La Lettre du Pharmacologue - vol. 23 - n° 2 - avril-mai-juin 2009
Pharmacologie
Pharmacologie
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continue à l’aide d’une pompe connectée à un cathéter sous-
clavier tunnellisé. Chez les patients en classe fonctionnelle III
ou IV de la NYHA, le traitement par époprosténol a prouvé qu’il
apportait une amélioration signifi cative des symptômes, des
capacités à l’eff ort (test de marche de 6 minutes), des paramètres
hémodynamiques ainsi qu’une réduction de la mortalité (10-12).
L’époprosténol est indiqué dans l’HTAP idiopathique, familiale,
ou associée aux connectivites, en classe fonctionnelle III ou IV
de la NYHA. Ce médicament reste le traitement de référence
des formes les plus sévères de la maladie.
En dépit du bénéfi ce apporté, la perfusion continue d’époprosténol
ne constitue pas un traitement idéal. Il s’agit d’une thérapeutique
complexe, inconfortable et dont le coût est très élevé. Les
eff ets secondaires du traitement sont fréquents : douleurs des
mâchoires, céphalées, diarrhées, fl ushes, douleurs des membres
inférieurs, nausées et vomissements (10-12). Ces manifestations
sont doses-dépendantes et le plus souvent modérées, ne néces-
sitant pas l’interruption du traitement. Les complications les
plus sévères sont liées au mode d’administration par cathéter :
thromboses et surtout infections (incidence de l’ordre de 0,1 à
0,6 cas par an et par patient) [13]. L’interruption du traitement
par dysfonction de la pompe ou rupture de cathéter peut se
compliquer d’une aggravation brutale de l’HTAP, potentielle-
ment mortelle (4).
Les analogues stables de la prostacycline 쐌
Les complications liées à la mise en place d’un cathéter veineux
central pour l’administration intraveineuse d’époprosténol ont
justifi é le développement d’analogues de la prostacycline délivrés
sous d’autres formes (sous-cutanée, inhalée ou orale).
Le tréprostinil (Remodulin
®
) est un analogue de la prostacycline
dont la demi-vie est plus longue, ce qui permet une administra-
tion en continu par voie sous-cutanée à l’aide d’une minipompe
semblable à celle utilisée pour la délivrance de l’insuline (14).
Une étude contrôlée a démontré que ce traitement permettait
d’améliorer les capacités à l’exercice et l’hémodynamique des
patients en classe II, III ou IV de la NYHA (14). L’existence de
douleurs au point d’injection observées chez 85 % des patients
représente le principal eff et secondaire. Ces douleurs consti-
tuent parfois un facteur limitant à l’augmentation des doses
et conduisent à l’arrêt du traitement dans environ 8 % des cas
(14). Les données à long terme sont encourageantes, avec un
impact positif sur la survie (15, 16). Le tréprostinil par voie
sous-cutanée est indiqué dans l’HTAP idiopathique de classe
fonctionnelle III.
Le tréprostinil peut également être utilisé comme l’époprosténol,
par voie intraveineuse (il est approuvé aux États-Unis dans cette
indication, mais aucune AMM n’est pour l’instant disponible
en France). Des essais thérapeutiques avec le tréprostinil en
inhalation et par voie orale sont en cours.
L’iloprost (Ventavis
®
) est un analogue stable de la prostacycline,
qui est administré par inhalation à l’aide d’un système produisant
des particules d’un diamètre de 0,5 à 3 μm. La courte durée
d’action de l’iloprost constitue le principal désavantage de ce
mode d’administration, puisqu’il nécessite 6 à 9 inhalations
par jour. Une étude contrôlée a permis de démontrer que le
traitement par iloprost améliorait le test de marche et la classe
fonctionnelle de patients souff rant d’HTAP et en classe fonction-
nelle III ou IV de la NYHA (17). La toux et les symptômes liés à
la vasodilatation représentent les principaux eff ets secondaires
observés (17). Les résultats à long terme obtenus avec l’iloprost
en monothérapie sont malheureusement assez décevants (18).
L’iloprost inhalé est approuvé dans l’HTAP idiopathique de
classe fonctionnelle III.
Antagonistes des récepteurs de l’endothéline
L’ET-1 est un puissant vasoconstricteur et un facteur favorisant
la prolifération des CML, contribuant ainsi à l’augmentation
du tonus vasculaire pulmonaire et à l’hypertrophie des parois
artérielles pulmonaires. Les antagonistes des récepteurs de l’ET-1
sont des médicaments utilisables par voie orale.
Le bosentan (Tracleer
®
) est un antagoniste mixte des récep-
teurs de l’endothéline. Deux essais contrôlés contre placebo
ont démontré son effi cacité chez des patients présentant une
HTAP idiopathique ou associée à une sclérodermie en classe
fonctionnelle III ou IV de la NYHA (19, 20). Ainsi, le bosentan
améliore les capacités à l’eff ort, l’hémodynamique, et allonge
le délai avant aggravation clinique (19, 20). L’évaluation à long
terme des patients inclus dans les deux essais contrôlés est en
faveur d’une amélioration de la survie sous bosentan par rapport
à la survie théorique (21). Une étude récente a montré son effi ca-
cité dans des formes moins sévères d’HTAP chez des patients en
classe fonctionnelle II de la NYHA (22). La dose recommandée
est de 62,5 mg deux fois par jour pendant 4 semaines, puis de
125 mg deux fois par jour. Le principal eff et secondaire est la
cytolyse hépatique, toujours réversible, survenant dans environ
7 % des cas, ce qui nécessite une surveillance mensuelle des
transaminases. Le traitement est contre-indiqué en cas d’in-
suffi sance hépatique modérée ou sévère ou en cas d’élévation
des transaminases à plus de trois fois la normale.
En dehors de l’HTAP idiopathique, familiale et associée aux
connectivites, le bosentan a été utilisé avec succès dans d’autres
formes d’HTAP, en particulier l’HTAP associée au VIH (23) et
l’HTAP associée aux cardiopathies congénitales (24).
Le bosentan est approuvé dans le traitement de l’HTAP en classe
fonctionnelle III de la NYHA.
Le sitaxentan ( elin
®
) est un antagoniste sélectif des récep-
teurs A de l’ET-1, ce qui off re l’avantage théorique d’éviter la
vasoconstriction induite par la liaison de l’ET-1 à son récepteur
de type A situé sur les CML, tout en maintenant la liaison à
son récepteur de type B responsable d’une vasodilatation et
d’une augmentation de la clairance de l’ET-1 (25). Deux études
ont démontré un eff et positif de ce traitement sur le test de
marche et l’hémodynamique (26, 27). La dose de sitaxentan est
de 100 mg par jour. Comme pour le bosentan, les eff ets secon-
daires sont essentiellement hépatiques, même si la fréquence des
cytolyses semble un peu plus faible. Une surveillance mensuelle
du bilan hépatique est cependant nécessaire. Il existe une
importante interaction médicamenteuse entre le sitaxentan
et les antivitamines K, ce qui rend parfois très diffi cile l’équi-