THÉRAPEUTIQUE Information communiquée avec le soutien du laboratoire Lundbeck Insomnie primaire du patient de plus de 55 ans : intérêt d’un nouvel hypnotique, Circadin® Primary insomnia in patients over 55: the interest of a new hypnotic, Circadin® C. Monaca*, J. Taillard**, B. Claustrat*** L e sommeil se modifie physiologiquement avec l’âge. La prévalence de l’insomnie chronique atteint près de 20 % dans la population générale en France, avec une nette prédominance féminine (23 %, versus 14 % chez les hommes), et augmente significativement avec l’âge (1). L’insomnie chronique du sujet âgé nécessite une prise en charge adaptée, tant diagnostique que thérapeutique. Quelques rappels sur le sommeil * Service de neurophysiologie clinique, hôpital Roger-Salengro, Lille. ** GENPPHASS, UMR CNRS 5227, CHU de Bordeaux. *** Service d’hormonologie, Centre de médecine nucléaire, groupement hospitalier Est, Lyon. Il y a 2 sortes d’états de vigilance : l’éveil, ou état de veille, et le sommeil ; le sommeil est lui-même composé de 2 types (stades) : le sommeil lent et le sommeil paradoxal (SP). Le sommeil lent est classé en 3 stades : les stades N1 (transition entre l’éveil et le sommeil) et N2, qui constituent le sommeil lent léger, et le stade N3, qui constitue le sommeil lent profond. Le sommeil léger occupe 55 % du temps total de sommeil. Le sommeil lent profond correspond à une synchronisation importante de l’activité cérébrale, caractérisée sur l’électroencéphalogramme par de nombreuses ondes lentes et amples (ondes delta). Il occupe généralement 15 à 20 % du temps total de sommeil. Le SP est caractérisé par une activité corticale rapide associée à une atonie musculaire généralisée et à des mouvements oculaires rapides. C’est pendant ce stade que la production de rêves est la plus importante. Le SP occupe généralement 20 à 25 % du temps total de sommeil. Ces états de vigilance se succèdent de manière organisée et cyclique. Un cycle de sommeil débute par le sommeil lent léger, se poursuit par le sommeil lent profond et se termine par le SP. Classiquement, un cycle dure entre 90 et 120 minutes. Une nuit de sommeil est composée de 4 à 6 cycles. Les premiers 104 | La Lettre du Pharmacologue • Vol. 23 - n° 3 - juillet-août-septembre 2009 cycles sont plus riches en sommeil lent, tandis que les derniers sont plus riches en SP. Le cycle veille/sommeil est contrôlé par deux processus : le processus homéostatique et le processus circadien (2, 3). Le processus homéostatique correspond à l’évolution, au cours du temps, de la pression du sommeil, et régule les besoins journaliers de sommeil. Ainsi, le besoin de sommeil s’accumule tout au long de l’éveil pour atteindre un niveau qui peut conduire au sommeil. Ensuite, il se dissipe rapidement au cours du sommeil. Le processus circadien dépend des horloges biologiques internes, dont la principale est située dans les noyaux suprachiasmatiques (NSC). Cette horloge contrôle aussi l’ensemble des rythmes circadiens (mélatonine, température, cortisol, comportement alimentaire, etc.). L’alternance lumière/obscurité (ou jour/nuit) constitue le synchroniseur majeur de l’horloge circadienne, par l’intermédiaire des voies d’entraînement photiques. Le processus circadien, qui correspond à la pression de l’éveil, va contrecarrer l’augmentation progressive de la pression du sommeil diurne jusqu’au début de la nuit. À ce moment, qui est associé au début de la sécrétion de la mélatonine, la pression de l’éveil chute pour laisser place à l’endormissement provoqué par la pression du sommeil. En fin de nuit, la pression de l’éveil est au plus bas, prolongeant ainsi l’effet de la pression du sommeil. Au tout début du jour, la pression de l’éveil