La Lettre du Cardiologue - n° 309 - mars 1999
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e 6eForum de rythmologie, qui s’est tenu récemment à
l’initiative du Collège des cardiologues d’Ile-de-France,
a permis de faire le point sur deux sujets controversés
rencontrés en pratique courante : la conduite à tenir devant une
tachycardie ventriculaire non soutenue découverte au holter et
l’indication du traitement anticoagulant dans la fibrillation auri-
culaire du sujet âgé. Ces thèmes ont donné lieu à de vives dis-
cussions.
CONDUITE À TENIR DEVANT UNE TACHYCARDIE VENTRICU-
LAIRE NON SOUTENUE (TVNS) DÉCOUVERTE AU HOLTER
(S. Kacet, Lille)
Dans un cabinet cardiologique de ville, on trouve des TVNS
asymptomatiques chez 2 à 3 % des patients, sans cardiopathie
sous-jacente connue ; elles représentent 2 à 3 cas par cardiologue
et par an.
Définition
Elle diffère selon les auteurs :
–3 extrasystoles ventriculaires successives, avec une fréquence
cardiaque 100/minute, et < 30 secondes ;
–3 extrasystoles ventriculaires successives, avec une fréquence
cardiaque 120/minute, et < 30 secondes ;
–3 à 30 extrasystoles ventriculaires successives, avec une fré-
quence cardiaque 120/minute (figure 1).
Démarche diagnostique et thérapeutique
L’essentiel est de répondre à la question suivante : existe-t-il une
cardiopathie sous-jacente ? L’interrogatoire du patient sur ses
antécédents personnels et familiaux, l’examen clinique, les explo-
rations complémentaires (électrocardiogramme, radiographie
pulmonaire, échocardiographie, épreuve d’effort, recherche de
potentiels tardifs, IRM cardiaque en cas de forte suspicion de dys-
plasie arythmogène du ventricule droit) permettent de distinguer
deux sous-groupes.
TVNS sans cardiopathie
L’existence ou non d’une TVNS n’a pas de valeur pronostique.
Il n’y a donc pas de justification à un traitement antiarythmique,
sauf si le patient est symptomatique ; dans ce cas, le seul traite-
ment éventuel à envisager repose sur les bêtabloquants.
TVNS avec cardiopathie
Cardiopathie non ischémique
Dysplasie arythmogène du ventricule droit (DAVD) : l’existence
d’une TVNS concerne un patient sur trois ayant une DAVD. Son
caractère polymorphe et sa sensibilité aux catécholamines consti-
tuent un facteur de risque de mort subite. Un traitement par bêta-
bloquant est conseillé, même si aucune étude contrôlée n’a
démontré un bénéfice en termes de mortalité.
Cardiomyopathie dilatée (CMD) : dans 20 à 80 % des cas, on
note une TVNS. La stimulation ventriculaire programmée a un
intérêt controversé. L’étude GESICA a montré la signification
pronostique péjorative de la présence d’une TVNS avec une dys-
fonction ventriculaire gauche importante (fraction d’éjection
<20%):la mortalité globale est augmentée (mort subite et mort
par insuffisance cardiaque). Le traitement des TVNS par amio-
darone ne modifie pas le pronostic.
Cardiomyopathie hypertrophique (CMH) : les TVNS sont un fac-
teur de mauvais pronostic en cas de jeune âge, d’antécédents de
syncope, d’existence d’une ischémie myocardique et de tachy-
cardie ventriculaire inductible par stimulation programmée.
Cependant, l’intérêt de la stimulation ventriculaire programmée
est controversé car les résultats de cette exploration sont non spé-
cifiques. L’intérêt de traiter par amiodarone ces TVNS de mau-
vais pronostic n’est pas démontré (Mac Kenna et Kuck).
Hypertension artérielle (HTA) : la présence d’une TVNS est cor-
rélée à la présence d’une hypertrophie ventriculaire gauche. Dans
ce cas, la valeur pronostique de la TVNS est peu claire ; la dimi-
nution de son incidence n’est pas corrélée à une augmentation de
survie des patients.
