Échos des congrès Compte-rendu ASCO-GU Orlando, 17-19 février 2011 B. Beuselinck*, P. Beuzeboc**, G. Gravis*** Cancer du rein * Oncologue médical, hôpitaux universitaires de Louvain, Belgique, et unité Inserm 674, Paris. ** Institut Curie, Paris. *** Service de ­cancérologie, institut ­Paoli-Calmettes, Marseille. Essai EFFECT, dosage optimal du sunitinib : 50 ­mg/­j 4 semaines sur 6 ou 37,5 mg/j en continu ? L’étude de phase II randomisée et multicentrique EFFECT, présentée par R. Motzer, a comparé l’efficacité et la tolérance du sunitinib utilisé dans le traitement du cancer du rein métastatique selon 2 schémas d’administration différents : le schéma 4 semaines sur 6 avec une dose quotidienne de 50 mg, et le schéma 37,5 ­mg/­j en continu. L’objectif principal était le temps jusqu’à progression (TTP), et les objectifs secondaires étaient la réponse, la survie globale (SG), la pharmacocinétique et la tolérance. Dans cette étude, 292 malades ont été inclus, 146 dans chaque bras. Il s’agissait de patients atteints d’un cancer du rein à cellules claires traités en première ligne par le sunitinib. Les 2 groupes étaient bien équilibrés en termes d’âge, d’indice de Karnofsky, de néphrectomie préalable et pour ce qui est des facteurs de risque du Memorial Sloan-Kettering Cancer Center (MSKCC). Dans le bras sunitinib 4 semaines sur 6, 29 % des malades étaient dans le groupe MSKCC de bon pronostic, 62 % dans le groupe de pronostic intermédiaire et 8 % dans Probabilité de progression tumorale 1,0 Schéma 4/6 (n = 146) Médiane : 9,9 mois (IC95 : 7,0-13,4) Schéma continu (n = 146) Médiane : 7,1 mois (IC95 : 6,8-9,7) 0,8 0,6 0,4 0,2 0,0 HR : 0,77 (IC95 : 0,57-1,04) p = 0,09 0 10 20 Mois Figure 1. Essai EFFECT : temps jusqu’à progression. 44 30 le groupe de mauvais pronostic. Dans le bras sunitinib continu, il s’agissait respectivement de 26 %, 60 % et 14 % des patients. Les sites métastatiques et leur nombre étaient bien équilibrés. La durée médiane de traitement était de 5 mois dans le bras sunitinib 4 semaines sur 6, et de 6 mois dans le bras sunitinib continu. Dans le premier bras, 53 % des malades ont arrêté le sunitinib pour cause de maladie progressive et 16 % pour cause d’effets indésirables. Dans le bras sunitinib en continu, il s’agissait respectivement de 60 % et 17 % des malades. Des réductions de dose ont eu lieu chez 36 % et 43 % des sujets. Le TTP est de 9,9 mois dans le bras sunitinib 4 semaines sur 6 et de 7,1 mois dans le groupe sunitinib continu. Cette différence n’est pas significative (p = 0,09) [figure 1]. La SG est de 23,1 mois et de 23,5 mois respectivement (différence non significative) [figure 2]. Le taux de réponse est de 32,2 % et de 28,1 % respectivement (différence non significative). La tolérance est la même dans les 2 bras de l’étude. En conclusion, les auteurs conseillent d’utiliser dans la mesure du possible le schéma approuvé de sunitinib 50 ­mg/­j 4 semaines sur 6. Le syndrome mains-pieds semble être un marqueur de l’efficacité du sunitinib chez les malades souffrant d’un cancer du rein métastatique Le syndrome mains-pieds (SMP) est un effet secondaire commun des inhibiteurs de la tyrosine kinase (ITK) des récepteurs VEGF et PDGF tels que le sunitinib, l’axitinib et le sorafénib. Sous sunitinib, 29 % des malades souffrent d’un SMP (tous grades confondus), et 8 % des patients souffrent d’un SMP de grade 3. Les précédentes années, un lien entre l’efficacité de ces traitements et l’apparition de certains effets indésirables avait déjà été établi : par exemple, l’apparition d’une hypertension sous axitinib ou de troubles de la fonction thyroïdienne sous sunitinib. Ce lien peut probablement s’expliquer par des effets pharmacocinétiques. D. Michaelson et al. ont rétro­ spectivement revu les dossiers de 770 malades atteints d’un cancer du rein métastatique et inclus dans 5 essais cliniques afin d’évaluer les corrélations entre l’incidence du SMP et des critères d’efficacité de la thérapie tels que le taux de réponse, la survie sans progression (SSP) et la SG. Ces sujets avaient été traités par sunitinib en pre- Correspondances en Onco-urologie - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2011 Compte-rendu ASCO-GU 1,0 Schéma 4/2 (n = 146) Médiane : 23,1 mois (IC95 : 17,4-25,4) Schéma continu (n = 146) Médiane : 23,5 mois (IC95 : 17,5- non atteint) 0,8 Probabilité de survie mière ou en deuxième ligne thérapeutique. Le sunitinib était administré à raison de 50 ­mg/­j 4 semaines sur 6 ou de 37,5 ­mg/­j en continu. Sur ces 770 malades, 179 (23 %) ont développé un SMP de tout grade qui apparaissait en général durant les premiers cycles. Les patients qui ont développé un SMP obtenaient en général plus de bénéfices de leur traitement : la SSP est de 14,3 mois versus 8,3 mois (p < 0,0001) [figure 3], la SG est de 38,2 mois versus 18,9 mois (p < 0,0001) [figure 4] et le taux de réponse est de 66,5 % versus 31,8 % (p < 0,0001). Le hazard-ratio (HR) pour la survie est de 0,539 (IC95 : 0,4230,686) [p < 0,001]. Pour les patients qui développent un SMP, la probabilité de décès est donc réduite de 47 %. 0,6 0,4 HR : 1,09 (IC95 : 0,78-1,50) p = 0,61 0,2 0,0 0 10 20 Mois 30 40 Figure 2. Essai EFFECT : survie globale. Probabilité de SSP 1,0 Avec SMP (n = 179) Médiane : 14,3 mois Sans SMP (n = 591) Médiane : 8,3 mois p < 0,0001 0,8 0,6 0,4 0,2 0,0 0 6 12 18 24 Mois 30 36 42 48 Figure 3. SSP selon la présence d’un SMP. Avec SMP (n = 179) Médiane : 38,2 mois Sans SMP (n = 591) Médiane : 18,9 mois p < 0,0001 1,0 0,8 Probabilité de SG Corrélation entre marqueurs génétiques de l’angiogenèse ou de l’exposition à la thérapie et SG chez les malades traités par pazopanib pour cancer du rein avancé Le pazopanib est un ITK du VEGFR, du PDGFR et de c-Kit qui a été approuvé récemment dans le traitement du cancer du rein avancé. C. Xu et al. avaient déjà présenté, à l’ASCO 2010, un lien entre des polymorphismes nucléo­tidiques dans les gènes IL-8, HIF1A et VEGFA (liés à l’angiogenèse), ainsi que dans le gène NR1IR (lié à l’expo­sition au pazopanib), et l’efficacité de cette molécule. Cette année, les auteurs