entrepreneur
général Canvar et Alex Gligorijevic, surintendant du projet
pour Canvar aussi, ont opté pour une approche originale de
prévention lors de la construction d’un immeuble de 40
étages, rue Sherbrooke Ouest à Montréal, en 2008. « Nous
avons concentré notre intervention sur un seul contaminant,
la poussière de silice cristalline, durant six mois sans relâche,
explique René Mathieu, plutôt que nous intéresser à
plusieurs dangers à la fois comme dans le passé. Nous avons
insisté sur les facteurs de risque et sur la prévention. Je
considère que nous étions au bon endroit au bon moment.
C'est-à-dire qu’il y avait réceptivité du groupe Canvar à la
prévention, avec l’apparition de nouveaux outils avec
captation de la poussière à la source et l’entrée en vigueur en
mars 2008 du changement règlementaire en vertu duquel les
milieux de travail doivent diminuer l’exposition à toute
substance cancérigène. »
250 travailleurs ont été sensibilisés à la poussière de
silice cristalline. Au moins 150 ont suivi une formation.
«Tous ces travailleurs formés deviendront autant de
préventionnistes dans un milieux où ils travailleront à
l’avenir», se réjouit Albert Pearson, qui affirme que plusieurs
d’entre eux n’avaient aucune idée des dangers de cette
poussière. Canvar a profité de la présence d’une vingtaine
d’entrepreneurs sur le chantier pour les sensibiliser.
Ils ont tous découvert l’importance, entre autres, de capter à
la source la poussière de silice cristalline au quartz avec des
outils appropriés qui existent depuis deux ans environ. Par
exemple, aspirateur télescopique pour mèches de plus de six
pouces, perceuse, carotteuse et meuleuse avec filtres HEPA
haute efficacité, qui aspirent et emprisonnent les particules
dans un bac. «Des entrepreneurs présents en ont profité pour
acquérir ces nouveaux outils mieux adaptés à la santé des
travailleurs et de l’environnement», souligne Albert Pearson,
finaliste en 2008 pour le prix innovation en santé et sécurité
au travail. René Mathieu, l’infirmière et le médecin du CSSS
engagés dans ce dossier ont tenu à revenir sur les lieux sur
une période de six mois pour faire d’autres rencontres
d’information et de formation, toujours sur le même sujet.
Pour se rendre compte, finalement, que le message s’est
imprimé dans la tête des gens. «Je pense que notre
persévérance et notre conviction ont été majeures dans cette
histoire», dit-il en conclusion.
Tiré du magazine Prévention au Travail, Volume 22,
Numéro 3, page 38 et 39, été 2009.