augmente, induisant le réveil. Le processus circadien consolide l’éveil diurne et le sommeil nocturne. Effets du vieillissement sur le sommeil Bien différencier les modifications normales du sommeil liées à l’âge de celles engendrées par des Résumé Avec l’âge, certaines personnes se plaignent d’un sommeil non réparateur, entrecoupé de nombreux éveils, d’un réveil matinal précoce et, plus rarement, de difficultés d’endormissement. À cette réduction du temps de sommeil s’ajoute souvent une somnolence diurne. Avec l’âge, la sécrétion de mélatonine diminue. Des essais cliniques comparant une préparation de mélatonine à libération prolongée à un placebo ont rapporté une amélioration de la qualité du sommeil, de la vigilance matinale, de la latence d’endormissement et de la qualité de vie dans l’insomnie primaire chez des patients de plus de 55 ans. pathologies liées au vieillissement n’est pas aisé (4). Quoi qu’il en soit, certaines personnes âgées se plaignent d’un sommeil non réparateur, entrecoupé de nombreux éveils et associé à un réveil matinal précoce ainsi que, plus rarement, à des difficultés d’endormissement. À cette réduction du temps de sommeil s’ajoute souvent une somnolence diurne dont il est difficile de savoir si elle relève d’une pathologie propre ou de l’insomnie nocturne. Ces plaintes sont confirmées par les enregistrements polysomnographiques. Alors que, au cours du vieillissement, le temps passé au lit augmente, la durée totale de sommeil diminue. L’index d’efficacité du sommeil (rapport entre le temps de sommeil total et le temps passé au lit) est en effet considérablement réduit chez le sujet âgé (5). L’organisation interne du sommeil se modifie elle aussi avec l’âge. Dès la quatrième décennie, la durée du stade N3 commence à se réduire pour pratiquement disparaître dans la septième décennie (6). Mais la durée de SP n’est que modestement réduite. En revanche, la répartition du SP au cours de la nuit est fortement modifiée (7). La probabilité d’apparition du SP a tendance à être plus forte en début de nuit, ce qui se traduit par un raccourcissement de la latence d’apparition du premier épisode de SP et par une diminution du SP en fin de nuit. La fragmentation du sommeil, qui correspond à la survenue de nombreux réveils très brefs, constitue une caractéristique majeure des modifications du sommeil liées à l’âge (8), les sujets âgés étant incapables de maintenir un état de sommeil stable. Il est généralement admis que, chez les personnes âgées, le processus homéostatique est altéré et la consolidation du sommeil par le processus circadien diminuée (7, 9). Ce dernier phénomène serait lié à la diminution de l’amplitude des rythmes circadiens et à leur mauvais ajustement à l’environnement, en particulier au cycle lumière/obscurité, du fait d’une avance de phase de ces rythmes. Récemment, une équipe suisse a suggéré que ce n’était pas le processus homéostatique qui était altéré, mais que c’était surtout le processus circadien qui s’atténuait avec le vieillissement (10). L’insomnie chronique du sujet âgé Selon l’ICSD-2 (11), l’insomnie chronique se caractérise par la survenue de troubles du sommeil au moins trois fois par semaine, et ce pendant plus d’un mois. La plainte peut concerner une difficulté d’endormissement, des troubles du maintien du sommeil (éveils durant la nuit) et/ou un réveil précoce. Le sommeil nocturne apparaît alors non réparateur. Cette plainte relative au sommeil doit également avoir un retentissement diurne pour que l’on puisse parler d’insomnie chronique (tableau). Les étiologies d’insomnie sont multiples. L’insomnie chronique peut être soit primaire, soit secondaire : insomnie psychophysiologique ; mauvaise perception de sommeil ; troubles