ont montré une corrélation significative entre 6 polymorphismes dans les gènes IL-8, FGFR2, VEGFA, FLT4 et NR1I2 et la SG (p ≤ 0,05). Les patients porteurs de la variante wild-type IL-8 2767 AA (n = 68, 31 %) avaient une SG médiane de 29,6 mois, versus 14,8 mois pour ceux avec la variante TT (n = 36, 16 %) [HR = 2,3 ; IC95 : 1,4-3,9]. La survie médiane pour les hétérozygotes IL-8 était de 23,9 mois (n = 119, 53 %). La variante TT dans le gène FGFR2 + 906C>T était associée à une SG inférieure par rapport à celle du génotype wildtype CC (survie médiane de 21,4 mois versus 28,0 mois) [HR = 2,0 ; IC95 : 1,2-3,2 ; p = 0,009]. De même, une survie plus courte était observée chez les patients avec la variante AA dans le polymorphisme VEGFA-1154G>A comparativement à la variante wild-type GG (survie médiane de 16,7 mois versus 25,3 mois) [HR = 2,2 ; IC95 : 1,3-3,6 ; p = 0,004]. Les variantes NR1IR (-5385C>T) et FLT4 (1480A>G) étaient également associées à une survie réduite (p < 0,05). Les auteurs suggèrent une validation dans une série indépendante de tumeurs. 0,6 0,4 0,2 Combinaison d’AMG-386 et de sorafénib dans le cancer du rein métastatique B.I. Rini a présenté les résultats d’une étude de phase II randomisée combinant AMG-386 et sorafénib. ­L’AMG-386 est un inhibiteur de l’angiogenèse qui bloque les angiopoïétines 1 et 2 et qui empêche leur fixation Correspondances en Onco-urologie - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2011 0,0 0 6 12 18 24 30 Mois 36 42 48 54 60 Figure 4. SG selon la présence d’un SMP. 45 Échos des congrès Tableau I. Résultats de l’étude randomisée évaluant la combinaison de sorafénib à 2 schémas de dose de l’AMG-386 versus placebo. Sorafénib + AMG-386 10 mg/kg Sorafénib + AMG-386 3 mg/kg (n = 50) (n = 51) SSP médiane (IC80), mois 9,0 (7,1-11,0) Modèle de Cox, HR (IC80) Bras A + B versus C 38 37 sur le récepteur Tie2 des cellules endothéliales. Cent cinquante-deux malades sans traitement préalable ont été randomisés 1:1:1 dans un bras sorafénib par voie orale 400 mg 2 fois par jour + AMG-386 i.v. 10 ­mg/­kg (bras A) ou 3 ­mg/­kg (bras B) ou placebo (bras C) chaque semaine. Les bras étaient bien équilibrés en termes de classification pronostique du MSKCC. La SSP était similaire dans les 3 bras, alors que le taux de réponse était plus élevé dans les bras avec ­AMG-386 (tableau I). L’addition d’­AMG-386 au sorafénib ne s’accompagne pas d’une augmentation de la toxicité. pTa Vessie normale 9pDel (INK4A) Carcinome Carcinome 15 % urothélial papillaire urothélial superficiel papillaire superficiel de bas grade de haut grade pTis pT1 10qDel PTEN pT2 Carcinome urothélial invasif 60-80 % Tp53 Rb PTEN 5qDel, 3pDel, 10pDel 6qDel, 11pDel, 18pDel Carcinome in situ (haut grade) Figure 5. Les 2 voies moléculaires de la carcinogenèse du cancer de la vessie. Tableau II. Comparaison entre taux de pT0 après CT néo-adjuvante ou après cystectomie seule. CT + cystectomie (%) CT seule (%) 32,5 12,3 38 15 26,4 11,5 MSKCC (GC) 26 NA MSKCC (MVAC) 28 NA CCF (GC) 7 NA MRC/International (CMV) SWOG (MVAC) NORDIC II (MTX/cisplatine) 46 9,0 (7,2-9,2) 0,88 (0,68-1,14) p = 0,523 ORR (confirmed CR + PR), % RAS FGFR3 PI3K 9pDel 8,5 (7,2-9,1) Sorafénib + placebo (n = 51) 24 Cancer de la vessie Biologie Il existe 2 maladies différentes (figure 5) : ✓✓ des tumeurs envahissant le muscle/papillaires, avec une prolifération dépendant de l’activation de Ras et contenant fréquemment des mutations de FGFR3 et PIK3CA ; ✓✓ des tumeurs envahissant le muscle, développées probablement à partir de CIS et caractérisées par une perte de gènes suppresseurs de tumeur comme p53, Rb et PTEN. L’utilisation de la “plateforme néo-adjuvante” pour tester la relation entre le phénotype et la réponse biologique aux traitements conventionnels est en cours d’investigation. Quelques recommandations de base Chimiothérapie néo-adjuvante La chimiothérapie néo-adjuvante est sous-utilisée, comme le montre cette étude rapportée par A. Feifer et al., qui a inclus 4 972 patients présentant une tumeur opérable T2-4 N0M0 et traités dans 15 institutions entre 2003 et 2008. En tout, 33,6 % ont eu une chimiothérapie (CT) péri-opératoire et 12,4 % une CT néo-adjuvante. La CT néo-adjuvante était à base de cisplatine dans 69,4 % des cas. La CT néo-adjuvante augmente le taux de rémission complète pathologique (pCR) [tableau II]. Sont admis comme facteurs à haut risque de récidives : les carcinomes micropapillaires ou à petites cellules, les envahissements lympho-vasculaires et les stades cT3b. La CT néo-adjuvante des tumeurs T2 est efficace. Il faut savoir que 50 % des tumeurs cT2 seront classées pT3 ou pT4 sur la pièce de cystectomie. La question de savoir si l’on peut considérer de facto l’association gemcitabine + cisplatine (GC) comme un standard de CT néo-adjuvante n’est pas résolue au vu des données limitées qui concernent cette association. Les histologies mixtes, en particulier, pourraient répondre mieux au MVAC néo-adjuvant. Cystectomie par robot La cystectomie par robot est-elle meilleure (moins hémorragique, permettant une meilleure vision, favorisant une récupération plus rapide) que la chirurgie Correspondances en Onco-urologie - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2011 Compte-rendu ASCO-GU ouverte (standard, permettant une palpation de la tumeur) ou équivalente ? On peut considérer, au vu des résultats, que la chirurgie par robot est une option raisonnable dans les tumeurs T1 et les petites tumeurs T2 (tableau III). Curage : standard ou étendu ? Des études non randomisées ont suggéré un bénéfice en survie en faveur des curages étendus dans les cancers gastriques ou vésicaux (Leissner J et al., J Urol 2004;171:139-44). Actuellement, en l’absence d’un niveau de preuve suffisant, il est recommandé pour tous les patients d’avoir au moins un curage standard (de la bifurcation iliaque au ligament inguinal), en attendant les résultats de l’étude du SWOG S-1011, dans laquelle les patients traités par cystectomie pour une tumeur T2, T3 ou T4 ont été randomisés entre curage standard et curage étendu. Prise en charge des