Prolapsus valvulaire mitral (PVM) : l’incidence des TVNS est
d’environ 20 % ; il n’y a pas de preuve que leur présence ait un
retentissement sur le pronostic à long terme.
Cardiopathie ischémique
Depuis l’étude CAST, on sait que la diminution des ESV et des
TVNS par les antiarythmiques de classe Ic s’associe à une aug-
mentation de la mortalité. Il n’y a pas de relation entre le risque
de mortalité de la TVNS et sa durée, son cycle, sa récurrence, son
inductibilité et ses circonstances de survenue.
Stratification du risque : différents paramètres permettent de juger
de la signification péjorative d’une TVNS.
Sixième forum de rythmologie
L
Figure 1. Tachycardie ventriculaire à 180/mn avec aspect de retard droit.
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ECG haute amplification, QRS filtrés > 120 ms : valeur pré-
dictive positive de 17 %, valeur prédictive négative de 98 % ;
l’absence de potentiel tardif est un facteur de bon pronostic.
Altération de la fraction d’éjection lorsqu’elle est < 40 %.
La variabilité du rythme sinusal multiplie par 5 la mortalité
post-infarctus myocardique.
Stimulation ventriculaire programmée : valeur prédictive posi-
tive de 18 %, valeur prédictive négative de 93 % ; l’absence de
TV inductible est un facteur de bon pronostic (l’inverse n’est pas
vrai).
Principales études sur le traitement médical et le défibrillateur
automatique implantable (DAI) :
–L’étude CAST a montré l’effet délétère des antiarythmiques de
classe Ic.
–L’étude SWORD avec le D-sotalol a dû être interrompue.
–L’étude CAMIAT, étudiant l’amiodarone avec une fonction ven-
triculaire gauche altérée, n’a pas montré d’augmentation de la
mortalité globale ; il existe même une diminution de la mortalité
rythmique.
–L’étude MADIT concerne une population âgée de 25 à 80 ans,
avec un antécédent d’infarctus myocardique, la présence de
TVNS, une fraction d’éjection ventriculaire gauche < 35 %, un
stade I à III de la NYHA et des tachycardies ventriculaires sou-
tenues inductibles et non supressibles par procaïnamide. Cette
étude a comparé le pronostic de ces patients sous traitement anti-
arythmique conventionnel et sous DAI. L’étude a été arrêtée pré-
maturément car la mortalité dans le groupe DAI était réduite de
54 %. Aux États-Unis, une TVNS avec fraction d’éjection ven-
triculaire gauche < 35 % et une tachycardie ventriculaire induc-
tible non suppressible sont des indications à la mise en place d’un
DAI.
–L’étude MUSTT est en cours. Elle compare par randomisation
le traitement antiarythmique adapté guidé par le “serial testing”
et le DAI dans une population de patients avec antécédents d’in-
farctus myocardique avec TVNS, fraction d’éjection ventricu-
laire gauche < 40 % et tachycardie ventriculaire inductible.
La discussion finale a reposé essentiellement sur l’indication du
DAI : on pose, aux États-Unis, 150 DAI/million d’habitants, pour
7 DAI/million d’habitants en France. Le Pr Kacem a mis en avant
l’attitude trop “frileuse” des Français dans leur indication de pose
de DAI. Par ailleurs, la stimulation programmée n’a pas d’inté-
rêt pour évaluer un traitement antiarythmique (sauf cas très par-
ticulier). Enfin, l’association bêtabloquant-amiodarone n’a jamais
démontré son efficacité.
Le tableau résume la conduite à tenir devant une TVNS décou-
verte au holter.
FIBRILLATION AURICULAIRE (FA) DU SUJET ÂGÉ : QUEL TRAI-
TEMENT ANTICOAGULANT ?
(G. Kirkorian, Lyon)
Faut-il donner un traitement antithrombotique au suget âgé de
plus de 80 ans en FA, et, si oui, lequel ?