de l’hygiène veille-sommeil ; insomnie secondaire à un trouble psychiatrique, à un trouble médical, à la prise d’un médicament ou d’un toxique. Afin de rechercher l’étiologie de l’insomnie chez un sujet donné, l’interrogatoire de ce sujet est primordial (habitudes de sommeil, circonstances de survenue de l’insomnie, traitements actuels et antérieurs, etc.). La prise en charge de l’insomnie exige du patient qu’il renseigne un agenda de sommeil. L’insomnie qui n’est pas exclusivement liée à une étiologie particulière sera considérée comme psychophysiologique (selon l’ICSD-2, 2005) ou primaire (selon le DSM-IV, 2000). Il est important de noter qu’il existe un continuum entre certains types d’insomnies. Ainsi, une insomnie secondaire initialement liée à un événement stressant de la vie peut tout à fait évoluer vers une insomnie psychophysiologique : en effet, le facteur déclenchant initial de l’insomnie – “l’événement stressant” – n’existe plus, mais l’insomnie perdure et évolue pour son propre compte. Cette insomnie devient donc psychophysiologique. La physiopathologie précise de l’insomnie psychophysiologique reste encore mal connue. Il existe plusieurs hypothèses à l’heure actuelle : s’agit-il de Mots-clés Insomnie Sujet âgé Mélatonine Highlights Insomnia of aging is characterized by non-restorative sleep, with several nocturnal awakenings, early morning awakening, resulting in sleep reduction and alteration of morning alertness. Also, there is a decrease in melatonin secretion with aging. Prolonged-release melatonin treatment results in significant and meaningful improvements in sleep quality, morning alertness, sleep onset latency and quality of life in primary insomnia of patients 55 years old and over. Keywords Insomnia Elderly Melatonin Tableau. Critères diagnostiques de l’insomnie (ICSD-2). Plainte ayant trait à des difficultés d’endormissement et de maintien du sommeil, à un éveil trop précoce ou à un sommeil considéré comme non réparateur ou de mauvaise qualité Apparition de ces troubles malgré des circonstances favo­rables à la survenue du sommeil Retentissement diurne de ces troubles, l’un au moins de ces symptômes étant retrouvé : • Fatigue • Trouble de l’attention, de la concentration ou de la mémoire • Retentissement social ou difficultés scolaires • Troubles de l’humeur, irritabilité • Somnolence diurne excessive • Perte de motivation, d’initiative • Accidents du travail ou de la voie publique • Céphalées, troubles gastro-intestinaux • Inquiétude concernant le sommeil La Lettre du Pharmacologue • Vol. 23 - n° 3 - juillet-août-septembre 2009 | 105 THÉRAPEUTIQUE Références bibliographiques 1. Léger D, Guilleminault C, Dreyfus JP, Delahaye C, Paillard M. Prevalence of insomnia in a survey of 12,778 adults in France. J Sleep Res 2000;9:35-42. 2. Czeisler CA, Weitzman E, MooreEde MC, Zimmerman IC, Knaver RS. Human sleep: its duration and organization depend on its circadian phase. Science 1980;210:1264-7. 3. Dijk DJ, Czeisler CA. Contribution of the circadian pacemaker and the sleep homeostat to sleep propensity, sleep structure, electroencephalographic slow waves, and sleep spindle activity in humans. J Neurosci 1995;15:3526-38. 4. Dinorah Garcia A. The effect of chronic disorders on sleep in the elderly. Clin Geriatr Med 2008;24:27-38. 5. Feinberg I, Koresko RL, Heller N. EEG sleep patterns as a function of normal and pathological aging in man. J Psychiatr Res 1967;5:10744. 6. Feinberg I. Changes in sleep cycle patterns with age. J Psychiatr Res 1974;10:283-306. 7. Dijk DJ, Duffy JF. Circadian regulation of human sleep and age-related changes in its timing, consolidation and EEG characteristics. Ann Med 1999;31:130-40. 