La Lettre du Cardiologue Risque Cardiovasculaire • n° 438 - octobre 2010 | 17
Points forts
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L’insuffisance cardiaque est fréquente chez les diabétiques, et, réciproquement, le diabète constitue un
facteur pronostique péjoratif chez les insuffisants cardiaques.
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Les glitazones multiplient par un facteur de 1,5 à 2 le risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque,
mais, selon les données disponibles, pas la mortalité cardiovasculaire.
»
Cet effet secondaire est lié à une rétention hydrosodée sensible aux diurétiques de type amiloride ;
il n’y a pas d’argument en faveur d’une toxicité myocardique directe.
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La metformine est le seul antidiabétique associé à une réduction du risque d’insuffisance cardiaque, et,
en cas d’antécédent d’insuffisance cardiaque, elle est associée à un meilleur pronostic vital.
»
Ces observations sont essentiellement épidémiologiques, et nécessitent une confirmation dans des
essais randomisés contrôlés.
Mots-clés
Insuffisance cardiaque
Diabète
Traitement
antidiabétique
Effet secondaire
Metformine
Highlights
»
Heart failure is common
among diabetics, and diabetes
is a pejorative prognostic factor.
»
The glitazones multiplied by
a factor of 1,5 to 2 the risk of
hospitalization for heart failure,
without evidence of excess of
cardiovascular mortality.
»
This side effect is related to
a significant sodium and water
retention sensitive to diuretics
like amiloride, there is no argu-
ment for a direct myocardial
toxicity.
»
Metformin is the only anti-
diabetic drug associated with
a reduced risk of heart failure,
and for patients with a history
of heart failure, is associated
with better prognosis.
»
These observations are
essentially epidemiological,
and require confirmation in
randomized controlled trials.
Keywords
Heart failure
Diabetes
Anti-diabetic drug
Side-effect
Metformin
diabétiques, comme l’hypertension, les pathologies
ischémiques, l’obésité, etc.
➤
L’hyperglycémie chronique, mais également
les autres anomalies métaboliques associées à
l’hyperglycémie (hypertriglycéridémie en particulier
postprandiale, élévation des acides gras libres, baisse
de la leptine, etc.) ont probablement un effet direct
sur le myocarde.
➤
Le diabète est associé à des anomalies des
systèmes hormonaux vaso-actifs (activation de la
noradrénaline et de l’endothéline-1), mais aussi à
une activation de cytokines pro-inflammatoires,
dont l’IL-6 ou le TNFα. L’insuffisance cardiaque
présente également ces anomalies, avec cependant
une élévation des concentrations circulantes de ces
marqueurs à des niveaux bien supérieurs, corrélées
au pronostic (7). Or, l’insuline possède des propriétés
anti-inflammatoires (peut-être émoussées dans les
situations d’insulinorésistance) ; cette observation
concorde avec un bénéfice démontré de l’insuline dans
certaines situations de dysfonction cardiaque (1, 8).
Certains traitements antidiabétiques exercent une
toxicité sur le myocarde. Cependant, dans une étude
britannique rétrospective publiée en 2005 (ne portant
que sur les sulfamides, la metformine et l’insuline,
et excluant donc les glitazones), le risque d’insuf-
fisance cardiaque était élevé chez les diabétiques
commençant un traitement (sans différence entre les
différentes classes) seulement la première année, ce
qui suggère que la durée du diabète et la sévérité de
la maladie métabolique étaient les vrais facteurs en
cause, plus que l’aspect thérapeutique lui-même (9).
Enfin, rarement, le diabète et la myocardiopathie
sont deux conséquences d’une même maladie systé-
mique, comme l’hémochromatose.
Impact de la prise en charge
thérapeutique du diabète
sur les insuffisances cardiaques
Quel effet du contrôle glycémique ?
Sur le plan épidémiologique, les patients diabé-
tiques déséquilibrés ont un risque plus important de
développer une insuffisance cardiaque : + 10 à 15 %
par point d’HbA1c supplémentaire. Cette relation
épidémiologique n’a pas pour l’instant trouvé de
prolongement à l’occasion des grands essais d’inten-
sification du traitement antidiabétique : au cours
de l’étude UKPDS (UK Prospective Diabetes Study),
le risque d’insuffisance cardiaque n’a pas été réduit
chez les diabétiques soumis à un contrôle intensif
(7 % d’HbA1c moyenne) par rapport aux sujets
sous traitement conventionnel (7,9 % d’HbA1c
moyenne) [10]. Il s’agissait, il est vrai, de diabétiques
plutôt jeunes, un peu plus de 50 ans à l’inclusion,
dont le diagnostic de diabète était récent. Dans les
essais publiés ces 2 dernières années (ACCORD, VADT
et ADVANCE), le taux d’insuffisance cardiaque n’était
pas non plus affecté par le contrôle glycémique chez
des sujets plus âgés (62 ans dans ACCORD et VADT
et 66 ans dans ADVANCE) dont le diabète évoluait
depuis environ 8 à 10 ans.
Autres interventions thérapeutiques
chez les diabétiques
Bien que cet aspect sorte du cadre de cette mise
au point, il est clair que l’efficacité de l’intensifi-
cation du contrôle tensionnel chez les diabétiques
est acquise : les sujets soumis au contrôle intensif
dans UKPDS présentaient un risque diminué de 56 %
de développer une insuffisance cardiaque. De plus,
dans l’escalade thérapeutique, la généralisation
du recours précoce aux bloqueurs du système
rénine-angiotensine, inhibiteurs de l’enzyme de
conversion et surtout sartans, en particulier chez
les patients présentant une néphropathie diabétique
plus ou moins évoluée, a probablement contribué,
récemment, à limiter l’incidence de l’insuffisance
cardiaque chez les diabétiques.
Traitements pharmacologiques
antidiabétiques
Insuline
L’insulinothérapie a été associée à un risque accru de
décès chez les insuffisants cardiaques de plusieurs
études observationnelles. Au sein de l’essai SAVE