tumeurs à petites cellules neuro-endocrines de la vessie (Siefker-Radtke A et al.) Les cancers à petites cellules ont un pouvoir métastatique important. Ils sont traités traditionnellement par une association CT et radiothérapie (RT), comme les cancers primitifs bronchiques. La plupart des cancers de la vessie neuro-endocrines ont une histologie mixte et leur traitement optimal n’est pas clair. Il est recommandé de : ✓✓ traiter les patients présentant une tumeur mixte urothéliale et neuro-endocrine à petites cellules de stade T2 par une CT première associant étoposide + cisplatine (ou carboplatine) avant cystectomie ; ✓✓ traiter par 6 cycles de CT suivis d’une cystectomie en cas de tumeur T3/T4a ; ✓✓ combiner CT et RT pour les exceptionnels carcinomes purs à petites cellules (similaires aux SCC ­pulmonaires). Analyse mutationnelle Les mutations génétiques sont fréquentes dans les cancers urothéliaux. Elles pourraient prédire des réponses à des traitements ciblés. En plus d’HRAS − le premier oncogène identifié dans les tumeurs urothéliales −, un certain nombre de gènes sont connus pour présenter des mutations dans les cancers de la vessie, comme FGFR3, CDKN2, PIK3CA, Rb1 et Tp53. D’autres mutations peuvent toucher EGFR, KRAS, BRAF, RET ou PDGFRA, sans que, jusqu’à présent, leur fréquence soit bien répertoriée et caractérisée. Les tumeurs super­ficielles de bas grade sont caractérisées par des mutations de FGFR3 (50 à 63 % des cas) et HRAS. Les surexpressions d’HRAS sont retrouvées dans 50 % des cancers urothéliaux. Les mutations de PI3K sont également fréquentes (tableau IV). L’identification des mutations d’HRAS et de FGFR3 pourrait conduire prochainement à l’évaluation de traitements ciblant ces voies. M.I. ­Milowsky et al. ont utilisé une approche génomique intégrée par une technologie appelée MALDI-TOF MS (specific matrix-assisted laser ­desorption/­ionization time-of-flight mass spectrometry) dans le but de corréler le statut mutationnel au pronostic et de prédire la sensibilité et la résistance aux nouvelles thérapeutiques ciblées. Cette technologie unique permet de fournir une excellente information en temps réel et favorise un effet immédiat sur la prise en charge du patient. Plusieurs nouveaux agents ciblant FGFR3, PI3KCA et BRAF sont en cours de développement (comme V600E dans le mélanome avec mutation de BRAF). Tolérance d’une CT néo-adjuvante par GC chez les patients âgés de plus de 65 ans avec une tumeur envahissant le muscle Cette expérience autrichienne (Niedersüb-Beke D et al.) portant sur une série de 23 patients (26,7 % avec atteinte ganglionnaire) montre la faisabilité et la tolérance correcte de l’association GC. Vingt et un patients (91,3 %) ont fini la CT prévue et 17 (81 %) ont eu une cystectomie radicale. Le taux de pT0 était de 22,2 %. En raison de la survenue de 4 épisodes thrombo-emboliques, une prophylaxie par HBPM pendant la durée du traitement est discutée. Tumeurs localement avancées de la vessie Cette étude de phase II a proposé 3 cycles de CT néo-adjuvante par ABI-007 (nab-paclitaxel : 260 ­mg/­m2/­21 jours), carboplatine (ASC = 5) et gemcitabine (800 ­mg/­m2 J1 et J8) dans les tumeurs localeTableau III. Cystectomie robotique ou ouverte. Comparaison des marges dans les tissus mous, entre les données de l’International Robotic Consortium (513 patients sur 6 ans) et celles d’une étude multicentrique de cystectomie radicale ouverte (4 400 patients sur 28 ans). ≤ pT2 pT3 pT4 Chirurgie ouverte 1,4 % 7,6 % 24 % Robot 1,5 % 8,8 % 39 % Tableau IV. Fréquence des mutations de FGFR3, BRAF, PI3KCA et Tp53 dans une série de 137 tumeurs de la vessie de haut grade. Mutation n Proportion (%) IC95 FGFR3 16 12 (6-17) BRAF 2 1,5 (1-8) PI3KCA 17 12 (7-18) Tp53 19 14 (8-20) Correspondances en Onco-urologie - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2011 47 Échos des congrès ment avancées de la vessie (Smith DC et al.). Vingt-sept patients ont été inclus ; tous ont présenté une neutropénie de grade 3-4 (2 neutropénies fébriles) ; 17 ont reçu du G-CSF. Il a été constaté 6 RC pathologiques (27 %), et 12 patients sur 22 ont eu une absence de maladie résiduelle invasive (54 %). Définir les patients métastatiques unfit (inéligibles au cisplatine) Au vu des données de la littérature (140 articles analysés) et de l’avis de 65 oncologues (sur 120 contactés), une définition claire des patients unfit est nécessaire (Galsky MD et al.) [tableau V]. Tableau V. Définition consensuelle proposée. Existence d’au moins un des critères suivants •PS ECOG = 2 (IK = 60-70) •Clairance de la créatinine < 60 ml/mn •CTCAE v4 grade ≥ 2 de perte audiométrique •CTCAE v4 grade ≥ 2 de neuropathie périphérique •Insuffisance cardiaque de classe III (classification NYHA) Tableau VI. Agents cytotoxiques en deuxième ligne. Essai Régime Larusso (1998) Albers (2002) Vaughn (2002) Joly (2009) Pronzato (1997) Witte (1997) MacCaffrey (1997) Sweeney (2006) Dreicer (2007) Bellmunt (2009) Sridhar (2011) Gemcitabine Gemcitabine Paclitaxel Paclitaxel Ifosfamide Ifosfamide Docétaxel Pémétrexed Épothilone Vinflunine Nab-paclitaxel Phase n II II 35 30 31 45 20 56 20 47 45 370 47 II II II II II II III II Taux réponse TTP Médiane (%) (mois) de survie (mois) 23 3,8 5 11 4,9 8,7 10 2,2 7,2 9 2,9 6,9 5 NR NR 20 2,5 5,5 13 NR 9 28 2,9 9,6 12 2,7 (SSP) 8 9 3 (SSP) 6,9 32 6 10,8 Tableau VII. Combinaisons cytotoxiques de deuxième ligne. Essai Régime n Krege (2001) Lin (2007) Bellmunt (2002) Sternberg (2001) Fechner (2006) Vaishampayen (2005) Pagliaro (2002) Docétaxel/ifosfamide Gemcitabine/ifosfamide MTX/paclitaxel Gemcitabine/paclitaxel Gemcitabine/paclitaxel Paclitaxel/carboplatine Ifosfamide/gemcitabine/ cisplatine Gemcitabine/docétaxel/ carboplatine Paclitaxel/cisplatine/MTX 22 23 20 41 27 44 49 Chen (2004) Tu (1995) 48 Taux réponse Médiane (%) de survie (mois) 25 4 22 4,8 32 5 60 14,4 44 13 16 6 41 NR 20 45 NR 25 40 NR Patients en insuffisance rénale L.C. Pagliaro et al. ont présenté les résultats préliminaires d’une association gemcitabine (900 ­mg/­m²) + paclitaxel (135 ­mg/­m²) + doxorubicine (40 ­mg/­m2) tous les 15 jours