8. Brezinova V. The number and duration of the episodes of the various EEG stages of sleep in young and older people. Electroencephalogr Clin Neurophysiol 1975;39:273-8. 9. Dijk DJ, Duffy JF, Riel E, Shanahan TL, Czeisler CA. Ageing and the circadian and homeostatic regulation of human sleep during forced desynchrony of rest, melatonin and temperature rhythms. J Physiol 1999;516:611-27. 10. Munch M, Knoblauch V, Blatter K, Wirz-Justice A, Cajochen C. Is homeostatic sleep regulation under low sleep pressure modified by age? Sleep 2007;30:781-92. 11. American Academy of Sleep Medicine. The international Classification of Sleep Disorders: diagnostic and coding manual (2nd ed.). Westchester: American Academy of Sleep Medicine, 2005. mécanismes d’hyper-éveil avec installation du cercle vicieux de l’insomnie, ou d’un dysfonctionnement des systèmes de régulation du sommeil homéostatique et/ou circadien ? Le traitement de l’insomnie doit être adapté à son étiologie (12). La prise en charge d’une insomnie psychophysiologique est avant tout comportementale, comprenant notamment une restriction du temps passé au lit et des conseils d’hygiène de sommeil. Lorsque cela n’est pas suffisant, le traitement peut consister en une thérapie cognitivocomportementale afin de diminuer les pensées dysfonctionnelles liées au sommeil. En outre, chez la personne de plus de 55 ans, un dysfonctionnement du système circadien peut être évoqué, et il est alors parfois nécessaire d’adjoindre un traitement à base de mélatonine. L’utilisation d’hypnotiques dans l’insomnie chronique ne doit être que transitoire. Mélatonine : sécrétion, mécanismes d’action et rôle dans la régulation du sommeil (13) Sécrétion de mélatonine La sécrétion de mélatonine a lieu préférentiellement pendant la nuit, s’étalant sur environ 10 heures, avec un pic vers 3-4 heures. Le “message mélatonine” présente une grande hétérogénéité d’un sujet à l’autre, alors qu’il est très reproductible chez un même sujet d’un jour à l’autre. Chez certains individus (5 % environ), la sécrétion peut être très discrète, voire, exceptionnellement, absente, sans conséquence évidente sur la qualité du sommeil ou sur les capacités d’adaptation à une perturbation des rythmes. La sécrétion s’amoindrit progressivement avec l’âge, comportant une tendance à l’avance de phase, voire une disparition totale chez la personne très âgée. La mélatonine franchit la barrière hématoencéphalique, en particulier depuis le sang jusqu’au tissu nerveux. Une petite fraction de la mélatonine est transformée en dérivés de la kynurénine – dont le rôle physiologique est encore imprécis, mais qui est vraisemblablement en relation avec l’excitabilité neuronale. Une horloge interne située dans les NSC contrôle le rythme de la sécrétion de mélatonine, comme l’ensemble des rythmes circadiens. La voie principale de régulation emprunte initialement le système nerveux central puis le système sympathique. Le contrôle 106 | La Lettre du Pharmacologue • Vol. 23 - n° 3 - juillet-août-septembre 2009 terminal épiphysaire est essentiellement assuré par des fibres noradrénergiques issues des ganglions cervicaux supérieurs. L’alternance lumière/obscurité (ou jour/nuit) constitue le synchroniseur majeur du système. La sécrétion de mélatonine s’effectue en fonction de cette alternance tout en montrant une relative inertie en cas de modifications de celle-ci. La lumière peut aussi exercer un effet inhibiteur, selon l’heure d’administration de la plage lumineuse, à condition que l’éclairement soit suffisant, prolongé, et qu’il intervienne à un horaire optimal (2 500 lx entre 2 heures et 4 heures du matin). Récepteurs à la mélatonine (13, 14) Deux sous-types de récepteurs (MT1 et MT2) couplés aux protéines G ont été