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SENAT - SEANCE DU 17 NOVEMBRE 1986
L'assainissement économique, budgétaire et financier était
le préalable indispensable à la remise en marche de notre
économie.
Le réaménagement des parités au sein du système moné-
taire européen, opéré le 6 avril, visait avant tout à asseoir
notre politique de liberté sur des bases saines, vraies et
durables.
Le plan d'accompagnement de ce réaménagement compor-
tait des mesures rigoureuses dans les domaines de la poli-
tique budgétaire, de la politique monétaire et de la politique
salariale, afin de maîtriser les conséquences des modifications
de parité. C'est ce souci qu'a traduit, notamment, le collectif
budgétaire que vous avez bien voulu, mesdames et messieurs
les sénateurs, approuver par votre vote au printemps dernier.
Le budget de 1987, enfin, prévoit une réduction importante
du déficit budgétaire, de façon à retrouver la maîtrise de nos
finances publiques et à réduire les ponctions opérées par
l'Etat sur le marché financier au détriment des entreprises.
D'ores et déjà, cet assainissement s'est traduit par une
importante réduction de l'endettement extérieur de l'Etat : la
dette extérieure à moyen et à long terme s'élevait, pour ce
qui est de l'Etat, à 33 milliards de francs au 30 juin 1986, au
lieu de 43 milliards de francs au 31 mars, du fait principale-
ment des remboursements anticipés intervenus au cours du
deuxième trimestre.
Au second semestre sont intervenus ou interviendront de
nouveaux remboursements anticipés sur la dette extérieure de
l'Etat, pour un montant total de 3,66 milliards de dollars, soit
25,5 milliards de francs sur la base des cours de change de
fin juin. C'est ainsi que la dette de l'Etat sera passée de
43 milliards de francs en mars à environ 7 milliards de francs
à la fin de l'année. Je rappelle qu'il s'agit de la dette exté-
rieure et non pas de la dette intérieure qui, elle, est infini-
ment supérieure. (Applaudissements sur les travées du R.P.R.,
de l'U.R.E.I. et de l'union centriste.)
J'ajoute que l'endettement extérieur de notre pays, apprécié
en rapprochant les dettes et les créances à moyen et à long
terme de la France vis-à-vis de l'étranger, peut être évalué à
139,5 milliards de francs au 30 juin 1986 contre 154,7 mil-
liards de francs au 31 mars 1986 : il a donc diminué de près
de 10 p. 100 au cours du deuxième trimestre 1986. Il s'agit là
de l'endettement de notre pays et non pas seulement de l'en-
dettement de l'Etat.
Au-delà de l'assainissement, la deuxième orientation fonda-
mentale de notre politique est la libération de notre éco-
nomie : dans un monde où la liberté des entreprises et l'allé-
gement des réglementations sont les moteurs de la croissance,
la situation de l'économie française devait être modifiée. La
volonté du Gouvernement repose aussi sur la conviction
qu'une économie de liberté est plus efficace qu'une économie
de contrainte.
D'ores et déjà, la quasi-totalité des prix des produits indus-
triels et la plupart des prix du secteur commercial ont été
libérés. Cela n'a nullement empêché - il convient de le souli-
gner - la poursuite du ralentissement de la hausse des prix ;
l'estimation provisoire de l'indice des prix à la consommation
du mois d'octobre, qui a crû de 0,2 p. 100, vient encore de le
confirmer.
La liberté des prix sera totale dans six semaines, c'est-à-
dire à la fin de l'année : nous aurons ainsi rejoint, selon le
calendrier que nous nous étions fixé dès le mois d'avril, la
situation des autres grands pays industrialisés.
Simultanément, un droit moderne de la concurrence sera
institué : la mutation des règles du jeu économique ainsi
effectuée permettra de donner aux entreprises la liberté de
gestion qui leur est indispensable tout en assurant la maîtrise
des évolutions des prix. L'ordonnance sur la concurrence,
actuellement en discussion devant le Conseil d'Etat, sera sou-
mise la semaine prochaine au Conseil des ministres.
Une très importante libération du contrôle des changes a
été effectuée en trois étapes : 15 avril, 15 mai et 14 juillet ;
entreprises et particuliers ont maintenant sur ce plan un
degré de liberté sans précédent depuis 1968. Les entreprises
peuvent désormais éviter tout risque de change sur leurs opé-
rations commerciales en se couvrant à terme, sans limite, et
en conservant en devises, jusqu'à trois mois, leurs recettes
d'exportation ; elles peuvent librement investir et emprunter à
l'étranger. Quant aux particuliers, ils peuvent librement
investir à l'étranger en valeurs mobilières ou en biens immo-
biliers, et effectuer toutes les opérations courantes à l'aide
d'une carte de crédit. J'annoncerai demain de nouvelles
mesures, à l'issue de la réunion du conseil national du crédit.
