
Soins de support en oncologie
Soins de support en oncologie
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La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 5 - mai 2007
la tolérance entre les sujets les plus âgés et les plus jeunes.
Cependant, le concept de “vulnérabilité liée à l’âge” semble être
réaliste. À l’appui de ce concept, l’intensifi cation de la toxicité
de la CT peut être en rapport avec l’allongement de la demi-vie
des cytotoxiques augmentant l’organisme à leur exposition ainsi
qu’à d’autres modifi cations pharmacocinétiques et pharmaco-
dynamiques liées à l’âge.
LES TOXICITÉS DIGESTIVES
Les nausées-vomissements (NV) chimio-induits sont ceux
les plus éprouvants pour les patients : malgré l’arrivée des
sétrons en 1995, ils restent en tête de liste des EI les plus
redoutés (4, 5). Ils sont un facteur de risque supplémentaire
de déshydratation, complication particulièrement grave chez
le sujet âgé, l’hydratation pouvant être déjà compromise par
une diminution de la sensation de soif, et donc des apports.
Les facteurs de risque des NV chimio-induits sont rappelés
dans le tableau I.
Parmi les diff érentes classes d’antiémétiques (antidopaminer-
giques, corticoïdes et antagonistes des récepteurs 5-HT3),
l’aprépitant est un antagoniste sélectif de haute affi nité pour
les récepteurs NK1 de la substance P. Cet antiémétique puis-
sant d’action centrale a une effi cacité supérieure à celle d’un
protocole classique à base de corticoïdes et de sétrons (apré-
pitant + protocole classique > protocole classique) [6, 7]. Les
recommandations 2006 de l’ASCO l’ont positionné comme étant
un nouveau standard de prévention des NV aigus et retardés
des CT hautement et moyennement émétisantes telles que les
protocoles à base de cisplatine ou l’association doxorubicine +
cyclophosphamide (AC) [3].
Le protocole recommandé est décrit dans le tableau II (3).
L’aprépitant est adapté aux patients suivis en ambulatoire : il est
disponible en ville sous la forme d’un conditionnement adapté
aux 3 jours de traitement (1 gélule à 125 mg pour J1 et 2 de
80 mg pour J2 et J3). Chez les sujets âgés pour lesquels une
CT hautement ou moyennement émétisante est prescrite, il
est donc essentiel de prévenir effi cacement les NV afi n de ne
pas compromettre l’équilibre hydrique et nutritionnel de ces
patients et d’optimiser le traitement anticancéreux.
LES FACTEURS DE CROISSANCE
HÉMATOPOÏÉTIQUES, GCSF ET ÉRYTHROPOÏÉTINE
Ils sont particulièrement recommandés en prophylaxie chez
les sujets cancéreux âgés recevant une CT hématotoxique
(8, 9). En eff et, plusieurs études ont montré que l’âge > 60 ans
et l’existence de comorbidités augmentent le risque de compli-
cations infectieuses graves (sepsis sévères de grades 3-4) et
celui de décès (10, 11). En ce qui concerne l’anémie, dont l’inci-
dence et la prévalence augmentent avec l’âge, elle est présente
en dehors de tout traitement chez environ 30 % des patients
atteints de cancer (taux d’hémoglobine < 10 g/l) [12]. Chez le
sujet âgé, l’anémie est une source majeure d’asthénie et donc
de dépendance fonctionnelle altérant la qualité de vie. De plus,
elle détériore, entre autres, l’appétit, l’état cardiovasculaire et
les fonctions cognitives. C’est pourquoi il est essentiel de la
dépister et de la traiter avant tout traitement hématotoxique.
L’administration d’érythropoïétine recombinante (EpoR) est
ici un traitement de choix pour maintenir de façon durable un
taux d’Hb de 12-13 g/l, dès lors que seront exclus des carences
en vitamine B12, folates fer et un saignement chronique. Les
transfusions ne seront réservées qu’aux non-répondeurs à
l’EpoR (9).
LES AUTRES TOXICITÉS DES TRAITEMENTS
ANTICANCÉREUX
Les diarrhées, notamment, qui peuvent être sources de
complications graves chez le sujet âgé cancéreux (risque de
déshydratation), mais aussi les mucites (douleurs et troubles
nutritionnels), les toxicités cutanées telles que le syndrome
“mains-pieds” (douleur). Enfi n, une vigilance particulière est
nécessaire quant à l’utilisation des agents potentiellement
néphrotoxiques, la fonction rénale du sujet âgé étant souvent
déjà altérée.
Tableau I.
Facteurs de risque des NV chimio-induits.
Spéci ques du patient
ATCD de NV CT induits Âge plus jeune Sexe féminin
Anxiété accrue Appréhension des EI Voisin de chambre avec NV
Faible motivation Faible indice
des performances
Consommation de nourriture
avant CT
Troubles du sommeil Faible consommation d’alcool
Spéci ques de la CT
Agent à potentiel
émétisant élevé
Associations
thérapeutiques Hautes doses de CT
Vitesse de perfusion
plus rapide
ATCD : antécédents ; CT : chimiothérapie ; NV : nausées-vomissements ; EI : effets indésirables.
Tableau II.
Protocole recommandé dans les CT hautement et moyen-
nement émétisantes.
Jour 1 Jours 2 et 3 Jour 4
Aprépitant* 125 mg 80 mg -
Dexaméthasone** 12 mg p.o. 8 mg p.o. 8 mg p.o.
Ondansétron*** 32 mg i.v. - -
*Administré par voie orale une heure avant la chimiothérapie au jour 1 et le matin des jours 2 et 3.
**Administré 30 minutes avant le début de la chimiothérapie au jour 1 et le matin des jours 2 à 4 (dose choisie
en fonction des interactions médicamenteuses).
*** Administré 30 minutes avant le début de la chimiothérapie au jour 1.