Algèbre LM 372 Université Pierre et Marie Curie 25 Mars 2013 TD numéro 9 Exercice 1. Torsion Soient M un A-module et x ∈ M ; on dit que x est un élément de torsion dans M s’il existe a ∈ A \ {0} tel que a.x = 0. On note T (M ) l’ensemble des éléments de torsion du module M . Un module M est dit sans torsion si T (M ) = {0} ; il est dit de torsion si T (M ) = M . 1. Quels sont les éléments de torsion du A-module A ? On suppose pour le reste de l’exercice que A est un anneau intègre. 2. Montrer que T (M ) est un sous-module de M . Est-ce encore vrai si A n’est plus supposé intègre ? 3. Montrer que M/T (M ) est un A-module sans torsion. 4. Soit N un sous-module de M . Exprimer T (N ) en fonction de T (M ). En déduire que T (M ) est un module de torsion. 5. Soient N et P deux sous-modules de M tels que M = N ⊕P . Montrer que T (M ) = T (N )⊕T (P ). En déduire que Ar est sans torsion. 6. Si f : M −→ N est un morphisme de A-modules alors f (T (M )) ⊂ T (N ). En déduire que si f réalise un isomorphisme entre M et N , alors f induit un isomorphisme entre T (M ) et T (N ). En déduire qu’un module libre de type fini est sans torsion. Solution de l’exercice 1. 1. a est un élément de torsion de A ssi il esiste b ∈ A tel que ba = 0. Autrement dit, a est un diviseur de 0. 2. Soient a, b ∈ A, x, y ∈ T (M ). Il existe c, d ∈ A tels que cx = dy = 0. Alors cd(ax + by) = ad(cx) + bc(dy) = 0, donc ax + by ∈ T (M ). T (M ) est bien un sous module de M . Lorsque A n’est pas intègre on a toujours cd(ax + by) = 0, mais on ne peut pas conclure car on pourrait avoir cd = 0. 3. Supposons que le module M/T (M ) admette un élément de torsion, et posons m ∈ M un représentant de cet élément. Il existe a ∈ A tel que acl(m) = 0, i.e. am ∈ T (M ). Il existe donc b ∈ A tel que bam = 0. Alors (ab)m = 0, et ab 6= 0, donc m ∈ T (M ), alors cl(m) = 0. M/T (M ) est donc un module sans torsion. 4. On montre que T (N ) = N ∩ T (M ). Si x ∈ T (N ), alors x ∈ N , et il existe a ∈ A tel que ax = 0, donc x ∈ T (M ). Réciproquement, si x ∈ N ∩ T (M ), alors x appartient clairement à T (N ). Puisque T (M ) est un sous-module de M on peut lui appliquer ce résultat. On obtient T (T (M )) = T (M ) ∩ T (M ) = T (M ). On en déduit que T (M ) est un module de torsion. 5. Soit x ∈ T (M ) ⊂ M . On peut écrire x = y + z, avec y ∈ N et z ∈ P . Et il existe a ∈ A tel que ax = 0 = an + ap. Puisque N ∩ P = {0}, on en déduit an = ap = 0. Donc x ∈ T (N ) ⊕ T (P ) (La somme est trivialement directe car T (N ) ∩ T (P ) = {0}), et T (M ) ⊂ T (N ) ⊕ T (P ). Réciproquement si x ∈ T (N ) ⊕ T (P ), alors x = y + z, avec y ∈ T (N ) et z ∈ T (P ). Il existe donc a, b ∈ A tels que ay = bz = 0. On en déduit que abx = aby + abz = 0. Donc x ∈ T (M ), et T (N ) ⊕ T (P ) ⊂ T (M ). Ar = A ⊕ . . . ⊕ A, donc T (Ar ) = T (A) ⊕ . . . ⊕ T (A) = {0}. 1 6. Soit x ∈ T (M ), il existe a ∈ A tel que ax = 0. Donc af (x) = f (ax) = 0, ce qui implique f (x) ∈ T (N ). On a donc f (T (M )) ⊂ T (N ), et réciproquement f −1 (T (N )) ⊂ T (M ). On en déduit que f induit un isomorphisme de T (M ) −→ T (N ). Si M est libre de type fini, et {x1 , . . . , xn } est une base de M , alors M est égal à hx1 i ⊕ . . . ⊕ hxn i et donc isomorphe à An . Il existe donc un isomorphisme entre T (M ) et T (An ) = {0}. On en déduit que T (M ) = 0. Exercice 2. 1. Montrez que M = Q/Z est un Z-module de torsion (i.e. tel que T (M ) = M ). Montrer ensuite qu’il n’existe pas n ∈ Z, tel que nM = 0. Vous notez en passant que M = Q/Z n’est pas de type fini sur Z. 2. Considérez le Z-module S = L 3. Considérez le Z-module Π = Q p∈P Z/pZ. Montrer que T (S) = S. p∈P Z/pZ. Montrer que T (Π) = S. Solution de l’exercice 2. 