22 février 2017 – Amphi Luton, Fac Cochin Responsabilités en imagerie : Des fondamentaux aux nouveautés Docteur Christian FORTEL, radiologue libéral, Mareuil-lès-Meaux Docteur Isabelle FORTEL, médecin légiste, CH Sud-Francilien Dr Vincent HAZEBROUCQ, MCU-PH Université Paris Descartes 22 février 2017 – Amphi Luton, Fac Cochin Introduction et survol historique Dr Vincent HAZEBROUCQ, MCU-PH Université Paris Descartes Époque ‘antique’ Jadis, le médecin était juridiquement civilement irresponsable Ambroise Paré (1510 – 1590) « Je le pansai, Dieu le guérit » Parlement de Paris (26 juin 1696) « Le malade doit supporter les inconvénients relevant de son médecin puisque c’est lui-même qui l’a choisi » Cependant depuis la plus haute antiquité, le médecin qui abusait de son savoir pour des crimes était plus sévèrement puni qu’un quidam (Code d’Hammurabi, vers 1790 avant JC) Code d’Hammurabi, Roi de Babylone, Le Louvre Section Mésopotamie ©2009 De nos jours, le médecin est pleinement responsable Aspect indemnitaire Civil / Administratif Aspect punitif Pénal / Ordinal Les différentes responsabilités classiques Indemnitaire : compensation d’un dommage à l’amiable, par une CRCI ou par voie juridictionnelle (droit commun civil ou droit administratif, selon le cadre d'exercice, privé ou public; du praticien,) Pénale : punition d’une infraction (violation de loi ou règlement) Ordinale : punition d’une faute déontologique (devoirs vis à vis du patient, des confrères ou des règles profess.) (+ responsabilité disciplinaire, dans le secteur public) Économique : devant les organismes sociaux (la « Sécu ») L'alternative civil/pénal/ordinal dépend du patient (et/ou sa famille) qui choisissent librement Seconde révolution de la responsabilité médicale : la responsabilité scientifique Après la première époque, antique, d’irresponsabilité médicale… Et une deuxième époque, classique, de responsabilité juridique, centrée sur la punition et l’indemnisation… Le 21è siècle fait émerger une troisième époque, moderne, de responsabilité scientifique, fondée sur la prévention, la qualité et la sécurité, qui refoule les aspects juridiques au 2nd plan : Il s’agit de passer d’une logique de culpabilité vers une culture de sécurité et de qualité des soins, intégrant la prévention scientifique systématique des erreurs et accidents médicaux Seconde révolution de la responsabilité médicale : la responsabilité scientifique Après la première époque, antique, d’irresponsabilité médicale… Et une deuxième époque, classique, de responsabilité juridique, centrée sur la punition et l’indemnisation… Au 21è siècle émerge une troisième époque, moderne, de responsabilité scientifique, fondée sur prévention, qualité et sécurité, en refoulant les aspects juridiques au 2nd plan : Il s’agit de passer d’une logique de culpabilité vers une culture de sécurité et de qualité des soins, intégrant la prévention scientifique systématique des erreurs et accidents médicaux Une nouvelle approche systémique -2 L’organisation même du système doit partir du postulat que ‘Tout ce qui est humain est faillible’ ‘Errare humanum est (Lucius Sénèque– Rome, 0030-50) ‘Whatever can go wrong, it will’ (Edward Murphy, USA 1949) et donc nous devons, selon W. Edward DEMING : - Prévoir de multiples sécurités et des outils permanents d’évaluation de la qualité et de la sécurité des pratiques et des résultats, - Dépister continuellement les dysfonctionnements, les corriger et évaluer les correctifs (Roue de Deming) - Informer régulièrement professionnels et public de ce qui est fait en permanence pour garantir qualité et sécurité. Ce n’est qu’à ce prix que l’on conservera la confiance du public. Le rationnel de cette démarche Science ou Technocratie ? Evidence based management fondé sur des analyses statistiques et scientifiques solides : - William Edwards Deming 1950+, - Frank E. Bird 1969+, - James Reason 1993+ , R. Amalberti 1996+…, …que les médecins ont globalement tardé à s’approprier jusqu’aux années 2000 La Roue de Deming DMAIC Le Titien, Sisyphe Musée du Prado Selon Deming, la qualité n’est jamais spontanément stable ; si on ne s’efforce pas continuellement de l’évaluer et de l’améliorer, elle se dégrade peu à peu inexorablement. Démarche DMAIC dérivée des théories de William Edwards Deming C: Contrôler le résultat du correctif et pérenniser l'amélioration D: Définir ou repérer un problème de qualité W. Edwards Deming 1900-1993 M: Mesurer le défaut qualitatif I: Innover pour résoudre le problème A: Analyser les causes profondes du problème