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THÉRAPEUTIQUE
Information communiquée avec le soutien du laboratoire Lundbeck
Insomnie primaire du patient
de plus de 55 ans : intérêt d’un
nouvel hypnotique, Circadin®
Primary insomnia in patients over 55:
the interest of a new hypnotic, Circadin®
C. Monaca*, J. Taillard**, B. Claustrat***
L
e sommeil se modifie physiologiquement avec
l’âge. La prévalence de l’insomnie chronique
atteint près de 20 % dans la population générale
en France, avec une nette prédominance féminine
(23 %, versus 14 % chez les hommes), et augmente
significativement avec l’âge (1). L’insomnie chronique
du sujet âgé nécessite une prise en charge adaptée,
tant diagnostique que thérapeutique.
Quelques rappels
sur le sommeil
* Service de neurophysiologie
clinique, hôpital Roger-Salengro, Lille.
** GENPPHASS, UMR CNRS 5227,
CHU de Bordeaux.
*** Service d’hormonologie, Centre
de médecine nucléaire, groupement
hospitalier Est, Lyon.
Il y a 2 sortes d’états de vigilance : l’éveil, ou état
de veille, et le sommeil ; le sommeil est lui-même
composé de 2 types (stades) : le sommeil lent et le
sommeil paradoxal (SP). Le sommeil lent est classé
en 3 stades : les stades N1 (transition entre l’éveil et
le sommeil) et N2, qui constituent le sommeil lent
léger, et le stade N3, qui constitue le sommeil lent
profond. Le sommeil léger occupe 55 % du temps
total de sommeil. Le sommeil lent profond correspond à une synchronisation importante de l’activité
cérébrale, caractérisée sur l’électroencéphalogramme
par de nombreuses ondes lentes et amples (ondes
delta). Il occupe généralement 15 à 20 % du temps
total de sommeil. Le SP est caractérisé par une activité corticale rapide associée à une atonie musculaire
généralisée et à des mouvements oculaires rapides.
C’est pendant ce stade que la production de rêves
est la plus importante. Le SP occupe généralement
20 à 25 % du temps total de sommeil.
Ces états de vigilance se succèdent de manière organisée et cyclique. Un cycle de sommeil débute par
le sommeil lent léger, se poursuit par le sommeil
lent profond et se termine par le SP. Classiquement,
un cycle dure entre 90 et 120 minutes. Une nuit de
sommeil est composée de 4 à 6 cycles. Les premiers
104 | La Lettre du Pharmacologue • Vol. 23 - n° 3 - juillet-août-septembre 2009
cycles sont plus riches en sommeil lent, tandis que
les derniers sont plus riches en SP.
Le cycle veille/sommeil est contrôlé par deux
processus : le processus homéostatique et le processus
circadien (2, 3). Le processus homéostatique correspond à l’évolution, au cours du temps, de la pression du sommeil, et régule les besoins journaliers
de sommeil. Ainsi, le besoin de sommeil s’accumule
tout au long de l’éveil pour atteindre un niveau qui
peut conduire au sommeil. Ensuite, il se dissipe rapidement au cours du sommeil. Le processus circadien
dépend des horloges biologiques internes, dont la
principale est située dans les noyaux suprachiasmatiques (NSC). Cette horloge contrôle aussi l’ensemble
des rythmes circadiens (mélatonine, température,
cortisol, comportement alimentaire, etc.). L’alternance lumière/obscurité (ou jour/nuit) constitue le
synchroniseur majeur de l’horloge circadienne, par
l’intermédiaire des voies d’entraînement photiques.
Le processus circadien, qui correspond à la pression
de l’éveil, va contrecarrer l’augmentation progressive
de la pression du sommeil diurne jusqu’au début de
la nuit. À ce moment, qui est associé au début de la
sécrétion de la mélatonine, la pression de l’éveil chute
pour laisser place à l’endormissement provoqué par
la pression du sommeil. En fin de nuit, la pression
de l’éveil est au plus bas, prolongeant ainsi l’effet
de la pression du sommeil. Au tout début du jour,
la pression de l’éveil augmente, induisant le réveil.
