COUR D'APPEL DE BRUXELLES , CHAMBRES CIVILES, 9 NOVEMBRE 1998 I. LES FAITS 1. Attendu qu'il est constant en fait que la S.A. S.G.S. I... s'est adressée à la fin de 1987 à la S.A. K..., agence de publicité, pour l'organisation d'une campagne publicitaire de grande envergure, dont les idées maîtresses ont été reprises dans un document intitulé " recommandation budgetée pour 1988 "; Que, le 16 janvier 1989, la S.A. K... a communiqué à la S.A. S.G.S. I... une "recommandation définitive" pour cette campagne qui était fondée sur l'usage du slogan "Des profils pour faire face", combiné avec la photographie de deux visages représentés de profil; Que cette recommandation comprenait un " plan média ", ainsi qu'un devis global se détaillant comme suit : […] Que, par lettre du 20 janvier 1989, la S.A. S.G.S. I... a fait part à la S.A. K... de son accord sur le " plan media ", ajoutant : " En ce qui concerne le devis global et plus particulièrement l(es) rubrique(s) 5 (affiches) et 6 (fardes), nous aimerions en discuter lors d'une prochaine rencontre "; Qu'au cours d'une réunion du 2 février 1989, la S.A. S.G.S. I... a confirmé son approbation du devis, […] 2. Attendu que la S.A. K... a adressé à la S.A. S.G.S. I... les factures suivantes : […] Que ces factures ont été acquittées par la S.A. K...; 3. Attendu que, pour la réalisation de la publicité en question, la S.A. K... a eu recours à la S.A. D... MODELS AGENCY, en abrégé S.A. DMA dans la suite du présent arrêt, qui lui a fourni les deux modèles à photographier; Que, le 24 février 1989, la S.A. DMA a facturé à la S.A. K... les droits d'utilisation des photographies de ses deux mannequins; Qu'il était convenu entre la S.A. DMA et la S.A. K... que cette utilisation se limiterait à de la publicité dans la presse - à l'exclusion des affiches, affichettes, posters, pancartes, showcards, présentoirs, emballages et spots TV - et pendant une durée d'un an; que la S.A. K... n'a pas informé la S.A. S.G.S. I... de ces limitations; 4. Attendu que, fin 1991, la S.A. DMA a constaté que la S.A. S.G.S. I... avait utilisé depuis 1989 et utilisait encore les photographies des mannequins pour du matériel PLV (publicité sur lieux de vente), c'est-à-dire sous la forme d'affiches et d'affichettes; Que la S.A. DMA a dès lors adressé à la S.A. S.G.S. I... deux factures, de 383.540 francs et 323.956 francs, soit au total de 707.496 francs, correspondant aux droits de reproduction des photographies pour ces affiches depuis 1989; Que la S.A. S.G.S. I... a immédiatement contesté ces factures; 5. Attendu qu'après lui avoir adressé deux mises en demeure infructueuses, la S.A. DMA a fait citer la S.A. S.G.S. I..., le 26 septembre 1993, en vue de l'entendre condamner au paiement desdites factures; qu'en termes de conclusions, elle a précisé que la somme de 707.496 francs faisant en principal l'objet de sa demande était réclamée à titre de dommages et intérêts; Que la S.A. S.G.S. I... a appelé la S.A. K... en intervention afin de l'entendre condamner à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à sa charge dans le cadre de la demande principale; Que, par voie reconventionnelle, la S.A. K... a sollicité, quant à elle, la condamnation de la S.A. S.G.S. I..., au paiement de 206.500 francs à titre de dommages et intérêts, pour avoir utilisé une publicité sans autorisation et en fraude de ses droits d’auteur ainsi qu'au paiement de 100.000 francs pour procédure téméraire et vexatoire; qu'elle a demandé, en outre, qu'il soit fait interdiction à la S.A. S.G.S. I... d'encore utiliser cette publicité à l'avenir, sous peine d'une astreinte de 50.000 francs par manquement; 6. Attendu que le premier juge a fait droit aux demandes principale et reconventionnelle, sous la réserve qu'il a limité à 50.000 francs les dommages et int érêts dus par la S.A. S.G.S. I... pour procédure téméraire et vexatoire; qu'il a dit, par ailleurs, la demande en intervention et garantie non fondée; Attendu que cette décision est frappée d'appel par la S.A. S.G.S. I... qui persiste à contester devant la cour le fondement des demandes principale et reconventionnelle et persévère subsidiairement dans les fins