10 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XX - n° 1 - janvier 2011
Cancers du sein
DOSSIER THÉMATIQUE
Rétrospective 2010
Partant de la constatation qu’il y avait environ 20 %
d’erreurs dans la détermination des récepteurs
hormonaux aux estrogènes (RE) et à la progestérone
(RP), les recommandations pour la standardisation
des dosages ont été publiées par l’ASCO dans le
Journal of Clinical Oncology (19) : elles préconisent
de déterminer ces récepteurs pour toute tumeur
invasive primitive ou en récidive, définissent les
contrôles positifs et négatifs mais prescrivent un
seuil de 1 % des cellules marquées, ce qui n’est pas
en adéquation avec les standards français recom-
mandant un seuil de 10 % de positivité.
◆Les cellules tumorales circulantes
La détection des cellules tumorales circulantes (CTC)
dans le sang des patientes traitées pour un cancer du
sein est un sujet de recherche en pleine expansion.
B. Rack et al. (20) ont présenté les résultats de
l’étude SUCCESS, qui évaluait la détection des CTC
par la technique CellSearch® avant une chimiothé-
rapie adjuvante chez 2 026 patientes. Le taux de
positivité était de 21,5 % en utilisant le seuil d’une
seule cellule détectée. Avec un recul de près de 3 ans,
la présence de CTC était un facteur pronostique
indépendant, en analyse multivariée, de la survie sans
récidive (SSR) et de la survie globale (SG). Il s’agit de
la plus grande étude démontrant l’intérêt des CTC
en situation non métastatique. L’étude française
IC 2006-04 (21), multicentrique, visait à valider
prospectivement la détection des CTC en première
ligne de chimiothérapie à la phase métastatique
comme facteur pronostique, et surtout prédictif,
du bénéfice du traitement chez 267 patientes. Cette
étude confirme la valeur pronostique indépendante
des CTC, et surtout vis-à-vis des marqueurs sériques
comme le CA 15.3 et l’ACE. De plus, la décroissance
du taux de CTC dès le premier cycle de chimio-
thérapie était associée à un meilleur pronostic. La
technique CellSearch® a été validée par la Food and
Drug Administration (FDA) et peut être utilisée aux
États-Unis. Cependant, l’utilisation en routine de cet
examen demande d’abord à être validée dans des
essais interventionnels qui associent la poursuite ou
l’arrêt d’une ligne de traitement à la diminution des
CTC après un cycle de chimiothérapie. Le coût de
cette technologie reste très supérieur à celui d’un
simple dosage de marqueur tumoral sérique.
◆Autres facteurs pronostiques
La valeur pronostique de la signature de 21 gènes
obtenue par PCR (Polymerase Chain Reaction) dite
Oncotype® a été appliquée rétrospectivement sur
367 échantillons de l’essai de phase III SWOG-8814
comparant, chez des patientes ménopausées avec
une atteinte ganglionnaire axillaire et une tumeur
RH+, tamoxifène avec ou sans chimiothérapie de
type CAF (cyclophosphamide, doxorubicine, 5-FU).
Le bénéfice de la chimiothérapie apparaissait en cas
de Recurrence Score (RS) élevé. En revanche, dans les
cas avec un RS faible, l’addition de la chimiothérapie
au tamoxifène ne réduisait pas significativement le
risque de récidive, ce qui conduit à envisager une
stratégie adjuvante sans chimiothérapie, même
en cas d’atteinte ganglionnaire quand la tumeur
exprime les récepteurs hormonaux et a une signature
Oncotype® (RS) de bon pronostic (22).
La signature dite “intrinsèque”, obtenue par puce
d’expression, permet de définir différents sous-
types de cancer du sein, dont les 5 principaux sont :
luminal A, luminal B, basal-like, HER2 et normal
breast-like – l’existence de cette dernière entité
étant très discutée. Il y a plusieurs définitions de
cette signature, et des améliorations restent néces-
saires pour permettre la reproductibilité de cette
classification pour un échantillon donné (23). L’uti-
lisation de cette classification permet d’améliorer
l’évaluation du pronostic. Plus de 10 000 cancers
du sein, inclus dans 12 études différentes, ont été
analysés en déterminant les différents sous-types
par immunohistochimie (IHC) : RE, RP, HER2 et un
marqueur dit basal soit EGFR (Epidermal Growth
Factor Receptor) ou cytokératine 5 et/ou 6 (24).
La mortalité est constante dans le temps pour les
formes luminales (HER2–), alors que pour les formes
HER2+ et non luminales (formes TN), le risque est
majeur pendant les 5 premières années et diminue
ensuite fortement. De même, l’utilisation de
6 marqueurs immunohistochimiques confirme que
les tumeurs de type luminal A ont un moindre risque
de récidive locale ou locorégionale (25). Cependant,
les classifications utilisant des outils moléculaires
comme les puces d’expression et l’IHC ne sont pas
strictement équivalentes. Ainsi, une classification
de type PAM50, qui évalue par radiochimiothérapie
(RT)-PCR 50 gènes identifiés initialement par puce
d’expression semble plus discriminante que l’IHC
pour les sous-types et le pronostic (26). Enfin, le
profil de dissémination métastatique est également
défini par ces sous-types comme, par exemple, plus
de localisations cérébrales, pulmonaires ou ganglion-
naires à distance et moins d’atteintes hépatiques
pour les formes de type basal-like (27). Une autre
signature, le Genomic Index®, peut permettre de
prédire la sensibilité au tamoxifène (28). Il faut
également noter une amélioration du score de
Nottingham en y intégrant HER2 et le RP (29).