Le processus circadien consolide l’éveil diurne et le
sommeil nocturne.
Effets du vieillissement
sur le sommeil
Bien différencier les modifications normales du
sommeil liées à l’âge de celles engendrées par des
Résumé
Avec l’âge, certaines personnes se plaignent d’un sommeil non réparateur, entrecoupé de nombreux éveils,
d’un réveil matinal précoce et, plus rarement, de difficultés d’endormissement. À cette réduction du temps
de sommeil s’ajoute souvent une somnolence diurne. Avec l’âge, la sécrétion de mélatonine diminue. Des
essais cliniques comparant une préparation de mélatonine à libération prolongée à un placebo ont rapporté
une amélioration de la qualité du sommeil, de la vigilance matinale, de la latence d’endormissement et de
la qualité de vie dans l’insomnie primaire chez des patients de plus de 55 ans.
pathologies liées au vieillissement n’est pas aisé (4).
Quoi qu’il en soit, certaines personnes âgées se plaignent d’un sommeil non réparateur, entrecoupé de
nombreux éveils et associé à un réveil matinal précoce
ainsi que, plus rarement, à des difficultés d’endormissement. À cette réduction du temps de sommeil
s’ajoute souvent une somnolence diurne dont il est
difficile de savoir si elle relève d’une pathologie propre
ou de l’insomnie nocturne. Ces plaintes sont confirmées par les enregistrements polysomnographiques.
Alors que, au cours du vieillissement, le temps passé
au lit augmente, la durée totale de sommeil diminue.
L’index d’efficacité du sommeil (rapport entre le temps
de sommeil total et le temps passé au lit) est en effet
considérablement réduit chez le sujet âgé (5). L’organisation interne du sommeil se modifie elle aussi avec
l’âge. Dès la quatrième décennie, la durée du stade N3
commence à se réduire pour pratiquement disparaître
dans la septième décennie (6). Mais la durée de SP
n’est que modestement réduite. En revanche, la répartition du SP au cours de la nuit est fortement modifiée
(7). La probabilité d’apparition du SP a tendance à
être plus forte en début de nuit, ce qui se traduit par
un raccourcissement de la latence d’apparition du
premier épisode de SP et par une diminution du SP en
fin de nuit. La fragmentation du sommeil, qui correspond à la survenue de nombreux réveils très brefs,
constitue une caractéristique majeure des modifications du sommeil liées à l’âge (8), les sujets âgés étant
incapables de maintenir un état de sommeil stable.
Il est généralement admis que, chez les personnes
âgées, le processus homéostatique est altéré et la
consolidation du sommeil par le processus circadien
diminuée (7, 9). Ce dernier phénomène serait lié à la
diminution de l’amplitude des rythmes circadiens et à
leur mauvais ajustement à l’environnement, en particulier au cycle lumière/obscurité, du fait d’une avance de
phase de ces rythmes. Récemment, une équipe suisse a
suggéré que ce n’était pas le processus homéostatique
qui était altéré, mais que c’était surtout le processus
circadien qui s’atténuait avec le vieillissement (10).
L’insomnie chronique du sujet âgé
Selon l’ICSD-2 (11), l’insomnie chronique se caractérise par la survenue de troubles du sommeil au
moins trois fois par semaine, et ce pendant plus d’un
mois. La plainte peut concerner une difficulté d’endormissement, des troubles du maintien du sommeil
(éveils durant la nuit) et/ou un réveil précoce. Le
sommeil nocturne apparaît alors non réparateur.
Cette plainte relative au sommeil doit également
avoir un retentissement diurne pour que l’on puisse
parler d’insomnie chronique (tableau).
