Radiologie et Rhumatologie interventionnelles: trucs et astuces pour la pratique quotidienne Dr Olivier Sisteron , Dr Michel Lagrée Service de radiologie – Polyclinique Saint-Jean Cagnes sur mer - France • La radiologie interventionnelle connaît depuis quelques • • • • • années un essor certain Les procédures pouvant être effectuées sous guidage radiographique, échographique et / ou tomodensitométrique sont nombreuses (plus de 300 !!!) certaines peuvent être très risquées, et nécessitent un plateau technique complet Certaines sont rapides, non ou peu invasives, sans danger et efficaces Ce sont notamment celles qui concernent l’appareil ostéo-articulaire : la « rhumatologie interventionnelle » Nous allons nous intéresser plus spécifiquement aux actes à visée thérapeutique La rhumatologie interventionnelle, qu’est ce que c’est ?… C’est un ensemble de procédures associant : Une voie d’abord transcutanée limitée et Une méthode de guidage (scopie ou échographie) il s’agit donc d’une technique de repérage et « d’action opératoire » qui prend sa place entre la rhumatologie traditionnelle et la chirurgie. Elle est applicable à toutes les articulations, aux bourses séreuses, aux tendons, aux muscles … • Les actes de radiologie interventionnelle ostéoarticulaire thérapeutiques sont parfaitement adaptés pour la pratique ambulatoire • Une anesthésie locale est faite systématiquement (chlorhydrate de lidocaïne 1%) • Ils ne nécessitent aucune préparation particulière • La seule limitation peut être la prise d’un traitement anticoagulant, en sachant qu’il est souvent plus « dangereux » pour le patient d’arrêter ce traitement que de faire l’acte…une information correcte du patient et du médecin correspondant permet de pallier facilement à tout incident…. Le but de cet exposé est de vous donner quelques conseils, quelques trucs et astuces, utiles lors de la réalisation de ce type d’acte afin : • Que l’indication soit correctement posée, car le bénéfice • • • • thérapeutique en découlera que l’examen se déroule de manière optimale pour le patient (compréhension de l’acte, confiance vis à vis du médecin, rapidité de réalisation) Que la « sécurité » de la procédure soir irréprochable Que le patient puisse obtenir toutes les réponses à ces questions éventuelles sur le geste, le suivi, les effets secondaires Que le suivi du patient soit assuré de manière optimale soit par vous même soit par le médecin correspondant (rhumatologue ou généraliste) Principes de l’exposé … Il nous parait logique de présenter les différentes procédures avec leurs « variantes », astuces et petits conseils, plutôt que de vous les présenter par articulation ou région Les différentes techniques seront donc abordées successivement, avec des conseils tirés de notre expérience, pour chacune, avec des précisions éventuelles pour chaque articulation ou type de geste Dans tous les cas Bien vérifier l’indication, les antécédents d’infiltration, afin de ne pas cumuler les doses de corticoïdes Bien choisir son mode de guidage et/ou repérage Consentement éclairé et surtout explications du pourquoi et du comment du geste Positionnement le plus confortable du patient et le mieux pour vous Conditions strictes d’asepsie : chaîne bétadinée, lavage des mains, champ stérile percé Anesthésie locale souvent utilisée et utilisable, à faible dose, mais toujours utile pour : • Rassurer le patient et le faire se décontracter au mieux • Permettre un positionnement correct et optimal • Permettre un premier lavage et test anesthésique Visco-supplémentation (1) • Technique de plus en plus utilisée et reconnue au niveau • • • • • • du genou Moins utilisée sur « petites » articulations, mais en cours de développement Produit visqueux de poids moléculaire élevé, à effets antalgique et nutritif sur le cartilage articulaire La procédure se déroule comme une ARTHROGRAPHIE Aiguille type spinale 20G (jaune) Lavage articulaire systématique avec un mélange de sérum physiologique et de lidocaïne réfrigérés, permettant une bonne distension articulaire Récupérer (partiellement en général) le liquide de lavage avant la visco-supplémentation Visco-supplémentation (2) • Toujours être sûr de la position intra capsulaire de • • • • • • l’aiguille opacification quasi toujours indispensable Faire un cliché en « remplissage articulaire » Lavage toujours utile pour effet