Nadine Abi-Jaoudeh, MD, Austin G. Duffy, MD, Tim F. Greten, MD, Elise C. Kohn, MD, Timothy W.I. Clark, MD, and Bradford J. Wood, MD
J Vasc Interv Radiol 2013; 24: 1083-1092
Cet article paru en 2013 dans JVIR met en avant la place du radiologue dans la prise en charge actuelle des patients en oncologie.
Les auteurs rappellent dans une première partie les progrès réalisés ces dernières années en oncologie et le concept de thérapies ciblées. Ils
détaillent les différents biomarqueurs ainsi que les mécanismes d’action des nouvelles thérapies.
Ils insistent ensuite sur le rôle clef du radiologue dans cette prise en charge grâce aux biopsies qu’il peut réaliser et orienter en fonction des données
de l’imagerie.
Le concept de thérapie personnalisée :
• Tumeur, génotype, phénotype et biomarqueurs : le génome humain peut être le siège de mutations. Certaines sont observées dans des cellules
saines, d’autres au sein de cellules tumorales. Certaines mutations peuvent favoriser le développement de cancer et d’autres peuvent être
responsables d’une modification de la sensibilité et de la résistance à un traitement.
Ainsi l’analyse du génotype d’un patient ou la recherche de biomarqueurs (pronostiques ou prédictifs) dans un tissu tumoral, ou sur échantillon
biologique, permettent d’adapter le traitement à un malade, voire à une tumeur ; c’est le principe de thérapie personnalisée.
• Thérapies ciblées : les thérapies ciblées agissent par différentes voies sur la cellule cancéreuse. On distingue habituellement les « -nib » qui sont
des molécules qui inhibent les kinases et les « -mab » qui elles sont des anticorps monoclonaux qui peuvent par exemple bloquer les domaines
extra-cellulaires de récepteurs empêchant alors la prolifération tumorale. Un autre moyen d’action est l’inhibition de l’angiogénèse tumorale.
Certaines thérapies peuvent avoir une action multi-cibles.
Pour illustrer ce concept, nous citons l’exemple du cancer du colon : la mutation KRAS a été identifiée comme un biomarqueur prédictif négatif dans
le cancer du colon. Le cetuximab (Erbitux) est indiqué dans le traitement des patients présentant un cancer colorectal métastatique avec gène KRAS
sauvage (non muté) exprimant le récepteur du facteur de croissance épidermique (EGFR) en association ou non avec une chimiothérapie classique.
Rôle du radiologue dans les thérapies personnalisées :
La sélection des patients pouvant bénéficier des thérapies ciblées se fait en général à partir de l’analyse anatomopathologique – incluant de plus en
plus fréquemment le recours aux techniques d’immunohistochimie, voire d’analyse génomique) – de biopsies guidées par l’imagerie. Il est parfois
nécessaire de réaliser plusieurs biopsies chez les patients engagés dans ces stratégies personnalisées : les biopsies peuvent être réalisées avant la
mise en traitement mais pourront être répétées après traitement notamment pour évaluer la réponse tumorale. Ce concept de biopsies séquentielles
permettra de réadapter un traitement sans attendre une réponse clinique ou radiologique plus lente à observer.
Les auteurs insistent sur l’importance de l’expertise du radiologue pour permettre de cibler au mieux la ou les lésions à biopsier. Les prélèvements
sont guidés par les techniques d’imagerie avancées - morphologiques, fonctionnelles, métaboliques - réalisées en dehors des zones nécrotiques, par
exemple dans la ou les portions qui fixent majoritairement au TEP TDM. La maîtrise des techniques de fusion d’images permet d’optimiser la
rentabilité des biopsies.
Certaines questions persistent :
- L’aspect homogène d’une lésion en imagerie s’accompagne parfois cependant d’une distribution hétérogène des biomarqueurs à l’échelle
tissulaire.
- Les lésions peuvent évoluer avec le temps, avec modifications concomitantes des biomarqueurs.
- Il peut exister des lésions présentant des caractéristiques phénotypiques différentes au sein d’un même organe, pouvant plaider pour des
biopsies multi-nodulaires.
En conclusion :
L’analyse des résultats anatomopathologiques de biopsies guidées par l’imagerie conditionne la prise en charge thérapeutique des patients engagés
dans les programmes de médecine personnalisée en oncologie.
L’expertise du radiologue pour cibler et optimiser le rendement des biopsies est alors capitale.
Commentaires :
Même si l’imagerie diagnostique a fait et fait encore de nombreux progrès notamment dans l’approche fonctionnelle et moléculaire, les biopsies
jouent un rôle central en oncologie, tant pour le diagnostic complet que pour l’évaluation pronostique et thérapeutique.
Les radiologues sont et seront amenés de plus en plus à réaliser ces gestes de radiologie interventionnelle.
Il est capital pour les radiologues de connaître les techniques de biopsie, les contre indications et de savoir optimiser le rendement des biopsies.
Cette activité croissante doit pouvoir être appréhendée et organisée dans les services de radiologie.
Veille scientifique FRI-SIAD – Audrey Fohlen