Pour la 1

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Pour la 1ère fois dans le domaine de l’anticoagulation des patients FA*, depuis 40 ans d’utilisation des AVK
EN PR
S AVC
DE
NTIO
ÉVE N
D
AN
S L A FA
AVC PRÉVENTION
Attitudes
Simplement efficace
DÉNOMINATION DU MÉDICAMENT ET FORME PHARMACEUTIQUE* : Pradaxa 110 mg et Pradaxa 150 mg, gélules. COMPOSITION QUALITATIVE ET QUANTITATIVE* : Chaque gélule
contient 110 ou 150 mg de dabigatran etexilate (sous forme de mésilate). Excipients dont colorant jaune orangé (E110). DONNÉES CLINIQUES : Indications thérapeutiques : Prévention
de l’accident vasculaire cérébral (AVC) et de l’embolie systémique (ES) chez les patients adultes présentant une fibrillation atriale non valvulaire associée à un ou plusieurs des facteurs de
risque suivants : Antécédent d’AVC, d’accident ischémique transitoire ou d’embolie systémique ; Fraction d’éjection ventriculaire gauche < 40 % ; Insuffisance cardiaque symptomatique,
classe ≥ 2 New York Heart Association (NYHA) ; Âge ≥ 75 ans ; Âge ≥ 65 ans associé à l’une des affections suivantes : diabète, coronaropathie ou hypertension artérielle. Posologie et mode
d’administration* : Posologie : La dose quotidienne recommandée est de 300 mg (1 gélule de 150 mg deux fois/jour). Le traitement doit être poursuivi au long cours. En cas d’intolérance
au dabigatran, les patients doivent être prévenus de la nécessité de consulter immédiatement leur médecin traitant afin de passer à d’autres alternatives thérapeutiques adaptées pour la
prévention de l’AVC et de l’ES associée à une fibrillation atriale. Cas particuliers : Sujets âgés, patients présentant un risque hémorragique, insuffisance rénale, administration concomitante de
Pradaxa et des inhibiteurs puissants de la P-glycoprotéine (P-gp) (amiodarone, quinidine ou vérapamil), poids, sexe, insuffisance hépatique, passage de Pradaxa à un anticoagulant par voie
parentérale, passage d’un anticoagulant par voie parentérale à Pradaxa, passage de Pradaxa aux antagonistes de la vitamine K (AVK), passage des AVK à Pradaxa, cardioversion, population
pédiatrique, dose oubliée. Mode d’administration : Les gélules de Pradaxa doivent être avalées entières avec de l’eau, avec ou sans aliments. Les patients doivent avoir pour instruction de ne
pas ouvrir les gélules, car cela pourrait augmenter le risque de saignement. Contre-indications : Hypersensibilité à la substance active ou à l’un des excipients mentionnés en rubrique « Liste
des excipients » ; Insuffisance rénale sévère (ClCr < 30 mL/min) ; Saignement évolutif cliniquement significatif ; Lésion ou maladie à risque significatif de saignement majeur, telle qu’ulcération
gastrointestinale en cours ou récente, présence de néoplasies malignes à haut risque de saignement, lésion cérébrale ou rachidienne récente, intervention chirurgicale cérébrale, rachidienne ou
ophtalmique récente, hémorragie intracrânienne récente, varices oesophagiennes connues ou suspectées, malformations artérioveineuses, anévrysme vasculaire ou anomalie vasculaire majeure
intrarachidienne ou intracérébrale ; Traitement concomitant avec tout autre agent anticoagulant, par exemple héparine non-fractionnée (HNF), héparines de bas poids moléculaire (énoxaparine,
dalteparine, etc), dérivés de l’héparine (fondaparinux, etc), anticoagulants oraux (warfarine, rivaroxaban, apixaban, etc), sauf en cas de changement de traitement pour Pradaxa ou inversement
(Cf «Posologie et mode d’administration ») ou en cas d’administration d’HNF aux doses nécessaires au maintien de la perméabilité d’un cathéter central veineux ou artériel (Cf « Interactions avec
d’autres médicaments et autres formes d’interactions ») ; Insuffisance hépatique ou maladie du foie susceptible d’avoir un impact sur la survie ; Traitement concomitant avec le kétoconazole
administré par voie systémique, la ciclosporine, l’itraconazole, le tacrolimus et la dronédarone. Mises en garde spéciales et précautions d’emploi* : Insuffisance hépatique ; Risque
hémorragique ; Administration de fibrinolytiques pour le traitement des AVC ischémiques aigus ; Interactions avec les inducteurs de la P-gp ; Actes chirurgicaux et interventions : Phase préopératoire, rachianesthésie/anesthésie péridurale/ponction lombaire, patients avec un risque accru de saignements en période post-opératoire ; Patients à haut risque de mortalité chirurgicale et
présentant des facteurs de risque intrinsèques d’événements thromboemboliques ; Infarctus du myocarde ; Patients porteurs de prothèses valvulaires cardiaques ; Colorants. Interactions avec
d’autres médicaments et autres formes d’interactions* : Anticoagulants et antiagrégants plaquettaires ; Interactions liées au profil métabolique du dabigatran etexilate et du dabigatran ;
Interactions avec des transporteurs : inhibiteurs de la P-gp, inducteurs de la P-gp, autres médicaments ayant une incidence sur la P-gp, substrats de la P-gp ; Traitement concomitant avec des
inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) ou des inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNA) ; pH gastrique. Fécondité, grossesse et
allaitement*. Effets sur l’aptitude à conduire des véhicules et à utiliser des machines*. Effets indésirables* : Au total, 22 % des patients présentant une fibrillation atriale traités pour
la prévention de l’AVC et de l’ES (traitement à long terme allant jusqu’à 3 ans) ont présenté des effets indésirables. Les effets indésirables les plus fréquemment rapportés ont été des saignements,
survenant au total chez 16,5 % des patients présentant une fibrillation atriale traités en prévention de l’AVC et de l’ES. Bien que de fréquence faible dans les essais cliniques, des saignements majeurs
ou sévères peuvent survenir et, indépendamment de la localisation, peuvent conduire à un handicap, à une menace du pronostic vital, voire même à une issue fatale. Surdosage*. Propriétés
pharmacodynamiques* : Groupe pharmacothérapeutique : inhibiteurs directs de la thrombine. Propriétés pharmacocinétiques*. Données de sécurité précliniques*. DONNÉES
PHARMACEUTIQUES*. NUMÉRO(S) D’AUTORISATION DE MISE SUR LE MARCHÉ : Pradaxa 110 mg, gélules : (60 x 1 gélule) : EU/1/08/442/007 - CIP 34009 385 262 0 2 – Prix : 75,78 € / CTJ :
2,53 €. Pradaxa 150 mg : (60 x 1 gélule) : EU/1/08/442/011 - CIP 34009 419 453 8 0 – Prix : 75,78 € / CTJ : 2,53 €. CONDITIONS DE PRESCRIPTION ET DE DÉLIVRANCE : Médicament soumis à
prescription médicale. Liste I. Boîtes de 60 x 1 gélule : Remboursées Sec. Soc à 65 % - Agréé collect. DATE DE PREMIÈRE AUTORISATION/DE RENOUVELLEMENT DE L’AUTORISATION : Date
de première autorisation : Pradaxa 110 mg : 18 mars 2008 ; Pradaxa 150 mg : 01 août 2011. DATE DE MISE À JOUR DU TEXTE : 30 août 2012. TITULAIRE DE L’AUTORISATION DE MISE SUR LE
MARCHÉ : Boehringer Ingelheim International GmbH, D-55216 Ingelheim am Rhein. Allemagne. Représentant local : Boehringer Ingelheim France, 14 rue Jean Antoine Baïf, 75013 Paris. Information
médicale : 12 rue André Huet 51100 Reims - Information médicale : 03 26 50 45 33. *Des informations détaillées sur ce médicament sont disponibles sur le site internet de l’Agence Européenne
du Médicament (EMA) http://www.ema.europa.eu/ ou sur demande auprès du Laboratoire. Pradaxacommunes_FA110-150-MLA-300812-v1.doc
Pour en savoir plus : www.anticoagulant.fr
Recommandations européennes 2012
sur l’insuffisance cardiaque chronique :
la prise en charge
Thérapie cellulaire :
bilan d’une décennie
12-896 - 09/2012 - Boehringer Ingelheim France S.A.S.
* Fibrillation atriale. AMM obtenue le 01/08/2011
Recommandations ESC 2012
sur la prise en charge de
l’infarctus avec sus-décalage
de ST (partie II)
Quiz ECG
Art et Cœur
Le cœur vendéen
Congrès
Groupe Consensus
European Society of Cardiology (Munich)
N°1 en audience* chez les hospitaliers toutes périodicités confondues
* Lecture au numéro moyen - Source : Enquête CESSIM automne 2012 (recueil cumulé entre octobre 2011 et janvier 2012, puis de mars à juin 2012).
EditoSommaire:modeles
19/10/12
15:45
Page 3
Editorial
Rédacteur en chef
Nicolas Danchin
Comité éditorial
Eric Abergel
Loïc Belle
Didier Blanchard
Eric Bruckert
Bernard Chevalier
Stéphane Cosson
Yves Cottin
Nicolas Danchin
Denis Duboc
(chef de rubrique Généalogie)
Jean-Noël Fabiani
Laurent Fauchier
Pascal Guéret
(chef de rubrique Art & Cœur)
Alain Hagège
Yves Juillière
Serge Kownator
Jean-François Leclercq
Jean-Yves Le Heuzey
Gilles Lemesle
Eloi Marijon
Nicolas Meneveau
(rédacteur en chef
du Cahier de cardiologie interventionnelle)
Jean-Jacques Mourad
Franck Paganelli
Atul Pathak
Pascal Poncelet
Etienne Puymirat
Philippe Romejko
David Rosenbaum
Simon Weber
Directeur de la publication
Yves Nadjari
Directeur médical
Sarah Cohen
Directeur général
Alexandre Nadjari
Secrétaire de rédaction
Virginie Condamine
Chargées de clientèle
Rim Boubaker
Audrey Dufaud
Nolwenn Gauthier
Rym Oussalah
Coordination commerciale
Valérie Renouf
Rédactrice graphiste
Lara Eve
Groupe Consensus
Groupe Consensus,
46-48, rue Lauriston, 75116 Paris
Téléphone : 01 53 65 87 70
Publicité : [email protected]
Rédaction : [email protected]
ISSN : 1767-5162
Site internet : www.consensus-online.fr
Corlet Imprimeur SA - ZI, route de Vire
14110 Condé-sur-Noireau, France
Prix au numéro : 4,50 €
Image d'Epinal
L’
impartialité, même dans le domaine scientifique, est décidément bien difficile à respecter. Une amusante étude publiée dans le New England Journal of Medicine (1) nous
le rappelle.
Les auteurs, pharmacologues américains, ont voulu voir si la mention de l'origine des financements d'études cliniques modifiait la perception et l'interprétation de leurs résultats par les
médecins. La méthodologie de cette étude randomisée est originale et astucieuse : 503 internistes ont eu à lire des résumés d'études factices, de qualité méthodologique variable, testant
l'intérêt de médicaments imaginaires. Les abstracts mentionnaient soit un financement public
par le National Institute of Health (NIH), soit un financement privé par un laboratoire pharmaceutique, soit ne précisaient pas la source de financement. Les médecins étaient ensuite interrogés sur la qualité de l'étude, leur niveau de confiance dans ses résultats et leur désir de prescrire le médicament évalué.
Comme on pouvait l'espérer, la qualité méthodologique des essais est évaluée correctement et
la volonté de prescription des nouveaux traitements dépend directement de la rigueur perçue
des études : plus l'étude est jugée rigoureuse, plus les médecins sont prêts à utiliser les traitements évalués. En revanche, la mention d'un financement de l'étude par un industriel amène
les lecteurs à avoir un regard beaucoup plus critique : les études sont jugées moins rigoureuses,
la confiance dans les résultats est plus faible et le souhait de prescrire les nouveaux médicaments
est moindre. Ainsi, à qualité d'étude identique, la volonté de prescrire un nouveau médicament
est diminuée d'un tiers par rapport à une étude dont le financement n'est pas mentionné, et de
moitié par rapport à une étude financée par le NIH.
Ces résultats sont inquiétants à plus d'un titre. Avant tout, ils démontrent que le regard porté
sur les résultats d'études publiées n'est pas neutre, mais modulé par des facteurs qui ne devraient
pourtant pas intervenir, dès lors que la qualité scientifique du travail est considérée comme indiscutable. Ils témoignent ensuite d'un réel climat de suspicion vis-à-vis des laboratoires pharmaceutiques, résultant sans doute d'affaires douloureuses plus ou moins récentes, où le comportement des industriels avait été plus qu'anormal (par exemple en taisant des résultats négatifs
pour ne présenter que des données positives), mais peut-être plus encore du climat général de
suspicion relayé par de nombreux médias à l’égard de l'industrie pharmaceutique. Ils révèlent
enfin une naïveté surprenante envers les scientifiques eux-mêmes et les organismes d'Etat, laissant supposer que les cliniciens les considèrent comme un véritable rempart contre tout conflit
d'intérêts.
Quelle belle image d'Epinal ! C'est tout simplement oublier les progrès majeurs qui ont pu
être accomplis à la suite d'essais entièrement financés par l'industrie pharmaceutique. C'est aussi
oublier que le financement par un organisme public n'est pas une garantie de probité scientifique : le choix des thèmes à soutenir n'est jamais innocent, et l'intérêt, en termes de notoriété
essentiellement, des auteurs à publier plus de résultats positifs que de résultats négatifs est également un moteur puissant, susceptible, lui aussi, d'entraîner de réels biais dans la présentation
des données.
Finalement, cette jolie étude (financée par l'université d'Harvard !) devrait nous aider à remettre les pendules à l'heure : il est essentiel de garder son esprit critique lors de l'analyse de tout
travail scientifique, quel qu'en soit le financeur, privé comme public. Des outils spécifiques, comme
la déclaration préalable du plan d'étude sur le site clinicaltrials.gov, sont d'ailleurs là pour aider
à y voir plus clair.
■
Nicolas Danchin
Rédacteur en chef
1. Kesselheim AS, et al. N Engl J Med 2012; 367: 1119-27.
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
3
EditoSommaire:modeles
22/10/12
11:06
Page 5
Sommaire
• numéro 82 • Octobre 2012
La qualité finit toujours
par payer !
Dans tous les domaines, dans le
présent et encore plus dans le
futur, ce critère sera un élément
de base qui fera consensus dans
toute l'humanité.
Qu'il me soit permis de l'évoquer
dans trois exemples :
- Le premier est une source de satisfaction considérable. Il s'agit de la dernière étude Cessim
(organisme dont j'ai toujours loué la qualité).
Elle montre que notre journal Consensus
Cardio est plus que jamais une référence,
comme en témoigne l'enquête d’audience villehôpital : avec 61,6% d’audience moyenne au
numéro, nous passons premier sur la cible Hôpital, quelle que soit la fréquence de parution.
Sur la ville, nous maintenons la position forte
de premier des mensuels (63,7% d’audience
moyenne au numéro). L'aventure du groupe
Consensus est le témoignage de la qualité de
notre concept. Synonyme de Recommandations
et des modalités de leur application dans la pratique courante, le terme Consensus est maintenant le message essentiel des grands congrès
internationaux. Merci au comité de rédaction
dirigé par Nicolas Danchin et à toute l'équipe ;
merci à vous chers lecteurs pour votre fidélité
et votre attachement au titre.
- Le deuxième est la place donnée à la thérapeutique au Congrès de l’ESC à Munich où le médicament a été à l'honneur. Ce numéro donne
une large place aux informations essentielles à
en retenir.
- La troisième réflexion est issue de notre pratique courante : les nouvelles dispositions en
pharmacie concernant les génériques. Que le
souci d'économie hante les pouvoirs publics,
cela se comprend. Prenons cependant un cas
précis : un patient âgé, modeste, ayant le 100%
aura des difficultés pour avancer l'argent s’il
veut ses médicaments habituels. Prenant des
génériques, le problème de l'observance (notre
lutte permanente) risque de se poser chez ce
type de patient. Ne risque-t-on pas de voir les
résultats sur la santé d'une mauvaise observance
avec paradoxalement un retentissement économique mettant en cause les économies
recherchées ?
A suivre…
Yves Nadjari
Photo couverture : © BSIP
Directeur de la publication
[email protected]
* Source : Enquête CESSIM automne 2012 (recueil cumulé
entre octobre 2011 et janvier 2012, puis de mars à juin 2012).
Résultats complets disponibles pour les adhérents sur
www.cessim.fr
Ce numéro comporte un supplément de 16 pages « ESC
2012 : le TAVI dans les nouvelles recommandations » et un
supplément de 4 pages « Les nouvelles recommandations
de l’European Society of Cardiology sur le STEMI ».
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
Éditorial
13 • Image d'Epinal
Nicolas Danchin
Attitudes
06 • Recommandations ESC 2012 sur la prise en charge
de l’infarctus avec sus-décalage du segment ST (partie II)
Nicolas Danchin
10 • Recommandations européennes 2012 sur l’insuffisance
cardiaque chronique : la prise en charge
Albert Hagège
14 • Thérapie cellulaire : bilan d’une décennie
Philippe Menasché
ECG
13 • Quiz ECG
Jean-François Leclercq
18 • Réponse Quiz
Art et Cœur
19 • Le cœur vendéen
Marie-Cécile Bouju
Cahier de cardiologie interventionnelle
21 • Editorial
Nicolas Meneveau
22 • Indications de l’angioplastie ad hoc : que disent les
recommandations ?
Luc Lorgis, Caroline Brulliard, Olivier Hachet, Philippe Buffet,
Isabelle L’Huillier, Aurélie Gudjoncik, Yves Cottin
26 • La voie radiale expose-t-elle vraiment le patient
et l’opérateur à des doses de rayons supérieures ?
Jean-Louis Georges
31 • Prévention des complications hémorragiques en angioplastie
Nicolas Meneveau
35 • Alcoolisation septale : résultats, indications
Patrick Ohlmann
37 • EuroPCR 2012
Congrès
42 • European Society of Cardiology (Munich)
51 • Actualité
5
N_Danchin:attitude
19/10/12
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Page 6
Attitudes
I FMC - recommandations - sociétés savantes - pratique clinique I
Nicolas Danchin
HEGP, Paris
Recommandations ESC 2012
sur la prise en charge de l'infarctus
avec sus-décalage du segment ST (partie II)
Après le long chapitre consacré à la
prise en charge en pleine phase
aiguë, les recommandations
STEMI de 2012 (1) s'intéressent à la
phase hospitalière et à la transition vers la reprise d'une vie aussi
normale que possible. Le principal
changement, par rapport aux recommandations de 2008, est la rétrogradation des bêtabloquants en classe IIa (un niveau de classe I étant maintenu
dès que sont présents des signes d'insuffisance cardiaque
ou une dysfonction ventriculaire gauche).
Durée et conditions d’hospitalisation
Après avoir rappelé la nécessité d’une hospitalisation en
soins intensifs (I, C), est abordée la problématique de la durée
du séjour hospitalier. Il est recommandé un séjour d’au moins
24 heures en soins intensifs (I, C), ensuite une hospitalisation de 24 à 48 heures supplémentaires dans un lit ayant un
monitoring ECG peut être envisagée (IIb, C). Le lever peut
être très précoce, en l’absence de dégâts ventriculaires importants ou de complications. Lorsque l’angioplastie est réalisée dans un centre tertiaire, un retour le jour même vers
l’hôpital initial peut être envisagé dans certains cas (IIb, C),
en maintenant le monitoring ECG continu pendant le transport. Enfin, une sortie d’hôpital précoce (72 heures) peut
être envisagée chez les patients à bas risque, à condition
d’avoir organisé la réadaptation et le suivi ultérieur (IIb, B).
Examens d’imagerie
L’échographie a une place de premier plan : dès l’admission, en
cas de doute diagnostique (I, C) à condition de ne pas reporter
la coronarographie si ses résultats ne sont pas concluants ; en
phase aiguë, l’échographie est obligatoire pour évaluer la fonction ventriculaire gauche (I, B), mais l’IRM peut constituer une
alternative si l’échographie est impossible (IIb, C). Chez les
patients multitronculaires, une imagerie de stress (scintigraphie,
échographie, IRM, PET) doit être programmée avant ou après
la sortie de l’hôpital, pour rechercher des signes d’ischémie ou
de viabilité (I, A). La recherche de viabilité est importante chez
les patients ayant une dysfonction ventriculaire gauche marquée ; aucune méthode n’offre une supériorité décisive par rapport aux autres. En revanche, le scanner coronaire n’a pas sa
place en routine (III, C).
6
Autres marqueurs de risque
Un bilan lipidique doit être systématiquement réalisé, dès
que possible après l’admission ; de même, la glycémie à jeun
et la créatinine doivent faire partie du bilan systématique.
Prise en charge à la sortie
➜ Mode de vie
En raison du risque élevé de nouvel accident coronaire, la
prise en charge au long cours est essentielle, et les premières
bases doivent en être jetées dès la phase hospitalière. L’intérêt et l’importance d’avoir un mode de vie favorable doivent être expliqués au patient. Ainsi, chaque hôpital doit
avoir un programme anti-tabac (I, B), ainsi qu’un protocole
spécifique pour l’arrêt du tabac (I, C).
Des conseils nutritionnels adaptés doivent être donnés aux
patients : alimentation diversifiée, avec apports accrus de
fruits et légumes, de céréales et de poisson, remplacement
des graisses saturées et trans par des acides gras mono- ou
polyinsaturés, apport calorique adapté pour éviter la prise
de poids, enfin, chez les hypertendus, réduction des apports
en sel. De même, une réflexion doit être menée avec chaque
patient pour obtenir une activité physique régulière d’un
niveau suffisant. Un programme de réadaptation fondé sur
l’entraînement à l‘effort est recommandé (I, B). Un niveau
de pression artérielle optimal doit être obtenu et des programmes spécifiques de gestion du stress peuvent être bénéfiques.
La reprise d’activité doit se discuter au cas par cas, en particulier en fonction de l’étendue des séquelles ventriculaires
et de la persistance éventuelle d’une ischémie myocardique ;
d’une façon générale, un arrêt de travail prolongé doit être
évité. La reprise d’une activité sexuelle peut habituellement
être rapide. Enfin, les vols long-courriers doivent être évités
pendant 4 à 6 semaines en cas d’ischémie ou de dysfonction
ventriculaire gauche marquées.
➜ Médicaments
L’aspirine à faible dose (75-100 mg) doit être utilisée systématiquement et indéfiniment (I, A), sauf en cas de véritable
intolérance, et le clopidogrel constitue alors une alternative
(I, B). Une double antiagrégation est recommandée (aspirine + prasugrel ou aspirine + ticagrelor, de préférence à
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
N_Danchin:attitude
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Recommandations sur les
traitements antithrombotiques
Classe
Niveau
Un traitement par aspirine à faible dose (75100 mg) est recommandé indéfiniment
après STEMI
I
A
Chez les patients intolérants à l'aspirine, le
clopidogrel est indiqué comme alternative à
l'aspirine
I
B
Un double traitement antiagrégant par aspirine et
prasugrel ou aspirine et ticagrelor (de préférence
à aspirine et clopidogrel) est recommandé chez
les patients traités par angioplastie
I
A
Le double traitement par aspirine et antagoniste
des récepteurs à l'ADP par voie orale doit être
continué jusqu'à un maximum de 12 mois avec
un minimum de :
I
C
• 1 mois pour les patients ayant eu un stent nu
• 6 mois pour les patients ayant eu un stent actif
I
IIb
C
B
Le double traitement antiagrégant doit être utilisé
pendant un an maximum chez les patients
n'ayant pas eu de stent
IIa
C
Une protection gastrique par IPP doit être
envisagée pour la durée du double traitement
antiagrégant chez les patients à risque
hémorragique élevé
IIa
C
En cas de thrombus intraventriculaire, une
anticoagulation doit être débutée pour un
minimum de 3 mois
IIa
B
Chez des patients sélectionnés recevant de
l'aspirine et du clopidogrel, le rivaroxaban à
faible dose (2 fois 2,5 mg) peut être envisagé si
le risque hémorragique est faible
IIb
B
En cas d'indication claire d'anticoagulants (par
exemple, fibrillation atriale avec score CHA2DS2VASC ≥ 2 ou prothèse valvulaire mécanique), un
traitement anticoagulant doit être institué en
plus du traitement antiagrégant
I
C
Chez les patients nécessitant un triple traitement
antithrombotique (double traitement antiagrégant
et anticoagulant), par exemple après pose de
stent et indication impérative d'anticoagulation,
la durée du double traitement antiagrégant doit
être aussi courte que possible pour réduire le
risque de saignement
Tableau 1.
I
C
aspirine + clopidogrel) chez les patients ayant eu une angioplastie (I, A). La durée du double traitement est débattue :
il est recommandé pour une durée pouvant atteindre un an
chez tous les patients après angioplastie (I, C), avec un traitement d’au moins un mois en cas d’utilisation de stent nu
(I, C) et de 6 mois minimum après utilisation d’un stent actif
(IIb, B). Pour les patients n’ayant pas eu de stent, une double antiagrégation doit être envisagée, pour une durée maximale d’un an (IIa, C). Chez les patients ayant un risque
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
hémorragique élevé, il est conseillé d’envisager un traitement par IPP (IIa, C).
En cas d’indication indiscutable d’anticoagulation, un traitement oral est recommandé en plus du traitement antiagrégant (I, C) ; il convient alors de réduire au minimum la
durée du double traitement antiagrégant (I, C). En cas de
thrombus intraventriculaire gauche, un traitement anticoagulant doit être mis en route pour un minimum de 3 mois
(IIa, B). Enfin, chez les patients traités par aspirine et clopidogrel, une faible dose de rivaroxaban (2,5 mg 2 fois/j) peut
être envisagée (IIb, B) (Tableau 1).