de sa demande en garantie; Que la S.A. K... introduit un appel incident tendant à entendre accueillir intégralement sa demande de dommages et intérêts pour procédure téméraire et vexatoire; Que la S.A. DMA conclut pour sa part à la confirmation du jugement attaqué; II. DISCUSSION A. Demande principale Attendu qu'il est constant que la S.A. S.G.S. I... a reproduit l'image des mannequins de la S.A. DMA au-delà des limites dans lesquelles celle-ci avait autorisé l'utilisation de cette image, puisqu'elle ne conteste pas avoir reproduit celle-ci sur des affiches apposées dans ses agences - et ce, de 1989 à 1993, alors que la S.A. DMA avait exclu cette forme d'usage et n'avait autorisé la reproduction de l'image que pendant une durée d'un an; Que la S.A. S.G.S. I... oppose à la demande principale qu'elle n'était pas liée conventionnellement à la S.A. DMA et que la relativité des contrats, consacrée par l'article 1165 du Code civil, s'oppose à ce que cette dernière puisse se prévaloir de restrictions conventionnelles qui n'ont été imposées qu'à la S.A. K..., d'autant qu'aucune stipulation pour autrui n'a été formulée et qu'il n'est pas établi qu'elle avait connaissance desdites limitations; Que la S.A. S.G.S. I... se prévaut en outre d'un droit propre qui lui aurait été conféré par la S.A. K...; Attendu que cette argumentation ne peut cependant être accueillie; Que les mannequins ou modèles, comme toute personne physique, sont en effet titulaires d'un droit à l’image qui leur permet de s'opposer à ce que leur image soit reproduite, notamment à des fins publicitaires, sans leur autorisation, ou de subordonner cette reproduction à certaines limites et certaines conditions, notamment de rémunération; Qu'il s'agit d'un droit opposable erga omnes, même dans sa composante patrimoniale; Que le " right of publicity ", qui peut être défini comme le droit à l'exploitation exclusive de sa personnalité à des fins publicitaires ou commerciales, peut être assimilé à cet égard au droit d’auteur, l'individu ayant une espèce de " copyright naturel sur son portrait " (cf. Marc Isgour et Bernard Vinçotte, Le droit à l’image, Larcier, 1998, n° 69, p. 62 et références citées); Attendu qu'il n'est, par ailleurs, pas contesté que des mannequins peuvent confier à une agence le mandat spécial d'exploiter leur image; qu'en l'espèce, les mannequins concernés ont valablement autorisé la S.A. DMA à négocier les droits de reproduction de leur image avec des tiers; Attendu que la cession de ces droits doit toutefois être interprétée restrictivement; que l'autorisation d'exploiter l'image d'une personne ne peut en outre jamais être que spéciale, c'est-à-dire qu'elle ne peut porter que sur un ou plusieurs usages déterminés d'une ou plusieurs photographies précises, ou doit au moins être limitée soit à certains types d'utilisation de l'image (notamment dans le temps), soit à certaines images; Que de même que l'auteur qui cède ses droits dispose d'un droit de destination qui lui permet de limiter la cession d'une façon opposable aux tiers, la personne représentée - ou son mandataire - peut de la même manière contrôler l'exploitation qui sera faite de son image (cf. M. Isgour et B. Vinçotte, op. cit., n°s 70, p. 63, 99, p. 83 et 104, p. 86 et références citées); Que la S.A. S.G.S. I... est partant malvenue de soutenir que les limitations fixées par la S.A. DMA lui seraient inopposables; Attendu qu'il ne peut être que constaté que l'image des mannequins concernés ne pouvait être exploitée sans leur autorisation ou celle de la S.A. DMA et que la S.A. S.G.S. I... reste en défaut de rapporter la preuve - dont la charge lui incombe - de ce qu'elle aurait obtenu cette autorisation pour la diffusion d'affiches ainsi que pour les années postérieures à 1989; Que l'usage qu'elle a fait de l'image des mannequins en dehors des limites fixées par la S.A. DMA doit être considéré comme fautif, indépendamment de la question de savoir si elle a agi de bonne foi ou non (cf, références citées par M. Isgour et B. Vinçotte, op. cit., n°s 35, p. 36 et 171, p. 124; cons. aussi De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, t. II, vol. I, 4ème