Les étiologies d’insomnie sont multiples. L’insomnie
chronique peut être soit primaire, soit secondaire :
insomnie psychophysiologique ; mauvaise perception
de sommeil ; troubles de l’hygiène veille-sommeil ;
insomnie secondaire à un trouble psychiatrique, à un
trouble médical, à la prise d’un médicament ou d’un
toxique. Afin de rechercher l’étiologie de l’insomnie
chez un sujet donné, l’interrogatoire de ce sujet est
primordial (habitudes de sommeil, circonstances de
survenue de l’insomnie, traitements actuels et antérieurs, etc.). La prise en charge de l’insomnie exige
du patient qu’il renseigne un agenda de sommeil.
L’insomnie qui n’est pas exclusivement liée à une
étiologie particulière sera considérée comme psychophysiologique (selon l’ICSD-2, 2005) ou primaire
(selon le DSM-IV, 2000). Il est important de noter
qu’il existe un continuum entre certains types d’insomnies. Ainsi, une insomnie secondaire initialement
liée à un événement stressant de la vie peut tout à
fait évoluer vers une insomnie psychophysiologique :
en effet, le facteur déclenchant initial de l’insomnie
– “l’événement stressant” – n’existe plus, mais l’insomnie perdure et évolue pour son propre compte.
Cette insomnie devient donc psychophysiologique.
La physiopathologie précise de l’insomnie psychophysiologique reste encore mal connue. Il existe
plusieurs hypothèses à l’heure actuelle : s’agit-il de
Mots-clés
Insomnie
Sujet âgé
Mélatonine
Highlights
Insomnia of aging is characterized by non-restorative sleep,
with several nocturnal awakenings, early morning awakening,
resulting in sleep reduction and
alteration of morning alertness.
Also, there is a decrease in
melatonin secretion with aging.
Prolonged-release melatonin
treatment results in significant and meaningful improvements in sleep quality, morning
alertness, sleep onset latency
and quality of life in primary
insomnia of patients 55 years
old and over.
Keywords
Insomnia
Elderly
Melatonin
Tableau. Critères diagnostiques de l’insomnie (ICSD-2).
Plainte ayant trait à des difficultés d’endormissement et de maintien du sommeil, à un éveil
trop précoce ou à un sommeil considéré comme non réparateur ou de mauvaise qualité
Apparition de ces troubles malgré des circonstances favo­rables à la survenue du sommeil
Retentissement diurne de ces troubles, l’un au moins de ces symptômes étant retrouvé :
• Fatigue
• Trouble de l’attention, de la concentration ou de la mémoire
• Retentissement social ou difficultés scolaires
• Troubles de l’humeur, irritabilité
• Somnolence diurne excessive
• Perte de motivation, d’initiative
• Accidents du travail ou de la voie publique
• Céphalées, troubles gastro-intestinaux
• Inquiétude concernant le sommeil
La Lettre du Pharmacologue • Vol. 23 - n° 3 - juillet-août-septembre 2009 | 105
THÉRAPEUTIQUE
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Academy of Sleep Medicine, 2005.
mécanismes d’hyper-éveil avec installation du cercle
vicieux de l’insomnie, ou d’un dysfonctionnement
des systèmes de régulation du sommeil homéostatique et/ou circadien ?
Le traitement de l’insomnie doit être adapté à son
étiologie (12). La prise en charge d’une insomnie
psychophysiologique est avant tout comportementale, comprenant notamment une restriction
du temps passé au lit et des conseils d’hygiène de
sommeil. Lorsque cela n’est pas suffisant, le traitement peut consister en une thérapie cognitivocomportementale afin de diminuer les pensées
dysfonctionnelles liées au sommeil. En outre, chez
la personne de plus de 55 ans, un dysfonctionnement du système circadien peut être évoqué, et il est
alors parfois nécessaire d’adjoindre un traitement à
base de mélatonine. L’utilisation d’hypnotiques dans
l’insomnie chronique ne doit être que transitoire.
