Cancers du col utérin à haut risque. Associations radio-

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La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 5 - mai 2007
Cancers du col utérin à haut risque. Associations radio-
chimiothérapies. Revue générale et perspectives
High-risk cervical cancers. Concurrent chemotherapy with radiotherapy. Review and
perspectives
P. Beuzeboc*, S. Scholl*, A. de la Rochefordière**, J. Kirova**, S. Alran***, R. Salmon***
* Département d’oncologie médicale, Institut Curie, Paris.
** Département de radiothérapie, Institut Curie, Paris.
*** Département de chirurgie, Institut Curie, Paris.
L
es deux dernières décennies ont permis l’intégration
progressive de la chimiothérapie dans la stratégie multi-
disciplinaire de prise en charge des formes à haut risque
des carcinomes du col utérin avec la preuve du bénéfi ce des
associations radio-chimiothérapies utilisant une chimiothérapie
à base de cisplatine reconnue comme un standard de traitement
des formes avancées. L’heure est aujourd’hui à de nouvelles pers-
pectives intégrant les progrès de la radiothérapie et de l’imagerie,
la place de la chirurgie et des traitements biologiques ciblés. Un
essai multicentrique du groupe gynécologie de la Fédération des
centres va explorer l’intérêt potentiel de l’addition du cétuximab
au cisplatine hebdomadaire.
Lincidence du cancer du col utérin est en constante diminution
dans la plupart des pays développés (1). En France, l’incidence
ajustée à l’âge a régressé de plus de 40 % sur les 20 dernières
années et la mortalité a diminué de plus de 50 % au cours des
quarante dernières années ; 3 387 nouveaux cas de cancer du col
utérin ont été diagnostiqués pour l’année 2000 avec 1 004 décès
enregistrés (2).
Le stade représente l’un des facteurs pronostiques majeurs avec
une survie à 5 ans variant de 85 à 90 % au stade IB et de 5 à 15 %
au stade IV. Les autres principaux paramètres du pronostic (3)
sont la taille supérieure à 4 cm pour les stades IB, la présence
d’emboles vasculaires et l’atteinte ganglionnaire. Les tumeurs
du col utérin de stade IB ont un pronostic moins bon en termes
de contrôle local et de survie que les tumeurs de stade I de taille
inférieure. Si dans les stades IB, la survie varie de 85 à 95 % pour
les N-, elle nest plus que de 45 à 55 % pour les N+.
Les données françaises en survie à 5 ans en fonction du stade
de 1 875 patientes (4) traitées par radiothérapie seule avaient
montré des survies de 70 % pour les stades IIB, de 45 % pour
les stades IIIB et de 10 % pour les stades IVA.
Pour essayer d’améliorer les résultats, deux approches théra-
peutiques intégrant la chimiothérapie dans les formes locale-
ment avancées ont fait l’objet d’importantes investigations : la
chimiothérapie néo-adjuvante et les associations radio-chimio-
thérapie.
CHIMIOTHÉRAPIE NÉOADJUVANTE
La chimiothérapie néo-adjuvante (NACT) na pas de place
reconnue malgré 3 000 patientes incluses dans des études
randomisées. Aucune étude randomisée n’a montré de béné-
ce avant radiothérapie (deux d’entre elles ont même eu des
résultats délétères).
Létude positive de NACT avant chirurgie ou radiothérapie
rapportée par P. Benedetti-Panici et al. (5) a été critiquée du
fait d’une dose de radiothérapie insuffi sante et de l’absence de
chimiothérapie concomitante. Cet essai randomisé multicen-
trique italien a comparé chez 441 patientes présentant une
tumeur de stades IB2 à III, une chimiothérapie néo-adjuvante
suivie d’une chirurgie radicale (hystérectomie plus lymphadénec-
tomie) à une association radiothérapie exclusive (radiothérapie
externe de 45 à 50 Gy suivie d’une curiethérapie de 20 à 30 Gy).
Il a été retrouvé un avantage en survie signifi catif seulement
pour les tumeurs de stades IB2 à IIB.
