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a diminué au 20esiècle, leur apport
énergétique a diminué également, d’où
le paradoxe nutritionnel des sociétés
riches (au sens propre), « bien nourries »
mais sédentaires : les apports en nutri-
ments essentiels diminuent et peuvent
devenir insuffisants comme dans les so-
ciétés « mal nourries » qui manquent
d’aliments.
Heureusement des adaptations physio-
logiques, comportementales ou socié-
tales se conjuguent pour assurer la sé-
curité nutritionnelle d’un enfant, même
si son apport énergétique est faible (en-
fant « peu mangeur »).
첸
Pour la plupart des nutriments, une
adaptation physiologique efficace et so-
lide rentabilise un faible apport, notam-
ment en augmentant l’absorption ou en
réduisant l’excrétion du nutriment. Ain-
si sa disponibilité est accrue. Une telle
adaptation (il s’agit plutôt d’une régula-
tion) utilise des mécanismes de rétro-
contrôle négatif, nombreux en physiolo-
gie. Elle explique qu’un apport très infé-
rieur à l’ANC ne s’accompagne pas né-
cessairement d’une carence.
첸
L’ajout intentionnel et contrôlé d’un
nutriment à la ration est la façon la plus
cartésienne d’augmenter son apport.
Deux familles de termes se concurren-
cent pour exprimer un tel ajout : supplé-
ment, supplémenter et supplémentation
d’une part, complément, compléter (deve-
nu parfois complémenter) et complémen-
tation d’autre part. Certains experts ai-
meraient qu’on distingue complé(men)ter
(jusqu’à la couverture du besoin) et sup-
plémenter (apporter plus que le besoin).
Mais l’usage entretient la confusion.
Supplément évoque la thérapeutique
quand complément connote la préven-
tion ; supplément est de l’ordre du né-
cessaire et complément de l’accessoire ;
supplément s’applique mieux à une pré-
sentation médicamenteuse et complé-
ment à une source alimentaire ; supplé-
ment fait craindre un excès alors que
complément est rassurant ; supplément
concerne plus souvent un nutriment
isolé et complément un mélange pluri-
nutritif ; supplément fait plus scienti-
fique quand complément est plus écolo-
gique. Au total, dans le langage courant
comme dans la langue médicale et le
vocabulaire du commerce agro-alimen-
taire, complément tend à supplanter
supplément.
첸
La supplémentation par un nutriment
administré à hauteur de l’ANC évite à
coup sûr la carence d’apport. Elle est
parfois proposée à tous les enfants.
C’est le cas pour la vitamine D (huile de
foie de morue ou présentation galé-
nique moins odorante), ou pour la vita-
mine A (huile de palme) dans les pays
où la xérophtalmie fait des ravages.
Quand une supplémentation aveugle à
hauteur de l’ANC risque d’avoir des ef-
fets indésirables, on peut la moduler se-
lon la quantité du nutriment déjà ap-
portée par les aliments et/ou l’eau habi-
tuellement consommés par l’enfant.
C’est ce que l’on fait (ou que l’on essaye
de faire) pour le fluor.
첸
La sup-(ou com-)plémentation peut
être obtenue en enrichissant les produits
alimentaires en nutriments. « Enrichi
en… » est une expression réglementée,
comme « riche en… ». Exemple efficace,
et pourtant souvent méconnu, d’enri-
chissement : l’iodation du sel de cuisine.
Elle a fait régresser de façon spectacu-
laire la carence en iode dans tous les
pays qui ont pu l’appliquer.
첸
Les compléments alimentaires sont des
aliments commercialisés sous forme de
gélules, comprimés, ampoules, capsules,
tisanes… dont le but est de compléter
l’alimentation habituelle. Ils constituent
une source concentrée de nutriments ou
d’autres substances ayant un effet nutri-
tionnel ou physiologique. Certains sont
formulés et dosés « pour les enfants ».
Leur utilisation ne nécessite ni prescrip-
tion, ni conseil médical. Heureusement
pour le médecin ! En général, celui-ci
préfère qu’on ne lui demande pas un
avis rationnel, scientifique et documen-
té sur tel complément alimentaire qui
contient 30 (sic) substances dont 9 vita-
mines et 10 minéraux, des anthocya-
nides, du carraghénane, de l’acide ma-
lique, de l’inositol… Il serait plus à l’aise
pour cautionner un complément consti-
tué des nutriments essentiels abondants
dans un groupe d’aliments que l’enfant
exclut de sa ration, autrement dit un
complément qui proposerait : « Tout ce
qu’il y a dans les légumes, sans les lé-
gumes ». Même s’ils sont inutiles, les
compléments alimentaires sont dosés
pour ne pas être toxiques. On pourrait
donc banaliser et innocenter leur
consommation. Cependant ils ont un
coût et grèvent inutilement les budgets
fragiles. Chez l’enfant sportif, ils préfi-
gurent le dopage à l’insu de son plein
gré, puisque certains sportifs confon-
dent vitamines et hormones. Enfin, les
compléments faisant partie de la pano-
plie « minceur » de nombreuses femmes,
panoplie coûteuse et inefficace, leur
usage ritualisé dans l’éducation d’une
fillette peut perturber le jugement et le
budget de la femme qu’elle deviendra.
첸
Les mêmes aliments apportent des
nutriments essentiels et de l’énergie.
Or, l’ajustement de la quantité de nour-
riture ingérée aux besoins (souvent dé-
nommée « régulation de la prise alimen-
taire ») ne tient compte que de l’énergie.
On améliore donc la qualité nutrition-
nelle de la ration en enlevant des nutri-
ments énergétiques non essentiels,
donc de l’énergie (des calories) à un ali-
ment. En effet le mangeur en mangera
davantage, donc ingérera davantage de
nutriments essentiels, pour ingérer la
même quantité de calories. Cette sous-
traction de calories est nommée allége-
ment
(7)
. Un aliment allégé peut donc
contribuer à favoriser la sécurité nutri-
tionnelle du mangeur, même si ce que
celui-ci recherche en réalité, c’est de
pouvoir manger davantage sans devoir
dépenser davantage (de calories) pour
ne pas prendre de poids. On peut allé-
ger un aliment en calories glucidiques
en enlevant du saccharose, mais on sup-
prime alors le goût sucré attractif de
l’aliment. Habituellement on remplace
donc le saccharose par un édulcorant de
synthèse : polyol, saccharine, asparta-
me (contre-indiqué dans la phénylcéto-
nurie) ou acésulfame de potassium.
L’éventuelle toxicité de certains édulco-
rants soulève régulièrement des polé-
miques. Ils sont l’objet d’une « veille
toxicologique ». L’allégement d’un ali-
ment en calories lipidiques passe par la
soustraction d’une partie des matières
Médecine
& enfance
février 2012
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