clonés et caractérisés chez les mammifères. Un troisième site de liaison MT3 participe à la protection contre le stress oxydatif. De plus, la mélatonine interagit avec des protéines intracellulaires telles que la tubuline, la calréti­culine et la calmoduline (dont la liaison au Ca²+ est antagonisée par la mélatonine). Les récepteurs sont exprimés dans différents tissus, en particulier dans le système nerveux central. Ils sont présents dans les NSC (MT1) et les noyaux paraventriculaires de l’hypothalamus où ils sont colocalisés avec les neurones à CRF, dans l’hippocampe, le cervelet (MT1 et MT2), où ils modulent l’activité des interneurones gabaergiques et les synapses glutamatergiques, les structures dopaminergiques centrales et dans différents types cellulaires rétiniens. Dans la maladie d’Alzheimer, l’expression des récepteurs MT1 est diminuée alors que l’augmentation de l’expression des récepteurs MT2 pourrait correspondre à un phénomène compensatoire. La régulation de ces récepteurs est complexe. Leur expression maximale, qui coïncide avec le pic de mélatonine endogène, suggère une absence de désensibilisation lors d’un traitement prolongé. La conservation de l’effet d’entraînement par administration chronique de mélatonine chez l’aveugle est un argument supplémentaire. Pharmacocinétique (15) L’administration per os de mélatonine à libération immédiate conduit à des profils plasmatiques très hétérogènes, avec un pic précoce et une concentration résiduelle pendant plusieurs heures. L’adminis- THÉRAPEUTIQUE Effet sur le sommeil et le rythme veillesommeil (16) Le couplage précis entre l’augmentation de la sécrétion endogène et l’ouverture de la “porte du sommeil” suggère que la mélatonine participe à la régulation du cycle veille-sommeil par inhibition des systèmes d’éveil (17). L’existence de projections nerveuses à partir des NSC vers l’aire préoptique ventrolatérale inhibitrice des systèmes d’éveil est un argument. Les protocoles de décalage de la sécrétion de mélatonine avec la lumière donnent à penser que la mélatonine endogène participe aussi à la régulation de l’architecture du sommeil. Les effets de la mélatonine exogène sur le sommeil varient selon que l’administration est unique ou répétée, qu’elle s’effectue chez le volontaire sain ou l’insomniaque, et selon l’heure et la dose. Chez le volontaire sain, l’effet sur la propension au sommeil de 5 mg de mélatonine est plus marqué à 21 heures qu’à 12 heures. Administrée dans l’après-midi, la mélatonine en prise unique a un effet sédatif, provoquant une augmentation de la sensation de fatigue, un allongement du temps de réaction, une diminution de la latence d’endormissement et une augmentation de l’activité thêta et des fuseaux (stades N1 et N2) [15, 18]. En l’absence de toxicité immédiate, la mélatonine a fait l’objet de multiples études portant sur l’insomniaque et impliquant différentes méthodes d’évaluation (autoquestionnaire, actimétrie, polysomnographie). La plupart des études ont été réalisées avec des préparations à libération immédiate à des doses souvent élevées (plusieurs milligrammes), pour contrebalancer la cinétique d’élimination très rapide. Des effets non spécifiques ont pu être observés, conséquence d’une interaction de la mélatonine avec la plupart des systèmes de neuromédiateurs lors de son administration à forte dose (15). L’administration de mélatonine ne modifie pas la sécrétion endogène selon le phénomène de rétrocontrôle négatif classique en endocrinologie. La phase du rythme endogène est modifiée différem- ment (avance ou retard de phase) selon l’heure d’administration du stimulus exogène. Parmi les effets connus de la mélatonine, lorsque celle-ci est administrée l’après-midi ou