Lire l'article complet

publicité
t h é m a t i q u e
Human Papilloma Virus (HPV)
Coordinateur : I. Sobhani
o
o
o
o
HPV et lésions néoplasiques - I. Sobhani, F. Walker
HPV et lésions cervicales, vaginales et vulvaires - F. Walker, H. Borne, E. Darai
Lésions péniennes et HPV - F. Bouscarat
HPV et lésions anales - P. Bauer
HPV et lésions néoplasiques
● I.
Sobhani*, F. Walker*
L
e Human papillomavirus (HPV) représente l’une des maladies sexuellement
transmissibles les plus fréquentes. La fréquence des infestations virales à HPV a augmenté ces dernières années. Elle est actuellement estimée à environ 6 % dans la population
générale. La prévalence est actuellement deux
fois supérieure à celle de l’herpès génital. Les
HPV affectent 1 à 2 % de la population aux
États-Unis, mais 10 à 15 % de la population
présenterait une infection latente (1, 2).
L’âge du diagnostic est variable, mais se situe
le plus souvent entre 25 et 35 ans (1-2). Il est
bien démontré que le HPV joue un rôle primordial dans le développement des lésions
intra-épithéliales et des cancers génitaux chez
la femme, du cancer anal et probablement
pénien. Ce virus a un tropisme particulier pour
l’épithélium épidermoïde en général. Cette
caractéristique explique sans doute son implication dans d’autres cancers, comme les carcinomes épidermoïdes de la sphère ORL (3)
et de l’œsophage.
Des données épidémiologiques ont démontré le rôle des HPV dans la genèse de ces
lésions (1-5). En effet, des HPV ont été
retrouvés dans 93 % des cancers du col. Chez
* Inserm U410, Faculté X. Bichat, Paris
une femme porteuse de HPV surtout oncogène, le risque de cancer est augmenté 130
fois. Ce risque est multiplié par 10 à 30 pour
le cancer anal (1, 4). Cela veut dire que cette
infection est une étape nécessaire mais non
suffisante pour le développement d’une néoplasie.
Les HPV sont des virus d’ADN circulaire qui
infectent les cellules épithéliales et provoquent des lésions tumorales. L’infestation
virale se produit au niveau d’une excoriation
ou d’une ulcération et se traduit par la présence d’ADN épisomal dans les assises
basales. La réplication virale se fait au niveau
du noyau et se produit dans les assises plus
superficielles en même temps que la différenciation de l’épithélium. Dans les néoplasies intra-épithéliales de haut grade et les carcinomes infiltrants, le génome de certains
types de HPV s’intègre à l’ADN chromosomique (5).
L’infection génitale résulte d’un contact
avec la peau ou les muqueuses infectées lors
de l’acte sexuel ou de la sodomie. L’incubation dure environ 6 semaines à 8 mois.
Cependant, la grande majorité des infections reste occulte ou latente. C’est alors à
l’occasion d’une altération immunitaire que
des lésions macroscopiques et microscopiques apparaîtront suggérant ainsi l’aide
de cofacteurs dans le développement de ces
lésions.
43
ORGANISATION DU GÉNOME
DES HUMAN PAPILLOMAVIRUS
(HPV)
Le génome des HPV est constitué d’un ADN
circulaire double brin d’environ 7 900 paires
de base. L’ensemble des gènes est transcrit à
partir d’un seul brin. Il existe environ 79 types
différents de HPV, d’après la classification établie en fonction des homologies de séquences
(6). L’analyse de la séquence de chacun des
nombreux HPV étudiés révèle une organisation génétique similaire, constituée de 8 à
10 phases ouvertes de lecture (POL) codant
pour des protéines de type précoce (E) ou tardif (L) ainsi que d’une région non codante
(RNC), appelée également longue région de
contrôle (LCR) (6).
Dans les lésions contenant des HPV oncogènes de type 16 (figure) et 18, les protéines
des gènes E6 et E7 fixent les protéines cellulaires p53 et pRb (rétinoblastome) dont la
conséquence est la dérégulation du cycle cellulaire et la transformation tumorale.
TYPES DE HPV
Les types 16, 18, 45 et 56 sont associés à un
risque élevé dans l’apparition des lésions néoplasiques, la probabilité de survenue étant de
250 fois supérieure chez les femmes infectées
par rapport aux femmes non infectées. Le type
16 serait le plus fréquemment rencontré et le
Le Courrier de colo-proctologie (II) - n° 2 - juin 2001
F O R M E R
D o s s i e r
F O R M E R
D o s s i e r
t h é m a t i q u e
Transcription
Stimulaion de la croissance
(promoteurs, activateurs)
Instabilité génétique
Origine de réplication
E6 E7
LRR
Protéine majeure
de la capside
7 906/1
L1
7 000
6 000
1 000
PVH16
E1
Réplication
2 000
3 000
5 000
4 000
E4
Protéine mineure
de la capside
E2
L2
Régulation
de la transcription
Réplication
E5 Interaction
avec le cytosquelette
Stimulation de
la croissance
Figure. Organisation du génome du HPV 16 (d’après Orth et al. 1997 [7]).