chez des patients en insuffisance rénale. En l’absence de standard dans cette situation, l’équipe du MD Anderson a traité 25 patients (âge moyen : 72,8 ans) dont la clairance de la créatinine était inférieure à 60 ­ml/­mn. L’utilisation de pegfilgrastim était systématique. Le taux de réponse est de 57,1 % (21 évaluables, 4 RC, 8 RP), avec une SG de 13,8 mois. La tolérance s’est avérée acceptable, avec des toxicités de grade 3-4 essentiellement hématologiques (anémie : 9 patients, neutropénies : 2 patients, thrombopénies : 3 patients). Patients réfractaires au cisplatine Le besoin d’un traitement de deuxième ligne efficace reste d’actualité. S.S. Sridhar et al. ont présenté une étude de phase II de monothérapie par nab-paclitaxel (260 ­mg/­m2/­21 jours) en deuxième ligne chez 48 patients réfractaires au cisplatine. Il a été rapporté un taux de RO de 32 % (IC95 : 19-47), avec une SSP à 12 mois de 48 % (IC95 : 31-65) et une SG médiane de 10,8 mois (IC95 : 5,8-16,9). Les facteurs associés à une amélioration de la SG étaient : un taux d’hémoglobine ≥ 10 ­g/­dl, un PS ≤ 1, un intervalle avec la CT précédente > 5 mois et un contrôle de la maladie (tableau VI). Des essais sont prévus en première ligne versus GC (tableau VII). Deuxième ligne métastatique Un essai randomisé a proposé en double aveugle la comparaison docétaxel + vandétanib versus docétaxel + placebo chez des patients prétraités par cisplatine (Choueiri TK et al.). Dans cette étude, l’addition de vandétanib, un double inhibiteur sélectif du VEGFR et de l’EGFR, n’a pas montré de bénéfice, que ce soit en termes de SSP, de taux de réponse ou de SG. Après échec d’une CT à base de cisplatine, le pronostic est très péjoratif, avec une SG de 7,03 mois dans le bras docétaxel + placebo (n = 72), versus 5,85 mois dans le bras docétaxel + vandétanib (n = 70). Effet de l’inhibition de l’EGFR avec le cétuximab combiné au paclitaxel chez des patients métastatiques précédemment traités Une expression forte de l’EGFR est retrouvée dans 50 % des cancers de la vessie. Une expression élevée est associée à un TTP et à une survie sans maladie plus courts (Chow et al. 2001, Smith et al. 1989, Neal et al. 1990, Popovet al. 2004). Y. Wong et al. ont rapporté les résultats d’un essai randomisé de phase II comparant le cétuximab seul (dose de charge de 400 ­mg/­m2, puis Correspondances en Onco-urologie - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2011 Compte-rendu ASCO-GU Modification maximale du volume tumoral (%) 250 ­mg/­m2 par semaine) ou associé à du paclitaxel hebdomadaire (80 ­mg/­m2) chez des patients prétraités par une seule ligne de CT sans taxane (que ce soit en situation néo-adjuvante, adjuvante ou avancée). Le bras anticorps seul a été arrêté après progression de 9 patients sur 11 à 2 cycles. Dans le bras combiné, 7 patients sur 28 ont présenté une réponse objective (1 RC et 6 RP), la médiane de SSP a été de 16,4 semaines et la médiane de SG de 9,5 mois (figures 6 et 7). Le cétuximab semble augmenter l’efficacité du paclitaxel, mais cela doit être confirmé par une étude randomisée. L’essai GETUG 19 pourrait aider à confirmer l’intérêt de la combinaison du cétuximab avec une CT de première ligne… Deuxième ligne métastatique Une étude de phase II a évalué le volasertib (BI 6727), un inhibiteur de Polo-like kinase (Stadler WM et al.). Le volasertib est un inhibiteur sélectif et puissant de Plk1 (sérine/thréonine kinase Polo-like kinase) qui contrôle différentes étapes clés de la mitose. Il a une demi-vie de 111 heures et un volume de distribution important. La dose initiale utilisée a été de 300 mg en perfusion de 2 heures tous les 21 jours. La dose a été augmentée à 350 mg en cas de bonne tolérance initiale. Sur les 50 patients inclus en progression après une CT systémique pour cancer avancé (localement ou métastatique), il a été noté 7 RO (14 %) pour une durée allant de 12,1 à 53,1 semaines, et 13 stabilisations (26 %) durant plus de 6 semaines, avec une médiane de SSP de 6 semaines. Les toxicités de grade 3-4 les plus fréquentes ont été les neutropénies (26 %), les thrombo­ cytopénies (18 %), les anémies (14 %), les infections du tractus urinaire (6 %) et la fatigue (4 %). Taux de réponse confirmé = 25 % 7/28 (1 RC, 6 RP) [IC95 : 11-45 %] 3 RP transitoires : 183, 176 et 161 + jours après arrêt du traitement 0,3 0,2 0,1 0,0 – 0,1 – 0,2 – 0,3 – 0,4 – 0,5 – 0,6 – 0,7 – 0,8 – 0,9 – 0,10 Patients Non confirmé (D’après Wong Y, ASCO GU 2011) Figure 6. Paclitaxel + cétuximab en deuxième ligne : meilleure réponse. 1,0 Survie médiane : 9,5 mois 285 jours (IC95 : 209-NR) 0,8 0,6 0,4 0,2 0,0 0 Prostate Quelques rappels épidémiologiques En 2010, 217 730 nouveaux cas de cancer de la prostate ont été enregistrés aux États-Unis, avec 32 050 décès. Un homme sur 6 au cours de sa vie a un cancer de la prostate (environ 3 % en décèdent), avec un âge moyen de 68 ans au diagnostic et de 80 ans au moment du décès. La diminution estimée du taux de décès spécifiques est approximativement de 35 % entre 1997 et 2007 (figure 8, p. 50). Cette baisse peut s’expliquer par un meilleur traitement primaire (chirurgie, RT), le mode de vie et les médicaments à disposition (statines, inhibiteurs de la COX-2), le dépistage précoce, ainsi que l’utilisation d’une thérapeutique adjuvante multimodale dans les tumeurs à haut risque (tableau VIII , p. 50). Confirmé 200 400 600 Survie globale (jours) 800 (D’après Wong Y, ASCO GU 2011) Figure 7. Paclitaxel + cétuximab en deuxième ligne : SG. Survie spécifique des hommes avec un PSA < 3 ng/ml participant à l’étude ERSPC (Bul M et al.) Avec un suivi de 11 ans, sur 15 758 hommes ayant un PSA initial inférieur à 3 ­ng/­ml, 915 cancers de la prostate (5,8 %) ont été diagnostiqués. Seuls 23 décès (0,15 %) ont été enregistrés. Le risque de mortalité est 11 fois plus élevé pour les hommes avec un PSA initial supérieur à 3 ­ng/­ml. Avec ces données, il n’y a pas de justification à faire un dépistage plus agressif avec un seuil plus faible de PSA. Correspondances en Onco-urologie - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2011 49 Échos des congrès Mortalité spécifique à 10 ans des cancers avec un score de Gleason 5-7, stade T1/T2 Le tableau IX montre la faible mortalité spécifique actuelle des cancers localisés avec un score de Gleason 5-7, et l’amélioration de 60 à 74 % du pronostic en un peu plus d’une décennie. Pour les tumeurs avec un score de Gleason 8-10, cette diminution est de l’ordre de 36 % à 46 %. Le nombre de décès par cancer de la prostate a diminué d’environ 35 % entre 1997 et 2007, selon l’American Cancer Society Nombre de décès annuels par cancer de la prostate 50 40 41 800 31 900 30 28 900 27 350 27 050 Cancers de la prostate à haut risque Ils sont responsables de la majorité des décès, d’où l’importance de leur identification. Leur pronostic a été amélioré par les associations RT-hormonothérapie (HT) [tableau X]. 