dans la soirée, une avance de phase est observée, alors qu’une administration matinale ou à midi conduit à un retard de phase, plus faible, voire absent, selon certains auteurs. L’effet d’avance de phase s’observe aussi sur le rythme de température. Cet effet chronobiotique constitue la base physiologique du traitement des troubles du rythme veille-sommeil tels que le jet lag, le syndrome de retard de phase, et le rythme différent de 24 heures, observé en particulier chez les aveugles. Les données physiologiques et cinétiques ainsi que les résultats discordants des études cliniques ont conduit à la mise au point d’une préparation à libération contrôlée (Circadin®), qui n’évite cependant pas l’effet de premier passage hépatique. Cette préparation orale génère un pic sanguin plus faible sur une durée prolongée (figure). Des essais cliniques récents contre placebo, utilisant des échelles d’auto-évaluation, ont montré l’efficacité de Circadin® en monothérapie dans le traitement à court terme de l’insomnie primaire chez les patients de 55 ans ou plus, indication pour laquelle cette forme pharmaceutique a reçu une AMM en 2007. La prise du médicament se situe une à deux heures avant le coucher. L’effet hypnotique est d’autant meilleur que la sécrétion 2 500 Références bibliographiques (suite…) 12. Schutte-Rodin S, Broch L, Buysse D, Dorsey C, Sateia M. Clinical guideline for the evaluation and management of chronic insomnia in adults. J Clin Sleep Med 2008;4:487-504. 13. Claustrat B, Brun J, Chazot G. The basic physiology and pathophysiology of melatonin. Sleep Med Rev 2005;9:11-24. 14. Ekmekcioglu C. Melatonin receptors in humans: biological role and clinical relevance. Biomed Pharmacother 2006;60:97-108. 15. Claustrat B. Mélatonine et troubles du rythme veille-sommeil. Médecine du sommeil 2009;6:1224. Circadin® Concentration de mélatonine plasmatique (pg/ml) tration d’une dose aussi faible que 1 mg conduit à des valeurs supraphysiologiques (nettement supérieures aux valeurs nocturnes sanguines). La phase métabolique très courte (demi-vie de 20 à 40 minutes) est la conséquence partielle d’un effet de premier passage hépatique intense. 16. Arendt J. Melatonin: characteristics, concerns, and prospects. J Biol Rhythms 2005;20:291-303. 17. Lavie P. Melatonin: role in gating nocturnal rise in sleep propensity. J Biol Rhythms 1997;12:657-65. 18. Cajochen C, Kräuchi K, von Arx MA, Möri D, Graw P, Wirz-Justice A. Daytime melatonin administration enhances sleep­iness and theta/ alpha activity in the waking EEG. Neurosci Lett 1996;207:209-13. 19. Circadin®. Dossier AMM, section 5.3.3.1.3. Rapport de l’étude RD 625/22940, avril 2001. 20. Léger D, Laudon M, Zisapel N. Nocturnal 6-sulfatoxymelatonin excretion in insomnia and its relation to the response to melatonin replacement therapy. Am J Med 2004;116:91-5. Mélatonine 2 mg à libération immédiate à jeun 2 000 1 500 1 000 Circadin® 2 mg LP à jeun 500 0 0,25 1 0,50 0,75 2 3 4 1,50 2,50 3,50 5 6 8 12 Temps (heures) Figure. Comparaison des cinétiques plasmatiques de mélatonine après administration de Circadin® et d’une solution de mélatonine 2 mg à libération immédiate à des volontaires sains âgés de 55 à 69 ans (19). La Lettre du Pharmacologue • Vol. 23 - n° 3 - juillet-août-septembre 2009 | 107 THÉRAPEUTIQUE Références bibliographiques (suite…) 21. Baskett JJ, Broad JB, Wood PC et al. Does melatonin improve sleep in older people? A randomised crossover trial. Age Ageing 2003;32:164-70. 22. Wade AG, Ford I, Crawford G et al. Efficacy of prolonged release melatonin in insomnia patients aged 55-80 years: quality of sleep and next-day alertness outcomes. Current Med Res Opinion 2007;23:2597-605. 