SOMMAIRE Organisateur: O. MONNEUSE ( Lyon) 1. En améliorant le diagnostic radiologique : possibilités actuelles, limites diagnostiques. F. PILLEUL (Lyon) 2. Doit on toujours hospitaliser les sigmoïdes aigues ? Comment réduire leur durée de prise en charge ? N. CHEYNEL 3. Réhabilitation précoce post opératoire : quelles possibilités d’application aux urgences abdominales ? E. COTTE 4. Du trauma center au center de prise en charge des urgences chirurgicales O. MONNEUSE Urgences Abdominales En améliorant le diagnostic radiologique : Possibilités actuelles, limites diagnostiques. Pr Frank PILLEUL POINTS CLES : Le syndrome abdominal aigu ne doit pas conduire obligatoirement à une imagerie. Le radiologue doit être guidé dans son examen en lui indiquant le ou les diagnostics probables et le but recherché. L’imagerie doit s’intégrer dans une prise en charge multidisciplinaire du patient vu en urgence pour douleur abdominale aigue L'échographie et le scanner prennent une place prédominante dans l'exploration des douleurs abdominales aiguës. Leurs indications sont superposables mais chaque examen a ses propres domaines de prédilection Les radiographies d'abdomen sans préparation ont l'avantage d'être faciles à obtenir mais leur sensibilité est faible, voire nulle dans certains diagnostics. Les opacifications digestives n'ont plus aucune indication en urgence, sauf cas particuliers Les artériographies n'ont pas d'intérêt diagnostique en urgence. L'imagerie par résonance magnétique n'a pas encore de place en urgence. INTRODUCTION : L’amélioration du diagnostic des urgences abdominales par l’imagerie doit bénéficier d’un plateau technique complet pour permettre l’accès le plus rapidement possible à une salle de standard, un échographe, un scanner et aussi une IRM. Chacune de ces technologies ont évolués à travers le temps avec des salles de standard bénéficiant des capteurs plans, les échographes de l’ensemble des modes d’acquisitions et de la performance des sondes, les scanners multi détecteurs de la rapidité d’acquisition et les IRM de l’amélioration des résolutions spatiales et de l’accroissement du nombre de séquences. Par ailleurs, l’ensemble des images numériques acquises par ces différentes modalités d’examen, dont le nombre ne fait qu’augmenter, est associé à des RIS, PACS et outils de télétransmissions permettant l’accessibilité quasi instantanée de n’importe quel lieu (bureau, bloc, salle d’urgence…). Avec ces évolutions technologiques, les indications des examens en urgences se sont considérablement modifiées comme par exemple, l’échographie dans les syndromes abdominaux aiguës traumatiques ou pas, les polytraumatisés au scanner, les AVC en IRM. Il convient aussi désormais de bien connaître la place de chacun de ces examens, les uns par rapport aux autres, dans le parcours de soins du patient aux urgences et de définir ainsi les substitutions envisageables. IMAGERIE EN 2015 Bien que les radiographies d'abdomen sans préparation (ASP) restent extrêmement pratiquées dans les situations d'urgence car elles ont l'avantage d'être très facilement accessibles et de ne pas nécessiter un avis expert; depuis 2009 l’HAS en accord avec les organisations professionnelles (SNFGE, SFCD, SFMU, SFR) considère que l’ASP n’a plus d’indication dans les douleurs abdominales (HAS 2009) devant leur faible performance diagnostique. En 2015, l’imagerie en cas de douleurs abdominales aigues réside à l’utilisation de 2 techniques d’imagerie l'échographie et/ou le scanner. La prescription d’imagerie se fera bien entendu en fonction du contexte (homme/Femme, enfant/adulte/âgé), de la topographie de la douleur, des signes associés et des résultats biologiques. Ces différents points permettront de réaliser l’examen radiologique au « bon moment » avec la « bonne technique ». Enfin tout clinicien doit avoir à l’esprit le principe d’ALARA « As Low As Reasonably Achievable » tiré du code de santé publique qui stipule : « ne débuter une stratégie d’imagerie par un examen à rayonnements ionisants que si celui-ci n’est pas substituable par un examen non irradiant apportant les mêmes informations » L'échographie abdominale est très souvent demandée en cas d’urgence abdominale mais doit être prescrit en connaissant ses performances diagnostiques en fonction de la pathologie recherchée et en ayant à l’esprit ses limites. L’échographie abdomino-pelvienne doit être demandée en première intention chez l’enfant ; en cas de douleurs pelviennes chez une femme, en cas de douleurs de l’hypochondre droit et en cas de douleurs lombaires fébriles. Ses limites, en urgence, sont liées à l'iléus réflexe, fréquent, à l'obésité. Le scanner multi-détecteur avec et sans injection de produit de contraste est largement répandu dans les différents centres d’imagerie et est devenu l’outil diagnostic principal en cas d’urgences abdominales au cours de ces 10 dernières années. En 2015, les performances diagnostiques ne sont plus à discuter avec des sensibilité / spécificité supérieures ou égales à 90 % lorsque la bonne indication est posée. Les limites du scanner aujourd’hui sont les risques d’exposition à un rayonnement ionisant. À ce jour, les études épidémiologiques n’ont pas pu mettre en évidence un lien entre examens tomodensitométriques et une pathologie radio-induite. Néanmoins, il a été démontré qu’un lien existe entre précocité du cancer du sein et surveillance répétée par mammographies si celle-ci est débutée très tôt dans la vie de femmes à hauts risques de cancers [Giannakeas V, Lubinski J, Gronwald J, Moller P, Armel S, Lynch HT, et al. Mammography screening and the risk of breast cancer in BRCA1 and BRCA2 mutation carriers: a prospective study. Breast Cancer Research and Treatment 2014;147(1):113-8]. La CIPR (Commission Internationale de Protection Radiobiologique) a publié des coefficients de risque de décès par cancer ; 5 % par sievert (S) reçu pour la population générale avec une dose maximum tolérable sur la vie de 70 mSv (ou encore 20mSV par an) [CIPR. Publication 60 (traduction). Oxford, UK; Pergamon Press: 1991: paragraph 15]. Ces calculs sont effectués sans tenir compte de l’âge du patient, le risque n’étant évidemment pas le même chez un enfant que chez une personne âgée, sans connaître réellement la pertinence des 5 % avancés et sans pondération entre risques et bénéfices [Ivanov VK, Kashcheev VV, Chekin SY, Menyaylo AN, Pryakhin EA, Tsyb AF, et al. Estimating the lifetime risk of cancer associated with multiple CT scans. J Radiological Protection (official journal of the Society for Radiological Protection) 2014;34(4):825-41]. Ainsi l’avancée la plus significative est l’introduction d’un nouveau type de reconstruction des images, la reconstruction itérative [Andersen HK, Jensen K, Berstad AE, Aalokken TM, Kristiansen J, von Gohren Edwin B, et al. Choosing the Best Reconstruction Technique in Abdominal Computed Tomography: A Systematic Approach. J Computer assisted Tomography 2014] qui permet de diminuer très significativement la dose délivrée au patient. En fait, le principal facteur d’exposition reste lié à la facilité et à la rapidité d’acquisition des scanners modernes. La répétition des acquisitions, pour un même patient, peut très nettement augmenter la dose reçue. Il est donc indispensable que chaque examen soit programmé de façon rationnelle, en fonction de l’indication clinique : faut-il injecter ? Faut-il faire des coupes avant injection ? Si oui, sur quelle partie de la région à explorer ? Sur toute la région à explorer ? Des coupes tardives sont-elles réellement utiles ? CONCLUSION : L’amélioration de la prise en charge radiologique des urgences abdominales doit passer par une discussion multi disciplinaire permettant de poser la bonne indication et ainsi réaliser le bon examen avec un protocole optimisé au bon moment. Tout ceci permettra une interprétation optimale et ainsi éviter l’errance diagnostique et le risque de surmobidité associée. Doit-on toujours hospitaliser les sigmoïdites aigues ? Comment réduire leur durée de prise en charge ? Professeur N. Cheynel, Docteur O. Facy (MCU-PH) (CHU Dijon) L’histoire naturelle de l’inflammation des diverticules du sigmoïde (sigmoïdite diverticulaire) est maintenant mieux connue. Sa prise en charge évolue vers une simplification du traitement. Les crises faibles sont gérées à domicile depuis longtemps. Très naturellement, se pose la question de l’opportunité d’une hospitalisation pour les malades avec des symptômes plus aigues qui se présentent au service d’urgence de nos hôpitaux. Une crise de sigmoïdite diverticulaire est suspectée devant une douleur de la fosse iliaque gauche fébrile, d’autant plus que la présence de diverticules est connue. Cette crise est non compliquée lorsqu’elle ne