Caractéristiques de la FA du sujet âgé
La FA est une affection du sujet âgé, touchant particulièrement
le sexe masculin et le plus souvent associée à une cardiopathie
sous-jacente (figure 2). Dans une population âgée de plus de
80 ans, 10 % des sujets sont en FA.
La FA est un facteur majeur de risque d’accident vasculaire céré-
bral (AVC), indépendamment de l’existence ou non d’une valvu-
lopathie rhumatismale. Le risque d’AVC augmente aussi avec l’âge,
l’HTA, la maladie coronaire, une insuffisance cardiaque ; plus l’âge
augmente, plus la FA est un facteur d’AVC prépondérant.
C’est dans cette population âgée de plus de 80 ans en FA que le
risque d’AVC est important et que la prescription d’un anticoagu-
lant pose le plus de problèmes. Le risque hémorragique est lié à
l’âge (+ 32 % tous les 10 ans), à l’International normalized ratio
(INR) (+ 5,4 % par unité d’INR) et au produit utilisé. La dose
d’AVK nécessaire pour obtenir un INR efficace est de 25 à 50 %
moindre chez le sujet âgé que chez le sujet jeune. L’accident hémor-
ragique sous AVK est d’autant plus grave que le sujet est plus âgé.
Pas de cardiopathie :
pas de traitement
bêtabloquant si signes fonctionnels
Cardiopathie ischémique :
stratification du risque
DAI si FE < 35 %, TV inductible non suppressible
Cardiopathie non ischémique :
dysplasie arythmogène du ventricule droit : discuter bêtablo-
quant
cardiomyopathie hypertrophique : amiodarone si signes fonction-
nels ?
cardiomyopathie dilatée, hypertension artérielle, prolapsus val-
vulaire mitral : amiodarone/bêtabloquant si signes fonctionnels,
mais pas de modification du pronostic
Tableau. Conduite à tenir devant une tachycardie ventriculaire non
soutenue découverte au holter.
Figure 2. Arythmie complète par fibrillation auriculaire avec bloc de
branche droit complet et séquelle d’infarctus inférieur.
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Prévention des AVC emboliques par AVK
L’ensemble de 7 études randomisées comparant warfarine et aspi-
rine a montré le bénéfice du traitement par AVK, avec une dimi-
nution du risque d’AVC de 70 % ; cependant, la population était
peu représentative et une seule étude était réalisée en double
aveugle.
Les éléments en faveur d’un bénéfice du traitement par AVK sont
au nombre de 5 : âge > 65 ans, antécédents d’AVC, HTA, insuf-
fisance cardiaque et diabète.
Pour que le traitement soit efficace, le taux d’INR doit être pris
en compte : le risque embolique augmente quand l’INR est < 2
(dans l’étude SPAF 2, le taux d’AVC était important sous AVK
avec un INR compris entre 1,2 et 1,5, associé à l’aspirine). Le
risque d’hémorragie cérébrale sous AVK est de 0,8 à 1,3 %.
L’étude SPAF 2 ne montre pas de bénéfice du traitement par
AVK:la diminution des AVC emboliques s’accompagne d’un
risque hémorragique plus important, surtout après 75 ans. Il faut
cependant souligner que, dans cette étude, l’INR recherché était
compris entre 2 et 4,5 ; or, si l’on reconnaît que le risque embo-
lique augmente quand l’INR est < 2, le risque hémorragique est
augmenté quand l’INR est > 3.
En pratique
Les AVK sont sous-utilisés par les cardiologues : seuls (un tiers)
des patients de plus de 80 ans ayant une indication aux AVK sont
sous ce traitement. Étant donné les caractéristiques de cette popu-
lation âgée, il faut être très vigilant ; il faudra prendre en compte
la faisabilité de la surveillance du traitement, le cadre de vie, l’en-
tourage familial, les facultés intellectuelles du patient. L’INR
devra se situer entre 2 et 3. L’aspirine sera utilisée lorsque les
AVK seront contre-indiqués.
M.L. Lachurié, ACCA, Hôp. Paul-Brousse, Villejuif
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Prénom ..........................................................................................
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