Un traitement bêtabloquant doit être envisagé dès la phase
hospitalière et poursuivi par la suite, en l’absence de contreindication (IIa, B) ; les bêtabloquants doivent être prescrits
en cas d’insuffisance cardiaque ou de dysfonction ventriculaire gauche (I, A). L’utilisation intraveineuse des bêtabloquants peut être envisagée à l’admission en l’absence
d’insuffisance cardiaque, si la pression artérielle et la fréquence cardiaque sont élevées (IIb, B) ; ils ne doivent pas
être utilisés en cas d’hypotension ou d’insuffisance cardiaque
(III, B). Le vérapamil peut être envisagé comme alternative
aux bêtabloquants si ces médicaments sont contre-indiqués
et s’il n’y a pas d’insuffisance cardiaque (IIb, B).
Un traitement par statines à forte dose doit être prescrit et
poursuivi, en l’absence d’intolérance, quel que soit le niveau
de cholestérol (I, A). Après 4 à 6 semaines, une nouvelle prise
de sang doit permettre de vérifier si l’objectif de 0,70 g/l est
atteint (IIa, C).
Les IEC doivent être prescrits dès les 24 premières heures chez
les patients avec des signes d’insuffisance cardiaque, une dysfonction ventriculaire gauche systolique, un diabète ou un
infarctus antérieur (I, A). Chez les autres patients, ils doivent
être envisagés, sauf en cas de contre-indication (IIa, A). En
cas d’intolérance aux IEC, les ARA II, et de préférence le valsartan, constituent une alternative en cas d’insuffisance cardiaque ou de dysfonction ventriculaire gauche (I, B). En l’absence d’insuffisance rénale ou d’hyperkaliémie, un
antagoniste de l’aldostérone (par exemple l’éplérénone),
est indiqué chez les patients avec une fraction d’éjection
≤ 40%, ayant une insuffisance cardiaque ou un diabète
(I, B) (Tableau 2, p 8).
Complications de l’infarctus
avec sus-décalage du segment ST
➜ Insuffisance cardiaque
Le traitement de l’insuffisance cardiaque modérée (classe
Killip II) repose sur l’oxygénothérapie (I, C), les diurétiques
de l’anse (I, C), les IEC, en l’absence d’hypotension, hypovolémie ou insuffisance rénale (I, A), avec un ARA II (valsartan)
comme alternative en cas d’intolérance aux IEC (I, B). Un
antialdostérone comme l’éplérénone doit être utilisé si la
fraction d’éjection est ≤ 40 % (I, B). Les nitrés intraveineux,
le nitroprussiate, doivent être envisagés en cas de pression
artérielle élevée (IIa, C) et les diurétiques thiazidiques en cas
d’intolérance aux IEC et aux ARA II (IIa, C).
En cas d’œdème pulmonaire (classe Killip III), le traitement
7
N_Danchin:attitude
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Autres traitements médicamenteux
Un traitement bêtabloquant oral est indiqué chez
les patients avec dysfonction ventriculaire gauche
ou insuffisance cardiaque
Un traitement bêtabloquant oral doit être
envisagé pendant l'hospitalisation et continué
par la suite chez tous les patients avec STEMI
sans contre-indication au traitement
Un traitement bêtabloquant IV doit être envisagé
à l'admission chez les patients sans contreindication ayant une pression artérielle élevée ou
une tachycardie, sans signe d'insuffisance
cardiaque
Classe
Niveau
I
A
IIa
B
IIa
B
mine [IIa, C]; lévosimendan [IIb, C]). Enfin, l’ultrafiltration
doit être envisagée au besoin (IIa, B).
Le choc cardiogénique nécessite une prise en charge spécifique : échographie en urgence à la recherche de complications mécaniques (I, C), transfert dans un centre tertiaire
(I, C), revascularisation en urgence par angioplastie ou pontage, au besoin (I, B) ; l’oxygénothérapie et l’assistance respiratoire sont également recommandées (I, C). La fibrinolyse doit être envisagée si un traitement de revascularisation
n’est pas possible (IIa, C). La dopamine et la dobutamine doivent être envisagées (IIa, C). La contre-pulsion aortique
(IIb, B), les autres assistances circulatoires (IIb, C), l’utilisation d’un cathéter de Swan-Ganz (IIb, B) ou de la noradrénaline (IIb, B) peuvent être envisagées.
➜ Troubles du rythme
Il faut éviter les bêtabloquants IV chez les
patients avec hypotension ou insuffisance
cardiaque
III
B
Le vérapamil peut être envisagé en prévention
secondaire chez les patients avec contreindication absolue aux bêtabloquants et sans
insuffisance cardiaque
IIb
B
Les IEC sont indiqués dès les 24 premières
heures chez les patients avec insuffisance
cardiaque, dysfonction ventriculaire gauche,
diabète ou ayant un infarctus antérieur
I
A
Un ARA II, de préférence le valsartan, est une
alternative aux IEC chez les patients avec
dysfonction ventriculaire gauche ou insuffisance
cardiaque, particulièrement s'ils sont intolérants
aux IEC
I
B
IIa
A
Les antagonistes de l'aldostérone, par exemple
l'éplérénone, sont indiqués chez les patients ayant
une fraction d'éjection ≤ 40 % et de l'insuffisance
cardiaque ou un diabète, en l'absence d'insuffisance
rénale ou d'hyperkaliémie
➜ Troubles du rythme ventriculaire
et troubles de la conduction
I
B
Il est recommandé d'initier ou de poursuivre un
traitement par statines à haute dose, rapidement
après l'admission, chez tous les patients avec un
STEMI sans contre-indication ou antécédents
d'intolérance, quel que soit le niveau de cholestérol
I
A
Une nouvelle mesure du LDL-cholestérol doit être
envisagée après 4 à 6 semaines pour vérifier que
l'objectif cible de 1,8 mmol/l (0,70 g/l) a été
atteint
IIa
C
La cardioversion est indispensable en cas de fibrillation ou
de tachycardie ventriculaire soutenue (I, C). L’amiodarone
doit être envisagée en cas de récidive (IIa, C) ; de même, le
pacing ventriculaire doit être envisagé en cas de TV incessante (IIa, C). Les salves de TV non soutenue récidivantes peuvent faire l’objet d’une simple surveillance ou être traitées
par bêtabloquants IV, sotalol ou amiodarone (IIa, C). La lidocaïne ou le sotalol peuvent être envisagés en cas de TV récurrente (IIb, C). Les TV polymorphes doivent être traitées par
bêtabloquants (I, B) ou amiodarone IV (I, C) et peuvent justifier la recherche d’une cause ischémique par une coronarographie en urgence, si celle-ci n’a pas été réalisée (I, C).
Les désordres électrolytiques doivent être corrigés (I, C).
Les bradycardies sinusales avec mauvaise tolérance hémodynamique, les blocs auriculo-ventriculaires Möbitz 2 ou du
3e degré justifient un traitement par atropine (I, C), ou un
entraînement électrophysiologique provisoire (I, C), ainsi
qu’une coronarographie en vue d’un geste de revascularisation si celui-ci n’a pas déjà été réalisé.
A plus long terme, une évaluation électrophysiologique en
vue de l’implantation d’un défibrillateur doit être réalisée
en cas de dysfonction VG sévère avec TV soutenue, ou chez
les patients qui ont présenté une fibrillation ventriculaire
Les IEC doivent être envisagés chez tous les
patients en l'absence de contre-indication
Tableau 2.
repose sur l’oxygène (I, C), la ventilation assistée si nécessaire (I, C), les diurétiques de l’anse comme le furosémide à
la dose de 20 à 40 mg IV (I, C), la morphine (I, C) et les dérivés nitrés en l’absence d’hypotension (I, C). Un antialdostérone comme l’éplérénone doit être utilisé si la fraction
d’éjection est ≤ 40 % (I, B). Enfin, une revascularisation myocardique doit être envisagée (I, C). Les agents inotropes
doivent ou peuvent être envisagés (dopamine ou dobuta8
La survenue d’une fibrillation atriale n’est pas rare au stade
aigu de l’infarctus. Une stratégie de retour en rythme sinusal doit être envisagée quand l’arythmie est secondaire à
l’ischémie aiguë (IIa, C). En l’absence de signe d’insuffisance
cardiaque, les bêtabloquants ou, le cas échéant, le vérapamil ou le diltiazem sont indiqués pour le contrôle de la
fréquence cardiaque (I, A) ; en cas d’insuffisance cardiaque
ou d’hypotension, il est recommandé d’utiliser l’amiodarone
ou les digitaliques IV (I, B). Une cardioversion doit être effectuée si la fréquence cardiaque reste rapide, avec une mauvaise tolérance hémodynamique ou ischémique (I, C). Si la
fibrillation atriale est récente, l’amiodarone est indiquée
pour tenter le retour en rythme sinusal (I, A). La digoxine,
le vérapamil, le sotalol et les autres bêtabloquants sont inefficaces pour permettre le retour au rythme sinusal et ne doivent pas être utilisés dans ce but (III, A, B ou C).
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
N_Danchin:attitude
22/10/12
12:56
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au-delà de la phase aiguë (I, A). L’implantation d’un défibrillateur est indiquée pour réduire la mortalité en cas de dysfonction VG sévère avec TV soutenue instable ou fibrillation
au-delà de la phase aiguë (I, A). Chez les patients ayant une
fraction d’éjection ≤ 40 %, une évaluation électrophysiologique doit être faite au moins 40 jours après l’épisode aigu
pour juger de l’intérêt de l’implantation préventive d’un
défibrillateur.
➜ Autres complications
Les insuffisances mitrales par rupture de pilier ou de cordages nécessitent une réparation chirurgicale en urgence.
La rupture de paroi libre, si elle n’est pas immédiatement
mortelle, nécessite une ponction péricardique et une chirurgie immédiate.
La contre-pulsion intra-aortique peut aider à stabiliser les
patients ayant une rupture septale en attendant une intervention chirurgicale, dont la date optimale n’est pas consensuelle.
L’infarctus du ventricule droit est généralement diagnostiqué aisément à l’échographie ; les diurétiques et les vasodilatateurs doivent être évités et le remplissage peut aider à
stabiliser l’hémodynamique. Les complications rythmiques
doivent être traitées immédiatement.
La survenue d’une péricardite est devenue un événement
plus rare. Le traitement repose avant tout sur l’aspirine, le
paracétamol et la colchicine ; les anticoagulants doivent être
interrompus, sauf s’ils sont jugés absolument indispensables.
En cas d’infarctus étendu, les IEC, les sartans et les antagonistes de l’aldostérone limitent le risque de remodelage et
de formation d’anévrismes authentiques.
Il était classiquement recommandé de donner des anticoagulants pendant 6 mois en cas de thrombus ventriculaire
gauche ; peu de données sont disponibles à l’ère du traitement combiné à une double antiagrégation, et il paraît souhaitable de faire une échographie de contrôle à 3 mois, qui
peut alors permettre d’arrêter les anticoagulants si le thrombus a disparu, ce qui devrait réduire le risque hémorragique
lié à la triple association antithrombotique.
■
Pour en savoir plus
1. Steg G, James S, Atar D, et al. ESC guidelines for the management of
acute myocardial infarction in patients presenting with ST-segment
elevation: The Task Force on the management of ST-segment elevation acute myocardial infarction of the European Society of Cardiology (ESC). Eur Heart J 2012; DOI:10.1093/eurheartj/ehs215.
Pour toute correspondance avec l’auteur
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Consensus Cardio apporte
son soutien au Congrès Cœur et Sport,
organisé par le Club des cardiologues
du sport, présidé par
le Pr François Carré.
Cette année les thèmes abordés
porteront sur l'aéronautique,
le rugby, le dopage, la femme sportive,
les troubles du rythme… Les ateliers
pratiques et les cas cliniques occuperont
toujours une large place.
Rendez-vous les
23 et 24 novembre
à Toulouse
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
9
Albert Hage?ge (2):attitude
19/10/12
15:45
Page 10
Attitudes
I FMC - recommandations - sociétés savantes - pratique clinique I
Albert Hagège
Département de cardiologie,
HEGP, Paris
Recommandations européennes 2012
sur l’insuffisance cardiaque chronique :
prise en charge
Concernant la prise en charge usuelle,
les principales avancées de ce document (1) par rapport aux recommandations 2008 sont : une extension
des indications des antialdostérones
et de la resynchronisation et l’apparition de l’ivabradine.
Diagnostic
En cas de suspicion d’insuffisance cardiaque, le diagnostic
doit, après avoir intégré les données ECG et de la radiographie de thorax, reposer sur l’échocardiographie et le dosage
des hormones natriurétiques.
➜ Hormones natriurétiques
Sont considérés comme évocateurs du diagnostic des taux
de BNP ou de NT-proBNP respectivement > 100 et 300 pg/ml
en cas de symptômes aigus ou d’aggravation récente, et respectivement > 35 et 125 pg/ml dans les autres cas.
Un taux de BNP ou de NT-proBNP normal chez un patient
présentant des symptômes d’insuffisance cardiaque et
non traité exclut le diagnostic, rendant la nécessité d’une
échographie discutable.
➜ Insuffisance cardiaque systolique versus diastolique
Le distinguo est basé sur la quantification de la fonction systolique par la mesure de la fraction d’éjection du ventricule
gauche (FEVG) par méthode échographique apicale biplan
(Simpson) ; si FEVG < 35%, on parle d’insuffisance cardiaque
systolique, > 45-50% d’insuffisance cardiaque à FEVG préservée, et entre les 2, il s’agit probablement d’une insuffisance cardiaque avec altération modérée de la fonction systolique.
➜ Critères échographiques d’appréciation de la dysfonction diastolique
Les paramètres de relaxation sont dépendants des conditions de charge, de l’âge, de la fréquence cardiaque, de la
masse corporelle… et des conditions d’examen. Une combinaison des critères échographiques doit être utilisée faisant appel entre autres à l’évaluation du flux transmitral
(Em), du Doppler tissulaire à l’anneau mitral (Ea), l’élévation
du ratio Em/Ea étant corrélée à celle des pressions de remplissage.
10
Une vélocité normale de Ea (> 8 cm/s en septal, 10 cm/s en
latéral ou > 9 cm/s en moyenne) est très inhabituelle chez
un patient avec insuffisance cardiaque.
Un ratio Em/Ea > 2 signe l’élévation de PTDVG en cas de FEVG
altérée, de même que la transition d’une valeur de
Em/Ea = 1-2 (pseudo-normal) vers un ratio > 0,5 après Valsalva.
Pour le diagnostic échographique d’insuffisance cardiaque
à FEVG préservée (> 50%), l’hypertrophie du ventricule
gauche (> 95 g/m² chez la femme et 115 g/m² chez l’homme)
et la dilatation atriale gauche (> 34 ml/m² en l’absence de
fibrillation atriale) sont de bons indices. Une élévation des
pressions de remplissage est évoquée lorsque Ea moyenné
est inférieur à 9 cm/s en et/ou quand Em/Ea est supérieur à
15 cm/s. La présence d’au moins 2 mesures anormales et/ou
d’une fibrillation atriale augmente la probabilité du diagnostic.
Les manœuvres de sensibilisation telles que l’effort, ainsi
que les nouvelles techniques (strain, speckle tracking) ne
sont pas proposées en routine pour le diagnostic.
Traitement de l’insuffisance cardiaque
systolique (Figure 1)
➜ Traitement pharmacologique
Les IEC et bêtabloquants (bisoprolol, carvédilol, métoprolol, nébivolol) devraient être introduits le plus précocement
possible dans l’insuffisance cardiaque systolique (FEVG
≤ 40%) symptomatique.
En cas d’intolérance, la prescription d’antialdostérone (éplérénone, spironolactone) peut être remplacée par celle d’un
antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II (ARA II) : candésartan, valsartan, losartan.
L’ivabradine a une AMM européenne au-delà d’une fréquence cardiaque (FC) ≥ 75/min malgré une dose cible (ou
maximale tolérée) de bêtabloquant ; elle peut être aussi utilisée en alternative au bêtabloquant en cas d’intolérance ou
de contre-indication.
La digoxine peut être utilisée plus tôt pour ralentir une fibrillation atriale, en général en association à un bêtabloquant.
Il en est de même de l’association hydralazine et dinitrate
d’isosorbide (H-ISDN) en cas d’intolérance aux IEC et ARA II.
L’addition d’oméga-3 peut être discutée chez les patients
sous IEC, bêtabloquant et antialdostérone. Les statines, inhibiteurs de la rénine et anticoagulants oraux ne sont pas
recommandés à titre systématique.
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
Albert Hage?ge (2):attitude
19/10/12
15:45
Page 11
Prise en charge de l’insuffisance cardiaque systolique chronique symptomatique (NYHA II-IV)
:
Diurétiques (symptômes/signes congestifs)
+
IEC (ou ARA II si intolérance)
+ bêtabloquant
Encore NYHA II-IV ?
OUI
NON
+ antialdostérone
OUI
Encore NYHA II-IV ?
NON
FEVG ≤ 35%
OUI
NON
Rythme sinusal et FC ≥ 70/min
OUI
NON
+ ivabradine
Encore NYHA II-IV et FEVG ≤ 35%?
OUI
NON
QRS ≥ 120 msec
OUI
NON
Discuter CRT-P/CRT-D
Discuter DAI
Encore NYHA II-IV ?
OUI
NON
Pas de traitement spécifique
Prise en charge globale
Envisager digoxine et/ou H-ISDN
Si phase terminale, assistance et/ou greffe
Figure 1.
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
11
Albert Hage?ge (2):attitude
19/10/12
15:46
Page 12
Contrôle de la fréquence ventriculaire dans l’insuffisance cardiaque en FA
persistante/permanente hors décompensation aiguë
FEVG altérée
FEVG préservée
Inhibiteur calcique (ICC)
bradycardisant
(ou bêtabloquant)
Bêtabloquant
Cadence ventriculaire contrôlée ?
NON
Cadence ventriculaire contrôlée ?
OUI
+ digoxine
+ digoxine
Cadence ventriculaire contrôlée ?
NON
Cadence ventriculaire contrôlée ?
OUI
OUI
Cadence ventriculaire contrôlée ?
Cadence ventriculaire contrôlée ?
OUI
Avis spécialisé
Discuter ablation du NAV
NON
Remplacer digoxine par
bêtabloquant ou ICC
bradycardisant
Remplacer digoxine
par amiodarone
NON
NON
OUI
OUI
Traitement
d’entretien
NON
Avis spécialisé
Discuter ablation du NAV
Figure 2.
➜ Défibrillateur automatique implantable (DAI)
Le DAI est recommandé en prévention primaire chez le
patient symptomatique (NYHA II-IV) avec FEVG ≤ 35% en
dépit d’un traitement pharmacologique optimal avec une
survie prédite > 1 an en bon état fonctionnel. Chez le patient
asymptomatique, en cas d’antécédent d’infarctus avec FEVG
≤ 35%, l’implantation d’un DAI doit être discutée. Le DAI
n’est pas indiqué en classe NYHA IV.
➜ Resynchronisation ventriculaire (CRT)
La resynchronisation ventriculaire avec fonction pacemaker
(CRT-P) ou défibrillateur (CRT-D) est indiquée chez les patients
en rythme sinusal en classe NYHA III/IV avec FEVG ≤ 35% per12
sistante en dépit du traitement médical optimal, survie prédite > 1 an en état fonctionnel acceptable, et aspect de bloc
de branche gauche (BBG) avec QRS ≥ 120 msec. En l’absence
d’aspect de BBG, un QRS ≥ 150 msec est exigé.
La resynchronisation ventriculaire (plutôt CRT-D) est indiquée chez les patients en rythme sinusal en classe NYHA II
avec FEVG ≤ 30% persistante en dépit du traitement médical optimal, survie prédite > 1 an en état fonctionnel acceptable, et aspect de BBG avec QRS ≥ 130 msec. En l’absence
d’aspect de BBG, un QRS ≥ 150 msec est exigé.
Le bénéfice de la resynchronisation ventriculaire est incertain chez les patients symptomatiques (NYHA II/IV) avec FEVG
≤ 35% persistante en dépit du traitement médical optimal, en fibrillation atriale ou avec indication de pacemaker
conventionnel et QRS ≥ 120 msec.
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
Albert Hage?ge (2):attitude
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Prise en charge de la fibrillation atriale (Figure 2)
La cardioversion électrique ou pharmacologique (amiodarone)
doit être envisagée chez les patients symptomatiques en dépit
du traitement médical optimal et d’un bon contrôle de la FC.
L’amiodarone est seule indiquée pour la maintenance du
rythme sinusal.
Les inhibiteurs calciques à effet bradycardisant devraient
être évités dans l’insuffisance cardiaque systolique.
L’anticoagulation est le plus souvent systématique, sauf
risque hémorragique majeur.
L’association d’une anticoagulation orale avec un antiagrégant plaquettaire n’est pas recommandée plus de 12 mois
après un événement coronaire ou artériel aigu. Après ce
délai, seule l’anticoagulation orale devrait être maintenue.
tonine (en évitant les tricycliques), la dysfonction érectile
des inhibiteurs des phosphodiestérases, le syndrome d’apnées du sommeil d’un traitement spécifique (des troubles
du sommeil sont présents chez un tiers des patients)…
Prise en charge globale
L’exercice physique régulier en aérobiose est recommandé
de même que la participation à un programme de prise en
charge multidisciplinaire (associant cardiologues, médecins
généralistes, infirmières…) centré sur l’éducation du patient.
Le traitement guidé par les dosages d’hormones natriurétiques reste discutable.
■
Pour en savoir plus
Prise en charge des comorbidités
Elle est essentielle chez l’insuffisant cardiaque, la plupart des
comorbidités aggravant la gêne fonctionnelle et le pronostic.
Parmi celles-ci, l’anémie pourrait bénéficier de perfusions
de fer, la cachexie (perte de poids ≥ 6% en 6-12 mois) de suppléments nutritionnels, voire d’agents anabolisants, la bronchopathie chronique obstructive de corticoïdes inhalés (en
évitant le carvédilol), la dépression d’inhibiteurs de la séro-
Quiz ECG
1. McMurray JJ, et al. ESC Guidelines for the diagnosis and treatment of
acute and chronic heart failure 2012: The Task Force for the
Diagnosis and Treatment of Acute and Chronic Heart Failure 2012 of the
European Society of Cardiology. Eur Heart J 2012; 33: 1787-847.
Pour toute correspondance avec l’auteur
[email protected]
Jean-François Leclercq
Paris et Le Chesnay
C’est l’histoire d’une jeune fille de 17 ans, consultant pour des palpitations fréquentes. L’examen clinique est normal
en dehors d’irrégularités à l’auscultation. Elle ne prend aucun traitement. De fait, la patiente décrit des ratés, et des
tachycardies rapides à début et fin brusques. Quelle est votre interprétation ? Quel traitement proposez-vous ?
Réponse en page 18
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
13
Menasche:attitude
19/10/12
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Attitudes
I FMC - recommandations - sociétés savantes - pratique clinique I
Philippe Menasché
Département de chirurgie cardiaque,
HEGP, université Paris-Descartes, Paris
Thérapie cellulaire :
bilan d’une décennie
Résultats dans l’infarctus du myocarde
Dans le cadre de l’infarctus du myocarde vu au stade aigu,
rappelons que la procédure la plus couramment utilisée a
été l’infusion de cellules mononucléées autologues de la
moelle sanguine dans l’artère coronaire responsable de l’infarctus, préalablement rouverte. L’administration d’une fraction purifiée de ces cellules (progéniteurs CD34+) a été plus
rare tout comme l’injection intraveineuse de cellules souches
mésenchymateuses allogéniques, créditées d’un privilège
immunologique autorisant une telle origine, sans traitement
immunosuppresseur associé. Sans doute le résultat qui
résume le mieux ces essais est-il celui, récemment publié,
d’une méta-analyse entreprise par le centre Cochrane (1).
L’analyse de 1 765 patients inclus dans 33 essais contrôlés
randomisés fait ainsi apparaître, en dépit d’une très forte
hétérogénéité entre les séries, un modeste bénéfice de la
thérapie cellulaire sur la fonction ventriculaire gauche : le
gain en termes de fraction d’éjection ventriculaire gauche,
par comparaison aux patients des groupes contrôles, est de
2,87% et se maintient à long terme (3,75% avec un suivi de
12 à 61 mois) sans conséquence (comme cela était prévisible) sur la morbi-mortalité.
Fait notable, les différences ne sont statistiquement significatives entre les groupes contrôles et traités que lorsque
l’évaluation fonctionnelle est fondée sur l’échographie ; elles
ne le sont pas dans les séries utilisant l’imagerie par résonance magnétique (IRM).
Indépendamment de la technique d’évaluation, plusieurs
paramètres influençant les résultats ont pu être identifiés,
notamment le degré d’altération initiale de la fonction ventriculaire gauche (les patients chez lesquels elle est le plus
altérée étant ceux qui semblent bénéficier le plus de la thérapie cellulaire), la dose de cellules injectées, la technique
de leur préparation (avec un effet inhibiteur de l’héparine)
14
© BSIP
Depuis un peu plus d’une dizaine d’années (la première
implantation intramyocardique humaine de cellules musculaires remonte à 2000), la thérapie cellulaire s’est imposée comme l’une des nouvelles options possibles pour améliorer le traitement de l’infarctus du myocarde et de
l’insuffisance cardiaque chronique.
Aux multiples travaux expérimentaux ont succédé
(lorsqu’elles ne les ont pas précédés…) d’aussi nombreuses
études cliniques dont les résultats contrastés ont fait naître un sentiment de scepticisme à hauteur des espoirs excessifs que ce nouveau concept avait suscités.
Le moment semble donc venu de tirer un bilan global de
cette première décennie, et surtout de réfléchir à la manière
dont tous ces résultats peuvent être utilisés pour bâtir, de
façon plus efficace, la seconde génération d’essais cliniques.
et le moment précis de l’injection (une thérapie différée
au-delà d’environ une semaine semblant perdre toute efficacité).
Au-delà de ces enseignements naturellement précieux pour
mettre en place des essais dont l’optimisation passe par leur
prise en compte, une observation essentielle est le caractère
souvent défectueux de la fonction même des cellules médullaires chez les patients présentant les facteurs de risque de
maladie athéromateuse. Le paradoxe est donc d’utiliser un
traitement chez des sujets dont la maladie sous-jacente fait
qu’il risque d’être peu efficace. Pour remédier à ce problème,
une solution est d’essayer de corriger in vitro les anomalies
fonctionnelles des cellules médullaires avant de les injecter.
Conceptuellement élégante, techniquement réalisable dans
un contexte expérimental, cette approche semble assez peu
réaliste en clinique.
