Prophète ou Fils de Dieu ? Matthieu 16.13-19 Romains 5.8, 8.31-39 ; 1 Corinthiens 11.26 Matthieu 5.43-44 ; Jean 16.2 13 Jésus, arrivé sur le territoire de Césarée de Philippe, posa cette question à ses disciples : Au dire des gens, qui suis-je, moi, le Fils de l’homme ? 14 Ils répondirent : Les uns disent que tu es Jean-Baptiste ; d’autres, Élie ; d’autres, Jérémie, ou l’un des prophètes. 15 Mais vous, leur dit-il, qui dites-vous que je suis ? 16 Simon Pierre répondit : Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. 17 Jésus reprit la parole et lui dit : Tu es heureux, Simon, fils de Jonas ; car ce ne sont pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est dans les cieux. 18 Et moi, je te dis que tu es Pierre, et que sur cette pierre je bâtirai mon Église, et que les portes du séjour des morts ne prévaudront pas contre elle. 19 Je te donnerai les clefs du royaume des cieux : Ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux. Les deux réponses à la double question de Jésus : Qui dit-on et Qui dites-vous que je suis ? sont toujours d’actualité dans notre monde. Douloureusement d’actualité. du monde et du salut des fidèles. Cette anti-confession de foi musulmane en Jésus-Christ est clairement exprimée dans le Coran, comme au verset 171 de la sourate IV (Les femmes) : Soit Jésus est un prophète, à l’égal des plus grands prophètes d’Israël ; soit il est le Christ et le Fils du Dieu vivant. « Ô gens du Livre (c’est-à-dire : juifs et chrétiens) ! Ne dépassez pas la mesure dans votre religion ; ne dites, sur Dieu, que la vérité. Oui, le Messie, fils de Marie, est le prophète de Dieu (…) Croyez donc en Dieu et en ses prophètes. Ne dites pas « Trois » (c'est-à-dire, ne dites pas Dieu est Père, Fils et Saint-Esprit) ; cessez de le faire ; ce sera mieux pour vous. » Si ces deux options concernant jésus sont toujours d’actualité, c’est parce qu’elles caractérisent et distinguent la foi chrétienne et la foi musulmane - ou plutôt, en ce qui concerne Jésus, l’anti-foi musulmane… Car l’Islam rejette et condamne la foi chrétienne en Jésus-Christ comme le Fils de Dieu, c’est-à-dire comme Dieu fait homme, Dieu uni à l’humanité, et en cela, Dieu sauveur. Le problème, bien perceptible dans ce verset, est que cette différence entre la foi chrétienne et la foi musulmane au sujet de Jésus ne s’arrête pas à une seule différence, qui pourrait être vécue paisiblement par les uns et les autres dans leurs contextes religieux respectifs, mais qu’elle se manifeste comme une op- Pour l’Islam, si Jésus est bien le Christ, le Messie, c’est en tant que prophète et non pas en tant que Fils de Dieu. Le Christ n’est donc pas pour l’Islam le Dieu sauveur, mais le prophète annonciateur et signe par son retour de la fin 1 position. Cependant, si nous sommes, nous chrétiens, bénéficiaires et porteurs de la foi de Pierre, la foi en Jésus-Christ Fils de Dieu, c’est parce qu’il est venu nous sauver alors que nous étions nous-mêmes ennemis de Dieu, esclaves du péché, et bien incapables de nous en délivrer : « En ceci Dieu prouve son amour envers nous : lorsque nous étions encore pécheurs, Christ est mort pour nous », écrit Paul, lui aussi persécuteur de l’Église avant d’être délivré, d’autorité, par le Christ. Pourquoi ? Parce que pour l’Islam, la confession de foi chrétienne est blasphématoire, en cela d’une part qu’elle attente à la grandeur de Dieu en l’unissant à l’impureté des créatures, jusqu’à prétendre que Dieu se soit livré à la mort, et d’autre part qu’elle renie l’unicité de Dieu en confessant une pluralité, une trinité de personnes divines. L’Islam accuse les chrétiens d’associer à Dieu d’autres dieux, à figure humaine, et donc de commettre le péché suprême, l’abomination de l’idolâtrie, accusée par le Coran dans la même sourate IV, v. 48 : Si Jésus-Christ est mort pour nous, c’est parce qu’il est mort à cause de nous, parce que nous l’avons rejeté, pour la même raison et de la même façon qu’aujourd’hui l’Islam persécute l’Église. « Dieu ne pardonne pas qu’on lui associe quoi que ce soit (c’est-à-dire : que l’on confesse que Jésus est Dieu) Il pardonne à qui il veut des péchés moins graves que celui-ci Mais celui qui associe quoi que ce soit à