20 10 0 1997 2000 2003 2006 2007 Figure 8. Diagramme de baisse de la mortalité par cancer de la prostate. Tableau VIII. Rappel de la prévalence dans les séries autopsiques. Âge 21-30 ans 31-40 ans 41-50 ans 51-60 ans 61-70 ans 71-80 ans Américains blancs 8 % 31 % 37 % 44 % 65 % 83 % Noirs afro-américains 8 % 31 % 43 % 46 % 70 % 81 % Tableau IX. Évolution de la mortalité spécifique à 10 ans des cancers de stade T1-T2, Gleason 5-7, au cours des années. Statin, 2010 JNCI Lu-Yao, 2009 JAMA Albertsen, 2005 JAMA Johansson, 2004 JAMA Lu-Yao, 1997 Lancet Chodak 1994 N Engl J Med 65-69 ans 70-74 ans 4 % (3-5) – 6 % (4-8) 6 % (4-6) 21 % 23 % 15 % 15 % 23 % 23 % 16 % 16 % Tableau X. Études randomisées d’association RT-HT. Étude Intervention EORTC Agoniste LH-RH J1 x 3 ans RTOG 85-31 Agoniste LH-RH en continu débutant la dernière semaine de la RT RTOG 92-02 BAC 4 mois versus 24 mois 4 mois RTOG 94-13 Agoniste LH-RH adjuvant ou néo-adjuvant, RT limitée à la prostate ou pelvienne D’Amico BAC 6 mois commençant 2 mois avant RT 50 Augmentation de la SG avec HT Augmentation de la SG avec HT Augmentation avec HT 24 mois Augmentation de la SSP dans le bras HT néo-adjuvante + RT pelvienne Augmentation de la SG avec HT Tumeurs avec atteinte ganglionnaire Les données rétrospectives suggéraient que l’association d’une RT à une HT augmentait la survie. Les recommandations du NCCN ne proposaient l’association RT + HT que comme une option. J.D. Tward et al. ont présenté les données du registre NCI SEER durant les années 1988-2006. Pour les patients N+, la RT apparaît corrélée à une augmentation des survies globale et spécifique. Malgré le faible niveau de preuve en raison du caractère rétrospectif, ces données vont dans le sens des résultats positifs des 2 études randomisées présentées à l’ASCO 2010, qui comparaient l’HT seule à une association RT/HT dans les tumeurs localement avancées. L’indication d’un traitement local par RT de la prostate et du pelvis − en plus de l’HT − apparaît aujourd’hui à recommander fortement… Facteurs de risque de progression après traitement local par prostatectomie radicale ou RT Vingt à 40 % des patients vont progresser après RT ou prostatectomie radicale (PR) : moins de 25 % pour les bas risques définis par d’Amico, 25 à 50 % pour les risques intermédiaires et plus de 50 % pour les hauts risques définis par d’Amico. Les critères prédictifs de progression peuvent être : ✓✓ cliniques : PSA, stade ; ✓✓ pathologiques : score de Gleason, volume tumoral, marges chirurgicales ; ✓✓ une combinaison de facteurs (nomogrammes) ; ✓✓ autres : identification de la présence de maladies micrométastatiques, cellules tumorales circulantes (De Bono JS et al., Clin Cancer Res 2008;14:6302-9), micrométastases médullaires, RT-PCR, biomarqueurs ; ✓✓ les marqueurs génétiques moléculaires, qui représentent le futur. Correspondances en Onco-urologie - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2011 Compte-rendu ASCO-GU Il existe une relation entre le score PCA3 et le volume tumoral apprécié sur la pièce de prostatectomie (Nakanishi H et al., J Urol 2008;179:1804-9). Il faut insister sur l’importance du temps de doublement pour prédire le risque de décès. Un PSADT inférieur à 3 mois est un facteur prédictif majeur de décès. Diagnostic moléculaire et appréciation du risque (De Marzo AM et al., Gleave M et al.) Le diagnostic moléculaire pourrait permettre une médecine personnalisée, une amélioration du diagnostic et du pronostic, une appréciation du risque et une intervention individualisée par une meilleure prédiction de la réponse thérapeutique. Les marqueurs moléculaires proposés sont les suivants : cycle cellulaire (p21, p27, KI67, EZH2), apoptose (bcl2, p53), transduction du signal (HER2, PTEN, AKT, IGF-1R), adhésion cellulaire (CD44, E-cadhérine, EMT), suppresseurs de tumeur (p53, MDM2), gain 8q24 (FISH), angiogenèse (VEGF), chaperones (hsp27), génétiques (PCA3, gènes de fusion ETS). Cette démarche est à la base d’une étude réalisée chez 881 patients après prostatectomie radicale et ayant analysé de multiples marqueurs en immuno-histochimie (Donovan MJ et al., J Clin Oncol 2008;26:3923-9). Six variables ont permis d’améliorer la prédiction de rechute par rapport au nomogramme clinique. Des marqueurs sériques pourraient aider à la stratification du risque. Trois études ont également rapporté l’augmentation de la prédiction lorsque des marqueurs sériques ont été ajoutés à des nomogrammes établis : ✓✓ les niveaux de TGF-β1 et d’IL-6 (Kattan MW et al., J Clin Oncol 2003;21:3573-9) ; ✓✓ la validation externe (Shariat SF et al., J Clin Oncol 2008;26:1526-31) ; ✓✓ PAI-1 (Shariat SF et al., J Urol 2007;178:1229-36). Toutefois, aucun n’a trouvé d’utilisation clinique. Parmi les autres marqueurs, il faut signaler les exosomes, les ARNmi et les marqueurs urinaires (PCA3). En ce qui concerne les gènes de fusion, les données sont contradictoires pour ce qui est des associations avec le grade de Gleason, la prédiction des métastases et de la survie. En tant que simple marqueur, le statut des gènes de fusion n’émerge pas comme étant un facteur pronostique (Attard G et al., Oncogene 2008;27:253-63 ; FitzGerald LM et al., BMC Cancer 2008;8:230 ; Taylor et al., Cancer Cell 2010). Les études de profils génomiques ne sont pas