L’alternative est d’utiliser des cellules allogéniques provenant de banques dûment qualifiées, notamment sur le plan
fonctionnel. Cette approche est celle qui a été utilisée avec
des cellules mésenchymateuses ; les résultats en sont jugés
excellents par la société promotrice de l’essai (Osiris) sans
qu’il soit facile de faire la part entre les gages à donner à
des investisseurs inquiets et la réalité médicale. Il n’en reste
pas moins que cette thérapie allogénique présente d’indiscutables avantages : validation fonctionnelle et reproductibilité des lots de cellules, simplification logistique, disponibilité immédiate ; elle peut par ailleurs se justifier par
l’observation, également bien établie, que les cellules injectées ne vont pas « devenir » des cellules cardiaques ou vasculaires et que leur rôle est avant tout de sécréter des facteurs susceptibles d’activer des voies endogènes
cytoprotectrices (principalement augmentation de l’angiogenèse, diminution de l’apoptose et de la fibrose) ; dans ces
conditions, l’élimination de cellules étrangères par une
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
Menasche:attitude
19/10/12
15:49
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réponse immune (le privilège immunologique de ces cellules
mésenchymateuses est, en effet, très discuté) n’est pas nécessairement un inconvénient dès lors que les cellules ont survécu assez longtemps pour exercer cet effet paracrine, et
sur ce plan, les cellules mésenchymateuses (de la moelle sanguine ou du tissu adipeux) sont, en effet, de bons candidats,
compte tenu de leur forte activité sécrétoire.
A côté de la fonction des cellules, un autre facteur prédictif
du résultat a été identifié : le degré de leur rétention dans
le myocarde cible. Malheureusement, les observations
concordent pour montrer que cette rétention est très faible. Plusieurs approches sont donc en cours d’évaluation
pour tenter d’augmenter le nombre de cellules persistant
dans le tissu receveur. Sans doute la plus simple est-elle fondée sur de nouveaux cathéters permettant une extravasation extravasculaire des cellules et diminuant donc d’autant
leur fuite vers les poumons ou la rate. Une stratégie plus élaborée, dont les premiers résultats cliniques ont été jugés
encourageants, consiste à recourir à des moyens physiques
(chocs par ultrasons) pour stimuler la production par le myocarde de facteurs susceptibles d’« attirer » les cellules circulantes et donc de les « figer » dans la zone cible. C’est toutefois une approche classique (injection intracoronaire
précoce après l’infarctus de cellules médullaires mononucléées autologues chez des patients dont la fraction d’éjection est ≤ 45%) qui a été retenue pour être évaluée dans un
vaste essai européen randomisé dont la taille (3 000 patients)
devrait permettre de clarifier la question.
Résultats dans l’insuffisance cardiaque
chronique
Dans le cadre de l’insuffisance cardiaque chronique, les résultats publiés à ce jour n’emportent pas davantage la conviction. Qu’il s’agisse de cellules médullaires ou de myoblastes
(cellules souches squelettiques), que ces cellules soient injectées par voie épicardique lors de pontages coronaires ou par
cathétérisme intracoronaire ou endocardique, aucune amélioration cliniquement pertinente n’a pu être démontrée
dans les relativement rares études randomisées, contrôlées
et en double insu. Quelques essais ont néanmoins rapporté
des résultats encourageants qui concernent habituellement
la fonction régionale ou la perfusion et suggèrent qu’un certain effet thérapeutique, même modeste, est néanmoins
possible.
Sur la base de données expérimentales concordantes, il est
clair cependant que ce bénéfice n’est pas dû, à ce jour, à une
véritable régénération du myocarde. En effet, l’espoir d’une
plasticité des cellules adultes se transdifférenciant en cardiomyocytes sous l’influence de leur nouvel environnement
myocardique semble utopique. Le bénéfice inconstamment
observé des injections de cellules musculaires ou médullaires
s’explique donc ici encore par l’effet des facteurs sécrétés
par les cellules. La vraie question, non tranchée, est de savoir
si ces effets paracrines de cellules transplantées dans des
cicatrises fibreuses sont suffisamment puissants pour avoir
un impact thérapeutique ou s’il ne faut pas plutôt poursuivre l’objectif initial d’un remplacement physique des cellules
myocardiques détruites, par la transplantation de cellules
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
intrinsèquement douées d’un véritable potentiel de différenciation cardiomyogénique, susceptibles de s’intégrer sur
le plan électromécanique dans le myocarde receveur et pouvant ainsi contribuer à améliorer sa fonction contractile.
SCIPIO et CADUCEUS : deux essais cliniques
utilisant des cellules cardiaques
C’est dans ce contexte qu’une forte publicité, liée à l’excellence scientifique du journal qui a publié ces résultats et
relayée par les médias, a été donnée à deux essais cliniques
qui ont utilisé des cellules cardiaques. Identifiées même comme
des cellules souches cardiaques dans le premier (SCIPIO), elles
ont été isolées (sur la base d’un marqueur spécifique) et cultivées in vitro à partir d’une biopsie de l’auricule droit réalisée lors d’une intervention de chirurgie cardiaque, avant
d’être réinjectées par voie intracoronaire quelques semaines
plus tard (2). Les spécialistes s’accordent aujourd’hui à reconnaître que la multitude de failles méthodologiques entachant cet essai ne permet pas de conclure que ces cellules
ont réellement exercé un effet « régénérateur » et jette
même un doute sur le bénéfice fonctionnel rapporté. Au
demeurant, l’existence même de cellules souches cardiaques
dans le cœur humain adulte et a fortiori pathologique, qui
seraient susceptibles d’être mobilisées et de se substituer
aux cardiomyocytes détruits, est fortement discutée.
Plus modeste dans ses ambitions (on y parle de cellules cardiaques sans préjuger de leur caractère de cellules souches),
le second essai (CADUCEUS) a consisté à prélever un fragment de muscle ventriculaire droit par biopsie transjugulaire, à en isoler des cellules qui semblent assez hétérogènes,
avec une forte composante mésenchymateuse et à les réinjecter, comme dans l’étude précédente, par voie intracoronaire (3). Ici encore, les résultats sont jugés positifs par les
auteurs, même si certains s’interrogent sur le fait que le
bénéfice, établi par l’IRM sous forme d’une réduction de la
zone nécrosée, ne s’accompagne pas d’une amélioration de
la fonction cardiaque. L’évaluation de cette stratégie va
néanmoins se poursuivre sous la forme d’un plus vaste essai
randomisé (ALLSTAR) qui utilisera le même type de cellules,
mais d’origine allogénique. Le fait que les auteurs assument
l’hypothèse de la disparition, par rejet, de ces cellules traduit bien que dans leur esprit, elles agissent plus ici encore
par des effets paracrines que par la formation d’un tissu
contractile.
Cette génération d’un nouveau myocarde ne semble en fait
pouvoir être obtenue que par des cellules souches pluripotentes, prédifférenciées in vitro vers un phénotype cardiaque
ou plus généralement mésodermique (avec alors possibilité
d’une différenciation à la fois cardiaque et vasculaire) avant
d’être transplantées. C’est cette approche qui explique l’intérêt porté aux cellules souches embryonnaires dérivées
d’embryons très précoces (4-6 jours après la fécondation)
conçus dans le cadre d’une aide à la procréation et ne faisant plus l’objet d’un projet parental. Leur utilisation clinique n’est plus un mythe puisque deux essais sont en cours :
- l’un a utilisé ces cellules prédifférenciées en oligodendrocytes pour réparer des lésions traumatiques de la moelle
épinière (il a été interrompu pour des raisons financières) ;
15
Menasche:attitude
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- l’autre, qui se poursuit, cherche à traiter la dégénérescence
maculaire par des cellules souches embryonnaires prédifférenciées en progéniteurs rétiniens.
Deux défis majeurs
Dans le cas du cœur, la différenciation des cellules souches
embryonnaires en progéniteurs cardiaques est aujourd’hui
un processus assez bien maîtrisé, et ces cellules sont, à ce
jour, les seules capables d’une intégration électromécanique,
prérequis à une contribution réelle à la fonction contractile,
du moins dans des conditions expérimentales (4). Toutefois,
indépendamment des aspects éthiques qu’une loi, unique
au monde et promulguée par le gouvernement précédent,
a finalement réglés (cette recherche est interdite, mais peut
être autorisée !), l’utilisation thérapeutique des cellules
souches embryonnaires pose deux défis majeurs :
- Le premier est lié au risque tumoral si des cellules incomplètement prédifférenciées, c’est-à-dire encore pluripotentes et donc capables d’une prolifération incontrôlée,
venaient à être greffées, d’où l’importance de l’étape de
tri pour ne conserver qu’une population pure de progéniteurs.
- Le second découle du caractère allogénique de ces cellules
et donc du risque de leur rejet ; une recherche importante
est aujourd’hui consacrée au développement de stratégies
d’immunomodulation qui permettraient d’éviter un lourd
traitement immunosuppresseur dont on connaît les risques ;
dans ce domaine, la possibilité d’induire une tolérance
immunitaire (déjà démontrée pour la transplantation d’organes solides) par la brève administration d’anticorps (antiCD3 ou anti-CD4 et CD8) apparaît comme l’une des options
les plus attractives pour orienter favorablement le rapport
bénéfice/risque.
Cette observation explique l’importance de la recherche
visant à améliorer la prise de greffe, principalement par la
combinaison des cellules avec des biomatériaux permettant
de « protéger » les cellules pendant le transfert et de créer,
grâce à leurs propriétés physico-chimiques, un micro-environnement favorisant la prolifération et la différenciation
des cellules tout en stimulant le développement de la vascularisation nécessaire à leur survie. Le cœur étant un organe
anisotrope, c’est-à-dire dont la fonction est dépendante de
l’orientation de ses fibres, ces matériaux ensemencés peuvent être « travaillés » avant leur implantation afin que les
cellules soient déjà orientées en faisceaux et puissent former ainsi in vivo un néo-tissu capable de contribuer efficacement à la contraction. Il est donc vraisemblable que l’utilisation des techniques d’ingénierie tissulaire va améliorer
l’efficacité de la thérapie cellulaire.
Vers une thérapie cellulaire sans cellules…
S’il reste difficile de prévoir encore quelle sera la place exacte
de cette approche pour traiter certaines pathologies cardiaques, aiguës ou chroniques - seuls des essais complexes
et coûteux apporteront une réponse -, on peut néanmoins
espérer, au vu des moyens considérables attribués à cette
recherche dans le monde, que l’utilisation de cellules trouvera une application thérapeutique en cardiologie, comme
elle l’a trouvée avec succès dans le traitement des brûlures
ou des hémopathies. Il n’est même pas inconcevable que
s’il s’avérait, in fine, que les cellules agissent dans le
cœur par des mécanismes exclusivement paracrines, on
aboutisse un jour à une thérapie cellulaire… sans cellules,
seuls étant administrés, tels des médicaments, les facteurs
identifiés comme les plus cardioprotecteurs et sécrétés par
des cellules maintenues en culture à des seules fins de production et non plus de greffe.
■
Les cellules pluripotentes induites
Une abondante littérature est aussi consacrée aux cellules pluripotentes induites (iPS) qui sont des cellules adultes reprogrammées à un état pseudo-embryonnaire avant d’être redifférenciées dans la direction souhaitée. Leurs avantages
principaux sont d’éviter le débat éthique sur l’embryon et, en
principe (car cela est discuté), les problèmes immunitaires
puisque ces cellules peuvent être prélevées chez le patient luimême (fibroblastes cutanés, voire follicules pileux). Toutefois,
leur application clinique potentielle se heurte à des obstacles
importants, et notamment le risque d’aberrations génétiques
liées au processus de reprogrammation, même si l’on peut
s’affranchir des vecteurs viraux initialement utilisés pour transfecter les cellules avec les facteurs nécessaires pour les ramener à un état pseudo-embryonnaire. Aussi s’accorde-t-on à
reconnaître que ces iPS sont aujourd’hui surtout utiles pour le
criblage de médicaments ou la modélisation de certaines maladies, alors que leur application à la médecine régénérative
reste plus incertaine et en tout cas sans doute lointaine.
Il convient enfin de souligner que tout comme dans le cas
de l’infarctus au stade aigu, un problème général est ici le
faible nombre de cellules qui survivent dans le tissu greffé.
16
Pour en savoir plus
1. Clifford DM. Stem cell treatment for acute myocardial infarction.
Cochrane Database Syst Rev 2012; 2: CD006536.
2. Bolli R. Cardiac stem cells in patients with ischaemic cardiomyopathy
(SCIPIO): initial results of a randomised phase 1 trial. Lancet 2011;
378: 1847-57.
3. Makkar RR. Intracoronary cardiosphere-derived cells for heart regeneration after myocardial infarction (CADUCEUS): a prospective, randomised phase 1 trial. Lancet 2012; 379: 895-904.
4. Shiba Y. Human ES-cell-derived cardiomyocytes electrically couple
and suppress arrhythmias in injured hearts. Nature 2012. doi:
10.1038/nature11317. In press.
Pour toute correspondance avec l’auteur
[email protected]
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
ECG_Combes 81:attitude
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RéponseAttitudes
Quiz ECG
Jean-François Leclercq
Paris et Le Chesnay
I FMC - recommandations
- sociétés savantes - pratique clinique I
de la page 13
C’est l’histoire d’une jeune fille de 17 ans, consultant pour des palpitations fréquentes. L’examen
clinique est normal en dehors d’irrégularités à
l’auscultation. Elle ne prend aucun traitement.
De fait, la patiente décrit des ratés, et des tachycardies rapides à début et fin brusques.
Quelle est votre interprétation ?
Quel traitement proposez-vous ?
L’
aspect de WPW est connu depuis l’enfance chez
cette jeune fille. La topographie est a priori parahisienne avec une onde delta positive en D1,D2,D3. Les
extrasystoles sont à retard gauche, mais leur axe est
différent, avec une négativité initiale en D1 et VL alors
que l’onde delta est positive dans ces dérivations. Il y
a donc vraisemblablement à la fois un WPW parahisien
et des ESV provenant de l’infundibulum pulmonaire.
On décide de pratiquer une exploration électrophysiologique. Avant toute montée de sonde, on enregistre à nouveau des ESV infundibulaires. L’exploration
permet de déclencher par simple extrastimulation auriculaire des tachycardies réciproques orthodromiques
à QRS fins, utilisant la voie accessoire en rétrograde.
La période réfractaire antérograde de la voie accessoire est très longue, 500 ms, avec disparition brutale
de l’aspect de WPW en stimulation atriale à 120 bpm.
Après discussion avec la patiente et ses parents, on
décide de ne pas pratiquer d’ablation de la préexcitation compte tenu de sa localisation à proximité de la
voie normale et de son absence de dangerosité. Les
troubles du rythme ventriculaire sont peu fréquents
sur le Holter de 24 heures, et ne comportent pas de
18
salves, dans les conditions de repos de l’hospitalisation. Un traitement par flécaïnide et bisoprolol est
conseillé. L’activité physique modérée est autorisée,
le sport est interdit.
La patiente est revue 17 ans plus tard, à l’âge de
34 ans. Elle n’a plus eu de tachycardie paroxystique
sous flécaïnide seul, ne prenant le bêtabloquant que
de façon ponctuelle. Elle a mené à bien deux grossesses sans problème particulier. Par précaution, le flécaïnide a été stoppé lors de ces deux grossesses en raison de l’absence de données sur la tératogenèse de
ce produit. On note que l’aspect de préexcitation n’est
plus visible sur l’ECG, même en l’absence de traitement. A la fin de la 2e grossesse, après arrêt du flécaïnide, des palpitations réapparaissent, et on enregistre l’ECG ci-dessous, caractéristique d’une TV en salves
bénigne infundibulaire. Le traitement médical est
repris ultérieurement avec succès.
Cette patiente avait donc bien deux pathologies rythmiques différentes, sans rapport l’une avec l’autre :
une préexcitation et des TV en salves infundibulaires.
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
art&coeur:art
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Art et Cœur
Pascal Guéret
I Photographie - sculpture - littérature - poésie - peinture - musique I
Le cœur vendéen
Marie-Cécile Bouju
© DR
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
© DR
I
nitialement, le cœur vendéen se réfère au
culte du Sacré-Cœur, né au XIIe siècle et qui
s’est développé à partir du XVIIe siècle. Le
culte cordicole, très commun en Europe, n’était
pas exempt d’arrière-pensée politique, car très
présent chez les antijansénistes et les ennemis
de « l’irréligion » pendant le siècle des Lumières.
Cet insigne devint l’un des signes distinctifs des
populations qui se soulevèrent contre les révolutionnaires. Des troubles et désordres apparurent en différents points du pays, mus par
des motifs économiques, politiques ou religieux. En mars 1793, des paysans vendéens se
soulevèrent contre l’obligation de levée de
troupes et défirent les troupes républicaines.
Cet événement fut instrumentalisé par les deux
camps : le camp royaliste, mais aussi le camp
républicain qui s’en empara pour en faire le
symbole de la réaction. Le soulèvement se
transforma en une guerre civile extrêmement
brutale et longue, qui fit entre 170 000 et
200 000 morts.
Comme dans d’autres régions soulevées, les
paysans vendéens avaient choisi comme
emblème le port du Sacré-Cœur, souvent sous
la forme d’un scapulaire simple, un cœur rouge
orné d’une croix sur fond blanc. La signification en était à la fois religieuse et politique,
puisqu’ils combattaient pour le rétablissement
de l’ordre ancien, monarchique et religieux.
Le camp royaliste l’adopta à son tour, les légitimistes choisissant finalement la forme du double cœur : un pour Dieu, un pour le Roi.
Au XIXe siècle, ce symbole resta cantonné à la
sphère religieuse, même si la politique n’était
jamais loin. Ainsi, en 1870, des Vendéens constituèrent une troupe sous la bannière du SacréCœur lorsque les Etats du Pape furent menacés par Napoléon III. Pendant la Première
Guerre mondiale, des soldats vendéens portèrent ce carré de tissu censé protéger à la fois
la Patrie et l’Eglise de France.
Ce symbole retrouva sa force politique avec la
IIIe République. La diffusion énergique de
la culture républicaine entraîna de la part de
l’Eglise catholique et des notables locaux l’élaboration d’une contre-propagande : une
mémoire et une histoire des guerres de Vendée furent ainsi ranimées et reconstruites. Le
cœur vendéen devint alors un symbole politique de la droite réactionnaire et antirépublicaine. Ainsi, les nobles vendéens qui rejoi-
© Conseil général de Vendée
Emblème du département de
Vendée, le cœur vendéen est
aujourd’hui représenté sous
une forme très stylisée et
géométrique : un double
cœur couronné et surmonté
d’une croix, sur fond blanc et
rouge, la couronne étant
discrètement représentée par
deux traits horizontaux. Il
s’éloigne ainsi d’une de ses
formes premières et
rudimentaires : un cœur
rouge surmonté d’une croix
sur fond blanc. Mais il prend
aussi ses distances avec le
premier emblème choisi en
1943 pour symboliser le
département : un blason
composé d’un double cœur
rouge couronné et orné
d’une croix et d’un écu orné
de châteaux et de fleurs de
lys, accompagné d’une devise
latine. Chacune de ces
versions souligne les rôles
successifs de ce symbole :
l’insigne religieux, l’emblème
politique, le « logo ».
Chef de rubrique
gnirent les troupes fascistes en Espagne en
1936 l’arborèrent.
En 1943, lors du 150e anniversaire de la Guerre
de Vendée, à l’issue d’un concours, le cœur vendéen fut choisi pour représenter la Vendée,
choix validé par le gouvernement de Vichy : un
blason avec deux cœurs entrelacés surmontés
d’une couronne et d’une croix, au centre d’un
écu, et une devise - ambiguë - Utrique fidelis
(fidèle à l’un et à l’autre).
Lors des célébrations du Bicentenaire de la
Révolution française en 1989, une forme stylisée fut adoptée, gommant les aspects les plus
signifiants historiquement : la devise, l’écu disparaissent ; la croix et la couronne sont simplifiées à l’extrême. Mais certains Vendéens
s’émurent de l’apposition d’un tel symbole sur
le fronton des écoles publiques. Le tribunal
administratif rejeta leur plainte, signifiant que
l’aspect religieux et politique du symbole avait
désormais laissé la place à la communication,
phénomène commun aux collectivités territoriales qui cherchent maintenant à attirer touristes et investisseurs.
■
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Cardio interventionnelle pour le praticien
Traiter l’ischémie plutôt
que la lésion
L
es résultats définitifs de l’étude FAME II viennent d’être présentés au
Congrès de l’ESC à Munich et publiés simultanément dans le New England
Journal of Medicine. Il était difficile de passer sous silence les conclusions
de cet essai qui devraient à terme modifier la prise en charge des patients coronariens stables. Le fait d’associer angioplastie avec stent actif et traitement médical optimal réduit
le risque de revascularisation en urgence d’un facteur 8 par rapport au traitement médical seul. Le
recours à un critère fonctionnel ischémique plutôt qu’anatomique permet donc de sélectionner les
patients susceptibles de bénéficier d’une angioplastie. A y regarder de plus près, ces résultats viennent compléter plutôt que contredire ceux de l’étude COURAGE dans laquelle seulement 85% des
patients avaient bénéficié d’un test de détection ischémique non invasif.
Sommaire
22 • Indications
de l’angioplastie ad hoc :
que disent les
recommandations ?
Luc Lorgis, Caroline Brulliard,
Olivier Hachet, Philippe Buffet,
Isabelle L’Huillier, Aurélie Gudjoncik,
Yves Cottin
26 • La voie radiale
expose-t-elle vraiment
le patient et l’opérateur
à des doses de rayons
supérieures ?
Jean-Louis Georges
31 • Prévention
des complications
hémorragiques
en angioplastie
Nicolas Meneveau
35 • Alcoolisation septale :
résultats, indications
Patrick Ohlmann
37 • Congrès EuroPCR
Paul Luporsi
Pour mémoire, COURAGE n’avait pas montré de supériorité de l’angioplastie sur le traitement médical optimal chez les patients coronariens stables. Dans FAME II, le traitement médical seul confirme
qu’il est efficace chez les patients dont les lésions ne sont pas responsables d’une ischémie documentée par FFR. En outre, l’étude ancillaire COURAGE-Nuclear montrait que les patients ayant une
ischémie touchant plus de 10% du myocarde à la scintigraphie (un tiers des patients dépistés) bénéficiaient d’un geste d’angioplastie. Une proportion importante de patients sans ischémie a donc
été incluse dans COURAGE, alors que, rappelons-le, tous les patients randomisés dans FAME II avaient
au moins une lésion fonctionnellement significative.
Au-delà de l’enthousiasme évident qu’ont soulevé les résultats de FAME II dans la communauté cardiologique, il convient de rappeler que l’étude a été prématurément interrompue pour des raisons
critiquables. La décision d’arrêter les inclusions a été portée sur des critères secondaires d’hospitalisation et de revascularisation qui dans une étude menée « en ouvert » sont l’objet d’une certaine
subjectivité. La décision d’hospitaliser ou de revasculariser peut, en effet, être influencée par la perception qu’a l’investigateur des résultats de la randomisation : l’indication de revascularisation sera
plus facilement retenue chez les patients initialement traités médicalement.
En outre, l’interruption prématurée d’une étude conduit souvent à une surestimation des bénéfices. Mais le plus regrettable est de penser que l’on a peut-être manqué là une belle occasion d’évaluer l’apport de l’angioplastie en termes d’infarctus ou de décès chez le coronarien stable. Il faut
espérer malgré tout que cela suffise à convaincre les autorités, qu’en termes de service médical
rendu, le recours à la FFR justifie son remboursement. Le problème économique n’est d’ailleurs pas
le seul obstacle à l’usage de la FFR en pratique quotidienne. Le nombre annuel d’angioplasties affiché par les centres est vu comme un critère de qualité. Pour la presse grand public (et les autorités),
plus le volume d’angioplasties d’un centre est important, meilleure est la qualité des soins qui y sont
prodigués. Or, pratiquer une FFR revient, en pratique, à ne revasculariser qu’un tiers des lésions testées. Enfin, laisser en place, sur les données de la FFR, une lésion qui apparaît significative en angiographie demande souvent plus d’énergie à expliquer au patient qu’il est préférable de s’abstenir,
que l’énergie déployée pour implanter un stent.
Malgré cela, les résultats de FAME II sont susceptibles de modifier notre pratique clinique courante
à plus d’un titre : l’utilisation de la FFR est une technique largement appliquée, les résultats de
l’étude sont pertinents d’un point de vue clinique, et surtout ils permettent de répondre à des problèmes jusque-là non résolus tout en justifiant le choix thérapeutique effectué. Mieux, FAME II
apporte des preuves supplémentaires pour considérer la FFR comme le standard de soins chez les
coronariens. Il ne reste plus qu’à faire en sorte de pouvoir appliquer cette stratégie à notre pratique
quotidienne, comme le stipulent les recommandations européennes et américaines.
■
Pr Nicolas Meneveau, rédacteur en chef
CHU Jean-Minjoz, Besançon
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Cardio interventionnelle pour le praticien
Luc Lorgis, Caroline Brulliard
Olivier Hachet, Philippe Buffet
Isabelle L’Huillier
Aurélie Gudjoncik, Yves Cottin
CHU, Dijon
Indications de l’angioplastie
ad hoc : que disent
les recommandations ?
L'angioplastie ad hoc (dans la continuité immédiate de la
coronarographie diagnostique) est largement pratiquée ; elle
a des avantages indéniables, notamment en termes de
confort pour le patient, de réduction du risque de saignement au point de ponction ou de coût. Pour autant, elle ne
doit pas être considérée comme la stratégie par défaut et
doit faire l'objet de protocoles de prise en charge spécifiques
de certaines situations anatomiques et cliniques, définis au
sein de chaque établissement.
Nous envisagerons dans cet article les différentes situations
cliniques rencontrées : l’infarctus avec sus-décalage du segment ST, l’infarctus sans sus-décalage du segment ST, puis enfin
la cardiopathie ischémique stable, le tout avec un penchant
européen en nous focalisant sur les recommandations ESC.
Infarctus avec sus-décalage du segment ST
Le contexte dans lequel l’angioplastie immédiate a montré
son efficacité en améliorant le pronostic des patients, mais
aussi en diminuant la taille de l’infarctus, est celui de l’infarctus avec sus-décalage du segment ST.