édition par J.P. Masson, p. 65, n° 50); Qu'elle fait valoir en vain qu'elle ignorait l'intervention même de la S.A. DMA et qu'elle avait obtenu ou croyait avoir obtenu de la S.A. K... l'autorisation générale de reproduire les photographies prises des mannequins; Que ces circonstances fussent-elles établies (cf. ce qui sera dit ci-après sub B à ce sujet), elles ne seraient pas élisives de la responsabilité de la S.A. S.G.S. I... à l'égard de la S.A. DMA, dès lors qu'il ne lui eût pas été impossible de vérifier auprès de la S.A.K... si des droits de reproduction de l’image des mannequins étaient dus compte tenu de l'usage qu'elle en faisait, et s'ils avaient été payés; Que les éléments invoqués par la S.A. S.G.S. I... ne peuvent être pris en considération que dans le cadre de ses relations avec la S.A. K...; Attendu que le montant des dommages et intérêts réclamés par la S.A. DMA ne fait, comme tel, l'objet d'aucune contestation; Attendu que c'est partant à bon droit que le premier juge a déclaré la demande principale fondée; B. Demande en garantie 1. Attendu que la S.A. S.G.S. I... reproche à la S.A. K... d'avoir commis une faute contractuelle en lui cédant plus de droits qu'elle n'en avait ou, à tout le moins, en créant et en entretenant une situation apparente de nature à lui faire croire qu'elle était la seule titulaire des droits d’auteur et des droits de reproduction de l'image et que ces droits lui étaient cédés sans aucune limitation; Que la S.A. K... conteste formellement le fondement de ces griefs; Attendu que les éléments versés aux débats imposent de constater ce qui suit quant à l'objet de la convention intervenue entre la S.A. S.G.S. I..., et la S.A. K...; 2. Attendu qu'au début de 1989, la S.A. S.G.S. I... a marqué son accord sur le " plan media " et sur le devis global, à l'exception des affiches et des fardes; Que la teneur de cet accord ressort clairement de la lettre du 20 janvier 1989 de la S.A. S.G.S Interim et du compte rendu non contredit de la réunion du 2 février 1989 évoqués cidessus; Que c'est par l'effet d'une erreur que la S.A. S.G.S. I... fait état d'une lettre du 20 février 1989, par laquelle elle aurait émis le souhait de discuter les points 5 (affiches) et 6 (fardes) du devis global (cf. requête d'appel, p. 6, in fine), alors que cette lettre est datée du 20 janvier 1989 et donc antérieure à la réunion du 2 février 1989, au cours de laquelle lesdits points ont été exclus; Qu'on ne peut suivre, par ailleurs, la S.A. S.G.S. I... lorsqu'elle soutient que " le plan media recouvre la combinaison de media et de supports variés permettant d'atteindre le maximum de consommateurs " (requête d'appel p. 7); que cette interprétation va à l'encontre des termes mêmes de l'expression " plan media "; Que la S.A. K... n'a pas facturé en définitive à la S.A. S.G.S. I... le prix de 4.284.000 francs qui avait été prévu dans le devis pour le poste " media "; Qu'il est dès lors inexact d'affirmer, comme le fait la S.A. S.G.S. I..., que les factures " justifient renveloppe de plus de 5.000.000 francs " qu'elle a consacrée à la campagne (requête d'appel, p. 7), le total des factures qu'elle a payées ne s'élèvant qu'à 1.875.386 francs; Qu'elle se réfère en outre en vain à la " recommandation budgetée 1988 " qui n'a, à l'évidence, pas été mise en oeuvre comme telle par les parties; Attendu que, s'il n'est pas contesté que la S.A. K... a assuré la reproduction de la publicité en cause par la voie de la presse en 1989 (la facturation de la réalisation d'une annonce publicitaire pour les publications " L'Echo " et " De Tijd " s'inscrivant dans ce cadre), il se déduit de ce qui précède qu'il n'est en revanche pas établi qu'elle se soit chargée de cette reproduction par le moyen d'affiches à quelque moment que ce soit; Que la S.A. S.G.S. I... produit certes deux affiches 60/80 cm signées K...; que la S.A. K... conteste cependant formellement avoir apposé sa signature sur ces affiches et soutient que la S.A. S.G.S. I... a utilisé son film pour en tirer à son insu des affiches; qu'il est vrai que des affiches paraissent avoir été réalisées dès 1989, alors que le film qui permettait de les