antalgique immédiat Pour les grosses articulations, rarement de retour complet du liquide de lavage Injection du liquide de visco-supplémentation sans douleur!!!!!! Conseils post procédure : repos de quelques heures, « glaçage » si douleurs au point de ponction, reprise rapide de la mobilité Suivi à 8-10 jours et un mois (rhumatologue en général) Visco-supplémentation (3) petits trucs et astuces… • • • • On peut se passer de l’opacification iodée si retour spontané de liquide synovial Penser à faire des prélèvements (bactério/cytologie,…) si liquide synovial trouble ou atypique Toujours distendre l’articulation pour la hanche car permet d’optimiser l’injection du liquide de visco- supplémentation Pourquoi le lavage articulaire ? 1. NETTOYER la cavité articulaire des produits de dégradation résultant de la chondrolyse et des 2. cytokines de l’inflammation afin de faciliter et de prolonger l’action thérapeutique DISTENDRE la capsule articulaire afin d’optimiser le volume intra-articulaire disponible EVITER ou MINIMISER les réactions algiques 3. • • • On peut associer une injection de dérivés cortisonés Opacification possible de la gaine du psoas : paralysie crurale possible après la procédure, résolutive en quelques minutes Ne pas oublier de faire un cliché : profil arthrographique (document médico-légal) Visco-supplémentation (4) coxarthrose gauche : positionnement de l’aiguille et opacification iodée intra capsulaire, arthro-lavage et distension avec mélange réfrigéré de lidocaïne et de sérum physiologique puis injection du dérivé cortisoné et du produit de visco-supplémentation Visco-supplémentation (5) Arthrographie et VS : à noter opacification d’un kyste synovial Exemple de visco-supplémentation d’articulation trapézo-métarcarpienne (rhizarthrose) : repérage avec aiguille en place puis opacification iodée pour vérification avec la VS Visco-supplémentation (6) Épaule droite: omarthrose non opérable, 2ème visco-supplémentation, capsulite associée : lavage et distension articulaire, visco supplémentation en fin de procédure, pas de dérivé cortisoné car patiente âgée Visco-supplémentation (7) Visco-supplémentation sur coxarthrose gauche avec matériel d’ostéosynthèse, cliché simple et contrôle de l’opacification capsulaire Tendinopathie calcifiante • Essentiellement localisation à l’épaule • Technique connue et répandue • Principe du lavage/trituration de la calcification en phase • • • • résorptive Anesthésie locale, 2 aiguilles (verte IM, ou trocart rose…), injection progressive jusqu’à obtention du retour de liquide « laiteux » Lavage au sérum physiologique et lidocaïne réfrigérés Injection de dérivés cortisonés en fin de procédure Conseils post-procédures Tendinopathie calcifiante (2) Petits trucs et astuces… • Ténographie et bursographie utiles: recherche de lésion transfixiante et communicante de la coiffe • Ne pas injecter en pression, pour éviter un décollement de capsule • Technique valable pour localisation « calcique » à la hanche • Astuces : épaule « forte » ou forte poitrine : fixer (avec bande adhésive) et déplacer les replis cutanés pour optimiser le geste Tendinopathie calcifiante (3) Tendinopathie calcifiante du sus épineux droit : repérage de la calcification et mise en place de la première aiguille, bursographie ne montrant pas de communication avec l’articulation, contrôle avec 2ème aiguille après le lavage et l’injection cortisoné. On note une quasi disparition de la calcification Capsulite rétractile Pathologie fréquente Pathogénie de type algoneurodystrophique mais de mécanisme non encore élucidé Les modifications capsulo-synoviales observées dans la CR sont mieux connues depuis les constatations peropératoires et par IRM avec injection : • Synoviale hyperplasique congestive (phase algique) • Fibrose du plan capsulo-synovial (phase rétractile) Étiologie multiple et protéiforme mais le plus souvent primitive ou post traumatique La capsulite représente souvent un écueil thérapeutique pour le praticien Capsulite rétractile (2) • Toute articulation qui souffre ou a souffert peut être le siège d’une rétraction capsulaire • Fréquence élevée à l’épaule • Notre expérience : Distension intra articulaire au sérum réfrigéré + corticoïdes en fin de procédure Avec un maximum de 2 dilatations à 1 mois d’intervalle ( 2ème non obligatoire) Rééducation Capsulite rétractile (3) trucs et astuces … Toute « périarthrite » qui s’aggrave et qui se limite doit faire évoquer une rétraction capsulaire Le signe clinique majeur est le « couplage » scapulo-glénohuméral à radio standard normale Il n’existe pas de parallélisme arthro-clinique sauf dans la disparition de la totalité des récessus Il vaut mieux « dilater » une épaule encore douloureuse que totalement froide et gelée… La mobilisation post – dilatation n’améliore pas le résultat, demander au patient d’effectuer un repos de quelques heures Que la rééducation standard activo-passive est suffisante et nécessaire et à entreprendre dans les 24-48 heures après la procédure Capsulite rétractile (4) Capsulite de hanche droite post-traumatique, repérage et distension capsulaire, lavage articulaire avant injection de dérivé cortisoné Capsulite rétractile (5) Capsulite rétractile de l’épaule gauche: absence d’opacification de la gaine du long biceps. Après retrait de l’aiguille et distension, aspect de rupture capsulaire le long du sous scapulaire Tendinite - Ténosynovite • Procédure d’introduction récente en radiologie, • • • • souvent pratiquée avant au cabinet et sans repérage Intérêt de la précision grâce au repérage Repérage ECHOGRAPHIQUE ++++++ Rechercher le liquide : soit visible spontanément, soit après mouvements de la zone à infiltrer Conseils post-procédures Tendinite - Ténosynovite (2) • Après traitement médical bien conduit • Bien expliquer au patient l’intérêt d’éviter toutes les situations à risque : hyper sollicitation, mouvements répétitifs, … • Aiguilles fines 21 à 23 G Tendinite - Ténosynovite (3) Petits trucs et astuces… • Aiguille fine suffisante (22g bleue) • Quasiment jamais de retour de liquide spontanément • • • • vérifier le tip-écho avec la sonde, voire distension à la lidocaïne en cas de doute Intérêt de la position déclive pour ramener le liquide dans une zone facile d’accès : REPERER LE LIQUIDE +++ Attention aux synovites!!!!! Pas d’infiltration sur un épaississement synovial car douloureux à l’injection et dans les heures qui suivent Injecter de l’hexatrione dans un contexte de PR Bien masser la zone de ponction après le geste pour faire diffuser le produit infiltré Tendinite - Ténosynovite (3) Ténosynovite du long biceps gauche, repérage de l’aiguille dans la gouttière Tendinobursites • Souvent contexte de douleurs chroniques mal • • • • étiquetées, avec thérapeutique inadaptée ou inefficace Localisation fréquente à la hanche : tendinobursite péri-trochantérienne, au niveau de l’insertion du moyen fessier Parfois, en phase chronique, participation possible de calcifications d’hydroxy-apathite Diagnostic clinique ++++ Échographie pour confirmation et aide au repérage et guidage de la procédure Tendinobursites (2) exemple de la hanche • Patient en décubitus latéral opposé à la zone à infiltrer • 2 Aiguilles fines type IM (verte), 1 aiguille bleue pour lidocaïne au début • Repérage à la peau des points de ponction • Mise en place des 2 aiguilles et injection de sérum physiologique et lidocaïne jusqu’à obtention du retour par l’autre aiguille, puis rinçage abondant (3 à 4 seringues de 20 ml) • Injection de dérivés cortisonés à la fin de la procédure Tendinobursites (3) petits trucs … • Le repérage à la peau suffit la plupart du temps, le tout étant de bien évaluer la profondeur de la bourse et de visualiser l’angulation à donner à l’aiguille • Aucune douleur = bon positionnement des aiguilles • Pas de consigne particulière en local sauf glaçage les premières heures • Technique adaptable à toutes les bursites • Les douleurs doivent disparaître dés le lever de la table d’examen = test antalgique du lavage anesthésique • Ne pas se focaliser sur le retour obligatoire de tout le liquide de lavage; il peu être spontanée et sous pression quand la bourse est de petite taille, mais aussi sous la forme de « goutte à goutte » quand la bourse est plus grande et à contenu épais. Penser à la palpation et la pression sur la peau pour bien étaler le liquide pendant et après le retrait des aiguille ++++ Tendinobursites (4) Tendino-bursite du moyen fessier Patient serveur dans un restaurant, douleurs électives péri trochantérienne droite, récidivante, avec efficacité satisfaisante d’une première infiltration-lavage. Bursite échogène, mal limitée avec hypoéchogénicité péri tendineuse et tendance à