faisables en pratique courante, ni suffisamment robustes pour une application clinique (Paris PL et al., Clin Cancer Res 2010;16:195-202) [tableau XI]. RT de rattrapage avec ou sans HT L’étude RTOG 9601 (Wu S et al.) a comparé l’effet d’un traitement anti-androgénique par bicalutamide durant et après RT (64,8 Gy) sur la SSP et l’incidence de la maladie métastatique après prostatectomie dans les tumeurs pT2-pT3 N0 et élévation du PSA. Il y avait une stratification selon les marges (positives ou négatives), le nadir de PSA inférieur à 5 ­ng/­ml, le niveau de PSA à l’entrée (< 1,5 ou 1,6-4) et l’HT néo-adjuvante (STAD oui ou non). Au total, 771 patients (âge moyen : 65 ans) ont été inclus entre mars 1998 et mars 2003. L’intervalle moyen entre prostatectomie radicale et entrée dans l’étude postopératoire était de 2,1 ans. Il n’a pas été retrouvé de différence de toxicité immédiate ou tardive entre les 2 bras. Avec une médiane de suivi de 7,1 ans, les résultats montrent une différence significative pour (figure 9, tableaux XII et XIII , p. 52) : ✓✓ la SG : 91 % (RT + AAT) versus 86 % (RT seule) ; ✓✓ l’échec métastatique : 7,4 % pour RT + AAT (30/387) versus 12,6 % pour RT seule (56/383) [p = 0,01] ; ✓✓ la SSP : 57 % (172/387) versus 40 % (238/383) [p < 0,0001]. En conclusion, avec une médiane de suivi de 7 ans, l’addi­tion pendant et après RT pour une durée de 24 mois d’un anti-androgène périphérique réduit significativement les récidives biologiques et l’incidence des métastases. Si ces résultats sont encourageants, il faudra attendre les données à distance en SG, qui constituent le critère de jugement principal de l’étude. Tableau XI. Études translationnelles pour améliorer la caractérisation génétique de la tumeur. Cibles TMPRSS2-ERG Commentaires Les gènes de fusion représentent les anomalies les plus fréquentes RAF Réarrangements génétiques dans 1 à 2% PI3K, RAS/RAF, Rb Analyse du transcriptome et des mutations Récepteur nucléaire Données CNA prédictifs de récidive Coactivateur (NCOA2) biologique de sous-groupes après Analyse nombre de copie gènes (CNA) prostatectomie SRC Activité SRC corrélée à la perte de l’activité du RA Correspondances en Onco-urologie - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2011 Référence Tomlins SA et al., Science 2005;310:644-8 Palanisamy N et al., Nat Med 2010;16:793-8 Taylor, Cancer Cell 2010;18:11-20 Mendiratta P et al., J Clin Oncol 2009;27:2022 51 Échos des congrès Survie globale (%) 100 91 % 86 % 75 50 25 RT + ATT RT seule Décès 45 58 Total 387 383 0 0 1 2 3 4 5 6 Années après la randomisation 7 8 Figure 9. RT de rattrapage plus ou moins HT : actualisation de l’étude RTOG 9601. Patients à risque RT + ATT RT Alone 387 383 384 378 Tableau XII. RTOG 9601 : SSP en fonction des sous-groupes histologiques. 379 368 373Groupe 362 360 352 335 328 301 204 119 AAT + RT seule 286 199 RT104 p Tous les patients 57 % 40 % < 0,0001 Marges positives (pT2-3) 61 % 44 % < 0,0001 Marges négatives (pT3) 45 % 29 % 0,006 pGleason score ≤ 6 63 % 50 % 0,016 pGleason score 7 55 % 39 % 0,0005 pGleason score 8-10 52 % 26 % 0,0007 Tableau XIII. RTOG 9601 : SSP en fonction du temps de doublement du PSA post-prostatectomie. TD post-prostatectomie SSP à 7 ans p AAT + RT RT seule < 6 mois (n = 212) 49 % 27 % 0,0005 6-12 mois (n = 153) 60 % 32 % 0,0001 12-24 mois (n = 165) 59 % 45% 0,02 > 24 mois (n = 135) 64 % 61 % 0,19 Tous les patients 57 % 40 % < 0,0001 Prise en charge des récidives après RT (Roach M et al.) Ce type de récidives constitue un groupe hétérogène, entre les patients présentant une récidive lente et ceux ayant une rechute rapide. Il faut distinguer les récidives locales accessibles à des thérapeutiques de sauvetage, les récidives régionales accessibles à une thérapeutique régionale et les récidives à distance. Les données du registre CaPSURE de traitement de rattrapage après RT (430 patients) montrent la répartition suivante des trai- 52 tements : privation hormonale (93,5 %), cryo­thérapie (3 %), RT (1,9 %), prostatectomie radicale (0,9 %), curiethérapie (0,2 %) et inconnu (0,5 %) [Agarwal PK et al., Cancer 2008;112:307-14]. Les données comparatives entre prostatectomie totale et cryothérapie après échec local d’une RT font plutôt opter, chez les sujets jeunes, pour une prostatectomie de rattrapage (Pisters LL et al., J Urol 2009;182:517-27). Une étude de phase II de curiethérapie (MPD = 137 Gy) guidée par l’IRM après RT chez 25 patients sélectionnés a montré, avec un suivi moyen de 47 mois, 30 % de toxicités gastro-­intestinales ou génito-urinaires de grades 3 et 4 (Nguyen PL et al., Cancer 2007;110:1485-92) ; 13 % des patients ont nécessité une colostomie ou une dérivation urinaire pour fistule. Dans une autre expérience rétrospective de curiethérapie (implantation permanente de grains radio-actifs), la survie sans récidive biochimique était de 95,5 % à 1 an et de 89,5 % à 3 ans (Aaronson DS et al., BJU Int 2009;104:600-4). Au total, plus de 100 patients ont reçu une RT de sauvetage après échec d’une RT, mais seuls des centres ayant beaucoup d’expérience peuvent envisager cette option thérapeutique. B. Lee et al. (Int J Radiat Oncol Biol Phys 2007;67:1106-12) avaient également rapporté la faisabilité d’une curiethérapie à haut débit (36 Gy en 6 fractions) pour récidive locale après RT. Patients en progression après traitement radical L. Klotz et al. ont rapporté une étude de phase III (NCIC CTG PR.7) comparant un traitement hormonal intermittent versus une suppression hormonale continue chez des patients en progression après traitement radical. Le traitement hormonal diminue les effets indésirables aigus et chroniques, améliore la qualité de vie et minimise les coûts. Le critère de jugement principal était la SG. Les 1 386 patients inclus présentaient un taux de PSA supérieur à 3 ­ng/­ml, une testostéronémie supérieure à 5 ­nmol/­l, une absence de métastases, un maximum de 12 mois d’HT adjuvante ou néo-adjuvante et une espérance de vie supérieure à 5 ans. Le bras continu associait un agoniste de la LH-RH et un anti-androgène. Dans le bras intermittent, l’agoniste était