ASSOCIATIONS RADIOCHIMIOTHÉRAPIE
La chimiothérapie apporte un gain de survie démontré lorsqu’elle
est administrée de façon concomitante à la radiothérapie. Une
dizaine d’essais randomisés essentiellement menés sous l’égide du
Gynecologic Oncology Group (GOG), évaluant les eff ets de la radio-
chimiothérapie concomitante dans diff érents stades du col utérin,
ont été publiés au cours de ces dernières années (tableau).
Les premières études ont utilisé l’hydroxyurée maintenant aban-
donnée. Une revue générale récente des essais contrôlés na pas
retrouvé de preuve évidente pour justifi er en routine l’utilisation
de l’hydroxyurée en association avec la radiothérapie (6). De
plus, une étude randomisée du GOG a montré la supériorité
de l’association cisplatine + 5-FU sur l’hydroxyurée (7).
Les cinq études de phase III d’associations radio-chimiothérapie
comprenant du cisplatine, réalisées sur des tumeurs de stades
diff érents ont toutes montré un avantage en faisant un standard
thérapeutique pour les formes à mauvais pronostic.
Les résultats des trois études princeps publiées dans le New
England Journal of Medicine et l’alerte clinique du National
Cancer Institute (NCI) qui en a découlé ont permis d’imposer
les associations avec le cisplatine comme un standard à partir
de 1999, modifi ant ainsi les pratiques (8) :
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Tableau.
Comparaison radio-chimiothérapie concomitante versus radiothérapie seule : essais randomisés dans le traitement du cancer du col
de l’utérus.
Références Bras Traitement
Irradiation
Chimiothérapie
(en indice : dose en mg/m2)
Nombre
de patientes
évaluées
(randomisées)
Stade FIGO Suivi
médian
(mois)
SSR
(p)
SG
(p)
Choo 1986 A RT pelv. (40 Gy, 2,5 Gy/fr) + CuT + CDDP25 hebd. x 4 20 IIB, III 10 à 34 NP NP
B RT pelv. (40 Gy, 2,5 Gy/fr) + CuT 25
(45)
NP NP
Wong 1989 A RT pelv. (40 Gy, 2,5 Gy/fr) + CuT + CDDP25 hebd. x 4 22 IIB, III 42 à 72 ≈ 46 % NP
B RT pelv. (40 Gy, 2,5 Gy/fr) + CuT + CDDP25 bihebd. x 4 17 ≈ 58 % NP
C RT pelv. (40 Gy, 2,5 Gy/fr) + CuT 25
(64)
≈ 39 %
(NS)
NP
(NS)
Tseng 1997 A RT pelv (44 Gy/22 fr) + CuT
(point A : 6 x 4,3 Gy)
+ CDDP50 + vincristine1
+ bléomycine25 21 j x 4
60 IIB (> 4 cm), IIIB -
N- lombo-aortique
46,8 à 3 ans
51,7 %
à 3 ans
61,7 %
B RT pelv. (44 Gy/22 fr) + CuT
(point A : 6 x 4,36 Gy
62
(122)
53,2 %
(p = 0,92)
64,5 %
(p = 0,33)
Thomas1998 A RT pelv. (50 Gy/25 fr) + CuT
(point A : 40 Gy)
+ 5-FU1000 x 4 j x 2 221
(234)
IB, IIA (> 5 cm)
III, IVA
59 à 5 ans
53 %
à 5 ans
65 %
B RT pelv. (50 Gy/25 fr) + CuT
(point A : 40 Gy)
45 % 58 %
C RT pelv. 1(53 Gy/33 fr) + CuT
(point A : 40 Gy)
+ 5-FU1000 x 4 j x 2 61 % 69 %
D RT pelv. (53 Gy/33 fr) + CuT
(point A : 40 Gy)
58 %
(NS)
68 %
(NS)
GOG 123
Keys 1999
A RT pelv. (45 Gy, 1,8-2 Gy/fr)
+ CuT (point A : 75 Gy)
+ HTE extrafasciale
+ CDDP40 / hebd. x 6 183 IB2 (> 4 cm)
N- lombo-aortique
36 à 3 ans
79 %
à 3 ans
83 %
B RT pelv. (45 Gy, 1,8-2 Gy/fr)
+ CuT (point A : 75 Gy)
+ HTE extrafasciale
186
(374)
63 %
(p < 0,001)
74 %