exécuter n'aurait été cédé à la S.A. S.G.S. I... qu'en février 1990; qu'il ne peut toutefois être exclu qu'ainsi que la S.A. K... l'allègue, la S.A. S.G.S. I.... ait dans un premier temps exécuté des affiches en effectuant un agrandissement de l'encart presse A 4; Qu'il s'impose en toute hypothèse de constater que la S.A. S.G.S. I... ne produit aucun courrier faisant état d'une acceptation ultérieure du point " affiches " du devis et qu'aucune prestation de réalisation d'affiches ne lui a été facturée; Qu'il est exact que la S.A. K... a réalisé et facturé d'autres prestations que celles relatives à la reproduction des photographies par la voie de la presse; qu'ainsi, elle a réalisé un film du visuel de la publicité pour l'impression de calendriers (facture du 31 octobre 1989) ainsi qu'une annonce pour le Salon de l'Entreprise de Charleroi; qu'elle a également offert diverses prestations dans le cadre de l'ouverture d'une agence de la S.A. S.G.S. I... à Malines; Que ces éléments sont cependant dénués de pertinence dès lors qu'ils n'impliquent pas que la S.A. K... ait dérogé aux restrictions fixées par la S.A. DMA; Attendu qu'en définitive, rien ne permet de considérer qu'en 1989, la S.A. K... aurait transmis à la S.A. S.G.S. I... plus de droits qu'elle n'en avait ou aurait créé l'apparence qu'elle lui cédait les droits de reproduction de l'image des mannequins; Que même la facture du 22 mars 1989 relative à une fourniture de " matériel pour les supports " ne dément pas cette analyse, la S.A. K... exposant que le prix demandé pour ce poste consistait en la rémunération des prestations qu'elle avait fournies pour la réservation d'espaces publicitaires dans les journaux (cf. ses premières conclusions, p. 3); que rien n'infirme cette allégation; Qu'il n'est pas établi en tout cas qu'elle ait fourni à la S.A. S.G.S. I... les films nécessaires à la réalisation d'affiches en 1989; 3. Attendu que la facturation réalisée en 1990 apparaît, en revanche, comme plus problématique; Que les trois factures établies en février 1990 concernaient en effet essentiellement la fourniture du matériel pour quatre supports ainsi que de deux films 3 couleurs de formats A 3 et A 4 avec le logo SGS; Qu'elles portent en outre la mention " campagne année 1990 "; que la S.A. K... expose que cette mention procéderait d'une erreur de son service de comptabilité qui, selon elle, a cru à tort qu'elle serait chargée de la campagne de 1990; que l'existence de cette erreur n'est toutefois pas établie; Attendu que, la cession du droit de reproduction d'une image étant d'interprétation restrictive, il ne peut être déduit de l'établissement desdites factures que la S.A. K... aurait cédé à la S.A. S.G.S. I... le droit de reproduire les images des mannequins concernés en 1990, ni a fortiori au cours des années suivantes; Que la S.A. S. G.S. Interim, eût dû vérifier ce qu'il en était; Attendu qu'il reste cependant que la S.A. K... devait se douter de ce que, si la S.A. S.G.S. I... souhaitait acquérir le matériel pour quatre supports ainsi que les films susdits, c'était en vue de procéder elle-même à la reproduction de photographies dans le cadre d'un prolongement de sa campagne en 1990; que la S.A. K... ne précise au demeurant pas pour quel autre motif la S.A. S.G.S. I... aurait payé la somme de plus de 150.000 francs représentant le prix total de ces fournitures; Que, dans ces circonstances, la S.A. K... eût dû informer la S.A. S.G.S. I..., au début de 1990, de l'intervention de la S.A. DMA et des conditions restrictives imposées par celle-ci quant à l'usage des photographies; Que cette obligation s'inscrivait dans le cadre de l'obligation générale de bonne foi qui doit présider à l'exécution de tout engagement contractuel, ainsi que du devoir d'information qui pèse sur le cocontractant ayant la qualité de professionnel spécialisé; qu'en tant qu'agence de publicité, la S.A. K... revêtait bien cette qualité; Qu'il convient du reste de relever surabondamment à cet égard que la formule contractuelle proposée par l'Union belge des annonceurs et la Chambre des agences-conseils en publicité stipule notamment ce qui suit : " L'agence