1. Soit cl( ab ) ∈ M , alors bcl( ab ) = cl(a) = 0, donc cl( ab ) est un élément de torsion. On en déduit que M est un module de torsion. 1 Supposons qu’il existe n ∈ Z, tel que nM = 0. Alors ncl( 2n ) = cl( 12 ) = 0, c’est absurde. Il n’existe donc pas un tel entier n. 2. On a évidemment T (S) ⊆ S. Soit x = (xp )p∈P ∈ S (seul un nombre fini d’éléments de la suite sont Q non nuls). On pose supp(x) = {p ∈ P; xp 6= 0}, et n = p∈supp(x) p. Alors nx = (nxp )o∈P = 0. En effet soit xp = 0, soit n est un multiple de p, et nxp est nul. Donc x ∈ T (S). On a bien S = T (S). 3. Puisque S est un sous module de Π, on a évidemment S = T (S) ⊆ T (Π). Réciproquement considérons x = (xp )p∈P ∈ T (Π). Il existe n ∈ Z, tel que nx = (nxp )p∈P = 0. Décomposons n en produit de facteurs premiers : n = pα1 1 . . . pαk k . Soit un nombre premier p ∈ / {p1 , . . . , pk }. Si on pose cl(yp ) = xp , l’égalité nxp = 0, implique p|nyp , or p est premier et p ne divise pas n donc p divise yp . Ce qui donne xp = 0. Ainsi on a démontré que xp est nul qauf pour un nombre fini de nombre premiers p. On en déduit que (xp )p∈P ∈ S. Au final T (Π) = S. Exercice 3. On suppose A intègre, et on note K son corps des fractions. 1. Montrer que si K est un A-module de type fini, alors A = K. 2. Soit M un A-module de type fini. Montrer que M est de torsion si et seulement si M n’est pas fidèle (On dit que M est fidèle ssi AnnA (M ) = {a ∈ A, aM = 0} = {0}). 3. Soit M un Z-module. Montrer l’équivalence : M est de torsion et de type fini ⇔ M est fini. Solution de l’exercice 3. 1. Supposons que K est un A-module de type fini et posons {(1, b1 ), . . . , (1, bn )} une famille généQ ratrice de K. Soit b ∈ A, on considère alors l’élément x = (1, b ni=1 bi ) ∈ K (vous pouvez le voir Q Q Q comme b Qn1 b ). On peut écrire x = a1 (1, b1 )+. . .+an (1, bn ) = (a1 i6=1 bi +. . . an i6=n bi , i bi ). i=1 i Q Q A étant intègre, cela implique b(a1 i6=1 bi + . . . an i6=n bi ) = 1, et donc b est inversible. Ainsi, tous les éléments de A sont inversibles, on en déduit que A est un corps. Il est donc égal à son corps des fractions K. 2 2. Si M n’est pas fidèle, alors il existe a ∈ A \ {0} tel que aM = 0, et donc tous les éléments de M sont de torsion, M est alors un module de torsion. Réciproquement, si M est un module de type fini de torsion, alors on pose m1 , . . . , mn , une famille génératrice de M , et a1 , . . . , an des éléments de A \ {0} tels que ai mi = 0 pour i = 1, . . . , n. Soit x ∈ M , x = x1 m1 +. . .+xn mn , et (a1 . . . an )x = (a1 . . . an )x1 m1 +. . .+(a1 . . . an )xn mn = 0. On a donc (a1 . . . an )M = 0, avec a1 . . . an 6= 0, car A est intègre. M n’est donc pas fidèle. 3. Supposons que M est un Z-module de torsion de type fini. D’après la question précédente, il existe k ∈ Z tel que kM = 0. Posons m1 , . . . , mn une famille génératrice de M . Soit x ∈ M , x = x1 m1 + . . . + xn mn . On effectue les divisions euclidiennes des xi par k : xi = kyi + ri , 0 ≤ ri < k Alors x = (ky1 + r1 )m1 + . . . + (kyn + rn )mn = r1 m1 + . . . + rn mn ∈ [0 . . . k − 1]m1 + . . . + [0 . . . k − 1]mn . On a donc M ⊂ [0 . . . k − 1]m1 + . . . + [0 . . . k − 1]mn . M est fini. Réciproquement, si M est fini, M est trivialement de type fini puisqu’il est engendré par l’ensemble de ses éléments. De plus si x est un élément de M , il existe k et k 0 deux entiers distincts, tels que kx = k 0 x, puisque M est fini. Donc (k − k 0 )x = 0, x est un élément de torsion. Ainsi M est un module de torsion de type fini. 3