type 18 le plus oncogène. Les types 31, 33,
35, 51 et 52 sont considérés comme ayant un
risque intermédiaire, mais sont souvent associés aux dysplasies de haut grade. Les types
6, 11, 42, 43 et 44, considérés comme à bas
risque, sont impliqués dans le développement
de lésions correspondant à des condylomes
acuminés qui peuvent régresser. En matière de
cancer de l’anus, les travaux sont beaucoup
plus rares mais permettent de retenir les VPH
de type 16 ou 18 comme oncogènes.
RÔLE DES HPV DANS L’APPARITION D’UNE NÉOPLASIE
Au total, 40 des 79 génotypes de HPV connus
ou récemment identifiés sont susceptibles
d’infecter les muqueuses génitales ou anales.
De nombreuses publications confirment la
relation existant entre HPV, lésions intraépithéliales génitales et les cancers. Les HPV
à haut risque sont retrouvés dans 93 % des carcinomes épidermoïdes invasifs, mais également dans les dysplasies modérées et sévères
(1, 4, 7). Plusieurs études prospectives ont
montré que les femmes ayant une infection à
Le Courrier de colo-proctologie (II) - n° 2 - juin 2001
HPV avaient un risque relatif de développer
un cancer in situ supérieur à celui des femmes
sans infestation virale évidente. Dans la plupart des cancers invasifs, l’ADN viral est le
plus souvent intégré dans le génome de la cellule hôte, mais dans les lésions de bas grade,
il est le plus souvent à l’état épisomal.
Cependant, le mécanisme d’action du virus et
la place des cofacteurs non viraux restent peu
clairs. Les conditions socio-économiques
défavorables et la multiplicité des partenaires
occasionnels, le tabac, l’imprégnation hormonale, les contraceptifs oraux et les infections locales par d’autres agents viraux, tel le
virus herpès de type 2, sont parmi les plus
identifiés. L’altération de l’immunité tissulaire
telle que nous avons eu l’occasion de rapporter (4) est à prendre en considération.
CONCLUSION
Ce dossier thématique souligne l’étroite relation existant entre les papillomavirus humains
oncogènes, les lésions intra-épithéliales de bas
grade allant jusqu’à un cancer. Des mises au
point ciblées sur les cancers génitaux chez la
44
femme, les cancers de l’anus et les cancers
péniens mettent en exergue l’importance du
site d’infestation conditionnant ainsi les
risques évolutifs différents : faible au niveau
du pénis, intermédiaire au niveau anal et élevé
au niveau du col utérin. D’importantes données suggèrent qu’une infection à HPV infraclinique avec certains types viraux oncogènes
peut progresser vers une néoplasie intraépithéliale mais peut également rester totalement quiescente ou disparaître. Les techniques
de détection virale au stade infraclinique sont
de plus en plus routinières. La prévention du
cancer reste néanmoins fondée sur la destruction d’une muqueuse devenant siège d’une
dysplasie. Ce sont des études d’intervention de
type thérapie virale qui permettront d’agir réellement à l’échelle des populations à risque.■
Mots clés. Human papillomavirus –
Condylome – Cancer – Immunité –
Transmission sexuelle.
R É F É R E N C E S
1. Laurent R. Infections génitales à papillomavirus.
Rev Prat 1996 ; 46 : 1961-8.
2. Frisch M, Glimelius B, Van den Brule AJC.
Sexually transmitted infection as a cause of anal cancer. N Engl J Med 1997 ; 337 : 1350-8.
3. Bosch FX, Manos MM, Munoz N. Prevalence of
HPV in cervical cancer. J Natl Cancer Inst 1995 ; 87 :
796-802.
4. Mork J, Lie K, Glattre E et al. Human papilloma
virus infection as a risk factor for squamous-cell carcinoma of the head and neck. N Engl J Med 2001 ;
344 : 1125-31.
5. Sobhani I, Vuagnat A, Walker F et al. Prevalence
of high grade dysplasia and cancer in the anal canal
in human papilloma virus-infected individuals.
Gastroenterology 2001 ; 120 : 857-66.
6. Sobhani I. Virus et cancer de l’anus. Lett
Hepatogastroenterol 2000 ; 5 : 235-40.
7. Zur Hausen H. Human papillomaviruses in the
pathogenesis of anogenital cancer. Virology 1991 ;
184 : 9-13.
8. Favre M, Ramoz N, Orth G. Human papillomavirus :
general futures. Clin Dermatol 1997 ; 15 : 181-98.
Téléchargement