Mélatonine : sécrétion,
mécanismes d’action et rôle
dans la régulation du sommeil (13)
Sécrétion de mélatonine
La sécrétion de mélatonine a lieu préférentiellement pendant la nuit, s’étalant sur environ 10 heures,
avec un pic vers 3-4 heures. Le “message mélatonine” présente une grande hétérogénéité d’un
sujet à l’autre, alors qu’il est très reproductible chez
un même sujet d’un jour à l’autre. Chez certains
individus (5 % environ), la sécrétion peut être très
discrète, voire, exceptionnellement, absente, sans
conséquence évidente sur la qualité du sommeil ou
sur les capacités d’adaptation à une perturbation des
rythmes. La sécrétion s’amoindrit progressivement
avec l’âge, comportant une tendance à l’avance de
phase, voire une disparition totale chez la personne
très âgée. La mélatonine franchit la barrière hématoencéphalique, en particulier depuis le sang jusqu’au
tissu nerveux. Une petite fraction de la mélatonine
est transformée en dérivés de la kynurénine – dont
le rôle physiologique est encore imprécis, mais qui
est vraisemblablement en relation avec l’excitabilité
neuronale.
Une horloge interne située dans les NSC contrôle le
rythme de la sécrétion de mélatonine, comme l’ensemble des rythmes circadiens. La voie principale de
régulation emprunte initialement le système nerveux
central puis le système sympathique. Le contrôle
106 | La Lettre du Pharmacologue • Vol. 23 - n° 3 - juillet-août-septembre 2009
terminal épiphysaire est essentiellement assuré par
des fibres noradrénergiques issues des ganglions
cervicaux supérieurs. L’alternance lumière/obscurité
(ou jour/nuit) constitue le synchroniseur majeur du
système. La sécrétion de mélatonine s’effectue en
fonction de cette alternance tout en montrant une
relative inertie en cas de modifications de celle-ci. La
lumière peut aussi exercer un effet inhibiteur, selon
l’heure d’administration de la plage lumineuse, à
condition que l’éclairement soit suffisant, prolongé,
et qu’il intervienne à un horaire optimal (2 500 lx
entre 2 heures et 4 heures du matin).
Récepteurs à la mélatonine (13, 14)
Deux sous-types de récepteurs (MT1 et MT2) couplés
aux protéines G ont été clonés et caractérisés chez
les mammifères. Un troisième site de liaison MT3
participe à la protection contre le stress oxydatif.
De plus, la mélatonine interagit avec des protéines
intracellulaires telles que la tubuline, la calréti­culine
et la calmoduline (dont la liaison au Ca²+ est antagonisée par la mélatonine).
Les récepteurs sont exprimés dans différents tissus,
en particulier dans le système nerveux central. Ils
sont présents dans les NSC (MT1) et les noyaux
paraventriculaires de l’hypothalamus où ils sont
colocalisés avec les neurones à CRF, dans l’hippocampe, le cervelet (MT1 et MT2), où ils modulent
l’activité des interneurones gabaergiques et les
synapses glutamatergiques, les structures dopaminergiques centrales et dans différents types
cellulaires rétiniens. Dans la maladie d’Alzheimer,
l’expression des récepteurs MT1 est diminuée alors
que l’augmentation de l’expression des récepteurs
MT2 pourrait correspondre à un phénomène
compensatoire.
La régulation de ces récepteurs est complexe. Leur
expression maximale, qui coïncide avec le pic de
mélatonine endogène, suggère une absence de
désensibilisation lors d’un traitement prolongé. La
conservation de l’effet d’entraînement par administration chronique de mélatonine chez l’aveugle est
un argument supplémentaire.
Pharmacocinétique (15)
L’administration per os de mélatonine à libération
immédiate conduit à des profils plasmatiques très
hétérogènes, avec un pic précoce et une concentration résiduelle pendant plusieurs heures. L’adminis-
THÉRAPEUTIQUE
Effet sur le sommeil et le rythme veillesommeil (16)
Le couplage précis entre l’augmentation de la
sécrétion endogène et l’ouverture de la “porte du
sommeil” suggère que la mélatonine participe à la
régulation du cycle veille-sommeil par inhibition
des systèmes d’éveil (17). L’existence de projections
nerveuses à partir des NSC vers l’aire préoptique
ventrolatérale inhibitrice des systèmes d’éveil est un
argument. Les protocoles de décalage de la sécrétion
de mélatonine avec la lumière donnent à penser que
la mélatonine endogène participe aussi à la régulation de l’architecture du sommeil.
