24 | La Lettre du Pneumologue • Vol. XVII - n° 1 - janvier-février 2014
Points forts
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La chirurgie et l’anesthésie générale peuvent être à l’origine de complications pulmonaires respon-
sables d’une détresse respiratoire aiguë en postopératoire. La ventilation non invasive (VNI) fait partie des
techniques disponibles permettant de diminuer le travail respiratoire et d’améliorer les échanges gazeux.
Enpostopératoire, elle permet de prévenir les détresses respiratoires aiguës (“VNI prophylactique”) ou
de les traiter lorsqu’elles surviennent (“VNI curative”).
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Une insuffisance respiratoire aiguë en postopératoire peut être le symptôme d’une complication chirurgicale.
»
La VNI appliquée après certaines chirurgies ou sur des terrains fragiles améliorerait les échanges
gazeux, pourrait prévenir les détresses respiratoires aiguës après une extubation et éviter d’éventuelles
réintubations. Un échec de la VNI ne doit pas retarder une éventuelle réintubation.
Mots-clés
Détresse respiratoire
aiguë
Ventilation
noninvasive
Période
postopératoire
Complications
pulmonaires
Atélectasies
Highlights
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In the postoperative period,
surgery and anaesthesia can
be associated with pulmo-
nary complications leading to
respiratory failure. The use of
non-invasive ventilation (NIV)
may be considered in order to
prevent the risk of respiratory
complications by reducing
the work of breathing and
improving gas exchange. Two
main types of NIV are used
in the postoperative period:
“prophylactic” to prevent acute
respiratory failure or “curative”
to treat ARF avoiding intuba-
tion.
»
Acute respiratory failure can
be the symptom of surgical
complication.
»
NIV could be an important
tool to improve gas exchange
in the postoperative period,
could prevent acute respira-
tory distress, and could prevent
reintubation. If NIV fails, reintu-
bation should not be delayed.
Keywords
Acute respiratory failure
Non-invasive ventilation
Postoperative period
Pulmonary complications
Atelectasis
anesthésiques, dont les curares, qui entraînent un
relâchement musculaire avec compression du tissu
pulmonaire, par la fermeture intermittente des voies
aériennes lors de la ventilation invasive qui majore
le collapsus pulmonaire et par une altération du
surfactant (2-4). Les atélectasies après intubation
sont d’autant plus fréquentes que l’encombrement
bronchique est important (5). La survenue d’atélec-
tasies postopératoires expose à des pneumopathies
infectieuses. De plus, elles sont responsables d’une
diminution de la compliance pulmonaire et d’une
modification des rapports ventilation/perfusion (5, 6).
L’altération des paramètres ventilatoires secondaires
est marquée par une diminution du volume courant et
une augmentation de la fréquence respiratoire. Ainsi,
les atélectasies peuvent conduire à une dégradation
des échanges gazeux marquée par l’apparition d’une
hypoxémie et d’une hypercapnie (6).
Indépendamment du risque anesthésique, le type de
chirurgie influe sur la fréquence et le type des CPP.
Probablement sous-estimées dans des études essen-
tiellement rétrospectives où ne sont incluses que les
paralysies diaphragmatiques documentées, l’incidence
des lésions des nerfs phréniques est estimée entre
1 et 60 % après une chirurgie cardiaque et entre 3
et 30 % après une transplantation pulmonaire. La
dégradation de la fonction diaphragmatique qui en
découle aboutit à une altération de la mécanique
respiratoire marquée par un syndrome restrictif et à
des difficultés de sevrage de la ventilation invasive. De
plus, la baisse du tonus musculaire, en provoquant le
déplacement du diaphragme en position céphalique
lors d’une AG, conduit à une altération fonctionnelle.
La douleur en postopératoire provoque une augmen-
tation du tonus des muscles abdominaux qui majore
la dysfonction diaphragmatique. Elle entraîne égale-
ment une réduction des volumes pulmonaires et de
la compliance thoracique par inhibition de la toux.
De plus, l’utilisation fréquente de la morphine, étant
donné l’intensité des douleurs postopératoires, peut
être responsable d’un certain degré d’hypoventilation
alvéolaire (6).
Enfin, les autres principales CPP incluent le bronchos-
pasme, les atteints pleurales (pneumothorax, hémo-
thorax, fistule bronchopleurale), les média stinites et les
complications thromboemboliques, et peuvent toutes
être à l’origine d’une dégradation de la mécanique
respiratoire ou de la qualité d’échangeur des poumons.
Tableau I. Différentes indications de la ventilation non invasive, d’après la conférence de consensus commune de la Société
de réanimation de langue française (SRLF), de la Société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR) et de la Société
de pneumologie de langue française (SPLF) sur la ventilation non invasive au cours de l’insuffisance respiratoire aiguë
(nouveau-né exclu) de 2006 (1).
Intérêt certain
Il faut faire...
Décompensation de bronchopathie chronique obstructive
OAP cardiogénique
Intérêt non établi de façon
certaine
Il faut probablement faire...
IRA hypoxémique de l’immunodéprimé
Après une chirurgie thoracique et abdominale
Stratégie de sevrage de la ventilation invasive chez les patients atteints de BPCO
Prévention d’une IRA postextubation
Traumatisme thoracique fermé isolé
Décompensation de maladies neuromusculaires chroniques et autres insuffisances
respiratoires chroniques restrictives
Mucoviscidose décompensée
Forme apnéisante de la bronchiolite aiguë
Laryngo-trachéo-malacie
Aucun avantage démontré
Il ne faut probablement pas faire...
Pneumopathie hypoxémiante
Syndrome de détresse respiratoire aiguë
Traitement de l’IRA postextubation
Maladies neuromusculaires aiguës réversibles
Situations sans cotation possible Asthme aigu grave
Syndrome d’obésité-hypoventilation
Bronchiolite aiguë du nourrisson (hors forme apnéisante)
OAP : œdème aigu pulmonaire ; IRA : insuffisance respiratoire aiguë ; BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive.