La Lettre du Cancérologue • Vol. XX - n° 1 - janvier 2011 | 55
Résumé
L’année 2010 a été marquée, pour les cancers du rein, par l’avènement du pazopanibe en première ligne des
formes métastatiques et par l’échec de l’association bévacizumab-temsirolimus dans l’étude TORAVA. On
se souviendra de 2010 comme de l’année des grands bouleversements, avec 4 études de phase III positives
permettant l’enregistrement du sipuleucel-T, du cabazitaxel, de l’abiratérone et du dénosumab dans les
cancers métastatiques résistants à la castration. Il faut aussi relever les résultats encourageants de l’étude
REDUCE avec le dutastéride et les espoirs suscités par le MDV3100. La radiothérapie (RT) n’est pas en
reste avec la confirmation des bons résultats à 15 ans de la curiethérapie et à 10 ans de l’étude EORTC de
M. Bolla et al., mais aussi avec les données des études canadiennes et françaises confirmant la supériorité
de l’association RT-hormonothérapie (HT) sur l’HT seule dans les formes localement avancées. Le cancer de
la vessie reste le “parent pauvre” des traitements ciblés. Le sunitinib après chimiothérapie (CT) s’est montré
décevant et toxique. Dans les cancers du testicule, il n’existe qu’un BEP, le schéma sur 3 jours donnant des
résultats inférieurs. Les complications cardio-vasculaires de la CT sont très rares mais peuvent être graves.
Dans les cancers du pénis, pour les lésions de grade 3 et de stade pT2-4, le curage extensif (> 8 ganglions
versus < 8 ganglions) améliore la survie globale à 5 ans.
Mots-clés
Cancer du rein
Cancer de la prostate
Cancer de la vessie
Cancer du testicule
Cancer du pénis
Highlights
The efficacy of pazopanib in first
line metastatic treatment and
the failure of the bevacizumab-
temsirolimus combination in the
TORAVA study have been the
more notable events concer-
ning kidney cancer in 2010. The
data of 4 phase III trials have
overturned the 2010 year and
have permitted the registra-
tion of sipuleucel-T, cabazitaxel,
abiraterone and denosumab in
metastatic castration-resistant
prostate cancer. The effect of
dutasteride on the prevention of
prostate cancer (REDUCE study)
and the antitumour activity
of MDV3100 are also very
encouraging. Updated reports
have confirmed the benefit
at 10 years of the EORTC trial
(Bolla) and at 15 years of
brachytherapy. The two Cana-
dian and French randomised
phase III trials have proved
the impact of radiotherapy
combined with androgen depri-
vation (ADT) versus ADT alone
in locally advanced tumours.
Few targeted treatments are
developed in bladder cancer.
Sunitinib following chemo-
therapy is toxic and disap-
pointing. In testicular cancer,
the classical BEP remains still
the standard of care, the 3-days
regimen is less efficient. The
cardio-vascular complications
secondary to chemotherapy are
rare but can be severe. Exten-
sive inguinal lymphadenec-
tomy (> 8 lymph nodes versus
< 8 lymph nodes) improves
overall 5-year survival in penile
cancer patients with grade 3
and pT2-4 tumours.
Keywords
Kidney cancer
Prostate cancer
Bladder cancer
Testicular cancer
Penile cancer
◆
Le pazopanib concurrencera-t-il prochainement
le sunitinib ?
Le pazopanib est un autre inhibiteur oral de tyrosine
kinase (ITK) bloquant les récepteurs de VEGFR, de
PDGFR ainsi que de c-Kit. Une première étude,
publiée par T.E. Hutson et al. (9), a démontré son
efficacité : le taux de réponse objective (RO) est de
35 %, la médiane de survie sans progression (SSP)
est de 52 semaines, résultats assez similaires à
ceux du sunitib dans l’étude de phase III d’enre-
gistrement.