L’angioplastie primaire avec réalisation, dans un contexte
pharmacologique optimisé, de l’implantation d’un stent ne
fait plus débat.
Cette stratégie est indiquée chez tous les patients pris en
charge dans les 12 premières heures après le début des symptômes, voire après 12 heures si les patients gardent une douleur ou des modifications électriques.
Les nouvelles recommandations éditées par l’European Society
of Cardiology (1) mettent maintenant en avant l’utilisation préférentielle de stents à élution médicamenteuse en l’absence
de contre-indication et en limitant le geste de revascularisation au vaisseau coupable chez les patients ne présentant pas
d’état de choc cardiogénique.
Autre point important souligné par ces recommandations :
l’utilisation de l’approche radiale qui contribue à diminuer fortement les complications hémorragiques au point d’accès, ainsi
que l’emploi de molécules antithrombotiques et antiagrégantes plaquettaires lors de ces procédures.
Il est à noter que chez les patients pris en charge tardivement
après 24 heures, et stables cliniquement, un bilan à la recherche
d’une viabilité doit être conduit en première intention et préalablement à toute discussion de revascularisation. Enfin, en
raison de résultats cliniques discordants, le niveau de recommandation reste faible pour l’utilisation de système de
thrombo-aspiration systématique. On regardera avec intérêt
les résultats de l’étude MIMI (Minimal Intervention for Myocardial Infarction), dont l’objectif est de comparer l’effet sur
l’atteinte microcirculatoire de deux stratégies d’angioplastie
primaire à la phase aiguë du STEMI :
22
la technique d’implantation immédiate du stent et une
technique en 2 étapes avec thrombo-aspiration immédiate et
implantation différée du stent.
Les syndromes coronaires sans sus-décalage
du segment ST (2)
Le délai optimal de prise en charge, en particulier de la coronarographie, reste, bien entendu, pondéré par le niveau de risque
du patient établi selon le score GRACE. On sait maintenant que
l’imprégnation par les molécules bloquant le récepteur GPIIb/IIIa
chez les patients à haut risque doit être le plus précoce possible
afin d’obtenir les meilleurs résultats sur l’obstruction microvasculaire et la taille de l’infarctus, avec une mention spéciale pour
les patients diabétiques.
Chez les patients victimes d’un syndrome coronaire, mais sans
sus-décalage du segment ST, environ un tiers se présentent avec
une lésion monotronculaire, tout à fait accessible à un geste de
revascularisation ad hoc.
Dans le contexte d’une prise en charge invasive avec stenting,
il est aussi recommandé d’utiliser les nouvelles plates-formes de
stent actif dont l’efficacité, mais surtout la sécurité, semble maintenant établie. Toutefois, l’évaluation préalable du risque hémorragique du patient reste primordiale, d’autant que l’association
par double antiagrégation plaquettaire sera prolongée.
Dans le cas d’atteintes multitronculaires, la décision est parfois plus difficile et doit être pondérée par les comorbidités
du patient, la présentation clinique ainsi que la disponibilité
du plateau technique.
Il est recommandé, pour chaque centre de cardiologie interventionnelle, d’avoir déterminé, après discussion entre l’équipe
d’angioplasticiens et les chirurgiens cardiaques, un score
Syntax seuil. En dessous de ce seuil, l’angioplastie même multiple peut être recommandée, alors qu’au-delà une stratégie
hybride (combinant angioplastie + pontage) ou une prise en
charge uniquement chirurgicale doit être recommandée.
Enfin, notons le cas particulier des patients présentant une
artère coupable avec un flux TIMI II et une charge thrombotique importante : la question d’une prise en charge miniinvasive ou d’une imprégnation prolongée d’anti-GPIIb/IIIa
préalable à la mise en place du stent, précédée ou non d’une
thrombectomie, reste à évaluer.
La maladie coronaire stable
Depuis les recommandations conjointes de l’European
Society of Cardiology et de l’European Association for Cardio-Thoracic Surgery (3) réunies sur un modèle d’équipe
médico-chirurgicale, l’angioplastie ad hoc a tout simplement
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
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Page 23
avant cathétérisme chez les patients symptomatiques ou
non à la recherche d’un substrat ischémique intéressant
au moins 10 à 15% du ventricule gauche.
Dès lors que l’ischémie est documentée, si une lésion coronaire > 50% est mise en évidence surtout dans le territoire
ischémique, point de débat : stentons !
Dans le cas particulier du tronc commun, l’angioplastie reçoit
une recommandation de niveau IIa B ou IIb B (Tableau 2).
Chez les patients adressés d’emblée en salle de cathétérisme
sans aucune épreuve fonctionnelle préalable (même s’il s’agit
d’un effectif faible), ou encore chez le pluritronculaire, l’utilisation de la mesure de la réserve coronaire (FFR : Fractional
Flow Reserve) est recommandée et a démontré son intérêt en
améliorant les événements, ainsi qu’en diminuant l’utilisation
du stenting dans 2 études : DEFER (5) et FAME I (6).
Toutefois, aujourd’hui, la décision de recourir à l’angioplastie
est (encore) généralement prise suivant l’apparence des lésions
à l’angiographie, sans utiliser de critère de pression comme la
FFR. Or, cette dernière détecte la présence d’une ischémie impossible à évaluer à partir des caractéristiques initiales des patients
et des données visuelles. Elle permet donc de poser formellement une indication d’angioplastie.
De ce point de vue, les résultats définitifs de l’étude FAME II (7)
(FFR-Guided Percutaneous Coronary Intervention Plus Optimal
Medical Therapy vs. Optimal Medical Therapy Alone in Patients
with Stable Coronary Artery Disease), présentés à l’ESC 2012 et
publiés récemment dans le New England Journal of Medicine,
enfoncent le clou et encouragent la mesure de la réserve coronaire déterminée par l’utilisation d’un guide de pression endocoronaire pour détecter une ischémie et décider de réaliser une
angioplastie chez le coronarien stable.
De Bruyne, et al. ont mené cette étude dans 28 centres européens et nord-américains : 1 220 patients (sur les 1 632 prévus), tous des coronariens stables programmés pour recevoir un stent actif sur une, deux ou trois lésions, ont été
recrutés, avec un suivi à 2 ans.
Les patients qui présentaient au moins une sténose avec FFR
< 0,8 (n = 888) ont été randomisés pour recevoir une prise
en charge par angioplastie et un traitement médical optimal ou un traitement médical optimal seul. Ceux qui pré-
Indications potentielles des angioplasties
ad hoc versus revascularisation
Angioplastie ad hoc
Patients hémodynamiquement instables
(y compris choc cardiogénique)
Lésion responsable de STEMI et NSTE-SCA
Patient stable à faible risque avec atteinte mono- ou bitronculaire
(hors IVA proximale) et de morphologie favorable
Première resténose
Coronarographie et revascularisation en 2 temps
Lésions à haut risque
Insuffisance cardiaque chronique
Insuffisance rénale (clairance de la créatinine < 60 ml/min)
si le volume total contraste exigé est > 4 ml/kg
Patients stables avec lésions multitronculaires impliquant l’IVA
Patients stables avec lésions ostiales ou complexes de l’IVA proximale
Tout motif suggérant un risque plus élevé d’une angioplastie ad hoc
Tableau 1.
disparu des recommandations. Publiées après l’étude pivot
SYNTAX (4), elles permettent de mieux comprendre l’articulation entre angioplastie et chirurgie lors de la prise en charge
des coronariens stables, qui, doit-on le rappeler, n’ont comme
seul bénéfice que d’être améliorés d’un point de vue fonctionnel, plus rarement du point de vue de la morbi-mortalité.
La disparition de l’angioplastie ad hoc dans ces recommandations souligne qu’il est préférable de se donner le temps
de la réflexion avant de prendre une décision thérapeutique
(Tableau 1), bien que les recommandations sur la prise en
charge de la revascularisation myocardique, publiées par
l’European Heart Journal en 2010, insistent sur l’évaluation
1 ou 2
vaisseaux ; IVA non
proximale
1 ou 2
vaisseaux ; IVA
proximale
3 vaisseaux ; lésions
simples, accessibles
à l’angioplastie, score
Syntax ≤ 22
3 vaisseaux ; lésions
complexes non
entièrement accessibles à l’angioplastie,
score Syntax
> 22
TC
(isolé ou + 1 vaisseau,
lésion ostiale)
TC
(isolé ou +
1 vaisseau,
lésion distale ou
bifurc.)
TC
+ 2/3 vaisseaux,
score Syntax ≤ 32
TC
+ 2/3 vaisseaux,
score Syntax > 32
Indication de la chirurgie versus l’angioplastie chez les patients stables, dont les lésions
relèvent des 2 procédures et présentant un faible risque chirurgical
En faveur de
la chirurgie
IIb C
IA
IA
IA
IA
IA
IA
IA
En faveur de
l’angioplastie
IC
IIa B
IIa B
IIIA
IIa B
IIb B
IIb B
III B
Tableau 2.
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
23
interventionnelle_Lorgis
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Cardio interventionnelle pour le praticien
FAME II : résultats sur l’IDM et la mortalité toute cause
Infarctus du myocarde
Décès toute cause
35
30
Incidence cumulée (%)
Incidence cumulée (%)
35
Angioplastie vs traitement médical
HR 1,05 (IC 95% [0,51-2,19] ; p = 0,89
25
Angioplastie vs registre
HR 1,61 (IC 95% [0,48-5,37] ; p = 0,41
20
Traitement médical vs registre
HR 1,65 (IC 95% [0,50-5,47] ; p = 0,41
15
10
5
30
Angioplastie vs traitement médical
HR 0,33 (IC 95% [0,03-3,17] ; p = 0,31
25
Angioplastie vs registre
HR 1,12 (IC 95% [0,05-27,33] ; p = 0,54
20
Traitement médical vs registre
HR 2,66 (IC 95% [0,14-51,18] ; p = 0,30
15
10
5
0
0
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10 11 12
0
1
2
3
Mois après la randomisation
sentaient une FFR > 0,8 (inclus dans un registre) ont été traités par traitement médical optimal (n = 332).
Une majorité des patients était classée en stade CCS1 ou 2
et avait une atteinte monotronculaire, seuls 3% présentaient
une atteinte multitronculaire.
L’étude a été interrompue prématurément au bout de 7 mois
de suivi, en raison d’une différence hautement significative
sur le critère primaire de jugement (critère composite associant : mortalité toute cause, survenue d’un IDM, hospitalisation non programmée avec revascularisation en urgence)
dans le groupe FFR + angioplastie, et essentiellement sur le
critère revascularisation urgente (49 patients dans le groupe
traitement médical versus 7 patients dans le groupe FFR +
traitement médical ; p < 0,001).
On peut noter que pour les critères durs (mortalité ou infarctus
du myocarde), il n’existe pas de différence entre les 2 groupes
(Figure), et on ne peut que regretter l’interruption prématurée
de ce travail qui était une occasion inespérée de démontrer un
bénéfice sur des critères autres que fonctionnels.
Petit regret supplémentaire, l’indication de revascularisation urgente ne nécessitait pas la recherche d’un substrat
ischémique ou la positivité de biomarqueurs et était quasiment basée sur l’appréciation clinique des praticiens, ce
qui me paraît pour le moins un critère subjectif.
Enfin, et cela me semble le point le plus important, seule
une faible proportion de patients (16%) ont bénéficié d’explorations en amont authentifiant un retentissement ischémique sur le ventricule gauche, comme cela avait pu être
fait dans les études COURAGE (8) ou BARI 2D (9).
Bien qu’incomplets, les résultats de FAME II rassurent l’angioplasticien : FAME I a démontré qu’il ne faut pas revasculariser
les lésions n’abaissant pas la réserve coronaire, et FAME II qu’il
faut dilater les artères quand la FFR < 0,8.
Néanmoins il s’agit d’une procédure invasive pouvant être compliquée de dissection coronaire ou d’occlusion par déstabilisation de plaques.
Enfin, c’est un examen qui reste coûteux et, pour l’heure,
non remboursé par les autorités de tutelle et qui doit donc
24
4
5
6
7
8
9
10 11 12
Mois après la randomisation
être pris en charge par le patient ou par la structure dans
laquelle il est accueilli.
On l’aura compris, dans le contexte de la maladie coronaire
stable, l’angioplastie ad hoc n’a quasiment aucun intérêt en
dehors des patients chez lesquels l’exploration non invasive
est impossible, et ils ne sont pas nombreux.
Il reste aux coronarographistes à scruter les résultats de
l’étude clinique ISCHEMIA, actuellement en cours, qui teste
l’intérêt sur le long terme de la supériorité de la revascularisation + traitement médical versus traitement médical seul,
chez les patients coronariens stables porteurs d’une ischémie myocardique modérée à sévère, évaluée par les techniques non invasives.
■
Pour en savoir plus
1. ESC Guidelines for the management of acute myocardial infarction in
patients presenting with ST-segment elevation. The Task Force on the
management of ST-segment elevation acute myocardial infarction
of the European Society of Cardiology (ESC). European Heart Journal
2012.
2. ESC Guidelines for the management of acute coronary syndromes in
patients presenting without persistent ST-segment elevation. European Heart Journal 2011; 32 : 2999-3054.
3. Guidelines on myocardial revascularization. The Task Force on Myocardial Revascularization of the European Society of Cardiology (ESC) and
the European Association for Cardio-Thoracic Surgery (EACTS).
European Heart Journal 2010; 31 : 2501-55.
4. Serruys PW, Morice MC, Kappetein AP, Colombo A, Holmes DR,
Mack MJ, Ståhle E, Feldman TE, van den Brand M, Bass EJ, Van Dyck N,
Leadley K, Dawkins KD, Mohr FW; SYNTAX Investigators. Percutaneous
coronary intervention versus coronary-artery bypass grafting for severe
coronary artery disease. N Engl J Med 2009 ; 360(10) : 961-72.
Pour toute correspondance avec l’auteur
[email protected]
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
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Cardio interventionnelle pour le praticien
Jean-Louis Georges
Service de cardiologie,
Centre hospitalier de Versailles,
hôpital André-Mignot,
Le Chesnay
La voie radiale expose-t-elle
vraiment le patient et l’opérateur à
des doses de rayons supérieures ?
Proposée depuis le début des années 1990, la voie artérielle
radiale est devenue la voie d’abord prédominante en Europe
et en France pour réaliser les coronarographies et les interventions coronaires percutanées (ICP). Ses avantages par rapport à la voie fémorale sont une immobilisation réduite du
patient et une diminution du risque hémorragique au point
de ponction.
La voie radiale vient d’entrer dans les recommandations de
l’ESC 2012 pour les procédures réalisées en phase aiguë d’infarctus (classe IIa, niveau de preuve B), grâce à deux études,
RIVAL et RIFLE STEACS, qui ont montré qu’elle est associée à
une réduction de la morbi-mortalité. Cependant, pour beaucoup de cardiologues, la voie radiale reste associée à des doses
de rayons X (RX) plus élevées, tant pour le patient que pour
l’opérateur. Qu’en est-il réellement ?
La voie radiale expose-t-elle le patient
à une irradiation supérieure ?
➜ Les données de la littérature
Depuis 1996, une vingtaine d’études observationnelles ou
randomisées ont comparé la voie radiale et la voie fémorale
et ont inclus une estimation des doses reçues par le patient.
Le Tableau 1 résume les résultats des études ayant comparé
le Produit Dose.Surface (PDS) exprimé en Gy.cm² (1). (Les lecteurs peu familiers des paramètres de doses et des valeurs
habituelles sont invités à se reporter à l’encadré « Les mesures
d’exposition : les 10 points clés ».) Pour faciliter la lecture, le
tableau indique la différence absolue « Radiale-Fémorale »
Dose de RX délivrée au patient (PDS en Gy.cm²) en cardiologie interventionnelle coronaire :
comparaison de la voie radiale et de la voie fémorale
Etude
Randomisée
Fémorale
n
PDS*
n
Radiale
PDS*
p
Coronarographie
Différence absolue (R-F)
Δ PDS
Bornes de l’IC à 95%
Sandborg, 2004
NR
40
38 ± 22
36
51 ± 25
< 0,01
13
2,4 – 23,6
Lange, 2006
R
103
13 ± 8
92
15 ± 8
< 0,05
2
0,2 – 4,2
Brasselet, 2008
NR
98
38 [10-130]
150
59 [15-334]
< 0,0001
21
15,9 – 26,1
Achenbach, 2008
R
155
32 ± 18,9
152
37,4 ± 23,7
NS
5
- 0,2 – 9,8
Brueck, 2009
R
494
38,2 [20,4-48,5]
511
41,9 [22,6-52,2]
0,03
3,7
3,1 – 4,3
RAY'ACT, 2011 soumis
NR
21 726
26,8 [15,1-44,5]
< 0,0001
- 1,3
- 2,1 – - 0,5
9 055 28,1 [16,4-46,9]
Angioplastie coronaire
Larrazet, 2003
NR
184
138 [93-197]
218
175 [128-246]
< 0,001
37
27,2 – 46,8
Larrazet, 2003
NR
263
185 ± 117
328
242 ± 137
< 0,0001
57
36,5 – 77,5
Philippe, 2004
NR
75
151 ± 86
87
229 ± 133
0,01
78
43,9 – 112,1
Sandborg, 2004
NR
42
47 ± 34
24
75 ± 47
< 0,05
28
6,6 – 49,4
Geijer, 2004
NR
114
70,5 ± 56,8
55
69,8 ± 54,8
NS
-1
- 18,9 – 16,9
Lange, 2006
R
48
46 ± 26
54
51 ± 29
NS
-5
- 16,3 – 6,3
Brasselet, 2008
NR
83
103 [23-383]
90
125 [21-398]
< 0,001
22
8,6 – 35,4
Hetherington, 2009
NR
480
32 [20-49]
571
25 [15-37]
< 0,001
-7
- 8,2 – - 5,8
RAY'ACT, 2011 soumis
NR
17 134
55,6 [32,1-92,1]
< 0,0001
- 3,8
- 5,7 – - 1,9
7 863 59,4 [34,6-99,9]
* PDS en Gy.cm² présentés, selon les études, soit par la médiane avec les quartiles entre crochets, soit par la moyenne ± l'écart type. Les PDS n'ayant pas une
distribution normale, les moyennes sont faussement majorées par rapport aux médianes, les écarts types sont très élevés, ne permettant pas une estimation
correcte des variations autour de la moyenne. Les bornes de l'IC 95% de la différence absolue de PDS sont donc données à titre indicatif.
Tableau 1.
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Les mesures de l’exposition : les 10 points clés
1. La dose de rayonnement reçue par un patient peut
être exprimée en gray (Gy) ou en sievert (Sv).
2. Le gray mesure la « dose absorbée » localement (1 Gy
correspond à l’absorption d’une énergie de 1 J/kg de
tissu). Les doses directement reçues par le patient, dites
doses à la peau, s’expriment en Gy, et il existe un risque
de brûlure cutanée ou de radiodermite pour des doses
cumulatives > 2 ou 3 Gy (2).
3. La vraie dose à la peau du patient est rarement mesurée, car elle nécessite des films dosimétriques appliqués sur la peau du patient dans la zone recevant les
rayons qui varie avec les arceaux mobiles.
4. Les appareils récents de cardiologie interventionnelle
fournissent 2 chiffres d’exposition globale : le PDS (produit dose.surface) et la dose cumulée (ou Air Kerma total).
5. Le PDS exprimé en Gy.cm² est une estimation de la dose
totale émise et reçue par le patient. Une coronarographie délivre en médiane 30 Gy.cm² et une angioplastie coronaire 60 Gy.cm².
6. La dose cumulée donnée en Gy ou en mGy est calculée par les systèmes à capteur plan pour un point situé
15 cm sous l’isocentre, et est censée estimer la dose à
la peau (sans l’atténuation de la table et du matelas).
des PDS médians ou moyens (une différence > 0 est en faveur
de la fémorale et < 0 en faveur de la radiale).
Pour la coronarographie, toutes les études publiées indiquent des durées de scopie ou des doses de radiations supérieures pour la voie radiale, la différence tendant à se réduire
pour les études plus récentes.
Pour l’angioplastie coronaire, les résultats sont plus discordants. Les études les plus anciennes montrent un PDS supérieur avec la voie radiale. Deux études plus récentes, dont
une randomisée (2), ne montrent pas de différence significative. L’étude la plus récente concernant l’angioplastie primaire de l’infarctus aigu montre une différence significative, mais en faveur de la voie radiale ! Les 5 études mettant
en évidence une exposition supérieure pour la voie radiale
ont en commun leur relative ancienneté : 3 sont issues de la
même équipe et rapportent des niveaux de PDS très élevés,
largement supérieurs aux valeurs de référence, une étude
est basée sur de très petits effectifs. L’étude de Brasselet (3)
est plus récente et détaillée, mais souffre de nombreuses
limites : non randomisée, effectif modeste, nombreuses
exclusions (syndromes coronaires aigus, contrôle de pontages), niveau relativement élevé de l’exposition, et centre
de moyen volume pour la voie radiale.
A ces études sur le PDS, il faut ajouter une étude observationnelle récente, montrant elle aussi un excès de dose cumulée de 23% pour la voie radiale, constante pour les différents opérateurs (4). D’après les données publiées, il existe
donc une tendance pour une irradiation supérieure par voie
radiale dans les premières études comparatives, non retrouCONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
7. Deux autres paramètres sont recommandés pour quantifier l’exposition globale et la comparer à des valeurs
de référence : la durée de radioscopie (en minutes) et le
nombre d’images enregistrées en graphie.
8. Le sievert (Sv) est une unité de « dose efficace » qui
tient compte de la quantité d’énergie délivrée, mais
aussi de la sensibilité des différents tissus aux rayonnements ionisants.
L’exposition en Sv ou plutôt milliSievert (mSv) représente mieux le risque aléatoire, sans effet de seuil,
des rayons ionisants : risque de mutations et de cancers radio-induits.
9. Les doses reçues par le personnel (dosimétrie) sont
mesurées en mSv, la limite à ne pas dépasser est fixée
à 20 mSv/an. Pour donner un ordre de grandeur, la
radioactivité naturelle en France est en moyenne
d’environ 2,4 mSv/an.
10. Il existe une relation entre l’exposition mesurée en
Gy.cm2 et celle mesurée en mSv. Pour la coronarographie et l’angioplastie coronaire, compte tenu des
organes traversés par les RX, l’équation habituellement proposée est : équivalent de dose efficace
(en mSv) = 0,2 x PDS (en Gy.cm2).
vée dans les essais randomisés, et qui semble s’estomper dans
les études les plus récentes, et même s’inverser dans l’expérience de centres à haut volume pour la radiale. Toutes les
comparaisons sont issues d’études monocentriques, et
aucune ne mentionne l’ancienneté du passage du centre à
la voie radiale au moment de l’analyse.
➜ Les données françaises de l’enquête RAY’ACT
L’enquête RAY’ACT est une enquête multicentrique française réalisée en 2011 sous l’égide du Collège national des
cardiologues des hôpitaux dans 48 hôpitaux généraux, ESPIC
et hôpitaux militaires. Ses résultats portent sur 60 000 actes
consécutifs (33 000 coronarographies, 27 000 ICP) réalisés
en 2010, sans exclusion, représentatifs de la pratique quotidienne. Ils ont été présentés au Congrès de l’ESC 2012 (5) et
sont en cours de publication. Les comparaisons brutes montrent que les actes réalisés par voie radiale en France sont
en moyenne moins irradiants que ceux réalisés par voie
fémorale (Tableau 1). Après ajustement sur l’âge, l’IMC, etc.,
la durée de scopie et le PDS restent inférieurs pour la voie
radiale pour les ICP, et ne diffèrent pas significativement
entre les deux voies pour la coronarographie.
➜ L’effet volume pour la voie radiale
Le caractère multicentrique de l’enquête permet d’approfondir l’analyse de ces résultats discordants avec une partie
des données publiées. Par exemple, si on classe les centres en
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Cardio interventionnelle pour le praticien
Etude RAY’ACT : différences entre voie radiale
et fémorale des doses de RX au patient lors
des interventions coronaires percutanées
Coronarographie
Angioplastie coronaire
80
250
Passage à la
voie radiale
Plan d'optimisation Changement
des doses RX
salle Coro
Voie fémorale
70
PDS en Gy.cm2
Evolution des doses émises (PDS) pour les
interventions coronaires percutanées réalisées
entre 2002 et 2011 au CH de Versailles
200
Voie radiale
Médiane
25e p
75e p
Moyenne
60
150
50
Niveau de
référence
100
40
30
50
20
< 50% 59-79%
radiale radiale
> 80%
radiale
< 50% 59-79%
radiale radiale
> 80%
radiale
Pourcentage d'actes réalisés par voie radiale dans le centre
Figure 1.
3 groupes selon le pourcentage d’actes réalisés par voie
radiale, on s’aperçoit que les centres à faible volume de radiale
(< 50%) ont effectivement une irradiation supérieure avec
cette voie, alors que c’est l’inverse pour les centres à moyen
(50-70%) ou haut volume (> 80%) de radiale (Figure 1). De
plus, il existe une nette tendance, moins attendue, entre le
niveau global d’irradiation toutes voies confondues et la
voie dominante, les centres à haut volume de radiale délivrant en moyenne des doses de RX beaucoup plus basses,
tant pour la coronarographie que pour les ICP. Comme dans
toute étude observationnelle, des biais sont possibles. Par
exemple, on peut imaginer que dans un centre préférant en
routine la voie fémorale, on réserve la voie radiale aux
patients très obèses ou aux patients artéritiques polyartériels, ce qui pourra majorer le PDS des procédures par voie
radiale. A l’inverse, un centre à haut volume de radiale réservera la voie fémorale aux chocs cardiogéniques, aux échecs
de voie radiale, donc à des procédures potentiellement plus
longues ou complexes et plus irradiantes. Cependant, étant
donné le volume d’actes analysé dans RAY’ACT, il est probable que l’interaction observée entre la différence d’exposition radiale-fémorale et le volume d’actes réalisés par voie
radiale ait d’autres explications, comme la courbe d’apprentissage de la voie radiale.