s’accompagne ni d’abcédation, ni de péritonite, ni de fistulisation et ni d’occlusion. Un taux de CRP > 50 mg/l est un argument pour ce diagnostic 15. Un taux de CRP > 200 mg/l est un argument fort pour une perforation digestive 11. L’examen clinique, même associé à une biologique concordante, est insuffisant pour affirmer le diagnostic 15. L’identification de chaque crise par une imagerie est importante. Il est utile de distinguer une réelle crise de sigmoïdite d’une crise de colopathie fonctionnelle, souvent associée. Ceci permet de retracer l’historique de la maladie et dans des cas de plus en plus rare de poser une indication de sigmoïdectomie prophylactique. Le scanner abdomino-pelvien est le meilleur examen diagnostic en cas de suspicion de sigmoïdite diverticulaire 8,15. L’échographie est une alternative en cas d’impossibilité d’accès au scanner 8. Les antibiotiques sont communément administrés lors d’une sigmoïdite diverticulaire en phase aigue 15. Les antibiotiques recommandés associent une pénicilline A et l’acide clavulonique ou une céphalosporine de 3ème génération et imidazolé. En cas d’allergie, une fluoroquinolone est proposée en association avec un imidazolé 6. Selon la gravité évaluée mais surtout selon les habitudes de chacun !, cette antibiothérapie dure de 4 jours per os à une semaine en intraveineux. 15. Un nouveau concept physiopathologique de la sigmoïdite diverticulaire considère l’origine d’une poussée aigue comme un phénomène purement inflammatoire 8. Ce concept rend l’usage des antibiotiques moins pertinent. Différentes études ont analysées l’absence d’utilisation des antibiotiques lors d’une phase aigue de sigmoïdite diverticulaire non compliquée. L’utilité des antibiotiques n’était pas démontrée en 2011, alors que de nombreuses sociétés savantes les préconisaient 5. En 2011, une étude rétrospective comparait 191 patients traités pour sigmoïdite diverticulaire non compliquée par antibiotique, avec 81 traités sans antibiotique, sans noter de différence sur l’évolution de la crise 4. En 2012, une étude prospective multicentrique suédoise et Icelandaise randomisait 623 patients traités pour sigmoïdite diverticulaire aigue non compliquée entre un traitement antibiotique de sept jours ou l’absence d’antibiotique 3. Il n’y avait aucune différence entre les deux groupes, ni sur la durée de la crise, ni sur l’apparition de complication ni sur l’évolution au long terme. Un régime sans résidu voire une diète temporaire est généralement proposé pendant la crise 14,15. Cette pratique ne repose sur aucun argument fort. Ce régime peut prolonger l’hospitalisation 14. Des antalgiques peuvent être proposés. Les anti-inflammatoires non stéroïdiens, qui sont délétères au long cours d’une diverticulose (augmentation du risque d’infection, de saignement) ne sont probablement pas adaptés lors d’une crise aigue. L’application locale de glace a une action antalgique qui n’a semble t-t-il rarement été étudiée. En cas de crise aigue de sigmoïdite diverticulaire non compliquée, il convient de certifier le diagnostic par un examen clinique, une biologie simple et un scanner abdomino-pelvien. Le traitement comporte une antibiothérapie, remise en question et un régime dont l’utilité fait encore débat. Une surveillance clinique est nécessaire afin de traquer une éventuelle complication et de surveiller la résolution de la crise. Ces éléments sont simples à organiser et le traitement ambulatoire de la crise de sigmoïdite aigue non compliquée est de plus en plus préconisé. Une sortie rapide de l’hôpital après un scanner dans les premières 24 heures de la crise est envisageable 1. En 2010, 693 patients étaient traités pour sigmoïdite aigue diverticulaire non compliquée à domicile, avec une antibiothérapie. Le taux de succès (traitement sans hospitalisation) était de 94 % 7. Un taux plus élevé d’échec du traitement à domicile était noté chez les femmes (odd ratio 3,08) et en cas de présence de liquide libre intra-abdominal sur le scanner (odd ratio 3,19) 7. Une revue systématique en 2014 a fait le point sur le traitement ambulatoire de la sigmoïdite diverticulaire non compliquée à partir de 9 séries publiées 10. Dans toutes les séries sauf une, le diagnostic était étayé par un examen radiologique, principalement un scanner abdomino pelvien, plus rarement une échographie. Toutes les séries analysées excluaient les