ces deux vastes domaines. Nous essayons toujours d'associer recherche clinique et recherche fondamentale. Ainsi, le
coordonnateur du CIC, le Professeur Michel Ovize exerce à l'hôpital Cardiologique et est également responsable d'une
équipe de recherche Inserm dans le domaine de la physiologie cardiaque.
Avant même les pionniers dont vous nous avez parlé, peut-on distinguer des traits de caractère lyonnais qui
pourraient expliquer la compétitivité de recherche clinique locale ?
La tradition lyonnaise se situe plus dans le champ de l'expérimentation et de l'innovation, que dans le champ de la
recherche clinique. Cela s'illustre par exemple par l'histoire lyonnaise des greffes avec notamment les travaux du
Professeur Jean-Michel Dubernard. Ses 1ères greffes de pancréas et de main relevaient de l'expérimentation, les
protocoles de greffes ont été ensuite affinés au fil des interventions et là, on se situe plus dans le champ de la recherche.
Ce domaine est en pleine évolution sur le plan scientifique, grâce en particulier à la thérapie cellulaire, qui permet
d’ouvrir un nouveau champ, celui de la médecine régénérative. Dans un avenir à la fois lointain et proche, il sera sans
doute possible de créer de nouveaux organes, ou parties d’organes, qui viendront suppléer les organes défaillants. On
pourrait ainsi éviter les transplantations à partir d’organes d’autres personnes, et tous les problèmes immunologiques de
gestion des rejets, qui obligent aujourd’hui à des traitements à vie. Toutes ces recherches doivent se faire dans un cadre
éthique rigoureux, mais les perspectives pour les patients sont fabuleuses. Nous avons la chance à Lyon de bénéficier
de la très grande expérience d’Odile Damour, biologiste responsable de la Banque de Tissus des HCL, installée à
l’hôpital Edouard Herriot..
On a bien sûr besoin d'innovation, d'inventivité et de créativité pour franchir des étapes. L'expérimentation va s'appuyer
d'abord sur la créativité, alors que la recherche, au sens strict du terme, repose d'abord sur des études fondamentales.
La masse critique de chercheurs issus de la recherche fondamentale au sein de l'agglomération participe donc
au dynamisme de la recherche clinique...
Certainement, c'est pourquoi nous nous attachons à développer la recherche translationnelle, le maillon entre la
recherche fondamentale et la recherche appliquée. Nous essayons de tisser ce lien pour que les échanges aient lieu
dans les deux sens : trouver des applications concrètes à des connaissances scientifiques et parvenir à comprendre des
observations cliniques à la lumière de « modèles » scientifiques. Distinguer la recherche fondamentale et la recherche
appliquée a d'ailleurs de moins en moins de sens. Il faut penser la recherche comme un circuit d’amélioration des
connaissances qui conduit au progrès médical avec un bénéfice pour le patient.
Votre service cherche à établir et fluidifier ces liens entre les différentes dimensions de la recherche...
Nous sommes aidés en cela par les médecins qui travaillent également au sein de laboratoires, des unités mixtes de
recherche formées par des chercheurs de l'Inserm, du CNRS, de l'Université ou encore de l'ENS. Au-delà, nous
essayons de mettre en place des rencontres favorisant également les échanges. Nous avons par exemple déjà accueilli
des chercheurs du CEA de Grenoble qui ouvrent des perspectives tout à fait nouvelles.
A l'inverse, des chercheurs, biologistes, chimistes, etc., viennent parfois nous soumettre leurs demandes. Elles peuvent
venir aussi de disciplines plus étonnantes : par exemple, l'été dernier, un géologue nous a contactés afin d'obtenir des
échantillons sanguins. Les nouvelles technologies, les techniques d'imagerie en particulier, viennent encore augmenter
le nombre de partenaires possibles.
Ces collaborations ouvrent des perspectives très intéressantes mais elles sont aussi très complexes car ces
professionnels ne connaissent pas toujours les règles, les coûts et les délais des essais cliniques. Même les petites
entreprises de biotechnologies ou les entreprises des dispositifs médicaux méconnaissent la réglementation de la
recherche clinique. Obtenir les autorisations pour une étude exige plusieurs mois et engendre des coûts qu'elles
n'avaient pas forcément anticipés. Des organismes, comme le pôle de compétitivité Lyon Biopôle dans le champ de
l'infectiologie, aident beaucoup ces petites et moyennes structures à aller chercher des financements, répondre à des
appels à projets... Ces entreprises de biotechnologies ont la créativité, des idées, l'envie d'entreprendre des essais
cliniques mais n'ont pas toujours la connaissance du système. Le pôle de compétitivité Lyon Biopôle assure
particulièrement bien l'interface entre eux et notre service. Cela crée des échanges très riches et intéressants et nous fait
gagner à tous beaucoup de temps. Ces petites biotech' n'auraient pas forcément eu l'idée de s'adresser à nous et, de
notre côté, nous n'aurions pas repéré leurs innovations, faute de moyens humains et financiers pour assurer cette veille.
Au regard de votre expérience, quels sont les principaux freins au développement de la recherche clinique ?
Le temps... Le système actuel de financement des hôpitaux, qui est la tarification à l'activité, n'encourage pas
l'investissement des médecins et des équipes dans la recherche clinique. Entre une activité qui implique un gros
investissement personnel et qui va vous donner potentiellement une publication dans 4 ou 5 ans et l'activité de soins, qui
reste la mission première des équipes médicales et qui engendre des recettes sur l'année d'exercice, le choix peut être
vite fait.