Les effets de la mélatonine exogène sur le sommeil
varient selon que l’administration est unique ou
répétée, qu’elle s’effectue chez le volontaire sain
ou l’insomniaque, et selon l’heure et la dose.
Chez le volontaire sain, l’effet sur la propension au sommeil de 5 mg de mélatonine est plus
marqué à 21 heures qu’à 12 heures. Administrée
dans l’après-midi, la mélatonine en prise unique
a un effet sédatif, provoquant une augmentation
de la sensation de fatigue, un allongement du
temps de réaction, une diminution de la latence
d’endormissement et une augmentation de l’activité thêta et des fuseaux (stades N1 et N2)
[15, 18].
En l’absence de toxicité immédiate, la mélatonine
a fait l’objet de multiples études portant sur l’insomniaque et impliquant différentes méthodes
d’évaluation (autoquestionnaire, actimétrie,
polysomnographie). La plupart des études ont
été réalisées avec des préparations à libération
immédiate à des doses souvent élevées (plusieurs
milligrammes), pour contrebalancer la cinétique
d’élimination très rapide. Des effets non spécifiques
ont pu être observés, conséquence d’une interaction
de la mélatonine avec la plupart des systèmes de
neuromédiateurs lors de son administration à forte
dose (15).
L’administration de mélatonine ne modifie pas la
sécrétion endogène selon le phénomène de rétrocontrôle négatif classique en endocrinologie. La
phase du rythme endogène est modifiée différem-
ment (avance ou retard de phase) selon l’heure
d’administration du stimulus exogène. Parmi les
effets connus de la mélatonine, lorsque celle-ci
est administrée l’après-midi ou dans la soirée, une
avance de phase est observée, alors qu’une administration matinale ou à midi conduit à un retard
de phase, plus faible, voire absent, selon certains
auteurs. L’effet d’avance de phase s’observe aussi sur
le rythme de température. Cet effet chronobiotique
constitue la base physiologique du traitement des
troubles du rythme veille-sommeil tels que le jet
lag, le syndrome de retard de phase, et le rythme
différent de 24 heures, observé en particulier chez
les aveugles.
Les données physiologiques et cinétiques ainsi que
les résultats discordants des études cliniques ont
conduit à la mise au point d’une préparation à libération contrôlée (Circadin®), qui n’évite cependant
pas l’effet de premier passage hépatique. Cette
préparation orale génère un pic sanguin plus faible
sur une durée prolongée (figure).
Des essais cliniques récents contre placebo, utilisant des échelles d’auto-évaluation, ont montré
l’efficacité de Circadin® en monothérapie dans le
traitement à court terme de l’insomnie primaire
chez les patients de 55 ans ou plus, indication
pour laquelle cette forme pharmaceutique a reçu
une AMM en 2007. La prise du médicament se
situe une à deux heures avant le coucher. L’effet
hypnotique est d’autant meilleur que la sécrétion
2 500
Références
bibliographiques
(suite…)
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Circadin®
Concentration de mélatonine plasmatique (pg/ml)
tration d’une dose aussi faible que 1 mg conduit à des
valeurs supraphysiologiques (nettement supérieures
aux valeurs nocturnes sanguines). La phase métabolique très courte (demi-vie de 20 à 40 minutes)
est la conséquence partielle d’un effet de premier
passage hépatique intense.
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alpha activity in the waking EEG.
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5.3.3.1.3. Rapport de l’étude RD
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2004;116:91-5.