23. Lemoine P, Nir T, Laudon M, Zisapel N. Prolonged-release melatonin improves sleep quality and morning alertness in insomnia patients aged 55 years and older and has no withdrawal effects. J Sleep Res 2007;16:372-80. 24. EMEA. European public assessment report for Circadin® ( m e l a t o n i n ) . E M E A 2 0 0 7. EMEA/H/C/695. 25. Résumé des caractéristiques du produit Circadin®. physiologique de mélatonine est diminuée (20). Cette donnée biologique caractéristique de l’insomnie du sujet âgé n’est pas retrouvée dans une autre étude (21). Un essai incluant 354 patients montre que la qualité du sommeil et de la vigilance du matin est améliorée après 3 semaines de traitement (22). Les modifications fortement corrélées de ces deux para­mètres suggèrent un effet bénéfique sur la fonction réparatrice du sommeil. Une autre étude incluant 170 patients confirme ces données (23) et rapporte une diminution de la latence d’endormissement et une amélioration de la qualité de vie. Il n’existe pas d’effet de sevrage, ni d’insomnie de rebond, comme on l’observe avec les benzodiazépines. Ces études témoignent de l’importance qu’il y a à administrer une forme galénique conduisant à un “signal mélatonine” mimant la sécrétion endogène, ce que ne font pas les formes à libération immédiate. Les effets indésirables sont peu fréquents, voire rares, et la mélatonine est bien tolérée (24). Il faut cependant insister sur la possibilité de l’aggra­ vation d’une pathologie auto-immune, et sur une utilisation déconseillée en cas d’insuffisance hépatique. La mélatonine est métabolisée par les cytochromes hépatiques (Cyp1A2 principalement, et Cyp1A1 et Cyp2C19 à un degré moindre) [15-25]. Les composés inducteurs, substrats ou inhibiteurs de ces cytochromes peuvent modifier sa biodisponibilité, entraînant une diminution ou une augmentation. Cependant, aucun cas de surdosage n’a été rapporté. Des interactions médicamenteuses d’ordre essentiellement pharmacocinétique sont donc à surveiller ; certaines d’entre elles peuvent survenir si la prescription dans le cadre de l’AMM n’est pas respectée. Conclusion Circadin®, en améliorant à la fois la rapidité d’endormissement, la qualité du sommeil et la vigilance diurne, par le renforcement possible du processus circadien de contrôle du sommeil, constitue une alternative aux hypnotiques classiques, efficace et bien tolérée, chez les patients insomniaques de plus de 55 ans. ■ CIRCADIN® 2 mg comprimés à libération prolongée : mélatonine : 2 mg. Excipient à effet notoire : lactose monohydraté (80 mg/cp). Indications thérapeutiques : Circadin® est indiqué, en monothérapie, pour le traitement à court terme de l’insomnie primaire caractérisée par un sommeil de mauvaise qualité chez des patients de 55 ans ou plus. Posologie et mode d’administration* : voie orale. Posologie recommandée de 2 mg une fois par jour, 1 à 2 heures avant le coucher et après le repas, pendant trois semaines. Enfant : ne pas utiliser chez l’enfant et l’adolescent de moins de 18 ans. Insuffisant rénal : prudence chez les insuffisants rénaux. Insuffisant hépatique : déconseillé chez les insuffisants hépatiques. Contre-indications : hypersensibilité à la substance active ou à l’un des excipients. Mises en garde spéciales et précautions d’emploi* : Circadin® pouvant entraîner une somnolence, prudence si les effets de cette somnolence sont susceptibles de poser un problème de sécurité. Circadin® est déconseillé chez les patients présentant une maladie auto-immune. Les patients présentant une intolérance héréditaire au galactose, un déficit en lactase de Lapp ou un syndrome de malabsorption du glucose et du galactose ne doivent pas prendre ce médicament. Interactions avec d’autres médicaments et autres formes d’interaction* : interactions