s'engage à prendre toutes les dispositions nécessaires pour protéger l'annonceur contre toute réclamation de tiers (mannequins, photographes, etc.) ou avertir l'annonceur des limites qui seraient éventuellement apportées à la cession des droits de ceux-c i " (F. de Visscher, " La publicité et la loi-Belgique ", éd. Litec, n° 1277, p. 528, extrait produit par la S.A. K...); Que, si cette formule n'a pas été expressément introduite par les parties dans le champ de leur relation contractuelle, elle confirme néanmoins l'existence de l'obligation d'information s'imposant en vertu du droit commun à l'agence de publicité en relation avec un annonceur; Attendu que, tenant compte des considérations d'économie qui ont à l'évidence déterminé la politique de la S.A. S.G.S. I... en matière de publicité à partir de 1990, il y a tout lieu d'admettre qu'elle n'aurait pas réalisé les affiches incriminées si elle avait été informée des implications financières que cette réalisation impliquait, eu égard aux droits de la S.A. DMA; Attendu qu'il apparaît justifié dans ces circonstances de faire supporter par la S.A. K... les conséquences du non-respect par la S.A. S.G.S. I.... desdits droits, à concurrence de la moitié; Qu'il y a lieu dès lors de faire droit dans cette mesure à la demande en garantie, sauf en tant que celle-ci a pour objet le remboursement des dommages et intérêts réclamés par la S.A. DMA pour l'année 1989; Que les dommages et intérêts réclamés par la S.A. DMA pour les années 1990 à 1993 s'élèvent à 586.663 francs en principal, somme se décomposant comme suit : […] Que ces montants, calculés sur la base du tarif de la S.A. DMA, sont justifiés; Que la S.A. K... est en conséquence tenue de rembourser la moitié de 586.663 francs, soit 293.332 francs, à la S.A. S.G.S. I...; C. Demande reconventionnelle a) Demande de dommages et intérêts fondée sur l'atteinte aux droits d’auteur de la S.A. K.... Attendu qu'en cas de doute, les cessions de droits d’auteur s'interprètent restrictivement et en faveur de l'auteur; Que c'est à l'acquéreur à faire la preuve des droits qu'il a acquis; Qu'il ne faut cependant pas en conclure que les cessions doivent être expresses; qu'elles peuvent être tacites, pourvu que la volonté de céder soit certaine, ainsi que l'étendue des droits acquis par le cessionnaire (A. Berenboom, Le droit d’auteur, 1984, n° 77, p. 96); Attendu que la S.A. K... ne réclame pas de dommages-intérêts pour atteinte à ses droits d’auteur en ce qui concerne 1989 (cf. ses premières conclusions, p. 11); Qu'en ce qui concerne l'année 1990, il y a lieu d'admettre qu'elle a cédé implicitement le droit de reproduction des photographies en cause en livrant à la S.A. S.G.S. I... le matériel pour quatre supports et deux films moyennant le prix total de 150.148 francs, compte tenu de ce que cette cession s'est faite, selon les mentions des factures, dans le cadre de la " campagne année 1990 " et que cette cession n'avait de sens que dans la perspective de la reproduction des photographies par la S.A. S.G.S. I... pour les besoins de cette campagne; Que les éléments versés aux débats ne permettent par contre pas de considérer que la S.A. K... aurait cédé les droits de reproduction en question pour une période illimitée; Qu'une telle déduction ne peut être tirée en particulier du fait que la S.A. S.G.S. I... a payé le prix de la création ainsi que de la prise de vue et de la production de la photographie (facture du 27 février 1989), ainsi que du matériel pour les supports et les films susdits; Que, de la circonstance que la S.A. K... a attendu d'être attraite dans la présente procédure pour réclamer des dommages et intérêts à la S.A. S.G.S. I... par la voie d'une demande reconventionnelle, il ne peut être déduit ni qu'elle aurait cédé les droits de reproduction des photographies également pour les années 1991, 1992 et 1993, ni qu'elle aurait renoncé à faire valoir ses droits; Que la S.A. K... n'a par ailleurs pas créé une situation de nature à induire la S.A. S.G.S. I... en erreur quant aux droits qu'elle avait acquis, du point de vue des droits d’auteur ; Que la responsabilité de la S.A. K... n'est engagée à