(p = 0,008)
RTOG 9001
Morris 1999
A RT pelv. + CuT (point A : 85 Gy) + CDDP75 5-FU4000 / 21 j x 3 195 IB et IIA (> 5 cm
ou N+ pelvien)
IIB – IVA :
N- lombo-A
43 à 5 ans
67 %
à 5 ans
73 %
B RT pelv. + lombo-A (45 Gy,
1,8 Gy/fr) + CuT (point A : 85 Gy)
193
(403)
40 %
(p < 0,001)
58 %
(p = 0,004)
GOG 120
Rose 1999
A RT pelv.1 + CuT (point A : 81 Gy,
point B : 55 à 60 Gy)
+ CDDP40/semaine x 6 176 IIB, III, IVA
N- lombo-A
35 à 2 ans
67 %
à 2 ans
66,5 %
B RT pelv.1 + CuT (point A : 81 Gy) + CDDP50 J1, J29 ;
5-FU4000 J1, J29 ;
HU2000/bihebd. x 6
173 64 % 67 %
C RT pelv.1 + CuT (point A : 81 Gy) + HU2000/bihebd. x 6 177
(575)
47 %
(p < 0,001)
49,7 %
A vs C (p = 0,04)
B vs C (p = 0,02)
GOG 85
Whitney 1999
A RT pelv.2 + CuT + CDDP50 J1, J29 : 5-FU1000 J2
à J5, J30 à J33
177 IIB, III, IVA
N- lombo-A
100 59 % à 3 ans
67 %
B RT pelv.2 + CuT + HU80 bihebd. 191
(388)
47 %
(p = 0,033)
57 %
(p = 0,018)
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Probabilité de survie
Mois
Radiothérapie + cisplatine
Radiothérapie seule
Keys HM. N Engl J Med 1999;340:1154-61.
01224
0,7
0,6
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0
0,8
0,9
1,0
36 48
Figure 1.
Essai GOG 123. Carcinome cervical de stade IB.
Cisplatine + radiothérapie (RT), suivie d’hystérectomie versus
RT suivie d’hystérectomie. Survie globale.
Probabilité de survie
Mois
Radiothérapie + cisplatine
(38)
(28)
(23)
Rose PG. N Engl J Med 1999;340:1144-53.
01261824
0,7
0,6
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0
0,8
0,9
1,0
3630 4842
Radiothérapie + cisplatine + fluoro-uracile + hydroxyurée
Radiothérapie + cisplatine + hydroxyurée
Figure 2.
Essai GOG 120. Cancer du col utérin avancé. Étude
randomisée comparant RT + CDDP, RT + CDDP + 5-FU, RT + HU*.
Survie globale.
* RT : radiothérapie ; CDDP : cisplatine ; 5-FU : 5- uoro-uracile ; HU : hydroxyurée.
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l’étude GOG 123 (9) a comparé une association de radiothé-
rapie et de cisplatine hebdomadaire (40 mg/m2 x 6 doses, dose
maximale = 70 mg) suivie d’hystérectomie chez 183 patientes à
la même combinaison radio-chirurgicale dans les tumeurs de
stade IB (égale ou supérieure à 4 cm) chez 186 patientes. Les
femmes présentant des adénopathies au scanner abdomino-
pelvien étaient inéligibles. Les doses cumulatives de radiothé-
rapie étaient de 75 Gy au niveau du col (point A) et de 55 Gy au
niveau du pelvis (point B). La survie sans progression (p < 0,001)
et la survie globale (p = 0,008) se sont avérées signifi cativement
meilleures avec l’association radio-chimiothérapie (fi gure 1).
Les toxicités hématologiques de grades 3 et 4 ont été également
signifi cativement plus élevées (21 % versus 2 %) ainsi que les
toxicités gastro-intestinales (14 % versus 5 %).
Lactualisation à 72 mois a montré que la probabilité de survie
sans récidive était de 78 % dans le bras combiné versus 64 % dans
le bras radiothérapie (HR = 0,63 ; IC95 : 0,43-0,91 ; p = 0,015)
[10] ;
la deuxième étude GOG 120 rapportée par P.G. Rose et al.