pharmacocinétiques : En cas d’induction des enzymes CYP3A, diminution possible des concentrations plasmatiques des médicaments administrés simultanément. Observation peu probable d’interactions notables, entre la mélatonine et d’autres substances actives, découlant de l’effet de la mélatonine sur les enzymes CYP1A. Interactions possibles entre la mélatonine et d’autres substances actives découlant de leur effet sur les enzymes CYP1A. Prudence chez les patients traités par la fluvoxamine, (association à éviter), par le 5- ou le 8-méthoxypsoralène (5- et 8-MOP) et par la cimétidine. Le tabagisme est susceptible de réduire le taux de mélatonine. Prudence chez les patientes sous œstrogénothérapie. Les inhibiteurs du CYP1A2 sont susceptibles d’accroître l’exposition à la mélatonine. Les inducteurs du CYP1A2 sont susceptibles de réduire les concentrations plasmatiques de la mélatonine. Aucune étude réalisée pour déterminer si les agonistes/antagonistes adrénergiques, les agonistes/ antagonistes des opiacés, les antidépresseurs, les inhibiteurs de la prostaglandine, les benzodiazépines, le tryptophane et l’alcool interfèrent ou non avec Circadin® ou vice versa. Interactions pharmacodynamiques : Consommation d’alcool proscrite pendant le traitement par Circadin®. Circadin® peut amplifier les propriétés sédatives des benzodiazépines et des hypnotiques autres que les benzodiazépines. Aucune interaction pharmacocinétique cliniquement significative observée avec la thioridazine et l’imipramine, toutefois, l’administration concomitante de Circadin® a majoré la sensation de tranquillité et la difficulté à effectuer des tâches et a entraîné des sensations vertigineuses plus marquées. Grossesse et allaitement*. Effets sur l’aptitude à conduire des véhicules et à utiliser des machines*. Effets indésirables* : dans des essais cliniques, les effets indésirables les plus fréquents étaient : céphalées, pharyngite, mal de dos et asthénie, qui étaient fréquents, d’après la définition MedDRA, dans le groupe sous Circadin comme dans celui sous placebo. Surdosage*. Propriétés pharmacodynamiques* : agonistes des récepteurs de la mélatonine, Code ATC : N05CH01. La mélatonine participe au contrôle des rythmes circadiens et à la régulation du rythme jour-nuit. Elle est aussi associée à un effet hypnotique et à une propension accrue au sommeil. Propriétés pharmacocinétiques* : absorption complète chez l’adulte et pouvant être réduite chez les personnes âgées. La demi-vie terminale (t1/2) est de 3,5 à 4 heures. Les métabolites sont éliminés par voie rénale. Données de sécurité préclinique*. Excipients*. Durée de conservation : 5 ans. Précautions particulières de conservation*. Nature et contenu de l’emballage extérieur* : 21 comprimés. Précautions particulières d’élimination*. Titulaire de l’AMM : RAD Neurim Pharmaceuticals EEC Limited, One Forbury Square, The Forbury, Reading, Berkshire RG1 3EB, Royaume-Uni. E-mail : [email protected]. Numéro d’AMM : 384 141-5 CIRCADIN 2 mg, 21 comprimés à libération prolongée. Classification en matière de délivrance et prix : liste I. Non remboursable et non agréé aux collectivités à la date du 1er mai 2009. Laboratoires Lundbeck SAS, 37, avenue Pierre Ier de Serbie, 75008 Paris. Tél. : 01 53 67 42 00. Information pharmaceutique et remontée d’informations quant à la qualité de l’information et la déontologie de la visite médicale, e-mail : [email protected] - Information médicale/pharmacovigilance, tél. : 01 53 67 10 54. V05.2009 * Pour une information plus complète, se reporter au Résumé des Caractéristiques du Produit (disponible sur demande auprès du laboratoire). 108 | La Lettre du Pharmacologue • Vol. 23 - n° 3 - juillet-août-septembre 2009