In God, we trust : all other must bring their data Pyramide de Frank E. Bird Jr – 2/2 Cette étude statistique publiée en 1969 par la compagnie Insurance Company of North America, a porté sur près de 1,8 millions d’accidents déclarés par 297 entreprises différentes de 21 secteurs industriels. Elle a conduit Frank E. Bird Jr, directeur des services d’ingénierie de la compagnie, à conclure que la probabilité de survenue d’accidents graves augmente proportionnellement au nombre de dysfonctionnements et d’incidents observés dans une entreprise, et… que la proportion et la nature des causes des accidents graves ne diffère pas statistiquement de celles des incidents mineurs : Dès lors, ces derniers étant 600 fois plus nombreux que les premiers (accidents graves), il importe de les dépister et de les étudier pour prévenir et limiter les risques (fréquence et coûts) de l’ensemble des accidents, et notamment des plus graves La pyramide de Frank E. Bird Jr Accidents corporels sévères (n= 1) Accidents corporels modérés (n=10) Dommages matériels sévères (n=30) Dommages matériels mineurs et dysfonctionnements graves (n=200) Incidents et dysfonctionnements sans conséquences (n=600) James Reason et le Gruyère Plus un système comporte d’imperfections, plus le risque est grand que des petits défauts finissent par se cumuler pour provoquer une catastrophe qui semblait pourtant très peu probable 22 février 2017 – Amphi Luton, Fac Cochin Le nouveau décret d’exercice des manipulateurs Dr Vincent HAZEBROUCQ, MCU-PH Université Paris Descartes Statut des manipulateurs (Loi= CSP) La profession de manipulateur d’électroradiologie médicale résulte d’une exception légale au monopole médical, donc définie par la loi (art. L4351-1 CSP, réécrit en janvier 2016) et précisée par des décrets, régulièrement révisés et intégrés à la partie réglementaire du CSP (1984, puis 1986, 1991, 1994, 1997, 2000 et enfin 2016). Article L4351-1 CSP Modif Loi 2016-41 du 26 janvier 2016, Art. 208 « Est considérée comme exerçant la profession de manipulateur d'électroradiologie médicale toute personne, non médecin, qui exécute, sur prescription médicale et sous la responsabilité d'un médecin, des actes professionnels d'électroradiologie médicale. Le cas échéant, … intervient sous l'autorité technique d'un radiophysicien pour les activités de physique médicale … pour la préparation ou de la réalisation des actes exposant aux rayonnements ionisants. Un décret en Conseil d'Etat, pris après avis de l'Académie nationale de médecine, définit les actes ou les activités réalisés par les manipulateurs d'électroradiologie médicale ainsi que les conditions dans lesquelles ils sont effectués. …peut également, … sous l'autorité technique d'un pharmacien, aider à réaliser les actes définis par décret en Conseil d'Etat, pris après avis de l'Académie nationale de pharmacie. » Statut du manipulateur MERM - 1 Article R4351-1 Modif Décret 2016-1672 du 5 décembre 2016 Le manipulateur d'électroradiologie médicale contribue, dans les conditions définies aux articles R. 4351-2 à R. 4351-3, à la réalisation : 1° Des examens nécessaires à l'établissement d'un diagnostic mettant en œuvre des rayonnements ionisants ou d'autres agents physiques ; 2° Des traitements mettant en œuvre des rayonnements ionisants ou d'autres agents physiques. Il intervient dans les domaines de l'imagerie médicale, de la médecine nucléaire, de la radiothérapie et des explorations fonctionnelles, sur prescription médicale et sous la responsabilité d'un médecin de la spécialité concernée. Statut du manipulateur MERM - 2 Article R4351-2 Modif Décret 2016-1672 du 5 décembre 2016 Dans le cadre des actes et activités prévus aux articles R. 4351-2-1 à R. 43512-3 qu'il réalise, le MERM est habilité à accomplir, sous la responsabilité du médecin mentionné à l'article R. 4351-1, les activités suivantes : 1°Accueil et information du patient sur le déroulement de l'examen ou du traitement, y compris en phase pré-thérapeutique ; 2°Recueil auprès du patient puis analyse des informations et données nécessaires à la sécurité et à la réalisation de l'examen ou du traitement ; 3°Identification des besoins du patient en rapport avec les techniques utilisées et selon la situation clinique ; 4°Installation et positionnement du patient, conformément aux exigences de la technique utilisée, en tenant compte de son état clinique ; 5°Surveillance clinique du patient et continuité des soins durant les examens et traitements ; Statut du manipulateur MERM - 3 Article R4351-2 (suite) 