Professions Santé Infirmier Infirmière N° 66 • octobre-novembre-décembre 2005
Avec l’âge, la prévalence
des coronaropathies aug-
mente, ainsi que la proba-
bilité de l’apparition de symptômes
atypiques. Les lésions anatomo-
pathologiques sont les mêmes que
chez l’adulte, à savoir : la fibrose
artérielle proliférative, le développe-
ment de plaques d’athéroscléroses
instables, l’altération de la fonction
endothéliale.
Réduire les complications
Un des objectifs du traitement de
l’insuffisance coronaire chez l’adulte
est la réduction des complications et
de la mortalité, cela grâce au traite-
ment capable de freiner l’évolution
de l’athérosclérose. « L’objectif théra-
peutique dans l’insuffisance coro-
naire du sujet âgé est essentielle-
ment de permettre de soulager les
symptômes et de mener une vie
normale, tout en restant à l’abri
d’effets secondaires », estime le
Dr C. Guérot (Hôpital européen
Georges-Pompidou, Paris). On re-
tiendra que la correction des fac-
teurs de risque est souvent plus dif-
ficile que chez l’adulte jeune,
notamment en ce qui concerne les
habitudes alimentaires et taba-
giques. Il faut toujours encourager à
l’exercice physique régulier et
modéré (sans efforts intenses). Le
traitement de l’HTA devrait être pres-
crit en respectant certaines règles de
prudence, notamment vis-à-vis des
chutes tensionnelles et de l’hypo-
tension orthostatique, laquelle peut
entraîner des chutes, avec possibilité
de déclenchement d’un accident
vasculaire cérébral ischémique.
L’effet de la correction de l’hyper-
cholestérolémie reste probablement
théorique. Selon les conclusions de
l’AFSSAPS, l’institution d’un traite-
ment avec une statine en préven-
tion primaire après 75 ans ne
repose pas sur des données vali-
dées. D’ailleurs, avant tout traite-
ment par les statines, il faut réaliser
un dosage de la créatine phospho-
kinase et prendre en considération
le risque d’interaction médicamen-
teuse en cas de coprescription, de
certains médicaments cardio-vascu-
laires ou anti-infectieux notamment.
Le Dr Guérot rappelle aussi que
l’épreuve d’effort est souvent d’inter-
prétation difficile et qu’il faut se
méfier, chez les sujets âgés, des
fausses déstabilisations, c’est-à-dire
d’une modification de la symptoma-
tologie liée non pas à une évolution
des lésions coronaires, mais à des
facteurs tels que les thérapeutiques,
le stress majoré par les états dépres-
sifs, un impact climatique...
Surveillance régulière
On entrevoit l’importance de la sur-
veillance clinique et biologique
régulière et rigoureuse de la tolé-
rance du traitement cardio-vascu-
laire quand on sait que, chez le
sujet âgé, la iatrogénie est nette-
ment augmentée, les polypatholo-
gies plus fréquentes et la fonction
rénale souvent altérée. De plus, les
dérivés nitrés à fortes posologies et
même les formes à libération pro-
longée sont à éviter. Pour les bêta-
bloquants, il faut faire attention à la
décompensation d’une insuffisance
cardiaque jusque-là compensée et
inapparente, de la bradycardie, à
l’aggravation d’un syndrome dé-
pressif et au retentissement éven-
tuel sur une artériopathie des
membres inférieurs. La posologie
des anti-calciques doit être réduite
et initiée par des doses faibles aug-
mentées très progressivement. En
outre, la plupart des associations
aux autres familles thérapeutiques
sont contre-indiquées. Les effets
secondaires de l’amiodarone ne
sont pas plus marquées chez le
sujet âgé que chez l’adulte ; néan-
moins, le retentissement sur la thy-
roïde peut poser problème. Il ne
faut pas perdre de vue également
que l’aspirine et les autres anti-agré-
gants peuvent favoriser la tendance
hémorragique. Quant aux associa-
tions thérapeutiques, leurs effets
bénéfiques sont moins marqués
que chez le sujet jeune ; au
contraire, les effets iatrogéniques
sont plus graves et peuvent entraî-
ner des décompensations vitales.
L’association bêtabloquant-vérapa-
mil est formellement déconseillé,
mais des complications peuvent
aussi survenir avec les associations
diurétiques-dérivés nitrés ou bêta-
bloquants-inhibiteurs calciques.
En ce qui concerne l’insuffisance car-
diaque, chez les sujets âgés à comor-
bidité importante, l’objectif prioritaire
est l’amélioration symptomatique, en
évaluant au mieux le rapport béné-
fice/risque. La thérapeutique la plus
efficace sur les signes congestifs sont
les diurétiques, pour lesquels on
recommande la posologie minimale ;
ils sont considérés comme indispen-
sables lors d’un épisode de décom-
pensation. En cas de prescription des
IEC ou des antagonistes des récep-
teurs de l’angiotensine II, il est recom-
mandé d’augmenter la posologie sous
surveillance de la tension artérielle, du
ionogramme sanguin et de la fonction
rénale. La digoxine reste un médica-
ment souvent utilisé dans l’insuffi-
sance cardiaque du sujet âgé en vue
d’une amélioration symptomatique.
Ludmila Couturier
Entretiens de Bichat 2005.
>> DOSSIER
Chez le sujet âgé, les traitements de l’insuffisance coronaire et de l’insuffisance car-
diaque doivent tenir compte de la balance entre bénéfices et risques et imposent une
vigilance accrue vis-à-vis des effets indésirables. Ces derniers pourraient davantage
diminuer la qualité de vie que les manifestations de la maladie, d’autant que la pharma-
codynamie des médicaments n’est pas la même que chez les sujets jeunes.
Cardiologie
Quel choix thérapeutique ?
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