L’expérience de notre centre va dans ce sens. Depuis fin 2001,
nous suivons les paramètres d’exposition du patient aux
radiations pour toutes les procédures consécutives de coronarographie et d’ICP, sans exclusion (6,7). L’évolution sur les
10 dernières années des PDS des angioplasties coronaires
est représentée sur la Figure 2. La période 2002-2005 est
marquée par une augmentation considérable (+ 50%) des
doses émises, qui débute exactement lors du passage à la
voie radiale (juillet 2002). Ce n’est qu’au bout de 3 ans que
les PDS regagnent le niveau du 1er semestre 2002, lorsque la
voie fémorale était quasi exclusive. Il semble réaliste d’im-
28
0
200S21 200S22 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Figure 2. Effet de la courbe d’apprentissage de la voie radiale
et du programme d’optimisation des doses.
puter l’augmentation transitoire des PDS à la seule courbe
d’apprentissage de la voie radiale droite, aucune autre modification de pratique, d’équipement ou d’opérateurs n’ayant
été enregistrée dans cette période.
La deuxième période (2006-2007) montre l’effet spectaculaire
d’un programme simple de réduction des doses, dont
les modalités ont été publiées (8) (Figure 3) et sont rappelées
dans l’encadré ci-dessous. La dernière baisse de PDS (20082009) correspond au changement d’équipement radiologique
qui a permis, entre autres, de réduire les flux d’images en graphie de 15 images/sec à 7,5 images/sec. Durant ces 10 ans, le
pourcentage de voie radiale n’a cessé d’augmenter, se stabilisant à 90%, et les différences de doses de RX entre la voie
radiale et fémorale se sont inversées. Il est donc tout à fait
possible de réaliser l’ensemble de son activité de cardiologie
interventionnelle coronaire en privilégiant la voie radiale et
en exposant le patient à des doses de RX très faibles, 5 à
10 fois inférieures aux valeurs habituelles de référence (9).
Mesures d’optimisation des doses au patient mises
en place au CH de Versailles depuis janvier 2006
1. Formation à la radioprotection pour les opérateurs
et les IDE
2. Recommandations :
a. Faibles flux de RX en scopie (en 2006 : 6,25 images/sec; depuis
2009 7,5 images/sec) et graphie (en 2006 : 12,5 images/sec;
depuis 2009 7,5 images/sec)
b. Champ large de 23 cm
c. Collimation maximale
d. Distances tube/patient/détecteur optimisées
e. Pas de ventriculographie systématique
(nombre de séquences, angulation des incidences laissées libres)
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Evolution des différences de doses émises
(PDS) par voie radiale et fémorale
au CH de Versailles
Coronarographie
ICP
160
p < 0,001
Fémorale
PDS en Gy.cm2
140
Radiale
120
NS
100
p < 0,001
80
60
p = 0,05
NS
40
p = 0,02
20
0
l
Tota 02-2005 06-2007
20
20
l
Tota 02-2005 06-2007
20
20
Figure 3. L’excès de dose pour la voie radiale n’est observé que
pendant la phase d’apprentissage, se réduit après mise en
place du programme d’optimisation des doses, puis s’inverse.
La voie radiale expose-t-elle l’opérateur
à une irradiation supérieure ?
Les 3 études, dont une randomisée, qui ont comparé de
façon spécifique l’exposition des opérateurs selon la voie
d’abord sont unanimes (Tableau 2) : l’exposition de l’opéra-
teur mesurée par dosimétrie est environ le double lorsque
la coronarographie est réalisée par voie radiale par rapport
à la voie fémorale, et multipliée par 1,5 dans le cas des ICP.
Comment expliquer cette différence ?
Les durées de scopie ou de PDS supérieures par voie radiale
n’expliquent pas à elles seules la surexposition de l’opérateur observée dans les études comparatives. Si on compare les études de Lange et de Brasselet (2, 3), on voit qu’il n’y
a pas de parallélisme entre l’exposition globale (PDS) et celle
de l’opérateur.
A niveau de protection individuelle égal, l’analyse par opérateur ne montre pas non plus de parfaite concordance
entre la dose totale et la dose reçue par l’opérateur (3). Toutefois, quel que soit le niveau absolu d’exposition pour
l’opérateur, la différence radiale et fémorale reste
constante. Est-ce parce que l’opérateur est plus proche de
la source de RX lors de la mise en place et de la manipulation des guides et des sondes par voie radiale ? Si c’était
le cas, la différence radiale-fémorale serait plus importante pour les ICP (l’opérateur est proche de la source dans
toutes les phases irradiantes : mise en place du cathéterguide, franchissement de la sténose, mise en place du ballon ou du stent, etc.) que pour les coronarographies (l’opérateur n’est proche de la source que durant le
positionnement des sondes en scopie et peut se reculer
pour les acquisitions en graphie), alors que c’est l’inverse
qui est observé.
Quoi qu’il en soit, il paraît capital de mettre en œuvre toutes
les mesures de radioprotection, pour le patient et l’opérateur, lorsqu’on choisit de travailler par voie radiale.
Exposition des opérateurs lors de coronarographies ou d’interventions coronaires percutanées
réalisées par voie radiale ou fémorale
Auteur
Randomisée
Acte
Exposition
opérateur
Voie radiale
Voie fémorale
p
Coronarographie diagnostique
Lange HW,
Catheter Cardiovasc
Interv 2006
R
Coronarographie
diagnostique
Dosimétrie en μSv
64 ± 55
32 ± 39
< 0,001
Brasselet C,
Eur Heart J 2008
NR
Coronarographie
diagnostique
Dosimétrie en μSv
29 [1-195]
13 [1-164]
< 0,0001
Mann JT, J Invasive
Cardiol 1996
NR
ICP élective
Dosimétrie
en mrem/cas*
13,5 ± 2,1
8,8 ± 1,3
< 0,01
Lange HW, Catheter
Cardiovasc Interv 2006
R
ICP élective
Dosimétrie en μSv
166 ± 188
110 ± 115
< 0,05
Brasselet C,
Eur Heart J 2008
NR
Coronarographie +
ICP ad hoc
Dosimétrie en μSv
69 [4-531
41 [2-360]
0,02
Angioplastie coronaire
ICP : intervention coronaire percutanée. R/NR : étude randomisée/non randomisée. Les paramètres d'exposition sont exprimés en moyenne ± l'écart type
ou en médiane [quartiles]. * Les rem ont été remplacés par les sieverts dans le système international : 1 rem = 10 mSv, donc 1 mrem = 10 µSv.
Tableau 2.
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Cardio interventionnelle pour le praticien
Evolution de la dosimétrie opérationnelle des opérateurs du CH de Versailles associée
à la voie radiale quasi exclusive
Δ
2008
2009
2010
Coro
653
703
782
ICP
360
451
477
+ 25%
Total actes
1 013
1 154
1 259
+ 20%
% radiale
89
90
90
Dosimétrie sous tablier
Dose annuelle totale
des 4 op. principaux
Hp (0,07) μSv
452
183
125
Hp (10) μSv
349
118
84
Dose annuelle moyenne
par opérateur
Hp (0,07) μSv
113
46
31
- 72%
Hp (10) μSv
87
30
21
- 76%
Dose moyenne
opérateur par acte
Hp (0,07) μSv
0,45
0,16
0,10
Hp (10) μSv
0,34
0,10
0,07
Tableau 3.
L’effet des mesures de radioprotection
sur l’exposition par voie radiale
➜ Réduire les doses émises
Les mesures d’optimisation des doses totales émises, qui
bénéficient à la fois au patient et au personnel, et les mesures
individuelles de protection du personnel sont d’égale importance. Les nombreuses techniques de réduction des doses,
rappelées dans les formations obligatoires des cardiologues
interventionnels à la radioprotection, sont détaillées dans
une revue récente (10). Elles sont peu coûteuses, peu contraignantes, et ont des résultats spectaculaires tout en préservant la qualité diagnostique de l’examen.
➜ Mieux protéger l’opérateur
Les mesures individuelles de radioprotection du personnel sont
aussi capitales, et doivent être optimisées lorsqu’on travaille par
voie radiale. Les différences observées entre les études de Lange
et de Brasselet (2, 3) illustrent l’effet protecteur de ces mesures
(Tableau 2). Dans la première, les PDS des ICP sont modestes (de
l’ordre de 50 Gy.cm2) et les doses reçues par l’opérateur sont élevées (de 110 à 166 μSv/examen), alors que c’est l’inverse dans
l’étude de Brasselet (PDS élevés > 100 Gy.cm2, doses reçues par
l’opérateur modérées, entre 41 et 69 μSv). L’explication réside
certainement dans l’utilisation par l’équipe de Brasselet de dispositifs de radioprotection plus efficaces pour l’opérateur. Sontils pour autant optimaux, comme le titre de l’article le suggère ?
Une vitre plombée haute, un écran plombé bas (équivalents à
0,5 mm de plomb), un tablier de plomb, et des consignes pour
que l’opérateur se tienne le plus éloigné possible du tube à
RX paraissent un minimum.
Dans notre centre, on y ajoute systématiquement pour tous les
opérateurs le port d’un calot plombé, de lunettes plombées avec
verres latéraux (prévention de la cataracte radique), l’utilisation
systématique de prolongateurs de tubulure > 80 cm, et de façon
récente, d’un injecteur automatique et d’un deuxième écran
30
Ce qu’il faut retenir
➜ La voie radiale n’expose pas le patient ou l’opérateur
à des doses de radiations supérieures lorsque les opérateurs sont familiers avec cette voie ou dans les centres
à haut volume de radiale : « La voie radiale irradie moins
quand on la pratique beaucoup, et plus quand on la pratique peu ».
➜ La sur-irradiation existe transitoirement lors du passage de la voie fémorale prédominante à la voie radiale
prédominante, et il faut plusieurs mois pour que l’ensemble des opérateurs d’un centre maîtrise la technique
spécifique de la voie radiale et stabilise les durées de
scopie ou les doses de RX par cette voie.
➜ La différence d’irradiation entre voie fémorale et
radiale devient cliniquement négligeable lorsqu’un programme d’optimisation des doses est suivi.
➜ Les opérateurs utilisant la voie radiale sont susceptibles de recevoir des doses de RX supérieures lors des
coronarographies et surtout des angioplasties coronaires.
Ils doivent bénéficier de mesures de radioprotection
individuelles maximales.
protecteur sur roulettes, les commandes de la table étant situées
aux pieds du patient. Le résultat (Tableau 3) : il est possible d’utiliser quasi exclusivement la voie radiale droite avec des niveaux
d’exposition très bas pour les opérateurs, < 0,10 μSv par acte et
< 40 μSv par an (pour un seuil maximal toléré de 20 000 μSv), ce
qui est sans commune mesure avec ce qui est rapporté dans la
littérature.
■
Pour toute correspondance avec l’auteur
[email protected]
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
interventionnelle_Meneveau
Nicolas Meneveau
Pôle Cœur-Poumon,
hôpital Jean-Minjoz,
Besançon
19/10/12
15:56
Page 31
Prévention des complications
hémorragiques en angioplastie
Les progrès techniques et les avancées médicamenteuses
accomplis au cours de ces dernières années ont conduit à
améliorer de façon spectaculaire le pronostic des patients
soumis à une angioplastie coronaire, en particulier ceux pris
en charge dans le cadre d’un syndrome coronaire aigu.
L’efficacité accrue des antithrombotiques a permis de réduire
les événements cardiovasculaires ischémiques au prix d’une
majoration significative du risque hémorragique. Il est
aujourd’hui bien établi que ces complications hémorragiques
ont un impact pronostique majeur et justifient une prévention attentive.
de facteurs prédictifs de survenue d’une complication hémorragique au décours d’une procédure d’angioplastie. S’y associent un certain nombre de variables périprocédurales telles
que le recours aux anti-GPIIb/IIIa, une durée de procédure
≥ 1 heure, le retrait du désilet plus de 6 heures après la fin
de la procédure, la prise en charge du patient en unité de
soins intensifs ou la mise en place d’un ballon de contrepulsion intra-aortique. Des scores ont été développés pour
prédire le risque de survenue d’une complication hémorragique per- ou postangioplastie, limités toutefois aux procédures conduites par voie fémorale.
L’
Impact pronostique des complications
hémorragiques au décours de l’angioplastie
Incidence des complications hémorragiques
dans l’angioplastie
Le taux de complications hémorragiques varie en fonction
de la définition utilisée, du contexte clinique, mais également de la nature et de la posologie du traitement antithrombotique prescrit. Les données de la littérature font
état d’un taux de saignements variant entre 1 et 8% des procédures d’angioplastie. En moyenne, le chiffre de 2% d’accidents hémorragiques est le plus souvent rapporté. Ce taux
est toutefois probablement sous-estimé.
A titre d’exemple, le taux de complications hémorragiques
majeures dans STEEPLE était de 2% après angioplastie élective, mais de 5,4% et 6,6% après angioplastie conduite dans
le cadre d’un syndrome coronaire aigu ST- et ST+ dans les
études ACUITY et HORIZONS, respectivement. De la même
façon, l’avènement du prasugrel et du ticagrelor est associé
à une majoration de l’ordre de 20% des complications
hémorragiques majeures après angioplastie. A l’inverse, dans
l’étude REPLACE, la bivalirudine se distingue par une réduction des saignements de près de 40% comparée à l’association héparine non fractionnée-anti-GPIIb/IIIa, pour une efficacité antithrombotique équivalente.
L’âge avancé (≥ 75 ans), un poids corporel ≤ 60 kg, le sexe
féminin, un tabagisme actif, une hyperleucocytose, la présence d’une insuffisance rénale ou d’une anémie sont autant
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
La survenue d’une complication hémorragique au décours
de l’angioplastie est associée à une mortalité à 1 mois multipliée par 5, comme a pu le montrer l’analyse poolée des
données du registre OASIS, et des études OASIS 2 et CURE
(Figure 1). Le risque de décès est majoré au cours de l’hospitalisation, mais également à distance de celle-ci. Il existe
en effet une relation étroite et pérenne dans le temps entre
hémorragie hospitalière et mortalité à 1 an, chez les patients
Complications hémorragiques
et mortalité à 30 jours : analyse poolée
des données du registre OASIS
et des études OASIS 2 et CURE
14
Complications
hémorragiques
12
Evts cumulés (%)
évaluation de la fréquence et de l’impact pronostique
des saignements a longtemps été sous-estimée. Les multiples définitions utilisées d’une étude à l’autre ont rendu
difficile la comparaison du profil de sécurité des différentes
molécules antithrombotiques utilisées dans l’angioplastie.
Le recours à la définition BARC (Bleeding Academic Research
Consortium) a récemment standardisé ces événements hémorragiques afin d’homogénéiser l’analyse des futurs essais
conduits en pathologie cardiovasculaire (Tableau 1).
10
12,8%
HR = 5,37 [3,97-7,26]
8
6
4
Pas de complications
hémorragiques 2,5%
2
0
0
5
10
15
20
25
30
Jours
Figure 1.
31
interventionnelle_Meneveau
19/10/12
15:56
Page 32
Cardio interventionnelle pour le praticien
BARC 0
Pas de saignement
BARC 1
Saignement ne modifiant pas la prise en charge
médicale et pour lequel aucune action médicale
n'est entreprise mais qui peut induire des épisodes
d'arrêt des traitements par le patient sans consultation d'un professionnel de santé
BARC 2
Toute hémorragie manifeste ne répondant pas aux
définitions BARC de type 3, 4 et 5, mais à l'une des
trois caractéristiques suivantes :
- justifie un traitement médical non chirurgical par
un professionnel de santé
- conduit à une hospitalisation ou à une
surveillance accrue
- conduit à une évaluation médicale
BARC 3
- Type 3a
- Saignement extériorisé avec chute de
l'hémoglobine de 3 à 5 points (g/dl)
- Saignement extériorisé justifiant une transfusion
sanguine
- Type 3b
- Saignement extériorisé avec une chute
de l'hémoglobine ≥ 5 points
- Tamponnade
- Saignement nécessitant une hémostase
chirurgicale
- Saignement nécessitant l’administration d’amines
pressives intraveineuses
- Type 3c
- Hémorragie intracrânienne excluant les microhémorragies liées aux transformations
hémorragiques et incluant les hémorragies
méningées
- Hémorragie cérébro-méningée confirmée par
autopsie, imagerie ou ponction lombaire
- Hémorragie intra-oculaire compromettant la vision
BARC 4
Saignement en rapport avec un pontage aortocoronaire
- saignement intracrânien dans les 48 heures
postopératoires
- réintervention afin de contrôler l'hémostase
- transfusion ≥ 5 unités de sang total ou de
concentrés globulaires dans les 48 heures
postopératoires
- drainage thoracique ≥ 2 l dans les 24 heures
postopératoires
BARC 5
Saignement mortel
- Type 5a
Saignement mortel probable, non confirmé
par autopsie ou imagerie
- Type 5b
Saignement mortel confirmé par autopsie ou
imagerie
Tableau 1.
32
Saignements plus sévères se subdivisant en trois
sous-catégories
ayant un syndrome coronaire aigu pris en charge en angioplastie dans l’étude ACUITY (Figure 2). Si les hémorragies
les plus sévères sont associées à un risque de mortalité
plus élevé, il ne faut pas négliger l’impact pronostique des
saignements mineurs trop souvent sous-estimé.
Différents mécanismes interviennent dans le risque de surmortalité observé après saignement. L’arrêt intempestif du
traitement antithrombotique peut être responsable de
thromboses de stent et d’infarctus. La survenue d’un choc
hémorragique majore le risque d’ischémie myocardique,
alors que l’anémie et les transfusions sanguines sont à l’origine d’une réaction inflammatoire susceptible d’augmenter le risque de thrombose de stent par le biais de l’activation plaquettaire (Figure 3).
Comment prévenir les complications
hémorragiques de l’angioplastie ?
Prévenir les complications hémorragiques de l’angioplastie
est devenu un véritable enjeu thérapeutique. Pour y parvenir il convient de mettre en œuvre un certain nombre de
précautions.
➜ Eviter les surdosages…
En premier lieu les surdosages des différents traitements
antithrombotiques doivent être recherchés et évités. Ils sont
responsables d’approximativement 15% des complications
hémorragiques graves.
Les facteurs prédictifs de surdosage médicamenteux sont
les mêmes que ceux associés aux saignements eux-mêmes.
Les patients de sexe féminin, de faible poids, ceux souffrant
d’insuffisance rénale, de diabète ou d’insuffisance cardiaque
sont ainsi plus fréquemment exposés à une complication
hémorragique par le biais d’un surdosage médicamenteux.
ACUITY PCI : complications hémorragiques
et mortalité au long cours
10
9
8
7
6
5
4
3
2
1
0
* Log rank p < 0,0001
Complications
hémorragiques majeures
Mortalité (%)
Définitions BARC
7,7%*
5,4%*
Pas de complications
hémorragiques majeures
1,8%
0,8%
0
30 60 90 120 150 180 210 240 270 300 330 360 390
Jours
Figure 2.
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
interventionnelle_Meneveau
19/10/12
15:56
Page 33
Le fondaparinux, les héparines de bas poids moléculaire,
l’hirudine, l’argatroban, la bivalirudine et les anti-GPIIb/IIIa
ont tous une élimination essentiellement rénale et doivent
à ce titre ne pas être utilisés en cas d’insuffisance rénale
sévère (clairance de la créatinine < 30 ml/min), ou faire l’objet d’un ajustement posologique. Si l’héparine non fractionnée demeure l’anticoagulant de choix dans ce contexte, elle
est malgré tout associée à une majoration du risque hémorragique, proportionnelle à la dégradation de la fonction
rénale
➜ …et les changements d’anticoagulant
De la même façon, le changement d’anticoagulant est associé à un risque accru de saignement. Dans l’étude SYNERGY,
les patients avec syndrome coronaire aigu soumis à une
angioplastie étaient randomisés pour recevoir de l’héparine
non fractionnée ou de l’énoxaparine. Près de 75% d’entre
eux avaient reçu un traitement anticoagulant en amont de
la randomisation. Une majoration très nette des complications hémorragiques était observée chez les 8% de patients
contraints à un changement de traitement anticoagulant.
La règle est donc de s’abstenir de substituer un traitement
anticoagulant à un autre, particulièrement si ce changement
concerne l’héparine non fractionnée et les héparines de bas
poids moléculaire.
La durée du traitement anticoagulant doit par ailleurs être
la plus courte possible. A l’exception des situations à haut
risque thrombotique, les anticoagulants doivent être interrompus au décours de l’angioplastie.
➜ Privilégier les antithrombotiques les plus sûrs
d’utilisation
Le choix des agents antithrombotiques est également très
important et doit se porter sur les molécules dont l’efficacité et la sécurité d’emploi ont pu être établies à partir
d’études randomisées. L‘usage de bivalirudine est ainsi
recommandé dans l’angioplastie primaire (étude HORIZONS)
ou chez les patients avec syndrome coronaire aigu ST- soumis à angioplastie (étude ACUITY), en raison d’un taux de
complications hémorragiques inférieur à celui de l’association héparine non fractionnée-anti-GPIIb/IIIa.
Dans HORIZONS, la réduction du risque hémorragique était
associée à une baisse de la mortalité cardiovasculaire et globale à 1 mois, qui se maintenait à 3 ans. Le recours aux antiGPIIb/IIIa ne se conçoit qu’en situation d’urgence en salle de
cathétérisme et ne doit plus être envisagé en amont de la
coronarographie dans l’immense majorité des cas. Enfin,
l’administration d’un bolus IV unique d’énoxaparine s’est
montrée plus efficace dans l’angioplastie primaire que le
traitement conventionnel par héparine non fractionnée,
sans majoration des complications hémorragiques.
➜ Privilégier la voie radiale
Prévenir les complications liées à l’abord vasculaire est
essentiel, puisqu’elles sont responsables de deux tiers des
hémorragies survenant au décours de l’angioplastie. L’usage
de dispositifs de fermeture artérielle fémorale n’a pas fait
la preuve de son efficacité à réduire les complications
Impact pronostique des complications hémorragiques
Patient à risque
Complication hémorragique
Choc
Anémie
Ischémie
Transfusion
Inflammation
Arrêt intempestif
du traitement
antithrombotique
Thrombose de stent
Mortalité
Figure 3.
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
33
interventionnelle_Meneveau
19/10/12
15:57
Page 34
Cardio interventionnelle pour le praticien
ragiques gastro-intestinales constituent 50% des saignements spontanés de la phase aiguë des syndromes coronaires aigus et justifient la prescription d’inhibiteurs de la
pompe à protons (IPP) chez les patients aux antécédents
d’hémorragie digestive ou d’ulcère.
Ce qu’il faut retenir
➜ L’évaluation du risque hémorragique est un élément déterminant de la prise en charge des
patients soumis à une angioplastie.
➜ Le traitement antithrombotique doit être déterminé en fonction du niveau de risque hémorragique du patient et la posologie adaptée au poids
et à la clairance de la créatinine.
➜ Le remplacement d’un traitement anticoagulant
par un autre doit être évité, en particulier si ce
remplacement concerne l’héparine non fractionnée et l’énoxaparine.
➜ Le traitement antithrombotique doit être interrompu à l’issue de la procédure dans la majorité
des cas et l’usage des anti-GPIIb/IIIa ne pas être
instauré en amont de la salle de coronarographie.
➜ Enfin, l’abord radial doit être privilégié au détriment de l’abord fémoral, particulièrement pour
les patients pris en charge pour un infarctus.
➜ Le problème du traitement concomitant
par les anticoagulants oraux
Le problème des patients sous traitement anticoagulant (AVK)
pris en charge en urgence pour un syndrome coronaire aigu
est en revanche loin d’être éludé. Le recours à une double
antiagrégation plaquettaire ne saurait être remis en cause,
mais le clopidogrel doit être préféré au prasugrel ou au ticagrelor en raison d’un risque hémorragique moindre. La durée
optimale de la triple association est à considérer au cas par
cas, en fonction de la pathologie associée (maladie thromboembolique veineuse, fibrillation auriculaire, prothèse valvulaire mécanique) et du niveau de risque thrombotique du
patient. Dans tous les cas, l’implantation d’un stent « nu » sera
privilégiée à celle d’un stent « actif ».
■
hémorragiques, comparé à la compression manuelle. Le
recours à des introducteurs de taille réduite, le retrait précoce de l’introducteur (< 6 heures) et l’usage préférentiel
de l’abord radial sont en revanche associés à une réduction nette des complications hémorragiques.
L’étude RIVAL, qui comparait les abords radial et fémoral,
a montré une réduction des complications vasculaires avec
la voie radiale associée à un bénéfice clinique certain chez
les patients pris en charge pour un infarctus et dans les centres privilégiant cette approche. Les complications hémor-
Pour en savoir plus
- Eikelboom JW, et al. Circulation 2006; 114 : 774-82.
- Manoukian SV, et al. J Am Coll Cardiol 2007; 49 : 1362-8.
- Steg PG, et al. Eur Heart J 2011; 96 :1200-6.
Pour toute correspondance avec l’auteur
[email protected]
LE DOSSIER THÉMATIQUE DU MOIS
En novembre
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34
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
interventionnelle_OHLMANN
22/10/12
Patrick Ohlmann
Pôle d’activité
médico-chirurgicale cardiovasculaire,
Hôpitaux universitaires de Strasbourg,
Nouvel Hôpital civil, Strasbourg
11:11
Page 35
Alcoolisation septale :
résultats, indications
L’alcoolisation septale a été réalisée pour la première fois
en 1995 par Sigwart (1) comme alternative à la myomectomie chirurgicale dans le traitement de la cardiopathie hypertrophique obstructive. Cette procédure est donc « relativement récente » en comparaison de la myomectomie
chirurgicale qui se pratique depuis près de 50 ans (2) et souffre par conséquent, comme d’autres techniques interventionnelles, d’un certain manque de recul par rapport aux
techniques opératoires. Pour cette raison la myomectomie
chirurgicale demeure la technique de réduction septale de
référence (3), mais il n’en demeure pas moins que l’alcoolisation septale est aujourd’hui la technique de loin la plus
employée (4).
L’
alcoolisation septale consiste à produire un infarctus
septal localisé en regard du point de contact entre le
septum interventriculaire et le feuillet antérieur de la valve
mitrale afin de réduire le gradient intraventriculaire gauche.
Elle est réalisée au moyen de systèmes usuels de cathétérisme cardiaque : cathéter porteur, guide d’angioplastie
0,014 inch et ballon d’angioplastie coaxial de petite taille
(1,5-2 ou 2,5 mm de diamètre, en fonction du diamètre de
l’artère septale cible) par lequel est injecté de l’alcool absolu.