patients âgés de plus de 80 ou 90 ans, les malades avec une fièvre élevée ou des vomissements ou ceux qui présentaient une co-morbidité telle que diabète, insuffisance cardiaque ou rénale, immunodépression. La plupart des participants recevaient une antibiothérapie (amoxicilline-acide clavulonique ; céphalosporine plus métronidazole). Certains patients sortaient immédiatement, d’autres restaient hospitalisés 24 heures avec des antibiotiques intraveineux. L’antibiothérapie totale durait de 7 à 10 jours. La plupart des malades étaient revus entre 4 et 10 jours (certains par leur médecin traitant). Au total, 97 % (403 sur 415) des participants étaient traités sans hospitalisation. Un essai espagnol, prospectif, multicentrique, randomisé (Diver Trial), publié en 2014 comparait 132 patients pris en charge pour une sigmoïdite diverticulaire aigue non compliquée, soit à domicile, soit en hospitalisation 2. Tous les malades recevaient une première dose d’antibiotique intra veineux (amoxicilline-acide clavulonique). Ensuite, 66 malades étaient hospitalisés pour une antibiothérapie initialement intra veineuse pendant 36 à 48 heures, puis per os. Les 66 autres patients retournaient à domicile avec une antibiothérapie per os (amoxicilline acide clavulonique). Dans les deux groupes, l’antibiothérapie totale était de 10 jours. Cinq pour cent des malades traités à domicile ont du être hospitalisés. Il n’y eu aucune différence d’évolution entre les deux groupes. Iacson et al. ont récemment (mai 2015) fait part de leur expérience dans 2 hôpitaux Suédois avec 155 patients suivis en ambulatoire pour une sigmoïdite aigue non compliquée 9. Après confirmation du diagnostic par un examen clinique, une NF sanguine (moyenne 10 500 GB) et un dosage de la CRP (moyenne 73 mg/l) et un scanner abdomino-pelvien, les patients retournaient à domicile en moins de 24 heures. Ils ne recevaient pas d’antibiotique. Du paracétamol était recommandé si nécessaire. Les malades devaient suivre une alimentation orale pendant 48h puis un régime léger. Ils consignaient quotidiennement sur un journal la douleur, la température, leur alimentation et leur transit. Ils étaient contactés quotidiennement par une infirmière et vus par un chirurgien à 1 semaine (avec une nouvelle NF et CRP) et à 1 mois. Seulement quatre patients (2.6 %) ont du être hospitalisés au cours du suivi. Une colonoscopie est souvent proposée après une crise de sigmoïdite aigue. L’usage du scanner a fait diminuer le risque de confusion avec une tumeur abcédée. L’intérêt de cette coloscopie est controversée mais semble en s’affaiblir à mesure qu’apparaissent de nouvelles publications sur le sujet. La méta analyse de Sharma, publiée en 2014 rapporte un risque de cancer colorectal lors d’une coloscopie après sigmoïdite diverticulaire de 1,6 % 12. Ce risque est faible en cas de sigmoïdite diverticulaire non compliquée (0,7%) mais augmente en cas de sigmoïdite diverticulaire compliquée à 10,8 %. Les auteurs concluent qu’en cas de sigmoïdite diverticulaire non compliquée, le risque de cancer colorectal rejoint celui d’une population générale. Il s’agit de la conclusion la plus généralement admise actuellement pour une sigmoïdite diverticulaire non compliquée 13 (le cas des sigmoïdites diverticulaires compliquées reste discutable). Le risque de découverte d’un polype est de 19 %, d’interprétation plus délicate 12. Après une première poussée, le risque de survenue d’une autre poussée est modéré. Les poussées suivantes sont la plupart du temps moins graves que la poussée inaugurale. Le risque du recours à une chirurgie en urgence lors des poussées successives est faible, celui d’une stomie est minime. La sigmoïdectomie prophylactique, en vue d’éviter une autre poussée, comporte ses risques propres, certes faibles, mais non nuls. Elle ne met pas à l’abri de la persistance de douleurs chroniques voir de réelles récidives. Elle peut provoquer des troubles fonctionnels invalidants. Aussi, les indications de sigmoïdectomie prophylactique sont actuellement fortement revues à la baisse. Cette intervention doit dorénavant être discutée au cas par cas et non plus proposée systématiquement après la seconde poussée comme il était jusqu’alors recommandé. Il est donc important d’authentifier chaque crise douloureuse comme une poussée aigue de sigmoïdite diverticulaire et non comme une crise de colopathie. Ceci