6 | La Lettre du Gynécologue 364 - septembre 2011
ÉDITORIAL
L’
une des actions du Plan cancer les plus visibles pour les chirur-
giens aura été l’établissement de règles de fonctionnement
pour la prise en charge des cancers. Les établissements exer-
çant la chirurgie gynécologique se sont vu imposer des règles qualitatives
de plateau technique et d’organisation ainsi que des règles quantitatives
en niveau d’activité, qui ont été maintenant déployées, avec un contrôle
par les services des agences régionales de santé (ARS).
On peut discuter longuement de la pertinence des critères quantitatifs.
Le seuil de 20 cas annuels par établissement nest soutenu par aucune
bibliographie pertinente. Il a été choisi en fonction de son impact sani-
taire (ce seuil ne laisse persister que 40 % environ des établissements,
et son élévation aurait des conséquences drastiques). Les victimes de
ce critère, en particulier dans les petites structures, pensent qu’ils sont
injustement privés d’une activité qu’ils exercaient honnêtement, souvent
en lien avec des structures plus dotées. Les adeptes de la concentration
maximale de l’offre de soins pensent, à l’opposé, que le critère de 20 cas
est inadapté pour assurer aux patients l’intervention d’un chirurgien à
l’expérience suffisante, surtout pour les cancers du col utérin, de la vulve
et de l’ovaire, qui représentent chacun une faible proportion de la charge
carcinologique des chirurgiens gynécologues généralistes. Si on exclut
les cancers de l’endomètre et les carcinomes micro-infiltrants découverts
sur pièce de conisation, sur les 16 à 20 cas annuels – activité suffisante
pour être autorisée – on compte seulement une poignée de cancers de
l’ovaire, parfois même partagée par plusieurs chirurgiens. Considérant
la variété des présentations, la complexité des décisions à prendre et la
technicité croissante de la chirurgie pluriviscérale nécessaire, le nombre
minime de cancers de l'ovaire ne couvre pas une expérience suffisante
pour obtenir la désormais indispensable cytoréduction complète.
Au-delà de ces argumentations, personne ne peut contester l’introduc-
tion de critères qualitatifs portant sur : le plateau technique disponible,
l’exhaustivité du bilan préopératoire, la pertinence de la voie d’abord
utilisée, la valeur informative du compte-rendu opératoire, les résultats
obtenus en termes de cytoréduction, les complications postopératoires,
et, finalement, la survie des patientes.
Ce thème est désormais à l’ordre du jour pour les cancers de l’ovaire,
dans le cadre du Plan cancer 2009-2013 (encadré), au même titre
que d’autres tumeurs de traitement chirurgical complexe que sont les
cancers du foie, du pancréas et de l’œsophage. Il faut donc se préparer
à être audités sur ce type de critère, dont chacun mérite une longue
discussion afin d’éviter de les transformer soit en obstacles à un trai-
tement pertinent, soit en source contre-productive de contournement
de l’obligation. La Société française d’oncologie gynécologique (SFOG)
s’est déjà emparée de cette question majeure (1). Sur commande de
l’Institut national du cancer (INCa), qui a autorité pour établir des règles
de prise en charge, et en collaboration avec les sociétés savantes et
les organisations professionnelles pertinentes, la SFOG prépare une
définition de critères de qualité qui seront opposables.
Il n’y a aucun doute que l’évidente évolution des pratiques de haut
niveau dans le traitement chirurgical des cancers de l’ovaire conduira à
l’organisation d’équipes spécialisées et structurées, pour un plus grand
bénéfice des patientes. Les impératifs de l’environnement chirurgical
seront tels que seuls les centres à haut volume d’activité pourront,
avec une bonne rentabilité, satisfaire les exigences : la quantité et la
qualité se rejoindront. Inutile de dire que cette organisation, ainsi que
la complexité des actes opératoires – actuellement mal valorisés et
ce de façon scandaleuse dans la tarification en vigueur – devront être
financièrement soutenus. Si ce n’est pas le cas, les patientes auront le
choix entre un établissement insuffisamment organisé et un établis-
sement financièrement déficitaire.
Prise en charge chirurgicale des cancers
de l’ovaire : une nouvelle étape
dans l’organisation des soins
Surgical management of ovarian cancer: a new era in care organization
D. Querleu*
* Institut Claudius-Regaud, Toulouse.
Mesure 21.3 du Plan cancer 2009-2013 :
Faciliter l'accès aux techniques chirurgicales et instrumentales,
complexes et innovantes en particulier.
Le déploiement des nouvelles techniques, chirurgicales, instrumentales et
endoscopiques, et celui de plateaux techniques de référence est indispensable
pour structurer, au sein des pôles régionaux de cancérologie, une offre de
soins de recours adaptée à la prise en charge de certaines tumeurs, venant
compléter l'offre territoriale.
Définir des critères de qualité pour la prise en charge chirurgicale des
tumeurs de l'ovaire, du pancréas, du foie, de l'œsophage et du rectum sous-
péritonéal et pour les tumeurs rares, en lien avec les centres de référence et de
compétences des cancers rares.
Évaluer le coût médico-économique des actes de chirurgie carcinologique
lourde et complexe et maintenir une veille sur l'innovation chirurgicale.
Soutenir les techniques innovantes par des appels à projets (INCa).
Référence bibliographique
1. Querleu D, Narducci F. Critères de qualité dans la prise en charge des cancers
de l’ovaire au stade avancé. Bull Cancer 2009;96:1255-62.
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