Mélatonine 2 mg
à libération immédiate à jeun
2 000
1 500
1 000
Circadin® 2 mg LP à jeun
500
0
0,25 1
0,50
0,75
2
3
4
1,50 2,50 3,50
5
6
8
12
Temps (heures)
Figure. Comparaison des cinétiques plasmatiques de mélatonine après administration de
Circadin® et d’une solution de mélatonine 2 mg à libération immédiate à des volontaires
sains âgés de 55 à 69 ans (19).
La Lettre du Pharmacologue • Vol. 23 - n° 3 - juillet-août-septembre 2009 | 107
THÉRAPEUTIQUE
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produit Circadin®.
physiologique de mélatonine est diminuée (20).
Cette donnée biologique caractéristique de l’insomnie du sujet âgé n’est pas retrouvée dans une
autre étude (21). Un essai incluant 354 patients
montre que la qualité du sommeil et de la vigilance
du matin est améliorée après 3 semaines de traitement (22). Les modifications fortement corrélées
de ces deux para­mètres suggèrent un effet bénéfique sur la fonction réparatrice du sommeil. Une
autre étude incluant 170 patients confirme ces
données (23) et rapporte une diminution de la
latence d’endormissement et une amélioration de
la qualité de vie. Il n’existe pas d’effet de sevrage,
ni d’insomnie de rebond, comme on l’observe avec
les benzodiazépines. Ces études témoignent de
l’importance qu’il y a à administrer une forme
galénique conduisant à un “signal mélatonine”
mimant la sécrétion endogène, ce que ne font pas
les formes à libération immédiate.
Les effets indésirables sont peu fréquents, voire
rares, et la mélatonine est bien tolérée (24). Il faut
cependant insister sur la possibilité de l’aggra­
vation d’une pathologie auto-immune, et sur une
utilisation déconseillée en cas d’insuffisance hépatique. La mélatonine est métabolisée par les cytochromes hépatiques (Cyp1A2 principalement, et
Cyp1A1 et Cyp2C19 à un degré moindre) [15-25]. Les
composés inducteurs, substrats ou inhibiteurs de ces
cytochromes peuvent modifier sa biodisponibilité,
entraînant une diminution ou une augmentation.
Cependant, aucun cas de surdosage n’a été rapporté.
Des interactions médicamenteuses d’ordre essentiellement pharmacocinétique sont donc à surveiller ;
certaines d’entre elles peuvent survenir si la prescription dans le cadre de l’AMM n’est pas respectée.
Conclusion
Circadin®, en améliorant à la fois la rapidité d’endormissement, la qualité du sommeil et la vigilance
diurne, par le renforcement possible du processus
circadien de contrôle du sommeil, constitue une
alternative aux hypnotiques classiques, efficace et
bien tolérée, chez les patients insomniaques de plus
de 55 ans. ■
CIRCADIN® 2 mg comprimés à libération prolongée : mélatonine : 2 mg. Excipient à effet notoire : lactose monohydraté (80 mg/cp). Indications thérapeutiques :
Circadin® est indiqué, en monothérapie, pour le traitement à court terme de l’insomnie primaire caractérisée par un sommeil de mauvaise qualité chez des patients de 55 ans
ou plus. Posologie et mode d’administration* : voie orale. Posologie recommandée de 2 mg une fois par jour, 1 à 2 heures avant le coucher et après le repas, pendant
trois semaines. Enfant : ne pas utiliser chez l’enfant et l’adolescent de moins de 18 ans. Insuffisant rénal : prudence chez les insuffisants rénaux. Insuffisant hépatique :
déconseillé chez les insuffisants hépatiques. Contre-indications : hypersensibilité à la substance active ou à l’un des excipients. Mises en garde spéciales et précautions d’emploi* : Circadin® pouvant entraîner une somnolence, prudence si les effets de cette somnolence sont susceptibles de poser un problème de sécurité. Circadin®
est déconseillé chez les patients présentant une maladie auto-immune. Les patients présentant une intolérance héréditaire au galactose, un déficit en lactase de Lapp ou
un syndrome de malabsorption du glucose et du galactose ne doivent pas prendre ce médicament. Interactions avec d’autres médicaments et autres formes d’interaction* : interactions pharmacocinétiques : En cas d’induction des enzymes CYP3A, diminution possible des concentrations plasmatiques des médicaments administrés
simultanément. Observation peu probable d’interactions notables, entre la mélatonine et d’autres substances actives, découlant de l’effet de la mélatonine sur les enzymes
CYP1A. Interactions possibles entre la mélatonine et d’autres substances actives découlant de leur effet sur les enzymes CYP1A. Prudence chez les patients traités par la
fluvoxamine, (association à éviter), par le 5- ou le 8-méthoxypsoralène (5- et 8-MOP) et par la cimétidine. Le tabagisme est susceptible de réduire le taux de mélatonine.