justifie la réalisation d’un scanner abdomino-pelvien à chaque crise d’importance. Cette pratique permet de reconstituer l’historique de la maladie, et évite d’opérer un malade colopathe avec le risque de récidive douloureuse, de mauvais résultat fonctionnel et d’insatisfaction. Conclusion Le diagnostic d’une poussée aigue de sigmoïdite diverticulaire non compliquée nécessite, outre un examen clinique et une biologie simple, son authentification par un scanner abdominopelvien, afin d’éviter la confusion avec une colopathie fréquemment associée et de pouvoir ensuite reconstituer l’historique de la maladie. De nombreux arguments tendent à montrer que l’antibiothérapie serait inutile. Le rôle du régime pendant la crise est controversé. Plusieurs publications rapportent la faisabilité de la prise en charge à domicile de la plupart des malades qui se présentent au service des urgences pour une poussée aigue de sigmoïdite diverticulaire non compliquée, sans risque et avec un taux faible (inférieur à 6 %) de retour à l’hôpital. Une sélection rapide doit analyser les co-morbidités (malade greffé, immunodéprimé, diabétique instable,..), traquer une complication spécifique (abcès, fistule, liquide intra-abdominal sur le scanner), et vérifier l’absence de condition sociale ou d’hébergement défavorable, autant d’éléments qui pourraient contre-indiquer la sortie rapide de l’hôpital. Comme toute prise en charge ambulatoire, cette pratique justifie une organisation spécifique, un système de surveillance organisé et la possibilité d’un retour en hospitalisation rapide. Il est probable que cette organisation ambulatoire ou lors d’une hospitalisation très courte se généralise. Cette pratique doit lutter contre nos habitudes médicales. Elle doit également lutter contre les habitudes des malades qui vont se voir proposer un retour à domicile alors que la symptomatologie qui les suffisamment inquiétée pour les amener à l’hôpital n’a pas rétrocédé. Elle va certainement être favorisée par les autorités de santé soucieuses d’économie. Références bibliographiques : 1- Al-Sahaf O, Al-Azawi A, Fauzi M, El-Masry S, Gillen P. Early discharge policy of patients with acute colonic diverticulitis following initial CT scan. Int J Colorectal Dis 2008 ; 23 : 817-20 2- Biondo S, Golda T, Kreisler E, Espin E, Vallribera F, Oteiza F, et al. Outpatient versus hospitalization management for uncomplicated diverticulitis. A prospective, multicenter randomized clinical trial (Diver trial). Ann Surg 2014; 259: 38-44 3- Chabok A, Pahlman L, Hjern F, Haapaniemi S, Smedh K. 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Dietary restrictions for acute erticulitis : evidence-based or expert opinion ? Int J Colorectal Dis 2013 ; 28: 1287-9 15- Vennix S, Morton DG, Lange JF, Bemelman WA. Systematic review of evidence and consensus on diverticulitis : an analysis of national and international guidelines. Colorectal Disease 2014; 16: 866-78 Réhabilitation précoce post opératoire : quelles possibilités d’application aux urgences abdominales. Dr Guillaume PASSOT, Pr Olivier GLEHEN, Pr Eddy COTTE CHU de Lyon- Centre Hospitalier Lyon-Sud Service de chirurgie digestive et endocrinienne 165 chemin du grand Revoyet 69495 Pierre-Bénite Cedex Les programmes de réhabilitation rapide ou précoce après chirurgie (Fast-track pour les anglophones) se sont largement développés ces dernières années. Initié par Henrick Kehlet dans les années 1990 pour la chirurgie colique élective, ce type de prise en charge initialement conçue pour raccourcir la durée de séjour a démontré son efficacité également sur la réduction de la morbidité post-opératoire et donc sur une amélioration de la qualité des soins1. On parle ainsi volontiers maintenant de programme de réhabilitation améliorée après chirurgie (RAAC). Ces programmes de RAAC constituent un chemin clinique pour le patient dans lequel celui-ci devient un véritable acteur de ses soins et comportent une vingtaine de mesures réparties entre les périodes pré-, per- et postopératoires. Les mesures préopératoires comportent : information et éducation du patient, absence de préparation colique (pour la chirurgie colique), limitation du jeûne préopératoire (6h pour les solides, 2h pour les liquides), administration préopératoire d’une boisson riche en hydrates de carbone, omission de la prémédication. Les mesures peropératoires