(11) comparant 3 bras – un traitement avec radiothérapie et
hydroxyurée (3 g/m2 deux fois par semaine x 6 semaines), un
autre avec radiothérapie et cisplatine hebdomadaire (40 mg/m
2
),
un dernier avec radiothérapie et 5-FU + cisplatine + hydroxyurée
(cisplatine 50 mg/m2 J1 et J29, FU 4 g/m2 en perfusion de
96 heures à J1 et J29, hydroxyurée 2 g/m2 deux fois par semaine
x 6 semaines) –, a montré que les 2 combinaisons avec cispla-
tine présentaient avec un suivi médian de 35 mois, des taux
de survie sans progression (p < 0,001 pour les 2) et de survie
globale (respectivement p = 0,004 et p = 0,002) signifi cativement
meilleurs que le bras radiothérapie-hydroxyurée. Cinq cent vingt-
six patientes présentant une tumeur localement avancée (de
stades IIB à IVA) ont été incluses dans cet essai (fi gure 2) ;
l’étude du RTOG 9001 (Radiation  erapy Oncology Group)
[12] a comparé une radiothérapie pelvienne et lombo-aortique à
une radiothérapie pelvienne (45 Gy suivis ensuite d’une curiethé-
rapie) associée à deux cycles de chimiothérapie par cisplatine
SWOG 8797
Peters 2000
A RT pelv. 49 Gy/29 fr + CDDP70 5-FU4000 21 j x 4 127 IA2, IB, IIA :
N+ pelviens ±
marges positives ±
env paramétrial
42 à 4 ans
80 %
à 4 ans
81 %
B RT pelv. 49 Gy/29 fr 116
(268)
N- lombo-A 63 %
(p = 0,003)
71 %
(p = 0,007)
Wong 1999 A RT pelv. + CuT (point A : 85-
90 Gy et point B : 60 Gy)
+ épirubicine60 puis
épirubicine90
toutes les 4 semaines x 5
110/106
(110)4
I, IIA, IIB et IIIB
I & II > 4 cm
66 à 8 ans
82 %3
à 8 ans
80 %3
B RT pelv. + CuT (point A : 85-
90 Gy et point B : 60 Gy)
110/106
(110)4
70 %3
(p < 0,024)
66 %3
(p = 0,04)
Abréviations : CuT : curiethérapie ; env : envahissement ; FIGO : Fédération internationale de gynécologie obstétrique ; fr : fraction; GOG : Gynecologic Oncologic Group ; hebd. : hebdomadaire; HTE : hystérectomie; HU : hydroxyurée ;
j : jour ; lombo-A : lombo-aortique ; N : ganglions négatifs (non atteints) ; N+ : ganglions positifs (atteints) ; NP : non précisé ; pelv. : pelvienne ; RT : radiothérapie externe ; RTOG : Radiation Therapy Oncology Group ; SG : survie globale ;
SSR : survie sans récidive ; SWOG : SouthWest Oncology Group.
1 : 40,8 Gy/24 fractions ou 51 Gy/30 fractions ; 2 : pour les stades IIB, 40,8 Gy en 24 fractions, pour les stades III et IV, 51 Gy en 30 fractions ;
3 : les taux ont été estimés sur les schémas des courbes de survie de l’article publié ; 4 : 106 patientes évaluables pour SSR et 110 pour SG.
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Survie (%)
Mois
Radiothérapie + chimiothérapie
Radiothérapie seule
p = 0,004
(44)
(95)
(78) (33)
Morris M. N Engl J Med 1999;340(5):1137-43.
01224
70
60
50
40
30
20
10
0
80
90
100
36 6048
Figure 3.
RTOG 9001. Radiothérapie avec chimiothérapie
concomitante (5-FU et CDDP) versus radiothérapie pelvienne
et lombo-aortique dans les cancers cervicaux à haut risque ;
survie globale.
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et 5-FU. Le cisplatine était délivré à la dose de 50 mg/m2 et le
5-FU à la dose de 4 g sur 96 heures de J1 à J5 et de J22 à J26.