Un repérage échographique perprocédure (ETT ou ETO) est
essentiel afin de vérifier par injection de contraste in situ
dans l’artère septale que la zone de myocarde ciblée correspond bien au septum basal, précisément au niveau de la
zone de contact de la grande valve mitrale. Ce dernier point
est un critère clé de la réussite de la procédure.
De même, l’angiographie suprasélective via le ballon coaxial
permet de visualiser précisément la zone cible et de vérifier la bonne étanchéité du ballon dans la septale. Elle permet également de vérifier l’absence de diffusion du produit de contraste vers des structures myocardiques vitales
qui contre-indiquerait l’alcoolisation, tels les muscles papillaires ou la paroi libre du VD, ce qui peut s’observer dans
2% des cas (5). Un faible volume d’alcool (1,5-3 cc) est infusé
lentement in situ, ce qui permet de limiter la diffusion et
les fuites, mais aussi probablement de réduire le risque de
BAV complet postprocédure. Le risque de BAV était estimé
à 10-15% aux débuts de la technique, il est actuellement
de l’ordre de 5% (3).
Résultats
L’injection d’alcool s’accompagne dans plus de 90% des cas
d’une réduction, voire d’une disparition perprocédure du
gradient intraventriculaire gauche en cours d’infusion.
Cet effet est en partie dû à l’ischémie, à la nécrose, mais aussi
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
à une part de sidération de la zone de myocarde cible (6).
Le gradient évolue assez souvent de façon bimodale avec
une réduction immédiate en salle de cathétérisme, suivie
d’une réascension modeste dans les jours qui suivent présumée en relation avec une récupération de la sidération initiale, mais aussi un œdème myocardique. Secondairement
le gradient régresse progressivement dans les 6 mois qui suivent la procédure par rétraction fibreuse de la zone de
nécrose. Elle s’accompagne d’un élargissement de la chambre de chasse du ventricule gauche et d’une amélioration
de l’insuffisance mitrale, de l’hypertrophie ventriculaire
gauche et de la fonction diastolique (7). La pression est réduite
dans l’oreillette gauche, ce qui diminue également le risque
de fibrillation auriculaire et d’HTAP (7). La taille de la nécrose
constituée représente moins de 10% de la masse myocardique totale (8) en IRM cardiaque, et se localise au niveau du
septum inféro-basal sous forme d’une atteinte transmurale.
Les études en IRM ont également permis de montrer qu’en
cas de gradient résiduel après alcoolisation septale, la nécrose
se localise sur le versant droit du septum sans atteindre le
sous-endocarde gauche du SIV (9).
L’alcoolisation septale s’accompagne d’une amélioration
symptomatique franche et rapide avec réduction de la dyspnée, amélioration de la capacité de marche et des scores
de qualité de vie (10). Le suivi clinique à long terme après
alcoolisation septale montre des résultats durables jusqu’à
4, voire 8 ans (11). L’amélioration symptomatique est similaire entre les deux types de procédure (11). Cependant, des
cas isolés de troubles du rythme ventriculaire ont été rapportés précocement ou à distance de l’alcoolisation septale et rattachés des phénomènes de réentrée au sein de
la zone nécrosée (12,13).
Plusieurs méta-analyses, dont une très récente portant sur
plus de 4 000 patients traités par alcoolisation septale (entre
1996 et 2005) ou myomectomie (entre 1963 et 2007), montrent des taux de mortalité similaires lors du suivi à long
terme (14), le taux d’implantation de défibrillateurs était faible et similaire dans les 2 groupes.
D’autre part, sur une série de 109 patients traités par alcoolisation septale et implantés d’un défibrillateur en prévention primaire pour une cardiomyopathie hypertrophique
(CMH) considérée à risque rythmique selon les critères cliniques habituels, l’incidence de chocs électriques appropriés
est faible (9 chocs sur 3 ans, soit une incidence annuelle de
2,8% (15), comparable à celle attendue pour ce niveau de
risque.
Il est important de souligner que les études comparant les
deux techniques sont toutes observationnelles et biaisées
car les patients traités par alcoolisation sont en général plus
âgés de 10 ans en moyenne et que leur suivi clinique est sensiblement plus court (14).
35
interventionnelle_OHLMANN
19/10/12
15:58
Page 36
Cardio interventionnelle pour le praticien
Comparaison de la myomectomie chirurgicale
et de l’alcoolisation septale
Paramètres
Myomectomie
Ablation
1-2%
1-2%
Réduction du gradient
(au repos)
A moins
de 10 mmHg
A moins
de 25 mmHg
Symptômes (subjectifs)
Diminués
Diminués
Symptômes (objectifs)
Diminués
Diminués
Efficacité malgré la variabilité
anatomique
Habituelle
Incertaine
Pacemaker (BAV de haut grade)
1-2%
5-10%
x
15-20 x
Très faible
Incertain
Plus de 40 ans
Environ 6 ans
Sans
Avec
Mortalité opératoire
Fréquence de la procédure
Risque de mort subite
(à long terme)
Recul
Cicatrice intramyocardique
Ces données représentent la meilleure estimation à partir des données
publiées, en mettant l'accent sur l'expérience clinique la plus récente.
Tableau 1.
D’après (16).
Indications
Les techniques invasives de réduction septale, par alcoolisation ou myomectomie chirurgicale, sont réservées aux
patients dont les symptômes sont sévères et résistants au
traitement médical bien conduit comportant des bêtabloquants et/ou des antagonistes calciques (3) à forte dose. L’indication peut être retenue en présence des critères suivants :
1. Dyspnée de grade III NYHA ou syncope d’effort.
2. Gradient intraventriculaire gauche de plus de 50 mmHg
associé à une hypertrophie septale et lié à un mouvement
systolique antérieur de la grande valve mitrale (et non à
une oblitération intraventriculaire gauche systolique)
associé à une fuite mitrale typiquement orientée postérieurement.
3. Epaisseur septale jugée suffisante par l’opérateur (en
général plus de 16 mm) pour réaliser la procédure dans
de bonnes conditions. Les recommandations américaines
de 2011 (3) précisent que les ablations septales doivent être
réalisées par des opérateurs expérimentés (plus de 20 procédures) et/ou au sein d’une équipe ayant l’expérience de
plus de 50 procédures.
La chirurgie de réduction septale est recommandée en première intention (IIa, B), en particulier chez le sujet jeune, mais
aussi chez l’enfant (niveau d’évidence C). L’alcoolisation septale peut être envisagée lorsque la chirurgie est contre-indiquée en raison de comorbidités ou d’un âge avancé (IIa, B). Un
niveau de recommandation plus faible (IIb B) est préconisé
pour répondre à la demande d’un patient exprimant son souhait pour une alcoolisation septale versus une myomectomie
36
chirurgicale après discussion approfondie du rapport bénéfice/risque de chaque technique. Il conviendra ainsi de préciser au patient que la technique présente l’avantage de l’absence de nécessité de chirurgie à cœur ouvert avec un résultat
identique sur l’amélioration des symptômes, mais au prix d’un
risque supérieur d’implantation de pacemaker (5-10%) et d’un
certain degré d’incertitude sur un éventuel risque rythmique
à long terme. Enfin, l’alcoolisation septale est peu recommandée en cas de septum extrêmement épaissi de plus de
30 mm de diamètre (II, C).
En conclusion
L’alcoolisation septale représente une alternative à la chirurgie de résection septale et doit s’adresser à des patients
très symptomatiques, résistants au traitement médical. Elle
est devenue une technique bien rodée dans les mains
d’équipes entraînées, donnant des résultats équivalents à
ceux de la chirurgie à condition que l’anatomie soit favorable par la présence d’une branche septale alimentant le septum interventriculaire au niveau du point de contact de la
grande valve mitrale. Le recours à l’échographie cardiaque
transthoracique ou transœsophagienne en cours de procédure est indispensable pour guider la procédure. Le candidat idéal est le sujet âgé, les formes du sujet jeune devant
rester du domaine de la chirurgie de réduction septale. ■
Pour en savoir plus
01. Sigwart U. Non-surgical myocardial reduction for hypertrophic
obstructive cardiomyopathy. Lancet 1995; 346: 211-4.
02. Maron BJ, Maron MS, Wigle ED, Braunwald E. The 50-year history,
controversy, and clinical implications of left ventricular outflow tract
obstruction in hypertrophic cardiomyopathy from idiopathic hypertrophic subaortic stenosis to hypertrophic cardiomyopathy: from
idiopathic hypertrophic subaortic stenosis to hypertrophic cardiomyopathy. J Am Coll Cardiol 2009 ; 54 : 191-200.
03. Gersh BJ, Maron BJ, Bonow RO, Dearani JA, Fifer MA, Link MS,
Naidu SS, Nishimura RA, Ommen SR, Rakowski H, Seidman CE,
Towbin JA, Udelson JE, Yancy CW. 2011 ACCF/AHA guideline for the
diagnosis and treatment of hypertrophic cardiomyopathy: a report
of the American College of Cardiology Foundation/American Heart
Association Task Force on Practice Guidelines. Circulation 2011; 124 :
e783-831.
04. Maron BJ. Role of alcohol septal ablation in treatment of obstructive hypertrophic cardiomyopathy. Lancet 2000; 355 : 425-6.
05. Faber L, Seggewiss H, Welge D, Fassbender D, Schmidt HK, Gleichmann U, Horstkotte D. Echo-guided percutaneous septal ablation
for symptomatic hypertrophic obstructive cardiomyopathy: 7 years
of experience. Eur J Echocardiogr 2004; 5 : 347-55.
06. Yoerger DM, Picard MH, Palacios IF, Vlahakes GJ, Lowry PA,
Fifer MA. Time course of pressure gradient response after first
alcohol septal ablation for obstructive hypertrophic cardiomyopathy. Am J Cardiol 2006; 97 : 1511-4.
Pour toute correspondance avec l’auteur
[email protected]
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
Congres
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Dossier réalisé par le
Dr Paul Luporsi
EuroPCR 2012
CHU Jean-Minjoz, Besançon
Le congrès en quelques chiffres…
Le congrès européen intéressant tous les cardiologues interventionnels du globe a accueilli cette année
11 387 participants pour 712 heures de formation auprès de 1 259 universitaires. L’organisation a, une fois
encore, privilégié les retransmissions « en live » depuis le monde entier (48 centres recevaient une équipe de
télévision), soit 63 heures cumulées et 10 heures des fameux « live in a box » dont la renommée croissante
justifie leurs rotations lourdes sur Internet ou par échange de données entre « cathétériseurs ».
Ce congrès annuel, organisé à Paris depuis deux ans et qui le sera encore à l’avenir, a pu bénéficier du soutien de 134 partenaires industriels. Tous les aspects scientifiques récents de notre spécialité y ont été abordés, dont nous vous présentons un tour d’horizon, en attendant le compte rendu du Congrès américain du
TCT (Transcatheter Cardiovascular Therapeutics, Miami, 22-26 octobre 2012) et la prochaine mouture
d’EuroPCR 2013 (21-24 mai 2013).
The year
of the Textbook
L’usage en routine
de la FFR
Le congrès EuroPCR 2012 était marqué par la sortie du Textbook « Percutaneous Interventional Cardiovascular Medicine », annoncé comme la bible incontournable de la cardiologie interventionnelle. Il constitue de surcroît la première
publication du genre à visée pédagogique, adhérant strictement aux recommandations de l’ESC et de l’EAPCI, en s’appuyant sur un solide substrat scientifique et se voulant utile
pour chaque patient à titre individuel.
Cette méthode invasive d’évaluation de la réserve coronaire
(Figure 1) n’est pas récente et prône une approche de l’angioplastie coronaire basée sur l’évaluation hémodynamique
d’une sténose suspecte sans corrélation parfaite avec l’évaluation anatomique angiographique « de visu », qui
demeure souvent en 2012 le seul argument décisionnel en
faveur d’une revascularisation…
U
ne équipe renommée est à l’origine
du projet (Eric Eeckhout, Patrick W. Serruys, William Wijns,
Alec Vahanian, Mark
van Sambeek, Rodney
de Palma), à laquelle
s’associent de nomTextbook de l'EAPCI.
breux angioplasticiens,
Plus de renseignements sur
spécialistes et coéditeurs.
le site pcronline.
Les 93 articles publiés par 266 auteurs
sont regroupés en 4 volumes. Chaque
thème abordé est détaillé, mis à jour et exposé selon un
aspect « pratique », associé à de nombreuses illustrations de
qualité et à des vidéos de cas cliniques pour la version informatique.
■
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
Figure 1. Exemples de test positif (à gauche,
FFR < 0,80) après injection d'adénosine,
et de test négatif (à droite FFR > 0,80).
➜
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Cardio interventionnelle pour le praticien
La question soulevée par les études DEFER (Dr Pijls, 2007) et
plus récemment FAME (Fractional Flow Reserve versus Angiography for Guiding PCI in Patients with Multivessel Coronary
Artery Disease) (Dr Pijls, 2008) est celle de l’intérêt de guider
la stratégie de revascularisation par un examen fonctionnel,
nous invitant à « mieux stenter » nos patients, au risque de
diminuer le nombre total d’angioplasties. En effet, dans cette
étude, seulement 46% des patients souffrant de lésions angiographiquement multitronculaires présentaient effectivement
des atteintes multitronculaires lors de l’évaluation fonctionnelle proposée. La durée d’hospitalisation, le coût de la procédure, le nombre de stents implantés et la quantité de produit de contraste étaient tous significativement réduits dans
le groupe « angioplastie guidée par la FFR ».
La réduction significative du nombre de décès, d’infarctus
du myocarde et de revascularisations urgentes à un an
démontrait de surcroît un intérêt majeur à guider une angioplastie coronaire par la mesure de la FFR chez le patient pluritronculaire.
Basées sur ces données, les recommandations édictées par la
Société européenne de cardiologie concernant la revascularisation myocardique confortent le praticien à utiliser cet outil
lorsque la preuve d’une ischémie n’est pas évidente (I, A).
FAME II : résultats préliminaires
Le Pr Bernard de Bruyne (Alost, Belgique) a présenté les résultats préliminaires de la cohorte A de FAME II (Fractional Flow
Reserve (FFR) Guided Percutaneous Coronary Intervention (PCI)
Plus Optimal Medical Treatment (OMT) Versus OMT, soit un
même acronyme pour une signification un peu différente
de FAME [cf supra] : la lettre M ne concerne plus spécifiquement les multitronculaires, mais l’instauration d‘un traitement
médical optimisé). 1 219 patients ont été randomisés dans
28 centres européens et nord-américains dans le cadre d’une
maladie coronaire stable (angor d’effort stable ou ischémie
silencieuse) et devaient présenter au moins une sténose artérielle épicardique angiographique de plus de 50%.
L’excellent pronostic des patients coronariens sous traitement médical seul était déjà évoqué par COURAGE en 2007,
et est confirmé dans FAME II chez les patients porteurs de
lésions où la FFR reste > 0,80. Dans ce groupe recevant un
traitement médical, 86% recevaient un bêtabloquant,
90% un inhibiteur de l’enzyme de conversion et 93% une
statine. Cette nouvelle étude démontre en revanche l’intérêt de coupler angioplastie et optimisation du traitement
médical en cas de sténose hémodynamiquement significative d’après la mesure de la réserve coronaire (FFR < 0,80)
chez des coronariens stables.
L’angioplastie (de 1, 2 ou 3 vaisseaux) avec mise en place
d’un stent actif en cas de FFR < 0,80 s’accompagnait de taux
moindres de revascularisation en urgence à 1 an (0,6%) en
comparaison au groupe traitement médical seul (6%).
L’étude a été soumise à un arrêt prématuré des inclusions
en janvier 2012 en raison d’un sur-risque ischémique dans
le bras traitement médical seul - 11,2 fois plus d’événements
38
(HR : 11,2 IC 95% [2,62-47,9] ; p < 0,0001) que dans le groupe
angioplastie et traitement médical. La proportion de patients
présentant une ischémie démontrée par guide de pression
était de 78% au total. L‘absence de lésion ischémiante démontrée (FFR > 0,80) et relevant d’un traitement médical optimal
est associée à un pronostic très favorable, comparable à
celui des patients avec FFR < 0,80 traités par angioplastie et
traitement médical.
FAME II propose ainsi d’affiner la sélection de patients coronariens stables et candidats à une angioplastie en alliant des
critères anatomiques au critère fonctionnel évaluable par une
méthode extrêmement fiable et reproductible. En ce sens,
FAME II répond aux questions laissées en suspens après
COURAGE, qui n’avait pas démontré de bénéfice de l’angioplastie en termes de mortalité chez ces patients atteints de cardiopathie ischémique stable. FAME II s’inscrit dans la lignée de
l’étude COURAGE, et pourrait susciter un regain de revascularisations par angioplastie chez les patients coronariens stables. Ces considérations devraient logiquement mener à
l’extension de son utilisation en pratique quotidienne et surtout à son remboursement avant d’envisager l’utilisation à
l’avenir de la FFR « non invasive » (couplée au coroscanner),
qui est de plus en plus évoquée dans la littérature.
D’autres études comparant une revascularisation par angioplastie à un traitement médicamenteux optimal chez les
patients coronariens stables sont en cours, notamment
l’étude ISCHEMIA qui a débuté récemment (pour un total
de 8 000 patients dans 400 centres). Outre ces spécificités
avantageuses, le ratio coût/bénéfice est lui aussi à l’avantage de la FFR (Figure 2).
Ratio coût/bénéfice de la FFR
Coût incrémental
➜ Utilisation de la FFR en 2012
La FFR améliore
les résultats
QALY
incrémentale
La FFR réduit
les coûts
Figure 2.
De la FFR non invasive au stenting virtuel…
Le caractère hémodynamiquement serré d’une sténose coronaire peut être affiné, comme nous l’avons vu, au moyen de
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cette méthode diagnostique à la
tomodensitométrie coronaire : il
s’agit de la FFRCT (Figure 3). Cette
méthode non invasive a prouvé sa
Coronarographie
FFR
FFRCT
non-infériorité face aux autres outils
diagnostiques pour les lésions ischémiantes documentées, et il existe de
plus en plus de preuves quant à son
intérêt dans l’évaluation de sténoses
intermédiaires.
La mise à profit des nouvelles technologies de l’imagerie coronaire a
tout simplement conduit au
concept de stenting virtuel dont la
faisabilité a pu être évaluée dans
une petite étude coréenne, prospective et multicentrique : DISCOVER FLOW, englobant 48 lésions
sténosantes chez 44 patients coronariens stables (10% dans l’artère
circonflexe, 17% au niveau de la
coronaire droite, et 73% sur le territoire de l’IVA).
Figure 3. Trois examens proposés (de gauche à droite) : FFRCT, coronarographie,
Cette étude prouve une grande
FFR avant et après stenting de l'IVA moyenne.
corrélation entre FFR et FFRCT avec
une excellente sensibilité et spécificité (100% et 96% respectivement) pour prédire l’existence
la mesure de la FFR. Une nouvelle technologie, primée l’an
d’une ischémie résiduelle (FFR < 0,80) après stenting.
■
dernier lors du congrès EuroPCR 2011, permet d’associer
Après
stenting
Avant
stenting
Une nouvelle technologie : la FFRCT
Résultats des études EVOLUTION, SORT-OUT V
et COMPARE II
EuroPCR 2012 a été l’occasion de commenter les résultats des études EVOLUTION, SORT-OUT V et COMPARE II.
L
es résultats à un an de l’étude
EVOLUTION (A Randomized Study
to Evaluate Safety and Efficacy of the
Excel Sirolimus Eluting Stent with a
Biodegradable Polymer Versus Sirolimus
Eluting Stent with a Non-Biodegradable
Polymer in the Treatment of Patients
with de novo Coronary Artery Lesions)
ont été présentés par le Dr Junbo Ge
(Shanghai, Chine).
Cette étude multicentrique propose de
comparer en termes de non-infériorité
deux stents actifs au sirolimus : le stent
actif à polymère biodégradable (Excel)
et le stent actif à polymère permanent
(Cypher), même si celui-ci n’est plus
commercialisé depuis un an environ. Si
la plate-forme diffère peu entre ces
deux prothèses, le médicament est identique, et c’est la différence de polymères
qui est étudiée.
1 923 patients coronariens (ischémie
aiguë ou chronique) présentant des sténoses coronaires de novo ont été randomisés dans ces 2 bras (polymère biodégradable [n=1 239] et permanent
[n = 670]). Le critère principal est un critère ischémique composite associant
décès de cause cardiaque, IDM et revascularisation du vaisseau cible.
Les critères secondaires associent thromboses de stent et critères MACE (Major
Adverse Cardiac Events). Les résultats à
un an confirment la non-infériorité de
ce stent de dernière génération vis-à-vis
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
du comparateur plus ancien. Les événements liés aux sténoses traitées s’élèvent à 0,89% au bout d’un an dans le
groupe stent à polymère biodégradable et à 1,34% dans le groupe Cypher
(critère de non-infériorité atteint ;
p = 0,05).
L’étude SORT-OUT V (Randomised Clinical Comparative Study of the Nobori
and the Cypher Stent) n’a pas permis,
quant à elle, au stent Nobori d’atteindre ce critère de non-infériorité face au
stent Cypher (p = 0,06).
En termes d’ischémie composite (décès
cardiaque, IDM, thrombose de stent,
revascularisation du vaisseau cible), le
stent à polymère biodégradable présentait un taux de 4,1% versus 3,2% pour
le polymère permanent.
Le Pr Pieter Smits (Rotterdam, Pays-Bas)
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Cardio interventionnelle pour le praticien
présentait, quant à lui, l’étude de noninfériorité COMPARE II afin de préciser
la place de stent Nobori par rapport au
stent Xience V.
2 707 patients ont été randomisés dans
chacun des 2 bras. Le critère primaire
était un critère d’ischémie composite
classique dans ce type d’étude et offrait
un avantage certain au stent au biolimus (polymère biodégradable), sans
atteindre toutefois la significativité statistique.
■
VALENTINES Trial II
teste l’efficacité
du ballon actif DIOR
PLATINUM SMALL
VESSEL évalue le stent
PROMUS
Les ballons actifs ne sont pas issus de réflexions récentes,
et l’idée aurait presque périclité il y a une dizaine d’années
si le champ d’application au phénomène de resténose
n’avait pas émergé.
L’angioplastie au ballon est depuis longtemps une modalité thérapeutique des sténoses coronaires intéressant des
artères de petit calibre.
Stent PROMUS
Ballon actif DIOR
Figure.
L’
efficacité des ballons actifs en termes d’alternative
thérapeutique en cas de resténose intra-stent a déjà
été démontrée dans plusieurs essais, et ils sont même
recommandés dans cette indication par l’ESC (Guidelines
on myocardial revascularization, Wijns, Kohl, Danchin).
Le Dr Antonio Serra (Barcelone, Espagne) a, lui, présenté
les résultats à 9 mois de l’étude VALENTINES TRIAL II.
Ce registre multicentrique international permet d’étudier
chez des patients souffrant d’angor stable, instable et/ou
d’ischémie démontrée l’efficacité du ballon actif DIOR
(Drug Eluting Balloon (Figure) pour les lésions coronaires
de novo, à assez court terme (6-9 mois), quel que soit le
calibre de l’artère (des IVA ostiales ont effectivement bénéficié d’angioplastie par cette méthode !) chez 150 patients
dans 50 centres.
Les résultats rapportent un faible taux de revascularisation du vaisseau cible (6,9%) avec le DIORDEB, et de la
lésion cible (2,9%). Le « late loss » était de 0,30 ± 0,36 mm,
et le taux de MACE relativement bas (8,7%). Ces résultats issus de registre nécessitent toutefois une confirmation par la réalisation d’une étude randomisée.
■
40
P
lusieurs alternatives ont été proposées, notamment
l’angioplastie au ballon actif, comme l’a
rappelé le Dr Antonio
Serra, mais aussi le
stenting de la lésion,
stratégie longtemps
considérée comme à
risque de dissection du
site, de resténose
intrastent et surtout
de thrombose de prothèse, a fortiori quand
celle-ci était recouverte de substance
Figure.
antiproliférative.
L’étude PLATINUM
SMALL VESSEL (PLATINUM Clinical Trial to Assess the PROMUS
Element Stent System for Treatment of De Novo Coronary
Artery Lesions in Small Vessels) évalue l’efficacité et la sécurité d’implantation d’un stent PROMUS Element (PROMUS)
de 2,25 mm dont la plate-forme chrome-cobalt est recouverte
d’évérolimus (Figure), dans une artère dont le calibre est compris entre 2,25 et 2,5 mm, et démontre encore à 2 ans un excellent profil efficacité/sécurité pour ce stent.
Le taux de revascularisation de la lésion cible est de 2,5%
seulement avec un risque d’événements cardiovasculaires
qui demeure bas à 2 ans : 2,3% de décès cardiovasculaires,
0% d’IDM, 0% de thrombose de stent et sans décès constaté
depuis l’année dernière !
■
Les stents PROMUS et XIENCE V sont rigoureusement identiques. Le
stent XIENCE est une marque déposée des laboratoires Abbott,
PROMUS est un stent fabriqué par Abbott et distribué par Boston
Scientific.
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Congrès
I
European Society of Cardiology, 25-29 août 2012 • Munich I
European Society of Cardiology
Nouvelles recommandations et STEMI : le prasugrel en
première ligne
Les nouvelles recommandations, publiées durant le congrès
de la Société européenne de cardiologie, placent les nouveaux antiagrégants plaquettaires comme le prasugrel et
le ticagrelor en première intention pour le traitement en
phase aiguë des infarctus avec sus-décalage du segment ST
(STEMI).
L
e nouveau texte des recommandations insiste sur l’importance de la prise en charge préhospitalière, rappelle que le
délai à respecter pour entreprendre une angioplastie primaire
(de préférence par voie radiale) est de 120 min, et souligne la
nécessité d’administrer à tous les malades un traitement par
aspirine. « Une double antiagrégation plaquettaire devra aussi
systématiquement être proposée pour une durée de 12 mois au
décours de l’infarctus, avec une durée incompressible d’un mois
en cas d’implantation de stent nu et de 6 mois après pose de
stent actif », a noté le Pr Petr Widimsky (Prague).
