primitive. Un obstacle sur les voies
biliaires et une thrombose artérielle peu-
vent également entraîner une cholestase
et une raréfaction canalaire.
Le rejet chronique est le plus souvent
observé un à deux ans après la greffe. Il
peut cependant survenir beaucoup plus
précocement, et des retransplantations
pour rejet chronique ont été rapportées
dans les deux à trois semaines après une
transplantation (6).
MÉCANISME DU REJET CHRONIQUE
Il est habituellement admis que rejet aigu
et rejet chronique sont deux manifesta-
tions différentes dans leur chronologie de
l’alloréactivité contre les antigènes d’his-
tocompatibilité du donneur. Un rejet aigu
incomplètement traité peut évoluer d’un
seul tenant vers un rejet chronique, et un
antécédent de rejet aigu est le principal
facteur de risque identifié de rejet chro-
nique(2, 7).Cette hypothèse n’est cepen-
dant pas tout à fait satisfaisante. Des
rejets chroniques peuvent survenir chez
des patients n’ayant aucun antécédent de
rejet aigu. L’atteinte biliaire et l’atteinte
vasculaire sont communes aux rejets
aigus et chroniques, mais la topographie
des lésions vasculaires est différente, et
il semble que certains dysfonctionne-
ments chroniques d’origine immunitaire
puissent entraîner des lésions des gros
canaux biliaires et non des canaux
biliaires interlobulaires, qui sont la prin-
cipale cible du rejet aigu (8). Il est pos-
sible qu’à la réponse cellulaire dirigée
contre les antigènes d’histocompatibilité
s’associe une réponse humorale dirigée
contre des antigènes tissulaires (9).
La difficulté d’interpréter à un stade pré-
coce une raréfaction canalaire et l’impos-
sibilité actuelle d’apprécier l’état des gros
troncs artériels rendent difficile l’étude
des phénomènes immunitaires qui initient
le rejet chronique. À l’opposé, au moment
de la retransplantation, où le diagnostic
est rendu facile par l’analyse complète du
greffon, il n’existe plus de manifestation
évidente d’une réponse immune. L’infil-
trat mononucléé, en particulier, est soit
absent, soit non spécifique. On ne peut
donc exclure que rejet aigu et rejet chro-
nique soient la conséquence de processus
immunitaires différents.
Le mécanisme responsable de la moins
grande sensibilité du foie au rejet n’est
pas connu. Il se traduit sur le plan cli-
nique, outre la moindre incidence de rejet
aigu et de rejet chronique, par une
moindre influence péjorative d’un cross-
match positif ou d’une incompatibilité
HLA, par l’influence bénéfique de trans-
plantations combinées et par la possibi-
lité, chez un petit groupe de patients, d’ar-
rêter toute immunosuppression sans perte
du greffon. L’incidence plus faible de
rejet aigu pourrait être liée à l’apoptose
des cellules immunitaires infiltrant le
greffon. La moindre incidence des rejets
chroniques pourrait être liée, parce
qu’elle en est contemporaine, à la libéra-
tion d’antigènes de classe I solubles, à la
migration, chez le receveur, de certaines
cellules immunitaires résidentes du foie
transplanté responsables d’un microchi-
mérisme, ou à un remplacement des cel-
lules endothéliales du greffon par des cel-
lules pluripotentes d’origine médullaire.
INCIDENCE ET CONSÉQUENCE
L’incidence de rejet chronique rapportée
dans la littérature variait classiquement
entre 8 et 16 %. Chez les patients traités
par ciclosporine A, l’addition d’azathio-
prine était associée à une moindre inci-
dence de rejet. Les chiffres les plus
récents observés chez des patients traités
par tacrolimus et ayant un recul impor-
tant sont de 3 % (2). Le rejet chronique
n’est donc plus une éventualité fréquente
après transplantation hépatique. Les
chiffres du Registre européen de trans-
plantation hépatique confirment ces don-
nées monocentriques en montrant que le
rejet chronique n’est pas non plus une
cause fréquente de décès ou de retrans-
plantation (10). Il est responsable de
2,8 % de tous les décès, qui sont en fait
dominés par les causes infectieuses. Ce
chiffre est un peu inférieur à celui des
non-fonctions primaires du greffon
(3,1 %) et inférieur à celui des décès per-
opératoires (4,3 %), ou des décès secon-
daires à une complication technique
(6,4 %), ou à un cancer de novo (6,3 %).
De même, il n’est responsable que de
17 % des retransplantations, c’est-à-dire
moins que les retransplantations pour
non-fonction primaire du greffon (27 %)
ou complication vasculaire (24 %).
Les principaux facteurs de risque de rejet
chronique identifiés sont :
"L’indication de la transplantation. Le
rejet chronique est plus fréquent chez les
patients transplantés pour une pathologie
auto-immune (cirrhose biliaire primitive,
cholangite sclérosante primitive et hépa-
tite auto-immune) ; en revanche, il semble
exceptionnel chez les patients transplan-
tés pour une hépatopathie virale B (7).
"Un antécédent de rejet aigu. Le
risque de rejet chronique est très directe-
ment corrélé au nombre d’épisodes de
rejet aigu. Il est inférieur à 1 % chez les
patients n’ayant pas eu de rejet aigu, et
respectivement de 3 %, 8 % et 16 % chez
ceux ayant eu un, deux ou trois épisodes
ou plus de rejet aigu (2).
"Un défaut d’immunosuppression,
soit du fait d’une mauvaise compliance,
soit parce que le traitement doit être inter-
rompu en raison d’un sepsis grave, d’une
insuffisance rénale ou d’un syndrome
lymphoprolifératif.
"En revanche, l’influence d’une
incompatibilité HLA ou d’un cross-
match positif est controversée.
TRAITEMENT DU REJET CHRONIQUE
Encore récemment, le rejet chronique
était considéré comme un processus irré-
versible entraînant une défaillance iné-
luctable du greffon pour laquelle le seul
traitement était une retransplantation.
Des études ont cependant montré que
l’on pouvait dans certains cas observer
une stabilisation, voire une réversibilité
des lésions canalaires, spontanées (6) ou
après augmentation de l’immunosup-
pression (11, 12). Parce qu’il est mainte-
nant admis que le rejet chronique est un
processus dynamique, un groupe inter-
national de pathologistes a proposé une
classification du rejet chronique hépa-
tique (13), lors de la conférence de Banff
(Canada) en 1999. Cette classification
distingue le rejet chronique à un stade
Le Courrier de la Transplantation - Volume II - n o1 - janvier-février-mars 2002
18
DOSSIER
thématique