délivré pendant 8 mois, avec l’anti-androgène uniquement le premier mois. Le traitement était repris quand le PSA était supérieur à 10 ­ng/­ml et un blocage complet institué à l’échec (figure 10). Avec un suivi médian de 6,9 ans (524 décès), il n’a pas été mis en évidence de différence en termes de SG, avec des médianes respectives de 9,1 ans pour le traitement continu et de 8,8 ans pour le traitement intermittent (HR = 1,02 ; IC95 : 0,86-1,21) [figure 11]. Correspondances en Onco-urologie - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2011 Compte-rendu ASCO-GU Les auteurs concluent que le traitement intermittent n’est pas inférieur au traitement continu et qu’il peut être considéré comme un standard. Privation androgénique continue PSA Traitement hormonal de première ligne : comparaison du dégarélix versus leuprolide N. Shore et al. ont rappelé les résultats de l’étude pivotale de phase III CS21, qui avait montré, avec le dégarélix, une suppression androgénique plus rapide, une diminution significative du risque d’échec biologique la première année et de décès (Klotz L et al., BJU Int 2008;102:1531-8 ; Tombal B et al., Eur Urol 2010;57:836-42 ; Schröder et al., BJU Int 2010;106:182-7). L’étude ouverte d’extension a également retrouvé un avantage en SSP en cas de switch leuprolide pour dégarélix, en particulier pour les patients présentant un PSA supérieur à 20 ­ng/­ml (Crawford et al., J Urol 2010;183[Suppl. 4]:e252). R PSA PSA CR LH-RH Anti-androgène Résistance à la castration Hormonothérapie intermittente Stratification Intervalle libre depuis le traitement local (> 1-3 versus > 3 ans) PSA initial (< 15 versus > 15) Prostatectomie (O/N) avant hormonothérapie suppressive (O/N) 8 mois LH-RH AA PSA PSA LH-RH AA * * LH-RH as per CAD AA CR LH-RH AA Figure 10. Schéma de l’étude de phase III NCIC CTG PR.7. Métastases à distance après prostatectomie radicale ou RT (Zelefsky MJ et al.) Le risque de décès après prostatectomie est bien corrélé au temps de doublement du PSA (Freedland SJ et al., J Clin Oncol 2007;25:1765-71) [tableau XIV]. Concernant le PSADT et la RT, les données d’une étude rétrospective portant sur 8 669 patients (PR = 5 918, RT = 2 751) ont montré, pour un PSADT inférieur à 3 mois, une médiane de SG de 6 ans (HR = 19,6 pour la mortalité spécifique), sans impact du type de traitement primaire. Étude de phase III GETUG-AFU 15/0403 (Gravis G et al.) Une étude de phase III, promue par la FNCLCC en collaboration avec l’AFU (GETUG-AFU 15/0403), a été initiée en 2008, concernant des patients pris en charge pour un cancer de la prostate métastatique et sensibles à la castration. Ces patients ont été randomisés entre une castration associée à du docétaxel (75 ­mg/­m²/­j tous les 21 jours × 9 cures + prednisone) [bras A] versus une castration seule (bras B), traitement standard dans cette situation. L’objectif principal de cette étude était de déterminer un bénéfice de survie à 36 mois en faveur du bras A. Pour détecter une différence de 15 % avec un test bilatéral, alpha = 0,05 et une puissance de 80 %, il était prévu d’inclure 378 patients. Au total, 385 patients ont été inclus d’octobre 2004 à décembre 2008 dans 28 centres français et 1 centre belge. L’âge médian était de 63 ans, avec un score de Gleason de 8 pour 57 % des patients et un taux médian de PSA de 27 ­ng/­ml. Peu de patients ont eu un traitement local, 30 % ont subi une prostatectomie totale ­et/­ou une RT, et moins de 10 % un traitement par CT et/ou HT. La majorité des patients étaient métastatiques d’emblée. Les groupes 1:1 100 Pourcentage 80 * Duration of non-treatment interval and switch from IAS to CAD per decision algorithms based on PSA and evidence of clinical disease 60 40 20 Test de non-infériorité (IAS versus CAD) ≥ 1,25 ; p = 0,009 0 0 2 4 6 8 10 319 327 125 140 35 34 Années Patients à risque Continu 696 Intermittent 690 652 651 561 571 Figure 11. Survie globale. Tableau XIV. PSADT Patients Mortalité spécifique < 3 mois 6 % 100 % 3-8,9 mois 31 % 93 % 9,1-14,9 mois 21 % 78 % > 15 mois 42 % 35 % pronostiques selon T.R. Glass et al. (J Urol 2003) étaient bien équilibrés dans les 2 groupes, avec 48 % de bon pronostic, 29 % de pronostic intermédiaire et 22 % de mauvais pronostic. Après l’inclusion de 215 patients, 3 décès toxiques sont survenus : 2 liés à une neutropénie fébrile et 1 dû à une défaillance multiviscérale. L’IDMC a recommandé l’utilisation systématique du G-CSF après chaque cure, et aucun nouveau décès Correspondances en Onco-urologie - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2011 53 Échos des congrès 50 % de baisse par rapport à l’état initial ADT ADT + docétaxel 1,0 0,8 91 % 80 % 95 % 86 % 0,6 0,4 0,2 0,0 3 mois p = 0,008 6 mois p = 0,01 Figure 12. Réponse PSA (baisse ≥ 50 %). 25 % de baisse par rapport à l’état initial 0,30 ADT ADT + docétaxel 0,25 0,20 0,15 10 % 0,10 0,05 0,00 8% 3% 3 mois p = 0,008 Figure 13. Progression du PSA (augmentation ≥ 25 %). 54 1% 6 mois p = 0,01 toxique n’a eu lieu. Le taux de neutropénie fébrile (37 %) dans le bras A était plus important que celui rapporté dans l’étude TAX 327 (Tannock IF et al., N Engl J Med 2004) ; les autres toxicités étaient comparables. En dehors de la fatigue de grade 3-4 observée dans 7 % des cas, les autres toxicités de grade 3-4 étaient inférieures à 4 %. Dans le bras B, les toxicités les plus fréquentes quel que soit le grade étaient la fatigue (19 %), les bouffées de chaleur (63 %), la dysfonction érectile (12 %) et la diminution de la libido (15 %). La qualité de vie évaluée par l’EORTC QLQC-30 a montré une détérioration du score global et des scores fonctionnels pendant la CT, avec une équivalence entre les 2 bras lors de l’évaluation à 12 mois. Suite à la récente publication de M. Hussain (Hussain MH et al., J Clin Oncol 2009) faisant apparaître que l’augmentation du PSA de 25 % ou plus durant les 7 premiers mois de la mise en route de la castration était un facteur prédictif de décès, nous avons évalué l’évolution du PSA dans les 2 bras. Une augmentation du PSA de 25 % ou plus, par rapport à l’inclusion, était significativement