Un autre point fort des nouvelles recommandations concernant les STEMI est que le clopidogrel est désormais relégué
en seconde intention en phase aiguë de l’infarctus en cas
d’angioplastie et n’est, en pratique, plus recommandé que
lorsque le prasugrel ou le ticagrelor ne sont pas disponibles
sur le marché ou sont contre-indiqués.
Le Pr Widimsky a mis en avant les atouts du prasugrel dans
le traitement de l’infarctus du myocarde. Dans l’étude
TRITON-TIMI 38, cet antiagrégant a démontré sa supériorité
sur le clopidogrel chez les 3 534 patients ayant un STEMI
avec, à 30 jours, une réduction significative de 32% du critère de jugement primaire associant décès cardiovasculaires,
infarctus et AVC, cette plus forte efficacité du prasugrel persistant à 15 mois.
Les patients avec un STEMI semblent tirer particulièrement parti du prasugrel. En effet, la réduction du risque
ischémique était, dans TRITON-TIMI 38, plus importante chez
les malades porteurs de STEMI que ce qui a été observé avec
le ticagrelor dans l’étude PLATO, a fait remarquer le
Pr Widimsky. Par ailleurs, l’étude TRITON-TIMI 38 a révélé
que l’administration de prasugrel (60 mg en dose de charge,
puis 10 mg/j) ne provoque pas un surplus d’hémorragies
majeures ou mineures en comparaison du clopidogrel chez
les patients avec un STEMI ayant eu une angioplastie (alors
qu’en revanche, un peu plus d’hémorragies majeures ont
été constatées avec cet antiagrégant chez les malades pontés pour STEMI).
42
TRITON-TIMI 38 a également révélé que la population des
diabétiques est une bonne cible pour l’utilisation du prasugrel (réduction de 30% du critère primaire portant sur les
événements ischémiques sans sur-risque hémorragique)
« avec un bénéfice qui est d’autant plus important que le
diabète est sévère », a rappelé le Pr Widimsky. Par ailleurs,
la prise de prasugrel a l’avantage de ne pas exiger d’ajustement posologique chez les patients dont la clairance de la
créatinine est < 60 ml/min.
Il est néanmoins important de respecter les contre-indications
du prasugrel, qui découlent des données de tolérance observées sur l’ensemble de la population de TRITON-TIMI 38 (plus
de 13 000 patients), laquelle associait aux malades avec STEMI
des patients ayant subi une angioplastie coronaire pour
angor instable ou infarctus sans sus-décalage du segment
ST (AI/NSTEMI). « Le prasugrel ne devra ainsi pas être administré aux malades avec des antécédents d’AVC et d’AIT, chez lesquels le risque hémorragique est majoré, et il faudra être prudent pour les mêmes motifs chez ceux de plus de 75 ans, ou avec
un poids inférieur à 60 kilos », a reconnu le Pr Widimsky. Il est
préférable de réduire la dose de 10 à 5 mg/j chez ces deux dernières catégories de patients. Enfin, le prasugrel ne peut être
proposé aux malades thrombolysés, l’étude TRITON-TIMI 38
ayant été uniquement réalisée chez des malades reperfusés.
Nouvelles données de registre
Une étude de registre allemande, ATACS, ayant rassemblé
5 917 patients inclus entre octobre 2009 et décembre 2011,
dont 2 311 avec un STEMI de moins de 24 heures, laisse penser que le prasugrel pourrait aussi faire mieux que le clopidogrel chez des malades tout-venant avec un infarctus ayant
le plus fréquemment bénéficié d’une angioplastie. « Une
tendance à la baisse de la mortalité a, en effet, été relevée
en comparaison du clopidogrel chez les 69% de patients porteurs de STEMI, ayant reçu du prasugrel, et ce sans survenue
d’hémorragies importantes », s’est félicité le Pr Uwe Zeymer
(Ludwigshagen, Allemagne) en commentant ces données
encore non publiées. Ce qui est encourageant même si les
deux groupes traités par clopidogrel et prasugrel n’étaient
pas totalement comparables.
■
Dr Corinne Tutin
D’après un symposium organisé par les laboratoires Daiichi Sankyo et Eli Lilly.
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
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De ASCOT à AVANT’AGE : pourquoi choisir la stratégie
périndopril/amlodipine chez les patients hypertendus ?
“A
u vu des résultats des études
ASCOT et ACCOMPLISH, l’association IEC-inhibiteur calcique est préconisée en première ligne dans les
recommandations britanniques sur la
prise en charge de l’hypertension artérielle », a rappelé le Pr Frank T.
Ruschitzka (Hôpital universitaire de
Zurich).
L’étude AVANT’AGE, qui a été réalisée
chez 710 médecins généralistes ayant
recruté au total 6 256 patients, vient de
confirmer l’intérêt d’une combinaison de
périndopril et d’amlodipine. « L’utilisation, dans cet essai, de cette association
aux doses de 5/5, 5/10,10/5,10/10 mg a
abaissé de respectivement 20,3 et
11,3 mmHg la PAS et la PAD à 3 mois
chez des patients avec une HTA difficile
à contrôler », s’est félicité le Pr Jacques
Blacher (université Paris-Descartes).
Un autre essai ouvert, SYMBIO, entrepris durant 3 mois en Slovaquie chez
2 132 patients hypertendus, a également rapporté une baisse significative
de la PA sous cette bithérapie (de 158,5/
93,6 mmHg à 132,9/80,7 mmHg en
moyenne ; p < 0,0001), « ce indépendamment du traitement reçu initialement (IEC seul, IC seul ou déjà combinaison IEC + IC) », a expliqué le
Pr Robert Hatala (Institut national cardiovasculaire, Bratislava). En outre, l’addition du périndopril à l’amlodipine a
entraîné une réduction de 58%
(p < 0,001) des œdèmes imputables à
cet inhibiteur calcique.
Une très bonne efficacité antihypertensive, avec un taux de contrôle tensionnel de 79% à 3 mois, a également été
relevée avec cette bithérapie à base de
périndopril et d’amlodipine dans une
étude russe, PRORYV, ayant porté sur
4 115 patients, dans 56,2% des cas en
surpoids, avec une HTA non contrôlée.
Cette bithérapie a là aussi été bien tolérée, « seulement 0,5% des malades
étant exclus de l’essai en raison de la survenue d’un œdème et 0,2% d’une
toux », a indiqué le Pr Yuri A. Karpov
(Centre de recherche cardiologique
russe, Moscou).
Les données de l’étude ASCOT-BPLA, qui
a recruté plus de 19 000 patients hypertendus à risque cardiovasculaire modéré,
en prévention primaire sont également
favorables à l’emploi de cette association, avec, a souligné le Pr Michal Tendera (Université médicale de Silésie,
Katowice), « une plus forte interaction
positive entre cette bithérapie et l’atorvastatine avec une réduction de 53% du
critère de jugement primaire associant
coronaropathies fatales et infarctus non
mortels sous atorvastatine en comparaison du placebo dans ce bras contre
- 16% dans le bras aténolol-diurétique
thiazidique ».
Toutes ces études sont la preuve que la
stratégie périndopril/amlodipine est efficace quel que soit le profil du patient
hypertendu pour diminuer les chiffres
tensionnels et prévenir un éventuel accident.
■
Dr Corinne Tutin
© BSIP
Plusieurs études viennent de mettre en
évidence l’intérêt d’une combinaison
périndopril/amlodipine dans la prise en
charge des patients hypertendus, quel
que soit leur niveau de risque.
D’après un symposium organisé
par les laboratoires Servier.
STEMI : l’ajout de tirofiban au traitement standard améliore
les résultats cliniques après angioplastie primaire
Un traitement antithrombotique associant antiagrégants plaquettaires et héparine, administré le plus précocement possible, améliore l’évolution clinique des patients atteints d’infarctus du myocarde avec sus-décalage du segment ST.
L’
angioplastie primaire est actuellement le traitement
de référence de l’infarctus du myocarde avec sus-décalage du segment ST (STEMI) et doit être réalisée dans les
délais les plus courts possible après le premier contact médical. Le délai de reperfusion reste un déterminant majeur de
la mortalité des STEMI, a souligné le Pr Stephan James
(Suède). Selon les nouvelles recommandations de prise en
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
charge des STEMI, en termes de délai la cible à atteindre est
60 min entre le premier contact médical et l’angioplastie.
Si la reperfusion par angioplastie ne peut être réalisée dans
les 120 min, la thrombolyse, indiquée d’emblée, peut être
faite en phase préhospitalière.
Quelle que soit la stratégie de reperfusion, l’administration
précoce et systématique d’un double traitement antiagrégant (aspirine + prasugrel ou aspirine + clopidogrel) et héparinique est indiquée d’abord avec une dose de charge, puis
en traitement d’entretien.
De nouvelles données montrent l’intérêt de l’utilisation préhospitalière du tirofiban, un anti-GPIIb/IIIa, chez les patients atteints
d’un infarctus du myocarde avec sus-décalage du segment ST.
43
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Instaurer le traitement dès l’ambulance
Les résultats de l’étude FABOLUS PRO (1) comparant l’effet
antiagrégant plaquettaire du prasugrel (60 mg) et du tirofiban (25 mg/kg en bolus) chez des patients présentant un
STEMI montrent que 2 heures après l’administration des
deux molécules, l’inhibition de l’agrégation plaquettaire est
significativement plus faible avec le prasugrel (50 %) comparé au bolus haute dose de tirofiban qui atteint une inhibition de 95% dès 15 min.
L’étude On-TIME 2 (2) a comparé, chez des patients SCA ST+ ayant
reçu clopidogrel 600 mg + aspirine, l’administration dans l’ambulance du Samu d’un bolus haute dose de tirofiban versus placebo dans un délai de 90 min. L’adjonction de tirofiban a permis:
- une meilleure résolution du décalage du segment ST, témoignant d’une meilleure reperfusion, à 1 heure post-procédure d’angioplastie ;
- une réduction significative des MACE à J30 (de 50% en cas
d’angioplastie primaire) ;
- une diminution de la mortalité à J30 et à 1 an, et ce sans
augmentation significative des hémorragies majeures ou
mineures (3).
Bénéficient le plus de cette stratégie les patients recevant
le traitement précocement et pris en charge par angioplastie primaire.
« L’ensemble de ces données démontre l’importance de diagnostiquer les patients atteints de STEMI le plus précocement
possible afin d’instaurer un traitement antithrombotique et
un triple traitement antiagrégant plaquettaire comprenant
le tirofiban dès l’installation dans l’ambulance », a souligné
le Dr Arnoud Van’t Hof (Pays-Bas).
■
Dr Micheline Fourcade
D’après un symposium organisé par les laboratoires Iroko.
Pour en savoir plus
1. Valgimigli M, et al. J Am Coll Cardiol Interv 2012; 5 : 268-77.
2. Van’t Hof A, et al. Lancet 2008; 372 (9638) : 537-46.
3. Ten Berg JM, et al. JACC 2010 ; 55(22) : 2446-55.
HTA : les atouts de l’olmésartan
Une trithérapie à base d’olmésartan
permet d’espérer un taux élevé de
contrôle tensionnel chez les patients
répondant mal à une bithérapie.
«L
es données de l’étude EUROASPIRE III, ayant porté sur la
période 2006-2007, révèlent qu’à la différence d’autres facteurs de risque cardiovasculaire comme le tabagisme ou
le cholestérol, le contrôle tensionnel
ne s’améliore pas véritablement en
Europe avec seulement 43,9% de
patients normalisés contre 50,1% pour
EUROASPIRE I », a déploré le Pr Massimo Volpe (Rome). « Or, contrairement
à ce que beaucoup de praticiens pensent, un pourcentage non négligeable
de patients hypertendus est à haut
risque cardiovasculaire », a souligné le
Pr Vivencio Barrios (Madrid).
50% des hypertendus suivis
en médecine générale sont
à haut ou très haut risque
cardiovasculaire
Une enquête conduite par l’équipe du
Pr Barrios auprès de 8 920 patients a
révélé que la moitié des malades hypertendus suivis en médecine générale sont
44
à haut ou à très haut risque cardiovasculaire. C’est aussi le cas de plus de 70%
des patients pris en charge par des spécialistes.
Comment faire mieux ? Le Pr Barrios a
suggéré de privilégier certains ARA II,
et ajouté que «l’olmésartan a démontré une forte activité antihypertensive
en MAPA, dans des méta-analyses
comme celle de MJ Fabia (J Hypertens
2007), et ce tant pour la pression artérielle systolique que diastolique ».
Dans l’étude randomisée ESPORT,
menée chez des hypertendus âgés, l’olmésartan a aussi fait la preuve de sa
supériorité comparé à un IEC, le ramipril, et a prouvé son efficacité dans plusieurs essais contrôlés en association
avec l’hydrochlorothiazide ou l’amlodipine.
« Les recommandations de la Société
européenne d’hypertension artérielle
rappellent que 15 à 20% des malades
hypertendus ne peuvent au minimum
être traités uniquement par deux médicaments antihypertenseurs », a admis
le Pr Barrios. Une nouvelle stratégie thérapeutique consiste à prescrire à ces
patients hypertendus une trithérapie à
base d’olmésartan, d’amlodipine et
d’hydrochlorothiazide, qui bénéficie
depuis 2011 d’une autorisation européenne de mise sur le marché.
Une efficacité au long cours
Dans l’étude TRINITY, réalisée en double aveugle selon un plan factoriel chez
2 492 patients avec une HTA modérée à
sévère, cette trithérapie a normalisé
7 patients sur 10 aux doses de respectivement 40 mg/j, 10 mg/j, 25 mg/j des
3 antihypertenseurs. Le Pr Barrios a
insisté sur le fait que « cette trithérapie
assure un bon contrôle tensionnel, tant
chez les hypertendus non obèses
qu’obèses ». Elle est également active
chez les patients à haut risque cardiovasculaire et bien tolérée malgré des
baisses tensionnelles importantes :
- 37 mmHg à 8 semaines pour la PAS
dans TRINITY, - 21,8 mmHg pour la PAD.
Cette trithérapie a aussi démontré son
efficacité au long cours
Une nouvelle étude, effectuée par le
Pr Volpe auprès de plus de 2 000
patients, présentée sous forme de poster, a ainsi conclu à un taux de contrôle
de 78% après un suivi de 54 semaines
en ouvert.
A noter que, dans cet essai, le taux d’hypotensions est resté inférieur à 1% sous trithérapie.
■
Dr Corinne Tutin
D’après un symposium organisé par
les laboratoires Daiichi Sankyo et Menarini.
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Le dabigatran bénéficie à plus d’un million de patients-années
Le dabigatran, qui a obtenu les autorisations réglementaires pour la prévention des AVC et des embolies systémiques chez les patients atteints de FA,
est largement prescrit dans le monde.
L
e dabigatran étexilate (Pradaxa)
bénéficie aujourd’hui à un million
de patients-années, et ce dans deux
grands cadres nosologiques :
- la prévention des événements thromboemboliques veineux chez des
patients adultes ayant bénéficié d’une
chirurgie programmée pour prothèse
totale de hanche ou de genou ;
- la prévention des accidents vasculaires
cérébraux (AVC) et des embolies systémiques (ES) chez les patients atteints
de fibrillation atriale (FA) non valvulaire, associée à un ou plusieurs facteurs de risque : antécédents d’AVC,
d’AIT ou d’ES, FEVG < 40 %, insuffisance cardiaque symptomatique (classe
NYHA > 2), âge ≥ 75 ans ou > 65 ans
chez un diabétique, un coronarien ou
un hypertendu.
Cette expérience clinique, sans précédent pour un nouvel anticoagulant oral,
souligne la large utilisation de Pradaxa
dans plus de 70 pays à travers le monde,
après l’obtention des autorisations
réglementaires pour la prévention de
l’AVC et de l’ES dans la FA.
Ce niveau d’utilisation clinique montre
que les bénéfices importants du dabigatran étexilate mis en évidence dans
l’étude RE-LY (Randomised Evaluation
of Long term anticoagulant therapY)
ont été pris en compte.
Les résultats de RE-LY démontrent que
le dabigatran étexilate (150 mg x 2/j) a
réduit de 35% le risque global d’AVC et
d’ES, y compris les AVC hémorragiques,
et qu’indiqué à la dose de 110 mg x 2/j
chez certains patients, il s’est révélé non
inférieur à la warfarine, avec pour les
2 dosages une diminution significative
des hémorragies potentiellement mortelles et intracrâniennes.
Depuis sa première autorisation dans la
prévention des AVC, Pradaxa pourrait
avoir évité 40 000 AVC chez des patients
atteints de FA non valvulaire par rapport aux patients non traités.
Pour le Pr Hans-Christoph Diener (Duisburg-Essen, Allemagne), qui commentait ces résultats, « le nombre estimé
d’AVC évités positionne le dabigatran
comme un traitement efficace et présentant un bon profil de tolérance chez
les patients atteints de FA exposés à un
risque d’AVC ».
■
Dr Micheline Fourcade
D’après une conférence de presse organisée
par les laboratoires Boehringer Ingelheim.
Le TAVI fait son entrée dans les recommandations
Les Prs Martine Gilard (Brest, France), Bernard David Prendergast (Oxford, Royaume-Uni) et Helmut Baumgartner
(Munster, Allemagne) ont commenté l’actualité du TAVI et
son entrée dans les nouvelles recommandations sur la prise
en charge des valvulopathies.
L
e Pr Bernard David Prendergast a présenté les dernières données concernant le TAVI à partir des résultats à 2 ans de
l’étude PARTNER (The Placement of Aortic Transcatheter Valves)
et des résultats à un an du registre SOURCE.
Les résultats de l’étude PARTNER se confirment à 2 ans. Dans la
cohorte B, qui comparait le TAVI au traitement médical (pouvant inclure une angioplastie au ballon) chez les patients inopérables, la mortalité toute cause est de 43,3% chez les patients
traités par TAVI et de 68% chez les autres (HR : 0,56 ; IC 95%
0,44-0,75 ; p < 0,0001) (Figure 1, p 46). L’amélioration fonctionnelle constatée précocement après TAVI se maintient à 2 ans
avec une réduction au cours du temps de la classe NYHA.
Dans la cohorte A, qui comparait les TAVI par voie apicale
ou fémorale au traitement chirurgical chez les patients à
haut risque opératoire, le taux de mortalité à 2 ans est similaire dans les 2 groupes (RVA 35% versus TAVI 33,9% ;
HR : 0,88 ; IC 95% 0,70-1,12 ; p = 0,310).
Concernant la survenue d’AVC, il a été noté un taux d’AVC à 30
jours nettement supérieur dans le groupe TAVI (4,6% versus
2,4%), mais cet écart diminue au fil du temps avec au-delà de 2
ans une inversion des courbes et un taux d’AVC supérieur
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
dans le groupe chirurgie. A ce jour, les mécanismes précis de ces
excès d’AVC périprocéduraux sont inconnus. Cependant, les
données à plus long terme sont jugées rassurantes.
Les résultats de PARTNER confirment que la présence d’une fuite
paravalvulaire significative après TAVI est de mauvais pronostic. Même une fuite peu importante peut être à l’origine d’une
surmortalité équivalente à la présence d’une fuite moyenne ou
sévère. Le taux de mortalité à 2 ans est de 24,8% quand il n’existe
pas de fuite ou qu’elle est à l’état de trace, de 39,2% quand elle
est minime et de 41,7% quand elle est modérée ou sévère.
Le registre SOURCE confirme les progrès du TAVI
SOURCE est un registre prospectif, européen, recueillant les données de patients traités avec les valves Edwards Sapien XT, par
voie fémorale ou apicale. Ce registre confirme les bons résultats
du TAVI avec une survie à un an de l’ordre de 76,5%, supérieure
dans le groupe voie fémorale par rapport au groupe voie apicale (80,1% et 74,2% respectivement) (Figure 2, p 46). Cela est
en partie expliqué par le fait que les patients du groupe transapical ont plus de comorbidités, avec un EuroScore en moyenne
plus élevé que dans le groupe transfémoral (21,8 et 19,9 respectivement ; p = 0,0004). De même, le nombre de patients à très
haut risque, avec EuroScore > 40, est significativement supérieur
dans le groupe apical. La mortalité chez ce type de patients,
après TAVI par voie apicale, est extrêmement élevée, de l’ordre
de 22,4%.
45
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PARTNER cohorte B : mortalité à 2 ans
80%
100
Traitement standard
TAVI
HR 0,57
IC 95% [0,44-0,75]
95
p (log rank) < 0,0001
90
85
67,6%
60%
Δ à 1 an = 20%
NNT = 5 pts
50,7%
40%
43,3%
30,7%
20%
0
6
12
Mois
80,1%
80
76,5%
75
74,2%
70
Tous (n = 2 307)
Voie transfémorale (n = 920)
Voie transapicale (n = 1 387)
65
60
Δ à 2 ans = 24,3%
NNT = 4,1 pts
0%
Survie (%)
Mortalité toutes causes (%)
100%
Registre SOURCE : survie à 1 an
18
55
50
0
24
3
6
9
12
15
Survie (mois)
18
21
Figure 1.
Figure 2.
Les données concernant les complications confirment les progrès réalisés, on note un taux d’AVC de 2,1% et la survenue
de complications vasculaires majeures dans 6,3% des cas.
risque et des critères permettant de faire le choix entre les deux
types d’intervention. Actuellement, aucun score de risque ni
aucun élément clinique ne permet de répondre à ces questions, raison pour laquelle les recommandations se réfèrent
au jugement de la Heart Team, composée de cardiologues et
de chirurgiens cardiaques. L’absence de Heart Team est une
contre-indication à la réalisation de TAVI.
Le Pr Alec Vahanian (Paris) a commenté la prise en charge des
patients à risque intermédiaire. Il a noté qu’il n’est pas recommandé actuellement de traiter ce type de patients par TAVI, en
attendant d’autres études. Le Pr Martine Gilard a ajouté que,
au-delà des scores, il faut s’intéresser à la fragilité du patient.
D’après elle, il est nécessaire de développer un nouveau score,
dédié au TAVI, en prenant en compte les différents registres
et études publiés.
■
Le TAVI : réelle alternative à la
chirurgie dans les recommandations
Le Pr Baumgartner a commenté les nouvelles recommandations
sur la prise en charge des valvulopathies.
Le point essentiel et le plus attendu de ces recommandations
concerne le TAVI puisque aucune recommandation n’existait.
Ces recommandations découlent des différents registres, mais
surtout des résultats de l’étude randomisée PARTNER.
Les résultats à 2 ans de la cohorte A de PARTNER ont validé le
fait que le TAVI peut être considéré comme une réelle alternative à la chirurgie chez les patients à haut risque. Cependant, se pose le problème de la définition du patient à haut
Dr Timmy Plastaras
D’après un symposium organisé par les laboratoires Edwards Lifesciences.
SHIFT : diminution des hospitalisations récurrentes chez les
insuffisants cardiaques chroniques avec l’ivabradine
Au cours d’une session consacrée à l’actualisation des essais cliniques, le Dr Jeffrey Stephen Borer (New York) a présenté une sous-analyse de l’étude SHIFT.
Il en ressort que chez les insuffisants
cardiaques chroniques, l’ivabradine
réduit les hospitalisations pour aggravation de la maladie et l’incidence des
réhospitalisations.
L
46
e Pr Borer a rappelé les résultats de
l’étude SHIFT (Systolic Heart Failure
Treatment with the If inhibitor ivabradine
Trial), étude internationale randomisée en
double aveugle contre placebo menée
chez 6 505 insuffisants cardiaques symptomatiques, montrant que l’adjonction de
l’ivabradine, un bradycardisant pur, au traitement conventionnel permet de réduire
de 18% l’incidence du critère composite
associant décès cardiovasculaires et hospitalisations pour insuffisance cardiaque par
rapport au placebo.
La sous-analyse de SHIFT montre qu’à 30
mois, l’incidence cumulée des hospitalisa-
tions pour insuffisance cardiaque est inférieure de 25% dans le groupe ivabradine
comparé au groupe placebo (p = 0,0002)
et que l’incidence des réhospitalisations
est diminuée. Les patients ayant reçu l’ivabradine sont moins souvent réhospitalisés
pour aggravation de leur insuffisance cardiaque que ceux du groupe placebo.
Par ailleurs, le délai entre la randomisation, la première, la deuxième et la troisième hospitalisation a tendance à être
plus long dans le groupe ivabradine que
dans le groupe placebo.
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En France, l'insuffisance cardiaque représente 1% des dépenses de santé, et le coût
des hospitalisations s'élève à 1 milliard
d'euros par an, l'ivabradine en réduisant
le nombre et la durée des hospitalisations
va donc permettre de réduire ce coût, et
avoir un impact favorable sur l'économie
de la santé.
Pour expliquer le rationnel de cette sousanalyse, le Pr Stefan Anker (Berlin, Allemagne) a souligné que les analyses ne
tenant compte que du délai entre la randomisation et la survenue d’un premier
événement composite (décès cardiovascu-
laires ou hospitalisations) ne reflètent pas
complètement le poids que représente
aujourd’hui l’insuffisance cardiaque dans
la population.
« Un patient peut mourir après une première hospitalisation ou avoir été préalablement hospitalisé plusieurs fois, ce qui
n’est pas pris en compte dans les analyses
basées sur le délai de survenue du premier
événement composite. »
Les résultats de cette sous-analyse sur
les récurrences d’hospitalisation pourraient donc permettre d’apprécier l’impact du traitement sur le fardeau que
représente l’insuffisance cardiaque.
Toutefois, comme en a convenu le
Pr Borer, cette sous-analyse comporte des
limites dans l’approche temporelle des hospitalisations : l’effet du traitement dépend
de l’évolution de la maladie, donc des hospitalisations antérieures ; par ailleurs, les
données sur le poids des hospitalisations
peuvent être influencées par les différences
existant entre les systèmes de santé.
■
Dr Micheline Fourcade
D’après la session : « Clinical trials & Registry II:
Updates on Heart Failure and
Coronary Artery disease ».
Edoxaban : un large programme de phase III dans la FA
et la thrombose veineuse
L’edoxaban est un inhibiteur direct, spécifique et réversible du facteur Xa. Il
s’adresse à la fois à la prévention des
AVC et des embolies systémiques dans
la FA ainsi qu’à la prévention et au traitement de la maladie thromboembolique veineuse, avec deux grandes
études de phase III : ENGAGE AF-TIMI 48
et HOKUSAI-VTE.