une diminution de l’épanchement par rapport aux précédents bilan. Nouveau lavage à visée antalgique. Retour faible « goutte à goutte du liquide de lavage. Dérivé cortisoné en fin de procédure Tendinobursites (5) Tip écho Coupe transverse Bursite sous acromio-deltoïdienne sur conflit sous acromial, rebelle au traitement médical et à la rééducation. Ponction infiltration sous échographie Kystes synoviaux para-articulaires et péri-tendineux • Il s’agit en général d’un kyste synovial de sur• • • • • sollicitation tendineuse ou articulaire Exemple type = kyste de la face dorsale du carpe, ou scapho lunaire En fait on peut en observer partout Soit régression spontanée, soit après traitement médical local, soit après pression locale La chirurgie est réservée au kyste rebelle, récidivant ou handicapant Les infiltrations avec ponction et lavage du kyste peuvent être effectuées Kystes synoviaux para-articulaires et péri-tendineux Kyste scapho lunaire de la face dorsale du carpe, poignet gauche. Repérage et contrôle du positionnement de l’aiguille dans le kyste, aspiration partielle puis lavage du kyste, infiltration de dérivé cortisoné Traitement des hématomes musculaires et des cicatrices aponévrotiques • Désinsertion musculaire ou myo aponévrotique • • • • post traumatique Organisation rapide ou progressive en quelques jours à 3-4 semaines d’un hématome Parfois résorption spontanée avec soins locaux Mais il peut persister un hématome enkysté Il peut également apparaître à distance une cicatrice aponévrotique sous la forme d’une bande hyperéchogène avec épaississement de l’aponévrose intermusculaire (ou entre les faisceaux musculaires) avec parfois composante liquidienne Traitement des hématomes musculaires et des cicatrices aponévrotiques (2) • En cas d’hématome persistant , on peut proposer une ponction-évacuation • Elle est à indiquer plutôt si : • L’hématome est compressible sous la sonde • Il n’existe pas de paroi épaisse • Quand il n’existe pas de rétraction musculaire important (évaluation du pourcentage des fibres musculaires restantes) • Avis chirurgical nécessaire au préalable • Pour les cicatrices aponévrotiques, on peut proposer une ponction-lavage et infiltration : lavage au sérum physiologique, selon la technique de s bursites, avec 2 aiguilles permettant de rincer et d’évacuer le liquide dans le même temps, injection de vitamines B12 Traitement des hématomes musculaires et des cicatrices aponévrotiques (3) Repérage et mesures (volume à évacuer) Ponction avec aiguille multitrouée de 5 French, aspiration Contrôle post évacuation Hématome persistant et compressible, posttraumatique de la loge postéro interne de la jambe Trucs et astuces : en résumé!!!!!!! La Radiologie interventionnelle en rhumatologie a pour avantages: sa simplicité sa rapidité (geste ambulatoire) la diminution de la gêne pour le patient une limitation certaine des risques une réduction des coûts Une efficacité satisfaisante dans la plupart des situations et tout ceci au prix d’une expérience d’acquisition facile pour le praticien… Trucs et astuces : en résumé!!!!!!! • Bien expliquer le geste et ses limites • Bien expliquer les complications éventuelles, qui sont • • • • en fait rarissimes et donc préciser au patient qu’il peut contacter au moindre problème ou question Respecter la chaîne bétadinée!!!! Ne pas négliger l’anesthésie locale car elle permet de rassurer le patient, d’être confortable en cas de difficulté à positionner l’aiguille, de servir de test antalgique immédiat Ne pas oublier de dire que le dérivé cortisoné met en général quelques jours à être efficace Réévaluation systématique (correspondant en général) à 3 semaines un mois radiologie et rhumatologie interventionnelles : les 10 commandements … 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. Le consentement éclairé, tu obtiendras Les indications, tu vérifieras L’asepsie stricte, tu respecteras Les pièges techniques, tu éviteras Un contrôle scopique ou échographique, tu exigeras L’arthro-lavage, tu associeras (si besoin…) Le confort articulaire, tu respecteras L’injection avec précaution, tu réaliseras Les conseils post-procédure, tu indiqueras Contactable tu resteras …ET AINSI LE PATIENT TU SOULAGERAS… Merci au Dr Lagrée pour son aimable participation et son expérience, et merci à l’équipe des manipulatrices pour leur aide précieuse