6°Paramétrage et déclenchement de l'appareillage ; 7°Recueil, analyse qualitative, traitement et transfert du signal ou de l'image, à l'exclusion des actes mentionnés au b du 1°de l'art. R. 4351-2-2 ; 8°Préparation du matériel de ponction, de cathétérisme, d'injection, d'exploration et médicochirurgical ; 9°Reconstitution et mise sous forme appropriée à leur administration des médicaments nécessaires à la réalisation de l'examen ou du traitement, en dehors des situations prévues à l'art. R. 4351-2-4 ; 10°Réalisation ou recueil des prélèvements de sang veineux et capillaire, ainsi que des prélèvements d'excrétions ou de sécrétions ; 11°Réalisation, en cas d'urgence, des actes conservatoires nécessaires jusqu'à l'intervention du médecin ; 12°Évaluation de la douleur et mise en œuvre des techniques de prévention, de … soulagement et de traitement de la douleur ; Statut du manipulateur MERM - 4 Article R4351-2 (fin) 13°Transmission écrite et orale aux professionnels de santé de toutes les informations relatives au déroulement des examens et traitements ; 14°Traçabilité de la réalisation de l'examen ou du traitement ; 15°Mise en œuvre des règles relatives à la gestion des stocks et des déchets, y compris radioactifs ; 16°Vérification du fonctionnement conforme et entretien courant du matériel confié ; 17°Mise en œuvre des règles d'hygiène, de sécurité et de vigilances conformes aux bonnes pratiques ; 18°Mise en œuvre des règles de radioprotection pour les patients, le personnel, le public, l'environnement et lui-même ; 19°Contribution à l'élaboration des programmes d'assurance de la qualité et à l'application des protocoles de contrôle de qualité. Statut du manipulateur MERM - 5 Article R4351-2-1 Créé par Décret 2016-1672 du 5 décembre 2016 Le MERM est habilité à réaliser, sous la responsabilité du médecin mentionné à l'article R. 4351-1, en application soit d'une prescription médicale individuelle, soit d'un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé par ce médecin, les actes et activités suivants : ((simples et anodins, autonomie possible)) 1° °Dans le domaine de l'imagerie médicale : Réalisation des actes d'exploration ne nécessitant pas l'administration concomitante de médicaments, à l'exclusion des échographies ; 2° °Dans le domaine de la médecine nucléaire : a) Mesure et vérification de l'activité des composés radioactifs ; b) Mesure et vérification de l'activité prescrite par le médecin mentionné à l'article R. 4351-1 ; c) Réalisation des actes d'exploration ne nécessitant pas l'administration concomitante de médicaments ; … Statut du manipulateur MERM - 6 Article R4351-2-1, suite (actes simples et anodins possibles en autonomie) 3° ° Dans le domaine de la radiothérapie : a) Confection des moyens de contention et des caches personnalisés ; b) Mise à jour des éléments de traçabilité du traitement ; 4° ° Dans le domaine des explorations fonctionnelles : Réalisation des explorations d'électrophysiologie et magnétophysiologie ne nécessitant pas de stimulation. Statut du manipulateur MERM - 7 Article R4351-2-2 Créé Décret 2016-1672 du 5 décembre 2016 Le MERM est habilité à pratiquer, sous la responsabilité du médecin mentionné à l'article R. 4351-1, en application soit d'une prescription médicale individuelle, soit d'un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé par ce médecin, les actes et activités suivants, à condition qu'un médecin et, le cas échéant, un physicien médical, dans le champ qui le concerne, puissent intervenir à tout moment : 1° °Dans les domaines de l'imagerie médicale et de la médecine nucléaire : a) Réalisation des explorations nécessitant l'administration de médicaments, y compris radiopharmaceutiques ; b) Recueil du signal et des images en échographie, sous réserve de l'obtention d'un titre ou d'un diplôme dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé ; c) Sur prescription médicale, administration de médicaments requise par l'état du patient bénéficiant de l'examen ou du traitement ; Statut du manipulateur MERM - 8 Article R4351-2-2, suite (actes à risque modéré, non autonomes) 2° ° Dans le domaine de la radiothérapie : a) Contribution aux procédures relatives à la préparation des traitements ; b) Mise en œuvre des séances de traitement, pouvant comporter l'imagerie de positionnement ou de repositionnement du patient, qui ne relèvent pas des actes et activités mentionnés au c du 3° de l'article R. 4351-2-3 ; c) Réalisation des contrôles par dosimétrie ; 3° ° Dans le domaine des explorations fonctionnelles : Réalisation des explorations nécessitant la mise en place de systèmes de détection à caractère invasif. Statut du manipulateur MERM - 9 Article R4351-2-3 Créé Décret 2016-1672 du 5 décembre 2016 Le MERM est habilité à participer, sous la responsabilité et en présence du médecin mentionné à l'article R. 4351-1, et, le cas échéant, d'un physicien médical, dans le champ qui le concerne, en application d'un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé par ce médecin, à la réalisation des actes et activités suivants : 1°Dans le domaine de l'imagerie médicale : Acte d'imagerie interventionnelle, en milieu radiologique et au bloc opératoire ; 2°Dans le domaine de la médecine nucléaire : a) Épreuves d'effort ; b) Administration de médicaments radiopharmaceutiques à visée thérapeutique ; Statut du manipulateur MERM - 10 Article R4351-2-3, suite (actes à risque avéré, médecin présent) 3° ° Dans le domaine de la radiothérapie : a) Pose du matériel vecteur et application de sources radioactives ; b) Installation et vérification du positionnement des patients lors de la mise en œuvre des séances d'irradiation corporelle totale ; c) Installation et vérification du positionnement des patients lors de la mise en œuvre de traitements hypofractionnés délivrés avec une dose par fraction supérieure à un seuil fixé par arrêté du ministre chargé de la santé; 4° Dans le domaine des explorations fonctionnelles : Réalisation d'explorations électrophysiologiques et magnétophysiologiques permettant de guider un geste médical. Statut du manipulateur MERM - 11 Article R4351-2-4 Créé Décret 2016-1672 du 5 décembre 2016 Lorsqu'il exerce dans le cadre d'une pharmacie à usage intérieur, le manipulateur d'électroradiologie médicale est habilité, sous l'autorité technique d'un pharmacien, à aider à réaliser : 1° Les activités définies au 5°de l'article R. 5126-9 ; 2° La reconstitution des médicaments radiopharmaceutiques ; 3° La mise sous forme appropriée à leur utilisation des médicaments radiopharmaceutiques prêts à l'emploi. Statut du manipulateur MERM - 12 Article R4351-3 Modif. Décret 2016-1672 du 5 décembre 2016 Selon les secteurs d'activité où il exerce et les besoins rencontrés, le manipulateur d'électroradiologie médicale propose et organise différentes actions, notamment d'éducation, de recherche, de prévention, de dépistage, de formation et d'encadrement ou y participe. Ces actions concernent en particulier : 1° La formation initiale et continue des manipulateurs d'électroradiologie médicale et d'autres professionnels ; 2° La collaboration, notamment avec les membres des autres professions sanitaires et sociales, à la réalisation d'interventions coordonnées, y compris en matière de prévention ; 3° La recherche dans son domaine professionnel, notamment en ce qui concerne la prise en charge des patients, l'hygiène, la sécurité, la radioprotection et l'assurance de la qualité. Il participe également à des actions de secours, de médecine de catastrophe et d'aide humanitaire. Le manipulateur d'électroradiologie médicale adapte sa pratique professionnelle à l'évolution des sciences et des techniques, en lien avec les spécialités médicales ou les autres professions concernées. 22 février 2017 – Amphi Luton, Fac Cochin Évolutions actuelles de la responsabilité médicale des radiologues Dr Vincent HAZEBROUCQ, MCU-PH Université Paris Descartes Responsabilité économique Envers les organismes sociaux et la collectivité En pleine mutation avec les références médicales opposables et la multiplication des contrôles formels ne pas confondre un outil global statistique d'évaluation d'activité un cas individuel auquel s'applique l'obligation de moyen Responsabilité scientifique La population souhaite pouvoir continuer à faire confiance aux médecins, mais plus a priori ni aveuglément. Il nous faut désormais lui démontrer qu’on mérite cette confiance, par une politique permanente et transparente de qualité et de sécurité. Responsabilité populationnelle (ou territoriale) La population demande aux médecins de se préoccuper de leur accessibilité géographique (et pas seulement économique) et de raisonner au niveau territorial plutôt qu’à l’échelle de leur structure (hôpital, clinique, ou cabinet) Cette responsabilité populationnelle, ou territoriale, est d’autant plus importante que la structure est développée et tend vers une situation de monopole Conclusions et questions Celui qui ose poser une question peut se sentir bête cinq minutes ; Celui qui n’ose pas reste bête toute sa vie. (proverbe Chinois)