Elle a inclus 403 patientes avec une tumeur confie au pelvis
(stades IIB à IVA ou stade IB ou IIA avec un diamètre d’au
moins 5 cm ou une atteinte ganglionnaire pelvienne). Les taux
de survie à 5 ans atteignaient 73 % pour l’association radio-
chimiothérapie versus 58 % pour la radiothérapie pelvienne et
lombo-aortique (p = 0,004), et les survies sans récidive à 5 ans
étaient respectivement de 67 % et 40 % (p < 0,001) avec à la
fois une augmentation signifi cative des rechutes locales et des
métastases à distance (fi gure 3) ;
La mise à jour de l’étude RTOG 9001 avec un suivi médian de
6,6 ans (13) a confi rmé une réduction du risque de récidive de
51 % (IC95 : 36-66 %) et le bénéfi ce en survie globale (67 % versus
41 % à 8 ans, p < 0,0001).
À côté de ces trois études, il faut aussi relever l’étude SWOG 8797
(SouthWest Oncology Group) [14] qui a comparé une radiothé-
rapie pelvienne seule à une radiothérapie pelvienne combinée à
une association cisplatine + 5-FU (cisplatine 70 mg/m
2
et 5-FU
en perfusion de 96 heures à la dose de 1 000 mg/m2/j toutes les
3 semaines x 4 cycles). Cette étude a inclus 268 patientes à haut
risque qui ont eu une hystérectomie et un curage ganglionnaire
pour une tumeur de stade 1A2, IB ou IIA avec atteinte ganglion-
naire ou atteinte microscopique du paramètre ou marges chirur-
gicales positives. Il a été retrouvé dans le bras chimiothérapie
une amélioration signifi cative à 4 ans de la survie sans récidive
(80 % versus 63 %, p = 0,003) et de la survie globale (81 % versus
71 %, p = 0,007).
Enfi n, une étude plus récente du GOG (15) a comparé l’utili-
sation de cisplatine hebdomadaire (40 mg/m2/semaine avec
ou sans 5-FU en perfusion continue (225 mg/m2/jour pendant
5 jours/semaine) pour 6 cycles pendant la radiothérapie. Cette
étude a été interrompue prématurément, le bras 5-FU montrant
lors d’une analyse intermédiaire un taux d’échec plus élevé qui
ne pouvait se transformer en une amélioration de la survie sans
progression si l’essai avait été poursuivi.
Notons également que les données préliminaires d’un essai
de phase III thaïlandais – incluant 469 patientes et comparant
une association radio-chimiothérapie de carboplatine avec ou
sans tégafur-uracile – nont pas retrouvé d’avantage à l’addition
du tégafur-uracile (16).
On peut donc considérer actuellement que l’association à la radio-
thérapie de cisplatine hebdomadaire à la dose de 40 mg/m2/semaine
pendant 6 semaines représente le standard thérapeutique de ces
formes à haut risque.
PLACE DE LA CHIRURGIE AVEC LES ASSOCIATIONS
RADIOCHIMIOTHÉRAPIES
Parmi les questions en suspens, celle de la place de la chirurgie
reste importante à préciser.
Dans l’étude du GOG 123 qui s’adressait à des tumeurs de
stade IB, il faut noter qu’une colpohystérectomie extrafasciale
était réalisée 3 à 6 semaines après la fi n de l’irradiation.
Limportance de la résection chirurgicale a bien été soulignée
dans une étude rétrospective du GCCLCC. J.M. Classe et al.
(17) y ont évalué la morbidité et la valeur thérapeutique de
la chirurgie après radio-chimiothérapie et curiethérapie dans
une série multicentrique de la Fédération des centres ayant
enrôlée 175 patientes avec un cancer du col avancé (stades IB2
à IVA). Le traitement chirurgical faisait appel soit à une hysté-
rectomie radicale soit à une exentération pelvienne antérieure
et à un curage ganglionnaire. Avec un suivi médian de 36 mois
la survie globale et la survie sans récidive étaient signifi cati-
vement meilleures en cas de rémission complète histologique
(p < 0,0001). La morbidité s’est révélée acceptable.
D’autres équipes internationales ont rapporté leur expérience
(18, 19). En France, l’équipe de Marseille vient très récemment
de publier une étude menée auprès de 30 patientes et dont le
sujet portait sur la contribution de la chirurgie après radio-
chimiothérapie pour des cancers localement avancés présentant
des maladies résiduelles supérieures ou égales à 2 cm (20).
