Le Courrier de la Transplantation - Vol. X - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2010
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Dossier thématique
Prise en charge
du transplanté hépatique en 2010
limus), le plus généralement. Si ces médicaments ont
permis un progrès majeur dans les résultats de la TH,
ils sont limités par une morbidité importante : hyper-
tension artérielle, toxicité rénale, neurologique, dys-
lipidémie et diabète (tacrolimus). Le mycophénolate
mofétil (MMF) ou l’acide mycophénolique peuvent
être utilisés au long cours, rarement en monothérapie,
fréquemment pour diminuer les doses d’anticalci-
neurines en cas de toxicité rénale. La toxicité de cette
classe de médicaments est médullaire et digestive.
Les inhibiteurs de mTOR possèdent une activité anti-
tumorale et ne sont pas néphrotoxiques. Ils peuvent
être utilisés en monothérapie ou associés aux anticalci-
neurines. Leurs effets indésirables, entraînant un arrêt
du traitement chez 20 à 30 % des patients, sont assez
nombreux : thrombose artérielle précoce, rash, dyslipi-
démie, myélotoxicité, ulcérations buccales, pneumonie
interstitielle. Les corticoïdes sont en général arrêtés
dans l’année suivant la greffe, sauf en cas de patholo-
gies auto-immunes. L’usage de médicaments ayant les
mêmes voies métaboliques que les immunosuppres-
seurs (antituberculeux, anticonvulsivants, macrolides,
antifongiques, inhibiteurs de protéase, etc.) doit être
évité en raison d’un risque de modification des taux
sanguins responsable de sur- ou de sous-dosages. Les
anticalcineurines ont permis de réduire le risque de rejet
aigu à une incidence d’environ 20 %. Cependant, un
rejet aigu peut survenir plus tardivement après la TH en
cas de modification du traitement immunosuppresseur
(modification de dose, interactions médicamenteuses,
mauvaise compliance). Le rejet chronique est caracté-
risé histologiquement par une ischémie des territoires
centrolobulaires et une ductopénie, mais, avec les trai-
tements actuels, il conduit à une perte du greffon chez
moins de 5 % des patients.
L’un des objectifs majeurs, à l’avenir, sera la réduction
de la morbidité liée à l’utilisation des anticalcineurines.
Plusieurs voies sont possibles : des schémas de minimi-
sation des anticalcineurines ou des stratégies permet-
tant d’induire un état de tolérance et un arrêt total de
l’immunosuppression. L’augmentation du nombre de
molécules immunosuppressives permet d’envisager
une réduction, voire un arrêt des anticalcineurines.
L’introduction de MMF ou d’un inhibiteur de mTOR
entraîne une stabilisation ou une amélioration de la
fonction rénale, mais expose, en monothérapie, à un
risque de rejet dans environ 15 % des cas (12). Des essais
sur l’instauration précoce des stratégies de minimisation
des anticalcineurines sont actuellement en cours. Le
développement d’un état de tolérance est conditionné
par un équilibre entre les lymphocytes T alloréactifs
cytotoxiques contre le greffon et les lymphocytes T
régulateurs capables d’inhiber la réaction cellulaire T
effectrice du rejet. Des protocoles de déplétion lym-
phocytaire visant à diminuer les cellules T effectrices
et à induire les cellules T régulatrices sont en cours
d’évaluation. Des molécules agissant par un blocage
du signal de costimulation lymphocytaire (bélatacept)
sont à l’étude. Le blocage du second signal de costi-
mulation inhibe l’activation des cellules T effectrices en
épargnant les lymphocytes T régulateurs.
Complications métaboliques
Le syndrome métabolique est défini par la survenue
de 3 des éléments suivants : obésité abdominale (tour
de taille supérieur à 102 cm chez l’homme et à 88 cm
chez la femme), hypertriglycéridémie (≥ 1,5 g/l), baisse
du cholestérol HDL (inférieur à 40 mg/dl chez l’homme
et à 50 mg/dl chez la femme), hypertension artérielle
(≥ 130/85 mmHg) et hyperglycémie à jeun (≥ 1 g/l). Il
peut s’observer chez 40 à 50 % des greffés et est res-
ponsable d’une augmentation de la fréquence des
complications cardio-vasculaires et d’une diminution
de la survie (13). L’indence d’une stéatose sur le greffon
est d’environ 20 % et celle d’une stéatohépatite d’en-
viron 10 %.
Diabète
L’incidence du diabète peut atteindre 30 % des trans-
plantés. Les facteurs de risque sont un antécédent
familial de diabète, un âge supérieur à 45 ans, un
diabète prégreffe, le surpoids, les corticoïdes (bolus),
le tacrolimus et l’hépatite C. Selon les études, le risque
de diabète serait 5 fois plus important avec le tacro-
limus qu’avec la ciclosporine. Le relais tacrolimus versus
ciclosporine pourrait permettre un meilleur contrôle
du diabète.
Hypertension artérielle
L’hypertension artérielle peut s’observer chez 75 % des
transplantés. Elle entraîne une morbidité importante
par son retentissement sur les fonctions rénale et car-
diaque et est favorisée par l’utilisation d’anticalcineu-
rines responsables de vasoconstriction, en particulier
rénale. Les maladies cardio-vasculaires (insuffisance
coronaire) font partie des principales causes de décès
à long terme après TH, avec un risque relatif (RR) de
2,5 par rapport à une population non transplantée. Les
facteurs de risque de complications cardio-vasculaires
sont l’hypertension artérielle, le diabète, le surpoids et la
dyslipidémie. La prévention repose sur une surveillance
régulière de la tension et un traitement précoce, l’arrêt
du tabac, les règles hygiéno-diététiques et l’activité
physique. Le traitement antihypertenseur repose sur les