Dieu commet un crime immense » C’est bien ce que le Seigneur dit à Pierre, et à travers Pierre à tous les membres de l’Église : cette foi que tu viens de confesser et qui est en toi le salut de Dieu, elle ne t’a pas été révélée par la chair et le sang ; autrement dit : elle ne doit rien à ton jugement ni à ta décision, mais elle est pour toi, en toi, la décision et le don souverains de mon amour. En conséquence, l’Islam se donne comme mission de faire taire ce blasphème contre Dieu ; de le faire taire soit par la conversion, soit par l’éradication. Mission elle aussi clairement proclamée par le Coran, aux versets 686-70 de la sourate X (Jonas) : C’est dire que nous ne pouvons faire de notre foi un motif de jugement, d’accusation et encore moins d’agression, contre ceux qui rejettent et condamnent la foi de Pierre, et quand bien même ils combattent et persécutent ceux qui la confessent. « Vous avez entendu qu’il a été dit : tu aimeras ton prochain et tu haïras ton ennemi ; mais moi je vous dis : Aimez vos ennemis », enseigne le Seigneur. « Ils ont dit : Dieu s’est donné un fils ! Mais gloire à lui ! Il se suffit à lui-même. (…) Avez-vous quelque autorité pour parler ainsi ? Dites-vous sur Dieu ce que vous ne savez pas ? Ceux qui forgent un tel mensonge contre Dieu ne seront pas heureux. Ils jouiront momentanément de ce monde ; mais nous leur ferons goûter un dur châtiment, pour prix de leur incrédulité. » À ceux qui se veulent nos ennemis à cause de notre foi, nous ne pouvons répondre que par la mission que nous a confiée le Seigneur JésusChrist : annoncer l’appel à recevoir en lui le pardon et le salut de Dieu ; annoncer le Dieu venu se livrer au péché et à la mort des hommes pour les en délivrer ; annoncer le Dieu qui s’est fait notre victime pour être notre sauveur… Et l’annoncer à nos frais et au prix de la persécution que le malin nous infligera en retour, parce que l’annonce du pardon de Dieu C’est cette mission, le jihad, que nous voyons à l’œuvre et subissons aujourd’hui dans le monde et jusqu’à la table du Seigneur ellemême ; parce que cette table, où nous célébrons la mort du Fils de Dieu, le don de son corps et de son sang comme le summum de l’humanité qu’il a assumée par amour pour nous ; cette table est pour l’Islam un odieux blasphème, une insupportable abomination. 2 en Jésus-Christ signifie sa défaite, son anéantissement, et provoque sa fureur. Seigneur nous envoie, jusqu’à son retour : partager avec ceux qui veulent dominer ; pardonner ceux qui accusent… Mais « les portes du séjour des morts ne prévaudront pas contre l’Église », contre l’annonce de l’Évangile, promet Jésus. Au contraire, l’annonce du Fils de Dieu crucifié et ressuscité vide le séjour des morts ; elle est la clé qui ouvre le verrou de la mort, pour tous ; pour tous ceux qui s’entendent appelés par sa voix et qui se lèvent pour le suivre. Nous savons, nous, que ceux qui n’écoutent pas Jésus-Christ écoutent et servent le malin et la mort. Cependant, le Seigneur ne nous commande pas de les maudire, mais nous envoie les secourir. C’est pour cela qu’il nous a, nousmêmes, déliés. Afin que nous soyons avec lui des enfants de lumière pour le monde enténébré. Une porte ouverte vers la vie. Que son Esprit soit en nous le courage et la joie de vivre cette mission, jusqu’à son retour. Le courage de répondre à toute violence par l’Évangile ; le courage de ne pas nous laisser intimider par la mort et ses violences, mais de nous réjouir parce que le royaume des cieux est en nous ; nous réjouir parce qu’avec JésusChrist, nous avons la liberté de vivre, la liberté d’aimer, dont plus rien ni personne ne pourra nous séparer. Jésus-Christ n’a pas d’ennemis parmi les hommes. Beaucoup se disent ses ennemis, mais lui n’a pas d’ennemis. Devant lui, dans le monde, il n’y a que des pécheurs qu’il est venu pardonner, des mourants qu’il est venu sauver, au prix de sa croix. Pour tous, il est le don de Dieu qui lie la mort et qui délie la vie, sur la terre comme dans les cieux. Faire entendre sa parole, son appel, sa victoire, à ceux qui meurent et qui tuent, pensant en cela rendre un culte à Dieu, voilà ce à quoi le _______________ Pasteur Jean-Yves PETER [email protected] 2016 3