Dans l’expérience rétrospective de 70 patientes de stades
FIGO IB2, IIA, IIB et traitées à l’Institut Curie par radio-
chimiothérapie avec 2 cycles de 5-FU + cisplatine préopéra-
toires, les taux de survie sans récidive et globale actuarielles
à 5 ans étaient respectivement de 77 % (IC95 : 66-89 %) et de
68 % (IC95 : 55-81 %).
Il semble aujourd’hui que le choix doit dépendre d’une décision
multidisciplinaire au décours de l’association après une évalua-
tion clinique et radiologique (réalisée au mieux par IRM).
TOXICITÉS AIGUËS ET TARDIVES
J.M. Kirwan et al. (21) ont rapporté les données en termes de
toxicité sur 4 580 patientes incluses dans 19 études randomisées
et ont montré que plus d’une patiente sur 10 pouvaient présenter
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des complications sévères (plus de deux fois que dans les bras
témoins). Les auteurs ont suggéré que les études ultérieures
devraient collecter de façon préliminaire les données de toxicité
selon des critères d’évaluation validés et actuels.
NOUVELLES COMBINAISONS DE CHIMIOTHÉRAPIE
Des combinaisons avec de nouveaux radio-sensibilisants et des
drogues actives sont en cours d’exploration.
Au congrès de l’ASCO 2006, notamment, ont été rapportées
les données de deux études de phase I :
la première conduite par le groupe GINECO (22) a testé une
association d’irinotécan + cisplatine concomitante de la radio-
thérapie. Le traitement a utilisé l’irinotécan selon un schéma
d’escalade de dose hebdomadaire en association avec une dose
xe de cisplatine (20 mg/m2) pendant la radiothérapie pelvienne
(45-50 Gy). Une chirurgie ou une curiethérapie complémen-
taire était autorisée selon les habitudes des centres. La dose
recommandée d’irinotécan était de 30 mg/m
2
par semaine en
combinaison avec le cisplatine ;
la seconde s’est intéressée au docétaxel (23). Les paliers de doses
hebdomadaires de docétaxel concomitantes de la radiothérapie
(1,8 Gy x 30 séances) ont éde 20 mg/m
2
, 30 mg/m
2
, 40 mg/m
2
x 6 cycles. La dose recommandée a été de 40 mg/m2.
PERSPECTIVES
En dépit de l’amélioration de la prise en charge, le pronostic des
formes avancées du col utérin reste encore réservé.
Les nouvelles perspectives peuvent s’orienter sur lamélioration
des techniques de radiothérapie en introduisant la modulation
d’intensité associées au cisplatine – comme l’a déjà publié très
récemment de façon préliminaire l’équipe de Pittsburgh (24)
avec extension aux aires ganglionnaires lombo-aortiques.
Les agents antitumoraux ciblés ouvrent également le champ à de
nouvelles stratégies thérapeutiques et gagneront certainement
à être intégrés à des stades plus précoces de la maladie.
Dans un premier temps, le ciblage de l’EGFR semble le plus
rationnel en analogie avec les résultats observés dans les carci-
nomes épidermoïdes ORL. Le cétuximab a en eff et clairement
montré dans des études contrôlées son intérêt à la fois en associa-
tion avec le cisplatine dans les cancers récidivants et/ou métas-
tatiques (25) mais également en association avec la radiothérapie
dans des tumeurs localement avancées (26).
Dans les cancers du col utérin, les taux de surexpression de
l’EGFR rapportés dans la littérature varient de 6 à 85 % en fonc-
tion des techniques utilisées. De nombreuses études suggèrent
une corrélation entre la surexpression de l’EGFR et l’agressivité
tumorale incluant un large volume tumoral, des métastases au
niveau des ganglions lymphatiques et un pronostic péjoratif avec
cependant quelques résultats d’études contradictoires.
Un essai de phase II randomisé, ouvert, multicentrique, réalisé
par le groupe gynécologique de la Fédération des centres anti-
cancéreux qui devrait prochainement être activé va comparer
un traitement standard par radio-chimiothérapie à du cispla-
tine hebdomadaire avec ou sans cétuximab dans les cancers
du col de l’utérus de stades IB2 à IIIB non opérables d’emblée
(tableau).
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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