Prudence chez les patientes sous œstrogénothérapie. Les inhibiteurs du CYP1A2 sont susceptibles d’accroître l’exposition à la mélatonine. Les inducteurs du CYP1A2 sont
susceptibles de réduire les concentrations plasmatiques de la mélatonine. Aucune étude réalisée pour déterminer si les agonistes/antagonistes adrénergiques, les agonistes/
antagonistes des opiacés, les antidépresseurs, les inhibiteurs de la prostaglandine, les benzodiazépines, le tryptophane et l’alcool interfèrent ou non avec Circadin® ou vice
versa. Interactions pharmacodynamiques : Consommation d’alcool proscrite pendant le traitement par Circadin®. Circadin® peut amplifier les propriétés sédatives des benzodiazépines et des hypnotiques autres que les benzodiazépines. Aucune interaction pharmacocinétique cliniquement significative observée avec la thioridazine et l’imipramine,
toutefois, l’administration concomitante de Circadin® a majoré la sensation de tranquillité et la difficulté à effectuer des tâches et a entraîné des sensations vertigineuses
plus marquées. Grossesse et allaitement*. Effets sur l’aptitude à conduire des véhicules et à utiliser des machines*. Effets indésirables* : dans des essais
cliniques, les effets indésirables les plus fréquents étaient : céphalées, pharyngite, mal de dos et asthénie, qui étaient fréquents, d’après la définition MedDRA, dans le groupe
sous Circadin comme dans celui sous placebo. Surdosage*. Propriétés pharmacodynamiques* : agonistes des récepteurs de la mélatonine, Code ATC : N05CH01. La
mélatonine participe au contrôle des rythmes circadiens et à la régulation du rythme jour-nuit. Elle est aussi associée à un effet hypnotique et à une propension accrue au
sommeil. Propriétés pharmacocinétiques* : absorption complète chez l’adulte et pouvant être réduite chez les personnes âgées. La demi-vie terminale (t1/2) est de 3,5 à
4 heures. Les métabolites sont éliminés par voie rénale. Données de sécurité préclinique*. Excipients*. Durée de conservation : 5 ans. Précautions particulières
de conservation*. Nature et contenu de l’emballage extérieur* : 21 comprimés. Précautions particulières d’élimination*. Titulaire de l’AMM : RAD Neurim
Pharmaceuticals EEC Limited, One Forbury Square, The Forbury, Reading, Berkshire RG1 3EB, Royaume-Uni. E-mail : [email protected]. Numéro d’AMM : 384 141-5
CIRCADIN 2 mg, 21 comprimés à libération prolongée. Classification en matière de délivrance et prix : liste I. Non remboursable et non agréé aux collectivités à
la date du 1er mai 2009. Laboratoires Lundbeck SAS, 37, avenue Pierre Ier de Serbie, 75008 Paris. Tél. : 01 53 67 42 00. Information pharmaceutique et
remontée d’informations quant à la qualité de l’information et la déontologie de la visite médicale, e-mail : [email protected] - Information
médicale/pharmacovigilance, tél. : 01 53 67 10 54.
V05.2009
* Pour une information plus complète, se reporter au Résumé des Caractéristiques du Produit (disponible sur demande auprès du laboratoire).
108 | La Lettre du Pharmacologue • Vol. 23 - n° 3 - juillet-août-septembre 2009
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