FA : prévention des AVC et
des embolies systémiques
Les études de phase II avaient établi
dans la FA non valvulaire que le traitement avec une dose unique de 30 mg
ou 60 mg/j d’edoxaban avait un profil
de tolérance identique à celui de la warfarine. Les nouveaux anticoagulants
oraux sont très attendus quand on
connaît les difficultés pour le patient à
gérer les contraintes liées à la prise
d’AVK, comme l’illustre parfaitement
l’enquête EUPS-AF (EUropean Patient
Survey in Atrial Fibrillation).
L’edoxaban est actuellement évalué
dans ENGAGE AF-TIMI 48 (Effective aNticoaGulation with factor xA next GEneration in Atrial Fibrillation), une très
large étude internationale multicentrique menée en double aveugle dans
la FA (1 400 sites cliniques de 46 pays).
Elle a inclus plus de 20 500 patients,
entre novembre 2008 et novembre
2010, ayant une FA paroxystique, permanente ou persistante authentifiée,
évoluant depuis moins de 2 ans et dont
le score CHADS2 était ≥ 2; à l’inclusion,
52% avaient un CHADS2 ≥ 3, il s’agissait
donc de patients à risque moyen ou
élevé de complications ischémiques (respectivement 32%, 30% et 87% des participants de RE-LY, ARISTOTLE et
ROCKET-AF avaient un score CHADS2
≥ 3). Ils étaient ou non naïfs d’AVK.
Les participants ont été randomisés en
3 groupes : edoxaban 30 mg/j, edoxaban 60 mg/j en monoprise et warfarine
avec une durée moyenne de suivi de
24 mois.
L’objectif primaire est de prouver la noninfériorité de l’edoxaban comparé à
l’AVK sur un critère composite : AVC,
embolies systémiques.
Les critères secondaires portent sur la
mortalité toute cause, les AVC, les
embolies, ainsi que sur les MACE, la
sécurité étant évaluée sur les saignements majeurs ou non majeurs, mais cliniquement significatifs.
« ENGAGE AF-TIMI 48 présente des
spécificités particulièrement intéressantes, a détaillé le Pr RP Giugliano
(Etats-Unis). C’est la plus large étude
randomisée menée dans la FA avec un
nouvel anticoagulant oral, son suivi
est long et elle permet de tester deux
dosages en une prise quotidienne.
C’est aussi la première à ajuster en
permanence les doses qui passent de
60 à 30 mg et de 30 à 15 mg en fonction de la clairance de la créatinine,
d’un poids < 60 kg ou de la prise
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
concomitante d‘inhibiteurs de la glycoprotéine P. »
HOKUSAI-VTE dans le
traitement et la prévention
secondaire de la thrombose
veineuse
HOKUSAI-VTE est une étude clinique
randomisée, internationale (400 centres
de 38 pays). Les 8 250 participants sont
inclus après une thrombose veineuse
(TVP) ou une embolie pulmonaire symptomatique afin de montrer la non-infériorité du traitement par HBPM et relais
par l’edoxaban 60 mg/j par rapport au
schéma classique HBPM/warfarine
(maintenant l’INR entre 2 et 3) sur un
critère associant TVP et embolie pulmonaire (EP) fatale ou non à un an.
Le critère secondaire d’efficacité
concerne la récidive de TVP symptomatique, d’EP non fatale et la mortalité
toute cause. La sécurité sera évaluée sur
la non-infériorité de l’edoxaban sur le
taux de saignements majeurs et non
majeurs cliniquement significatifs. Le
design est original par la dose unique
quotidienne, l’ajustement de la dose sur
les mêmes critères que dans ENGAGE
AF-TIMI 48 et la flexibilité de la durée
de traitement de 3 à 12 mois afin de
refléter la réalité de la pratique clinique.
Dans la thrombose veineuse, on disposait
déjà de 2 études japonaises : STARS E-3
(Studying Thrombosis After Replace-
47
Congres_ESC:modeles
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Page 48
ment Surgery) et STARS J-V après prothèse de genou ou de hanche comparant l’edoxaban 30 mg/j en une prise à
l’énoxaparine 20 mg/2 fois/j. Chez les
1 326 opérés, l’edoxaban a significativement réduit les événements du critère
primaire : TVP symptomatique ou non
et embolie pulmonaire (5,1% versus
10,7% ; RRR = 52,7% ; p < 0,001).
Ces résultats sont homogènes dans les
divers sous-groupes, quels que soient
l’âge, le poids ou les autres traitements.
Il n’y avait pas de différence sur les
saignements (4,6% sous edoxaban ver-
sus 3,7% sous énoxaparine ; p = 0,427).
Le Pr Naonobu Takahira a témoigné de
son expérience clinique « dans la vraie
vie » avec l’edoxaban qui est approuvé
depuis avril 2011 dans la prévention de
la thrombose veineuse après prothèse
de genou ou de hanche et fracture de
hanche.
Chez les 91 patients de l’hôpital universitaire de Kitasato (âge moyen : 63 ans,
63% de femmes) qui ont reçu soit de
l’edoxaban 15 mg (n = 23), soit de
l’edoxaban 30 mg (n = 68) pendant 7 à
14 jours, les résultats ont été identiques
sur la prévention des thromboses et le
risque de saignement par rapport au
fondaparinux.
La pharmacovigilance post-marketing
pour 2 000 patients sous edoxaban et
23 000 sous fondaparinux a révélé moins
d’événements indésirables, moins de saignements totaux et de saignements
graves et aucun saignement fatal sous
edoxaban.
■
Dr Maia Gouffrant
D’après une conférence de presse organisée
par les laboratoires Daiichi Sankyo.
EMPHASIS-HF : même bénéfice et sécurité d’emploi équivalente
pour l’éplérénone chez les insuffisants cardiaques à haut risque
a mortalité à 5 ans est comparable à celle observée pour les
adénocarcinomes du côlon : environ 45%. Chez les patients
souffrant d’une IC de classe II de la NYHA, la plus fréquente
(69% des IC), - considérée comme modérée -, le taux annuel de
mortalité peut atteindre 10%.
Après un épisode de décompensation, le risque de réhospitalisation à 6 mois oscille entre 30 et 60%, et la mortalité augmente après chaque nouvelle hospitalisation. Pour améliorer le
pronostic, il faut donc être efficace le plus tôt possible au cours
de l’évolution de la dysfonction ventriculaire, a souligné Johann
Bauersachs (Hanovre, Allemagne) rappelant que dans
l’EURObservational Research Programme (ESC-HF Pilot), plus de
80% des patients reçoivent un inhibiteur du système rénineangiotensine et un bêtabloquant, mais seuls 40% d’entre eux
bénéficient d’un traitement par antagoniste des récepteurs
minéralo-corticoïdes, avec des doses cibles atteintes chez seulement 25 à 30% des patients. L’application des nouvelles recommandations thérapeutiques de l’ESC devrait permettre d’améliorer la survie des patients insuffisants cardiaques, a-t-il conclu.
Ces nouvelles recommandations tiennent compte des nombreuses études publiées ces 4 dernières années, parmi lesquelles
EMPHASIS-HF qui a permis à l’éplérénone de trouver sa place
dans la prise en charge de l’IC systolique à fraction d’éjection
basse (IC classe II de la NHYA, FEVG < 35%).
avait été arrêtée avant son terme en raison de l’efficacité du
traitement actif : réduction de 37% (p < 0,0001) du critère primaire (mortalité cardiovasculaire ou hospitalisation pour insuffisance cardiaque).
Une sous-analyse de l’étude, commentée par Bertram Pitt (Ann
Arbor, Etats-Unis), a mis en évidence une réduction significative
de 47% (p < 0,001) des hospitalisations récurrentes chez les
patients sous éplérénone comparés à ceux du groupe placebo.
La crainte de l’hyperkaliémie explique la réticence de certains
médecins à utiliser les antagonistes des récepteurs minéralo-corticoïdes. Dans EMPHASIS HF, les hyperkaliémies (K+ > 5,5 mmol)
sont plus fréquentes chez les patients sous éplérénone par rapport au groupe témoin (11,8% versus 7,2% ; p < 0,001), mais
n’entraînent pas davantage d’arrêts de traitement (environ 1%
dans les 2 groupes).
L’analyse de sous-groupes de population à haut risque (patients
diabétiques ou ayant une dysfonction rénale avec un DFG
< 60 ml/min/1,73m2) a confirmé ces résultats : l’augmentation
du potassium sérique observée n’empêche pas le bénéfice clinique de l’éplérénone sur la mortalité et les hospitalisations : la
réduction du critère primaire atteint 46% chez les patients diabétiques et 38% chez les insuffisants rénaux. Pour B. Pitt, l’augmentation d’incidence des hyperkaliémies et insuffisances rénales
qui serait observée « dans la vraie vie » avec les antagonistes des
récepteurs minéralo-corticoïdes pourrait s’expliquer par une
prescription non appropriée au patient, un défaut de surveillance biologique de la kaliémie et de la fonction rénale et l’utilisation de la spironolactone 25-50 mg/j, dont les propriétés pharmacologiques diffèrent de celles de l’éplérénone (sélectivité et
affinité pour les récepteurs, demi-vie).
Résultats de l’étude EMPHASIS-HF
L’IC dans les nouvelles recommandations ESC
L’étude EMPHASIS-HF, qui compare l’éplérénone à un placebo
chez plus de 3 000 patients avec FEVG < 30% en classe II de la
NYHA, avec traitement de fond optimal par IEC et bêtabloquant,
Faïez Zannad (Vandœuvre-lès-Nancy, France) est revenu sur la
mise à jour des recommandations européennes sur l’insuffisance
cardiaque qui s’est particulièrement attachée aux niveaux de
Malgré les énormes progrès thérapeutiques réalisés ces dernières décennies, l’insuffisance cardiaque systolique reste
un problème de santé publique majeur, l’incidence et la prévalence de la pathologie ne cessant de progresser.
L
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preuve, établis sur la base des nombreux travaux menés dans
l’IC ces dernières années, mais aussi à leur application en pratique quotidienne. La gestion du traitement par les antagonistes des récepteurs minéralo-corticoïdes y est clairement
détaillée : une bonne prescription est synonyme de prescription aux bons patients et aux bonnes doses - initiation du traitement à dose faible, sans dépasser les 50 mg/j - avec une surveillance adaptée à l’état fonctionnel des patients (vigilance
accrue chez les sujets âgés, fragiles, avec une dysfonction rénale
sous-jacente), mais aussi aux événements intercurrents
(déshydratation, troubles digestifs, associations médicamenteuses : supplémentation potassique, AINS ou autres
médicaments néphrotoxiques).
Faïez Zannad a aussi rappelé l’importance de l’éducation du
patient et de son entourage pour limiter le risque de complications.
Analyse coût/efficacité de la prise en charge de
l’insuffisance cardiaque
Enfin, J. McMurray (Glasgow, Royaume-Uni) a terminé en abordant les aspects économiques de la prise en charge de l’insuffisance cardiaque, soulignant son coût élevé, principalement
lié à celui des hospitalisations (69%).
Dans l’étude EMPHASIS-HF, le nombre d’hospitalisations et le
nombre cumulé d’hospitalisations, critère reflétant la survie,
la progression et aussi le coût de la prise en charge de l’insuffisance cardiaque, ont été réduits et l’analyse coût/efficacité
utilisant l’unité de mesure QALY (Quality Adjusted Life Year)
fait apparaître un rapport coût/bénéfice favorable pour l’éplérénone.
■
Dr Pascale Lefèvre
D’après un symposium organisé par les laboratoires Pfizer.
Prise en charge de l'hypertension artérielle pulmonaire associée
aux cardiopathies congénitales
En présentant deux cas cliniques, le
Dr Dimopoulos (Londres) et le Pr Rosenkranz (Cologne) ont permis de discuter
de la gestion actuelle et des difficultés
rencontrées lors de la prise en charge
des patients ayant une hypertension
artérielle pulmonaire (HTAP) associée à
une cardiopathie congénitale.
Syndrome d'Eisenmenger
Le syndrome d’Eisenmenger (ES) est
l’évolution ultime d’un shunt gauchedroit non corrigé précocement : canal
artériel persistant, communication interventriculaire, canal atrioventriculaire.
Ce shunt va entraîner des lésions artériolaires pulmonaires, qui elles-mêmes
auront pour conséquence une élévation
des résistances vasculaires pulmonaires
(RVP), puis une inversion du shunt et
donc une cyanose.
Historiquement, la gravité des ES a été
comparée à celle des autres formes
d’HTAP, dont la mortalité est plus élevée. La gestion globale des patients se
limitait alors à des mesures de soutien :
supplémentation martiale, saignées, diurétiques. Aujourd’hui, il ne fait nul doute
que l’ES est une maladie grave et progressive, associée à une mauvaise qualité de vie et à un mauvais pronostic,
relevant d’un traitement spécifique.
L’étude BREATHE-5 a montré que le
bosentan (Tracleer), un antagoniste des
récepteurs de l’endothéline, réduit significativement les RVP et améliore la distance parcourue au test de marche des
6 min, sans aggraver ni le shunt ni la cyanose. Selon les recommandations européennes, le bosentan est un des traitements de première intention chez les
patients en classe fonctionnelle III avec
ES (recommandation IB). Par ailleurs,
plusieurs études sur les prostanoïdes et
les inhibiteurs de la 5-phosphodiestérase
ont montré leur efficacité sur l’amélioration des paramètres hémodynamiques
et sur le statut fonctionnel des patients
avec ES.
HTAP après correction
chirurgicale cardiaque
La réparation chirurgicale est le traitement de choix pour la plupart des
enfants présentant une cardiopathie
congénitale hémodynamiquement significative. Le timing de la chirurgie est
essentiel, car elle doit être réalisée avant
que ne se développe la maladie vasculaire pulmonaire. L‘élévation des RVP
peut survenir en postopératoire (aiguë)
ou plus tardivement (chronique).
En postopératoire immédiat de correction d’un shunt, une élévation brutale
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
des RVP n’est pas rare, appelée crise
d’hypertension pulmonaire. Malgré un
taux de mortalité élevé, > 20%, ces épisodes sont en général transitoires, et les
patients considérés par la suite comme
guéris. Cependant, 12 à 13% d’entre eux
vont développer une HTAP.
L’HTAP chronique résiduelle est de moins
bon pronostic que si la chirurgie n’avait
pas été réalisée. L’étude rétrospective
pédiatrique de Haworth, et al. (Heart
2009) montre que cette sous-population
a une survie moins bonne que les
patients avec ES.
Chez l’adulte, le défect peut souvent
passer inaperçu, faisant porter à tort le
diagnostic d’HTAP primitive, et contribue au retard de prise en charge chirurgicale de la malformation.
Même si les études font défaut dans
cette pathologie, les traitements spécifiques de l’HTAP (prostanoïdes, antagonistes des récepteurs de l’endothéline,
inhibiteurs de la 5-phosphodiestérase)
peuvent être bénéfiques.
D’autres études sont nécessaires pour
améliorer la prise en charge de ces
patients, et pour mieux comprendre les
mécanismes qui mènent à l’HTAP parfois plusieurs années après chirurgie. ■
Dr Sarah Cohen
D’après un symposium organisé
par les laboratoires Actelion.
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Réduire le risque d’AVC dans la FA : une approche risque/bénéfice
La prévention des AVC en cas de fibrillation atriale est en pleine évolution. Les
données cliniques récentes et l’actualisation des recommandations de l’ESC
simplifient les messages à transmettre.
A
la différence des AVK, les nouveaux
anticoagulants oraux ont l’avantage
de ne pas nécessiter de monitoring avec de
faibles interactions médicamenteuses et alimentaires. Quel que soit le nouvel anticoagulant oral étudié, le taux d’hémorragies
intracrâniennes est inférieur à celui observé
sous AVK.
Les messages clés
des recommandations 2012
Tous les anticoagulants (AVK et les nouveaux) sont indiqués en classe I avec un
niveau de preuve A chez les patients avec
FA et indication d’anticoagulation.
Les femmes de moins de 65 ans ont le
même risque que les hommes du même
âge et ne justifient aucun traitement antithrombotique en l’absence d’autres facteurs de risque. Les nouveaux anticoagulants sont indiqués en première intention
et préférés aux AVK (IIa A). Enfin, les antiagrégants ont quasiment disparu.
L’apixaban supérieur aux AVK
même chez l’insuffisant rénal
L'étude ARISTOTLE a inclus des patients présentant une FA non valvulaire et qui avaient
au moins un facteur de risque d'AVC. Les
patients ont été randomisés en 2 groupes
pour recevoir soit de l'apixaban 5 mg
2 fois/j (2,5 mg 2 fois/j chez les patients à
risque), soit de la warfarine. Le critère primaire comprenait les AVC et les embolies
systémiques. Il s’agit d’une étude de noninfériorité, mais une analyse de supériorité
était prévue.
Dans le groupe apixaban, une diminution
significative du critère primaire de 21%
(1,2%/an sous apixaban versus 1,60%/an
sous warfarine [HR : 0,79]) ainsi qu’une
diminution significative des hémorragies
majeures, principal critère de tolérance
(réduction du risque de 31% [HR : 0,69] ;
p = 0,047), ont été retrouvées. Parmi les critères secondaires, il a été noté une diminution des hémorragies intracrâniennes et une
réduction de la mortalité totale (- 11%). La
sous-étude présentée à l’ESC a évalué les différences entre apixaban et warfarine selon
le degré d’altération de la fonction rénale,
ses résultats montrent que :
- l'apixaban est plus efficace que la warfarine sur le critère primaire quel que soit le
degré d'insuffisance rénale ;
- il y a moins d’hémorragies majeures sous
apixaban : la baisse pouvant atteindre
50% chez les patients ayant une clairance
de la créatinine à 50 ml/min.
En conclusion, la supériorité de l’apixaban
comparé à la warfarine en termes d’efficacité et de tolérance se maintient même en
cas d’insuffisance rénale.
■
Dr Michel Brenil
D’après un symposium organisé
par les laboratoires BMS-Pfizer.
Dyslipidémie : le risque cardiovasculaire au centre de la prise
en charge
Les recommandations ESC-EAS sur la prise en charge des dyslipidémies mettent au centre de la stratégie l’évaluation du risque
cardiovasculaire avec le LDL-cholestérol comme cible thérapeutique principale.
C
hez les patients à très haut risque cardiovasculaire, l’objectif
est d’obtenir un taux de LDL-C < 0,70 g/l ou de le réduire d’au
moins 50% ; chez les patients à haut risque, le taux de LDL-C devra
être < 100 mg/l, et chez ceux à risque modéré, il devra être
< 115 mg/l. Les statines, dont l’efficacité sur la réduction du LDL-C
a été démontrée, sont utilisées en première intention, néanmoins
chez de nombreux patients à haut risque, les valeurs cibles recommandées ne sont pas atteintes.
Les options thérapeutiques sont alors soit d’augmenter la posologie, soit de passer à une statine plus puissante, soit d’avoir recours
à une association : statine-ézétimibe (un inhibiteur de l’absorption
intestinale du cholestérol) ou statine-acide nicotinique. L’addition
d’ézétimibe à une statine réduit de 19% à 23% le taux de LDL-C
par rapport à la statine seule ; son effet sur la morbi-mortalité cardiovasculaire est en cours d’évaluation dans l’étude IMPROVE-IT.
L’acide nicotinique augmente le taux de HDL-C, diminue les taux
de LDL-C et de triglycérides chez les patients traités par une statine, mais ses effets sont dose-dépendants, et la plupart des
50
patients n’atteignent pas la dose de 2 g/j en raison des effets secondaires, dont les plus importants sont des bouffées vasomotrices
par vasodilatation cutanée (flushs).
Le laropiprant, un antagoniste sélectif des récepteurs de type 1
de la prostaglandine D2, récepteurs dont la stimulation provoque
une vasodilatation, permet d’améliorer la tolérance de l’acide nicotinique. L’étude de Maccubbin montre que la combinaison fixe
d’acide nicotinique (2 g) et de laropiprant (40 mg) associée à un
traitement par une statine réduit significativement les bouffées
vasomotrices, effet qui se maintient à long terme (> 24 semaines).
HPS2-THRIVE (Treatment of HDL to reduce the incidence of vascular events) est une vaste étude destinée à évaluer les effets de
la combinaison fixe acide nicotinique (2 g)-laropiprant (40 mg)
associée à un traitement par statine (40 mg/j) et ézétimibe sur les
événements cardiovasculaires chez des patients âgés de 50 à
80 ans ayant des antécédents d’infarctus du myocarde, d’AVC, ou
d’athérosclérose périphérique.
25 673 patients recrutés dans des centres coordinateurs au
Royaume-Uni, en Scandinavie et en Chine ont été randomisés
pour recevoir, associé à la statine, soit un placebo, soit la combinaison acide nicotinique-laropiprant, avec un suivi de 4 ans. Les
résultats sont attendus en 2013.
■
Dr Micheline Fourcade
D’après un symposium organisé par les laboratoires MSD-Chibret.
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actuamedicament:art
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Actualité
I Événements - AMM - nouvelle indication - conditionnement I
Le rivaroxaban obtient l’AMM dans deux nouvelles indications
Le rivaroxaban est le premier inhibiteur direct du facteur Xa administré par voie orale approuvé en France
dans trois indications, dont deux nouvelles.
L
e rivaroxaban (Xarelto, laboratoires Bayer HealthCare) vient
d’obtenir le remboursement dans deux nouvelles indications :
- la prévention des accidents vasculaires cérébraux (AVC) et des
embolies systémiques chez les patients atteints de fibrillation
atriale (FA) non valvulaire et présentant un ou plusieurs facteurs de risque : insuffisance cardiaque congestive, hypertension artérielle, âge ≥ 75 ans, antécédents d'AVC ou d'accident
ischémique transitoire sans surveillance biologique en routine ;
- le traitement des thromboses veineuses profondes (TVP) et la
prévention des récidives sous forme de TVP ou d'embolie pulmonaire (EP) suite à une TVP aiguë chez l'adulte.
Xarelto a été spécifiquement développé pour être administré
en une seule prise par jour afin de favoriser l'adhésion au traitement et d’améliorer l'observance : la dose recommandée est
de 20 mg/j, ou de 15 mg en cas d'insuffisance rénale modérée
à sévère.
Les nouvelles recommandations internationales (ESC 2012) pour
la prévention de l'AVC et des embolies systémiques en cas de
FA non valvulaire préconisent un anticoagulant oral pour
presque tous les patients (seuls ceux âgés de moins de 65 ans
avec une FA isolée ou présentant une contre-indication peuvent
ne pas recevoir d'anticoagulant) et confirment que les nouveaux
anticoagulants (dont le rivaroxaban) offrent une prise en charge
efficace (non-infériorité établie) avec un bon profil de tolérance ;
elles les positionnent en alternative à la prise en charge conventionnelle par antivitamines K (AVK), dans le respect de l'indication validée.
La place du rivaroxaban a été établie dans la prévention de l'AVC
chez les patients atteints de FA, en alternative à la prise en charge
conventionnelle par AVK et en alternative à la prise en charge
combinée HBPM + AVK dans le traitement de la TVP et la prévention de sa récidive sous forme de TVP et d’EP.
Les limites de maniabilité avec les thérapeutiques actuelles expliquent pourquoi les AVK sont la première cause de iatrogénie
médicamenteuse en France. « Le problème fondamental est
l'anticoagulation à long terme avec les antivitamines K, a déclaré
le Pr Jean-Marc Davy (Montpellier). Ces médicaments ont une
bonne efficacité, mais une fenêtre thérapeutique étroite. La
dose requise peut varier de manière importante d'un individu
à un autre, et il y a de nombreuses interactions avec les médicaments et l'alimentation, de sorte que les contrôles réguliers effectués par le biais des analyses biologiques de la coagulation sont
inévitables. » En revanche, peu d'interactions cliniquement significatives avec d'autres médicaments sont observées avec le rivaroxaban qui ne nécessite ni restrictions alimentaires ni examens
biologiques de routine.
■
D'après une conférence de presse des laboratoires Bayer HealthCare.
Dénervation rénale : première étude de faisabilité avec
le système Symplicity de prochaine génération
Medtronic annonce avoir achevé avec succès la première phase de l’étude de faisabilité de son système de
dénervation rénale composé d’un cathéter multiélectrodes et d’un générateur de radiofréquence (RF) élaboré. Au total, 9 patients ont été traités avec un taux
de succès de 100% pour l’accès aux vaisseaux et l’administration du traitement.
L
e système de dénervation rénale de prochaine génération
se fonde sur l'expérience acquise par Medtronic avec le
système Symplicity dans le traitement de l’hypertension artérielle résistante. Il comportera un nouveau cathéter à
4 électrodes fournissant de l’énergie RF simultanément. Il est
conçu pour réduire considérablement le temps d’ablation
durant les procédures de dénervation rénale et sera compatible 6 Fr, hautement conformable et non occlusif. Cette nouvelle conception est destinée à faciliter la mise en place et la
cohérence de l’application d’énergie RF tout en permettant
le traitement d’une grande diversité d’anatomies rénales.
CONSENSUS CARDIO pour le praticien - N° 82 • Octobre 2012
Le système de dénervation rénale Medtronic de prochaine
génération est également composé d’un nouveau générateur doté d’une interface utilisateur améliorée et sera compatible avec le cathéter Symplicity à une seule électrode et
avec le cathéter multiélectrodes de prochaine génération.
« La dénervation rénale est une évolution importante dans
la gestion du traitement de l’hypertension résistante », a
déclaré Robert Whitbourn (Melbourne, Australie), principal
investigateur de l’étude. « Ce système de prochaine génération présente plusieurs fonctions novatrices qui pourraient
faire évoluer cette procédure en offrant la flexibilité nécessaire au traitement d’une grande diversité d’anatomies, tout
en aidant à améliorer l’efficacité des soins grâce à une réduction significative des temps d’ablation et de procédure. »
« Cette étude de faisabilité symbolise l’engagement de
Medtronic à offrir aux médecins une gamme plus étendue de
solutions pour la réalisation de dénervations rénales », a
déclaré Sean Salmon, senior vice-président et président de la
division Coronaire et Dénervation Rénale de Medtronic. ■
D’après un communiqué de presse de Medtronic.
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