En matière de gestion des effectifs, la France était dans
une situation exceptionnelle par rapport aux autres grands
pays : en effet, il était nécessaire d'obtenir de l'administration
une autorisation préalable avant tout licenciement. La sup-
pression de cette autorisation administrative de licenciement
a été votée par le Parlement.
En outre, l'ordonnance sui les contrats à durée déterminée,
le travail temporaire et le travail à temps partiel simplifie et
assouplit une réglementation qui était tellement complexe
qu'elle était en réalité dissuasive.
Les charges fiscales et sociales des entreprises ont d'ores et
déjà été allégées par le collectif budgétaire pour 1986 et par
le plan d'urgence pour l'emploi des jeunes. Le projet de loi
de finances pour 1987 prévoit d'alléger, en outre, de façon
très significative, les impôts des entreprises et des particu-
liers, alors même que le déficit budgétaire est simultanément
réduit - j'y reviendrai en détail tout à l'heure.
De surcroît, les charges financières des entreprises et des
particuliers ont elles aussi été réduites : le succès du réamé-
nagement monétaire nous a, en effet, libérés de l'obligation
dans laquelle nous étions, jusque-là, de maintenir des taux
d'intérêt plus élevés que ceux des pays voisins, et ce pour
défendre notre monnaie.
Le troisième axe essentiel de notre politique économique
est la mise en oeuvre concrète et quotidienne de ces libertés
nouvelles. Participation, privatisation et loi sur l'épargne sont,
en effet, trois actions tournées vers le même objectif : per-
mettre aux Français de bénéficier, dans leur vie familiale et
professionnelle, des responsabilités plus grandes qu'ils aspi-
rent à assumer.
C'est ainsi que deux ordonnances sur la participation ont
été publiées : l'une offre aux sociétés la faculté d'ouvrir leurs
conseils d'administration à des représentants du personnel
salarié, siégeant avec voix délibérative ; l'autre vise à déve-
lopper les mécanismes d'intéressement, de participation et
d'actionnariat, en vue de favoriser la participation des
salariés au capital et aux résultats des entreprises.
Le projet de loi sur l'épargne, qui a été adopté par le
conseil des ministres le 12 novembre 1986 et qui sera bientôt
soumis au Parlement, crée des plans d'épargne en vue de la
retraite, assouplit et étend le régime des options d'achat d'ac-
tions de leur entreprise par les salariés, simplifie le régime
fiscal favorable dont peuvent bénéficier les salariés qui sou-
haitent racheter leur entreprise, améliore la fiscalité des
actions et des obligations et modernise le marché financier.
Le renforcement de l'épargne des ménages, comme d'ailleurs
celle des entreprises, est, en effet, essentiel pour le finance-
ment des investissements et la solidité de notre équilibre exté-
rieur.
M.
Hélène Luc.
Mme Gomez, elle, vend son entreprise
aux Etats-Unis 1
M. Edouard Balladur,
ministre d'Etat.
La mise en oeuvre
de la privatisation permettra de rendre à l'initiative privée
65 entreprises, banques, assurances, entreprises industrielles
du secteur concurrentiel représentant environ une vingtaine
de groupes. Ce programme, qui pourrait représenter de 200 à
250 milliards de francs, sera étalé sur cinq ans. Il est sans
précédent de par son ampleur.
Mesdames, messieurs les sénateurs, voilà succinctement
rappelées les orientations de notre politique économique.
J'aborderai maintenant une deuxième question portant sur
les objectifs retenus par le Gouvernement pour 1987 et les
résultats qu'il attend de son action.
Nous avons trois objectifs majeurs qui sont étroitement
liés : tout d'abord, annuler, voire inverser l'écart de hausse
des prix avec nos principaux partenaires ; ensuite, rejoindre,
grâce à ce recul de la hausse des prix et au dynamisme
retrouvé des exportations et des investissements, le taux de
croissance moyen des grands pays industrialisés ; enfin, faire
en sorte que la France redevienne, en 1987, créatrice nette
d'emplois.
Je reprends successivement chacun de ces points.
S'agissant de la hausse des prix, tout d'abord, nous avons,
dans ce domaine comme dans plusieurs autres, déjà obtenu
de premiers résultats : sur les dix premiers mois de l'année,
la hausse des prix à la consommation est de 1,8 p. 100 ou
1,9 p. 100. Je vous rappelle que notre objectif pour l'année