16 | La Lettre du Gynécologue • n° 376 - novembre 2012
DOSSIER Cancer du sein : peut-on influer sur son destin ?
Mais c’est en cas de traitement par les anti-aromatases
que la pratique d’exercices physiques, en particulier
renforcement musculaire, assouplissements et maintien
des mobilités articulaires, par le yoga par exemple, a
montré des bénéfices intéressants sur les arthralgies
(18). Ainsi, la pratique d’exercices diminue les douleurs,
principalement celles liées au traitement. Plusieurs
mécanismes peuvent être évoqués, l’amélioration des
amplitudes articulaires de l’épaule homolatérale, le
maintien de la force musculaire, voire un mécanisme
central par la production de bêta-endorphines. L’activité
physique adaptée fait partie des traitements adjuvants
des douleurs liées au traitement.
Sport et lymphœdème
Après de nombreuses années de restrictions d’acti-
vités physiques du côté du bras homolatéral par peur
d’un lymphœdème, cette crainte injustifiée persiste
encore chez les patientes. Les différents travaux ne
font plus l'objet de controverse et il est clair que l’acti-
vité physique ne majore pas le risque de lymphœdème
et n’aggrave pas un lymphœdème secondaire (19,
20). Des exercices courts et progressifs en durée et en
intensité améliorent les capacités musculaires du bras
et évitent que le déconditionnement à l’effort muscu-
laire n’induise des lésions ou une réponse inflam-
matoire inappropriée lors des activités physiques
du quotidien. Aussi, peut-on rassurer nos patientes
: proposer une activité physique ou sportive limite le
risque de lymphœdème (21).
Quelle activité physique
ou sportive proposer ?
Qu’il s’agisse d’une activité d’endurance en aérobie
(marche, séances sur ergocycle), d’une activité
contre résistance (renforcement musculaire) ou de
l’association des deux, de moyenne intensité, d’une
durée de 30 min ou de 1 heure atteinte progressi-
vement par paliers de 15 min pour un minimum
de 3 heures par semaine, le choix sera celui de la
patiente, choix adapté à son état, en concertation
avec son oncologue ou son médecin de suivi.
Rappel des principes de bonne
pratique du sport
➤
Un bilan médical d’évaluation des aptitudes et
des éventuelles contre-indications, en particulier
troubles du rythme cardiaque, insuffisance respira-
toire sévère, dénutrition sévère, métastases osseuses
du bassin ou du rachis.
➤
Des conseils d’hydratation suffisante avant et
pendant les séances, respect d’une période d’échauf-
fement et de récupération, vêtement adapté.
➤
Une intensité modérée, contrôlée par un test de
la parole ou par la fréquence cardiaque (FC) corrigée,
soit la fréquence maximale théorique (FMT) [200/
âge]-FC de la patiente, ce qui correspond à 50 %
de la FMT.
➤Une pratique sportive régulière et progressive.
Une activité physique est régulière si elle est adaptée
à l’état physique et choisie parmi un panel d’activités.
Quelques expériences ont fait des émules et, grâce
à l’engagement des fédérations dans le sport santé
et à la formation des éducateurs sportifs en sport
adapté, ont permis de développer des pratiques aussi
variées que le karaté, l’escrime, la gymnastique, le
dragon boat (Pr Lecuru).
Les risques traumatiques lors d’une pratique spor-
tive d’intensité modérée sont hypothétiques, mais
il est de bon sens que, chez les patientes ayant un
stade évolué avec métastases osseuses, une activité
encadrée (ergocycle, yoga) soit préférée, si elle est
possible.
Seul l’état physique vient limiter la pratique sportive
vigoureuse, en conséquence, c’est bien une reprise
d’activité modérée, progressive et encadrée pour
tenir compte de l’état clinique et du stade du cancer
qui apporte le maximum de chance à la patiente,
activité qui sera élargie dans un second temps si
elle le souhaite.
Conclusion
La problématique est moins le choix d’un sport
possible que la formation d’éducateurs spor-
tifs adaptée à l'état physique des patientes. Ces
éducateurs doivent tenir compte des difficultés
d’une reprise, prendre en considération la fatigue
des patientes, les exercices améliorant les ampli-
tudes et la souplesse, mais la reprise de confiance
progressive permettra l’autonomie dans la pratique
du sport et de l’activité physique. Cette période de
l’après-cancer du sein est une période d’écoute des
patientes, favorable aux modifications du mode de
vie. Pour elles, la pratique du sport et d’une acti-
vité physique doit s’intégrer dans les protocoles de
traitements pour améliorer la vie après le cancer du
sein. ■
Références
bibliographiques
(suite)
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