Une étude randomisée (2:1) de phase III ayant inclus
435 patients a comparé le pazopanib (800 mg/j) au
placebo en première ligne (n = 233) ou après une
immunothérapie (n = 202) [10]. La SSP (critère de
jugement principal) était de 9,2 versus 4,2 mois
(HR = 0,46 ; IC95 : 0,34-0,62 ; p = 0,0001), en faveur
du bras pazopanib. Le taux de RO du pazopanib était
de 30 %, que les patients aient déjà été traités par
immunothérapie ou non. Cette molécule a un profil
de tolérance assez superposable à celui des autres
ITK (l’incidence d’effets tels que la diarrhée, les
nausées et vomissements, l’anorexie, l’hypertension
ou la décoloration des cheveux est supérieure
à 20 %, tous grades confondus). Une toxicité
hépatique (cytolyse hépatique), survenant dans
les 4 premiers mois de traitement, a été retrouvée
chez 12 % des patients.
L’efficacité et la tolérance du pazopanib sont en cours
d’évaluation dans le cadre d’une étude de phase III
versus sunitinib en première ligne métastatique.
La place réelle du pazopanib en première ligne sera
alors précisée.
◆Biomarqueurs prédictifs dans l’étude TARGET
Dans l’étude TARGET, qui a comparé sorafénib et
placebo chez 903 patients, les taux plasmatiques de
VEGF, de CAIX, de TIMP-1 et de Ras p21 sont pronos-
tiques de survie. Parmi eux, TIMP-1 émerge comme
un facteur indépendant en analyse multivariée (11).
◆Études CALGB 90206 et AVOREN
L’analyse finale des études de phase III CALGB 90206
(12) et AVOREN (13), comparant l’interféron seul
à l’association interféron-bévacizumab, ne montre
pas d’amélioration statistiquement significative de
la survie globale (SG).
Traitement de deuxième ligne
◆Devenir des patients métastatiques après
échec d’une première ligne d’antiangiogénique
Les données rétrospectives de 216 patients de
7 centres américains (14), ayant reçu en deuxième
ligne soit une nouvelle ligne d’antiangiogénique
(sunitinib : 93 patients ; sorafénib : 80 patients ;
bévacizumab : 11 patients ; axitinib : 8 patients), soit
un inhibiteur de mTOR (temsirolimus : 21, évéro-
limus : 3), ont montré que le temps médian jusqu’à
échec de la deuxième ligne était de 4,9 mois pour
les anti-VEGF et de 2,5 mois pour les inhibiteurs de
mTOR. La SG à partir de la deuxième ligne n’était
pas significativement différente, respectivement de
14,2 et de 10,6 mois (p = 0,38).
◆
Évérolimus : résultats finaux de l’étude RECORD-1
et analyse des facteurs pronostiques (15)
L’analyse intermédiaire de l’étude de phase III
RECORD-1 (n = 416) a montré la supériorité de
l’évérolimus sur le placebo. La médiane de SSP était
de 4,9 versus 1,9 mois (HR = 0,33 ; p < 0,001) selon
une revue centralisée indépendante. En revanche,
la médiane de SG était de 14,8 versus 14,4 mois
(HR = 0,87 ; p = 0,162), mais il y a eu un crossover
pour 80 % des patients du bras placebo. En tenant
compte du crossover, la survie corrigée était 1,9 fois
plus longue avec l’évérolimus. Un faible Performance
Status (PS), une élévation de la calcémie, un taux
faible d’hémoglobine et un traitement antérieur par
sunitinib étaient des facteurs pronostiques indépen-
dants de diminution de la survie.
◆
Étude de phase II, sorafénib chez des patients
réfractaires au sunitinib ou au bévacizumab : une
activité modeste (16)
Dans cette étude ayant inclus 48 patients, le
traitement par sorafénib était commencé à la dose
de 400 mg × 2/j. Une escalade de dose était possible.
Une seule RO, non confirmée, a été observée. La SSP
a été de 4,4 mois (IC95 : 3,6-5,9).
◆
Temsirolimus hebdomadaire après traitement
inhibiteur de VEGF
Dans une étude rétrospective américano-
canadienne portant sur 87 patients, le taux de