moins importante dans le bras docétaxel à 6 mois (1 % versus 10 % [p = 0,002]) et une réduction du PSA de 50 % ou plus était significativement plus importante dans le bras docétaxel à 3 mois (91 % versus 80 % [p = 0,008]) et à 6 mois (95 % versus 86 % [p = 0,01]). L’étude GETUG-AFU 15/0403 a été menée à son terme. Le docétaxel augmente la toxicité par rapport à la castration seule, mais cette toxicité est gérable. La qualité de vie est également altérée pendant la CT, mais est équivalente à celle observée avec la castration lors de l’évaluation à 1 an. Il a été retrouvé moins de progression des PSA à 6 mois dans le bras A. L’analyse de survie − qui est l’objectif principal de l’étude − nécessite un suivi plus long (figures 12 et 13). Immunothérapie des cancers de la prostate résistants à la castration (Schlom J et al.) La preuve de l’efficacité du sipuleucel étant faite, l’­intérêt pour une immunothérapie a été remis en avant. La vaccination par PSA-TRICOM (Prostvac®) utilise des pox virus et fowlpox virus comme vecteurs de transgènes (PSA avec des molécules de costimulation comme B7.1, ICAM-1, LFA-3). Les résultats d’une étude randomisée (2:1) de phase II ayant inclus 125 patients ont été rapportés en 2010 (Kantoff PW et al., J Clin Oncol 2010;28:1099-105). Ils montraient un avantage en SG de 8,5 mois par rapport au groupe témoin (25,1 mois versus 16,6 mois) [HR = 0,56 ; IC95 : 0,37-0,85]. Une étude de phase III évaluant l’intérêt de l’anticorps anti-CTLA4 (ipilimumab) est actuellement en cours. Correspondances en Onco-urologie - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2011 Compte-rendu ASCO-GU Acétate d’abiratérone H. Scher a présenté les résultats, qui avaient été rapportés lors du congrès de l’ESMO par J.S. De Bono, de la première étude randomisée (2:1) de phase III ­(COU-AA-301) comparant l’acétate d’abiratérone (n = 797) à un placebo (n = 398) après une CT (1 à 2 lignes, dont 1 à base de docétaxel). Ils montrent un avantage significatif (HR = 0,646 ; IC95 : 0,54-0,77 [p < 0,0001]) en SG : 14,8 mois (IC95 : 14,1-15,4) versus 10,9 mois (IC95 : 10,2-12,0). La durée médiane de traitement a été de 8 mois dans le bras abiratérone. L’analyse en sous-groupes a montré que le bénéfice concernait tous les sous-groupes. Tous les critères de jugement secondaires de l’étude étaient significativement améliorés, qu’il s’agisse du TTP : 10,2 mois versus 6,6 mois (HR = 0,58 ; IC95 : 0,46-0,73 [p < 0,0001]), de la SSP : 5,6 mois versus 3,6 mois (HR = 0,67 ; IC95 : 0,59-0,78 [p < 0,0001]) ou du taux de réponse biologique (PSA) : 38 % versus 10,1 % (p < 0,0001). La tolérance a été acceptable, avec de rares toxicités de grade 3 ou 4 : rétention hydrique (2,3 %), hypokaliémie (3,8 %), anomalies de la fraction ventriculaire gauche (3,5 %), hypertension (1,3 %), désordres cardiaques (4,1 %). Ces données étaient assez comparables à celles du bras placebo. Dérégulation du récepteur aux androgènes et transition vers la résistance à la castration : mécanismes et implications thérapeutiques (Knusen KE et al.) Rb (retinoblastoma tumor suppressor) agit comme un suppresseur de tumeur par l’intermédiaire d’une régulation négative de l’expression de gènes. Rb supprime la progression du cancer de la prostate en contrôlant le récepteur aux androgènes (RA). Dépléter les xénogreffes humaines en Rb suffit pour favoriser la transition vers le cancer de la prostate résistant à la castration (CRPC). La perte de l’ARNm de Rb est surreprésentée dans les CRPC (figure 14). Le nouveau paradigme du rôle des interactions entre le RA et Rb peut se résumer en 5 points clés : une résurgence de l’activité du RA sous-tend la transition vers le CRPC ; Rb bloque cette transition en supprimant l’expression du RA et son activité ; la perturbation de la fonction Rb est un driver clé du développement du CRPC ; une signature de la fonction a été établie, qui distingue des tumeurs déficientes (> 60 %) ou non en Rb ; l’appréciation du statut de Rb pourrait servir de base à une intervention personnalisée. En effet, dans les tumeurs avec persistance de Rb, la fonction sup- Expression de RB1 6,0 5,5 5,0 4,5 p = 1,30 × 10– 4 4,0 Prostate bénigne Cancer de la prostate Cancer de la prostate résistant à la castration Figure 14. Expression de Rb1 dans du tissu prostatique bénin, dans le cancer de la prostate hormonosensible et dans le CRPC. pressive peut être activée par des inhibiteurs de CDK4. En revanche, des tumeurs ayant perdu Rb pourraient être particulièrement sensibles à des CT sélectionnées. Identification du nombre de copies géniques et des modifications de méthylation associées avec les CRPC (Friendlander TW et al.) Les modifications génomiques peuvent être structurelles (amplifications ou délétions géniques repérées par CGH qui identifie les sites communs d’aberrations de copies…) ou épigénétiques (méthylations CpG). Les profils apparaissent hétérogènes. Il faut relever que les tumeurs avec amplification du RA sont distinctes sur le plan génomique. Il existe une délétion des régulateurs négatifs du RA dans les tumeurs n’ayant pas d’amplification de RA. Des modifications structurelles et épigénétiques sont détectables en utilisant des microarrays à haute résolution. Des interactions entre gènes et mécanismes cliniquement pertinents pourraient être identifiées par cette approche. Plus de 800 agents sont en cours de développement (Kummar S et al., Nat Rev Drug Discov 2010;9:843-56). Le principal défi à venir sera d’identifier et de maximaliser l’inhibition des voies impliquées dans la croissance tumorale et celle des voies compensatrices, et de contourner les mécanismes de résistance aux agents actifs. ■ Les articles publiés dans “Correspondances en Onco-Urologie” le sont sous la seule responsabilité de leurs auteurs. Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction par tous procédés réservés pour tous pays. © mai 2010 - Edimark SAS (éditions DaTeBe) - Imprimé en France – Axiom Graphic SAS - 95830 Cormeilles-en-Vexin – Dépôt légal : à parution Correspondances en Onco-urologie - Vol. II - n° 1 - janvier-février-mars 2011 55