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La Lettre du Sénologue - n° 19 - janvier/février/mars 2003
Intérêt de l’irradiation locorégionale
locales grâce à l’apport de la radiothérapie. Dans quatre études
sur six, des différences de survie commencent à apparaître, mais
le recul insuffisant des séries ne permet pas de mettre en évidence
une différence significative.
D’autre part, la récidive locale a été pendant longtemps consi-
dérée comme un événement sans gravité. On s’est rendu compte
qu’elle a une influence défavorable sur la survie à long terme.
L’intérêt de la surimpression (boost) au niveau du lit tumoral a
été confirmé par un essai randomisé européen ayant inclus plus
de 5 000 patientes. Une dose supplémentaire de 16 Gy réduit de
59 % les récidives locales à 5 ans, tout particulièrement chez les
patientes de moins de 50 ans (3).
L’irradiation après chirurgie conservatrice pour carcinome
infiltrant est un standard. Elle réduit de façon très signifi-
cative le taux des récidives locales, qui peuvent elles-mêmes
être pourvoyeuses de métastases. Des différences sur la
survie commencent à apparaître. Une surimpression au
niveau du lit tumoral est indiquée chez les femmes de moins
de 50 ans afin d’augmenter le contrôle local.
L’irradiation locorégionale (paroi et aires ganglionnaires) dimi-
nue de façon très significative les récidives locales et ganglion-
naires en cas de facteurs de risque tels qu’un envahissement
ganglionnaire axillaire histologique (pN+), surtout quand plus
de trois ganglions sont atteints, ou en cas de lésions évoluées
(T3) et/ou avec présence d’emboles vasculaires ou lympha-
tiques. Les récidives tant locales (pariétales) que ganglionnaires
observées après mastectomie ont un pronostic défavorable parce
qu’elles ne sont pas toujours rattrapables et, d’autre part, car
elles s’accompagnent dans plus de 50 % des cas d’une évolution
métastatique, simultanée ou ultérieure (4). Deux essais danois
ont confirmé ces résultats (5).
Le premier essai danois (protocole 82-b) avait été conduit chez
1708 patientes non ménopausées présentant des facteurs de risque
de récidive locale, traitées par mastectomie-curage et CMF. La ran-
domisation concernait l’irradiation de la paroi thoracique et de tous
les relais ganglionnaires, y compris axillaires. Fait très important,
la paroi thoracique et la chaîne mammaire interne étaient traitées
exclusivement par électrons, afin qu’aucune toxicité pulmonaire ou
cardiaque ne se manifeste. Avec un recul de 10 ans, les taux de réci-
dive locorégionale, isolée ou associée à une dissémination méta-
statique, étaient de 32% dans le groupe CMF seul, et de 9% (p <
0,001) dans le groupe CMF + radiothérapie. De même, les taux de
survie passaient respectivement de 45 à 54% (p < 0,001).
Le deuxième essai danois (protocole 82-c) avait inclus
1460 patientes ménopausées, avec les mêmes critères d’inclu-
sion que ceux de l’étude 82-b. La chimiothérapie était en
revanche remplacée par le tamoxifène. Les taux de récidive
locorégionale sont passés de 35 % à 8 % pour le groupe tamoxi-
fène-radiothérapie (RT). Parallèlement, le taux de survie était de
45 % dans le groupe RT et de 36 % (p = 0,003) pour le groupe
tamoxifène seul. Le bénéfice est donc comparable à celui
observé chez les femmes plus jeunes.
Après mastectomie, l’irradiation locorégionale complémen-
taire réalisée avec des techniques modernes améliore nette-
ment le contrôle locorégional (même avec l’utilisation des
traitements médicaux adjuvants). Elle améliore également
la survie de l’ordre de 9 % chez les patientes à risque.
…/…
Résultats des nouvelles méta-analyses et confirmation
du bénéfice global de la radiothérapie
Les résultats de la nouvelle méta-analyse de l’EBCTCG avaient
été publiés en 2000 (6). Les dossiers de 20 000 femmes ont été
analysés, y compris ceux des patientes incluses dans les deux
essais danois. Les taux de récidive sont très significativement
réduits par l’irradiation, passant, à 20 ans, de 30,1 % à 10,4 %,
respectivement sans et avec radiothérapie (2p < 0,00001) ; cela
correspond à une réduction globale du risque de 68,4 %.
Le taux de survie globale est amélioré par l’irradiation : 37,1 %
versus 35,9 % à 20 ans. En revanche, le bénéfice observé en
termes de réduction des décès par cancer du sein (4,8 %) était
contrebalancé par une augmentation du taux de décès par
autre cause (essentiellement cardiovasculaire) dans des séries
anciennes. Deux nouvelles méta-analyses incluant des essais
plus récents et utilisant des techniques d’irradiation moderne
ont montré des bénéfices en survie de 12 % et 17 % respecti-
vement (2).