cet égard à l'égard de la S.A. S.G.S. I... sur la base ni des articles 1134 et 1382 du Code civil, ni de l'article 30 de la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du commerce et sur l'information et la protection du consommateur; Que la demande reconventionnelle de la S.A. K... doit, partant, être accueillie dans la mesure où elle tend à l'allocation de dommages et intérêts pour l'atteinte portée à ses droits d’auteur au cours de ces trois années; Attendu, quant au montant de ces dommages et intérêts, que la S.A. K... l'évalue au double des honoraires qu'elle aurait perçu pour la gravure et par année, pour l'impression de 500 affiches en français et 500 affiches en néerlandais; Que cette méthode d'évaluation par référence au prix facturé pour des prestations matérielles paraît inadéquate, s'agissant de l'évaluation de droits d’auteur ; Qu'à défaut d'autre élément précis de calcul, cette estimation ne peut se faire qu'ex aequo et bono; Qu'il y a lieu de tenir compte de ce que la S.A. S.G.S. I... expose sans être contredite que ses seize agences ont été reprises par la S.A. Adia Interim à partir du 1er janvier 1992, les deux dernières agences situées ... à Bruxelles et ... à Ixelles, ayant été supprimées à leur tour, respectivement les 1er juin 1992 et 1er avril 1993; Qu'il est dès lors certain que la S.A. S.G.S. I... n'a pas reproduit 500 affiches francophones et 500 affiches néerlandophones en 1992 et 1993; Qu'il est raisonnable dans ces conditions d'évaluer les dommages et intérêts revenant à la S.A. K... à 100.000 francs en principal; Attendu qu'il y a lieu enfin de maintenir l'interdiction imposée sous peine d'astreinte par le premier juge à la S.A. S.G.S. I... d'utiliser la publicité sous une forme non autorisée; que, si cette dernière expose que l'immatriculation de toutes ses agences au registre de commerce a été radiée, il reste qu'elle conserve une existence juridique et qu'il ne peut être exclu qu'elle tente encore à l'avenir d'utiliser la photographie en question sans en acquitter les droits de reproduction; b) Demande de dommages et intérêts pour procédure téméraire et vexatoire. Attendu que cette demande ne peut être accueillie dès lors que la demande en garantie est déclarée partiellement fondée; PAR CES MOTIFS, LA COUR, statuant contradictoirement, Vu l'article 24 de la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire, Reçoit les appels; Dit l'appel principal partiellement fondé et l'appel incident non fondé; Met à néant le jugement attaqué, sauf en tant qu'il a déclaré les demandes recevables, dit la demande principale fondée, prononcé une interdiction à l'encontre de la S.A. S.G.S. I... et liquidé les dépens; Statuant à nouveau pour le surplus, Déclare la demande en intervention et garantie fondée dans la mesure ci-après précisée; Condamne la S.A. K... à payer à la S.A. S.G.S. I... 293.332 francs augmentés des intérêts compensatoires calculés aux taux légaux à dater du 26 juillet 1993 jusqu'à la date du prononcé du présent arrêt, et les intérêts moratoires calculés sur ces montants jusqu'à leur entier paiement; Déboute la S.A. K... du surplus de sa demande en intervention et garantie; Déclare la demande reconventionnelle fondée dans la mesure ci-après précisée; Condamne la S.A. S.G.S. I... à payer à la S.A. K... 100.000 francs augmentés des intérêts compensatoires calculés aux taux légaux depuis le 26 janvier 1994, datte d'introduction de la demande reconventionnelle, jusqu'à la date du prononcé du présent arrêt, et les intérêts moratoires calculés sur ces montants jusqu'à leur entier paiement; Déboute la S.A. K... du surplus de sa demande reconventionnelle; Dit pour droit que les montants des condamnations prononcées dans le cadre de la demande en garantie et de la demande reconventionnelle se compenseront à due concurrence; Faisant masse des dépens des deux instances, condamne la S.A. K... et la S.A. S.G.S. I... à les supporter à concurrence, respectivement, des 3/4 et de 1/4, les dépens d'appel étant liquidés pour la S.A. D... MODELS AGENCY à 16.400 francs, pour la S.A. K..., à 16.400 francs et pour la S.A. S.G.S. I... à 7.500 + 2.050 + 16.400 francs.