n° 72 Fiche technique Caractéristiques radiologiques des lymphomes primitifs du système nerveux central F. Ducray (service de neuro-oncologie, Fiche technique Sous la responsabilité de leurs auteurs Caractéristiques radiologiques des lymphomes primitifs du système nerveux central hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris) R. Guillevin (service de neuroradiologie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris, et laboratoire d’imagerie fonctionnelle, Inserm U678, université Pierre-et-Marie-Curie, Paris) Fiche à détacher et à archiver L es lymphomes primitifs du système nerveux central (LPSNC) représentent 5 % des tumeurs cérébrales. Ils sont favorisés de manière considérable par l’existence d’une immunodépression (sida, patients sous immunosuppresseurs), mais la majorité des cas surviennent chez des patients immunocompétents. Les caractéristiques radiologiques du LPSNC chez le sujet immunocompétent sont le plus souvent évocatrices du diagnostic. Évoquer un tel diagnostic sur l’imagerie va permettre à la fois d’éviter de prescrire une corticothérapie qui risquerait de rendre négatifs les prélèvements anatomopathologiques et, avant de proposer une biopsie cérébrale, d’essayer de confirmer ce diagnostic par l’analyse cytologique du liquide céphalo-rachidien (LCR) [quand la PL est possible] et par la recherche d’une uvéite lymphomateuse (lampe à fente). Chez le sujet immunodéprimé, les caractéristiques radiologiques du LPSNC sont différentes et moins spécifiquement évocatrices du diagnostic. Quand évoquer un LPSNC ? Lésion spontanément isoou hyperdense (90 %) Prise de contraste homogène (90 %) Absence de nécrose (90 %) Lésion en isoou en hyposignal T2 (75 %) Lésions multiples (30 %) Lésion périventriculaire [50 %] (corps calleux, infiltration sous épendymaire, ventriculite) Systématiquement chez le sujet immunodéprimé Figure 1. TDM et IRM cérébrales, aspects radiologiques typiques. La Lettre du Neurologue - vol. XI - n° 8 - octobre 2007 Caractéristiques radiologiques du LPSNC chez le sujet immunocompétent Les lésions prédominent à l’étage sustentoriel (85 %), fréquemment dans la substance blanche périventriculaire (50 % des cas). Elles sont pratiquement toujours en contact avec les espaces sous-arachnoïdiens (épendyme ou leptoméninges). Leur taille est variable. Dans 30 % des cas, il existe des lésions multiples (figures 1C et 2A). L’œdème périlésionnel est en général discret, et l’effet de masse souvent beaucoup moins important que s’il s’agissait d’un gliome malin ou d’une métastase (figures 1A et 1F). Avant injection de produit de contraste, les lésions sont spontanément iso- ou hyperdenses dans 90 % des cas du fait de leur hypercellularité (figure 1A). Sur l’IRM, elles apparaissent en iso- ou en hyposignal T1(figure 1D) et, dans 75 % des cas, en iso- ou en hyposignal T2 par rapport à la substance grise (figures 1F et 2B). Ces caractéristiques distinguent les LPSNC des gliomes et des métastases, qui sont le plus souvent spontanément hypodenses et en hypersignal T2. Après injection, la prise de contraste est intense et homogène dans plus de 90 % des cas, avec un aspect en “boule de neige” souvent très Figure 2. IRM cérébrale, aspects radiologiques typiques. I Fiche technique n° 72 Caractéristiques radiologiques des lymphomes primitifs du système nerveux central Fiche technique Sous la responsabilité de leurs auteurs Figure 3. IRM cérébrale, aspects radiologiques atypiques. A : lésions multiples et nécrotiques chez un patient immunodéprimé. B, C et D : absence de prise de contraste chez des patients immunocompétents. Caractéristiques radiologiques du LPSNC chez le sujet immunodéprimé Chez les patients immunodéprimés, les caractéristiques radiologiques des LPSNC sont polymorphes et posent le problème du diagnostic différentiel avec une toxoplasmose cérébrale. Si la présentation radiologique peut être la même que celle des sujets immunocompétents, elle est souvent beaucoup plus atypique. Les lésions sont multiples dans 50 % des cas. L’absence de prise de contraste est plus fréquente (jusqu’à 30 % des cas selon les séries). Quand il existe une prise de contraste, celle-ci est volontiers annulaire, entourant un centre nécrotique (figure 3A). Par ailleurs, les lésions peuvent être spontanément hémorragiques. Chez ces patients, la spectro-IRM et l’imagerie métabolique peuvent être intéressantes pour le diagnostic différentiel entre un LPSNC et une toxoplasmose cérébrale. ■ P O U R E N S AV O I R P L U S … ◆ Martin-Duverneuil N, Béhin A, Mokhtari K, évocateur (figures 1B, 1C, 1E et 2A). En cas de lésion volumineuse, une composante nécrotique peut toutefois être observée, mais elle est en général peu marquée. Cependant, dans 10 % des cas environ, l’aspect radiologique des LPSNC peut être trompeur, notamment quand il n’existe pas de prise de contraste (figures 3C et II 3D). Chez certains patients, la présentation radiologique peut alors ressembler à celle d’une gliomatose cérébrale ou d’une leucoencéphalopathie (figure 3B). En cas de doute diagnostique, la spectroscopie par résonance magnétique et l’IRM de perfusion peuvent apporter des éléments supplémentaires en faveur du Hoang-Xuan K. Apport de la neuroradiologie au diagnostic et au suivi des principaux types de tumeurs cérébrales. Traité de Neurologie. Éditions Doin : Neuro-Oncologie, 2001, 73-113. ◆ Louis E, Camilleri-Broët S, Crinière E, HoangXuan K. Lymphomes intracrâniens du sujet immunocompétent. EMC. 17-270-A-10, 2005. ◆ Cotton F, Ongolo-Zogo P, Louis-Tisserand G et al. IRM de diffusion-perfusion dans l’évaluation des lymphomes cérébraux. J Neuroradiol 2006;33:220-8. La Lettre du Neurologue - vol. XI - n° 8 - octobre 2007 Fiche à détacher et à archiver Figure 4. A : spectre en temps d’écho long d’allure tumorale (élévation du pic de choline, pic de NAA effondré). Alors que la zone étudiée n’est pas nécrotique, la présence d’une résonance de lipides, mieux visualisée sur le spectre en temps d’écho court (B), est évocatrice d’un lymphome. En IRM de perfusion, la lésion (courbe verte) apparaît hyperperfusée (C et D) par rapport au côté sain (courbe mauve) avec un aspect caractéristique de remontée importante au-dessus de la ligne de base (D,**). diagnostic de LPSNC. La spectro-IRM est particulièrement évocatrice quand elle montre, en présence d’une lésion fortement cellulaire et peu ou pas nécrotique en IRM, une élévation très importante des rapports choline/créatine et choline/ NAA (figure 4A), associée à une résonance importante de lipides (figures 4A et 4B). En IRM de perfusion, les LPSNC présentent une courbe de premier passage caractéristique, avec une augmentation du signal au-dessus de la ligne de base due à la fuite massive d’agent de contraste dans l’espace interstitiel (figure 4D).