comportent des mesures chirurgicales : voie d’abord laparoscopique privilégiée, absence de drainage intraabdominal, absence de sonde nasogastrique ; et des mesures anesthésiques : limitation des apports liquidiens intraveineux, prévention des nausées-vomissements, maintien de la normothermie, antibio- et thromboprophylaxie. Enfin les mesures postopératoires comportent : retrait de la sonde urinaire dans les 24h postopératoire, alimentation orale précoce, analgésie multimodale avec épargne morphinique, mobilisation précoce et intensive du patient. Un audit en temps réel de l’application du programme, des différentes mesures et un suivi des indicateurs (taux de complications, durée de séjour par exemple) paraissent également essentiels au maintien dans le temps de la qualité de la prise en charge. Deux systèmes d’audit sont actuellement disponibles et permettent de suivre ses propres performances et également de les comparer aux autres centres participant à ce type de programme: celui mis à disposition par le Groupe Francophone de Réhabilitation Après Chirurgie (GRACE) et celui de la société ERAS®. Les protocoles ont bien entendu des spécificités en fonction du type de chirurgie et de pathologie concernés, mais une majorité de mesures peut être systématiquement appliquée. Pour la chirurgie colorectale élective, des recommandations ont été publiées conjointement par la Société Française de Chirurgie Digestive et la Société Française d’Anesthésie-Réanimation2. L’efficacité de ce type de programme pour la chirurgie élective n’est plus à démontrer et a fait l’objet de nombreuses études de fort niveau de preuve. Pour la chirurgie colorectale élective, deux méta-analyses récentes basées sur des études randomisées montrent une réduction de la morbidité globale de 30 à 40%, une diminution de la durée de séjour de 2 jours sans modification du taux de réadmission ni du taux de mortalité pour les programme de RAAC comparativement à une prise en charge classique 3,4. Les programmes de RAAC se sont maintenant développés dans toutes les sous-spécialités digestives (chirurgie hépatobiliaire, chirurgie pancréatique, chirurgie œsogastrique ou chirurgie bariatrique) et de nombreuses études ont également démontré leurs efficacités sur la réduction de la durée de séjour, et le plus souvent aussi sur la diminution de la morbidité postopératoire 5-8. Est-il possible d’appliquer ce type de programme pour la chirurgie digestive d’urgence ? Il est clair que certaines mesures ne sont pas applicables en urgence, en particulier les mesures préopératoires spécifiques d’une chirurgie programmée (limitation du jeûne ; boisson carbohydratée 2h avant l’intervention et dans une certaine mesure information et éducation du patient) qui paraissent difficile à appliquer à un patient en occlusion ou en péritonite. Les mesures peropératoires sont pour la plupart applicable notamment les mesures purement chirurgicales (chirurgie mini-invasive, limitation des drains et sondes). Les mesures anesthésiques doivent prendre en compte l’état général du patient et notamment son état hémodynamique. Il parait difficile de limiter le remplissage vasculaire chez un patient en choc hémodynamique par exemple. Enfin les mesures post-opératoires devront également s’adapter à la pathologie et à l’état général du patient et il sera par exemple difficile de proposer une réalimentation précoce à un patient en occlusion avec une sonde nasogastrique. L’impossibilité de réaliser une des mesures ne contreindique toutefois pas l’ensemble du programme de RAAC. Et il sera notamment toujours possible (sauf contexte traumatique) de proposer une mobilisation active en post-opératoire, élément primordial d’un protocole de RAAC. Il a été démontré que le taux de compliance aux différentes mesures était corrélé aux résultats notamment en terme de morbidité. Plus la compliance est élevée, meilleurs sont les résultats d’un programme de RAAC avec une morbidité moindre 9. Un protocole de RAAC dans un contexte d’urgence même s’il ne peut appliquer l’ensemble des mesures proposées à une chirurgie élective devra s’attacher à en respecter le plus possible pour optimiser l’efficacité de celui-ci. Peu d’études concernent les protocoles de RAAC pour la chirurgie d’urgence. Une étude a notamment analysé la compliance d’un programme de RAAC pour la chirurgie colique en urgence 10 . Cette étude démontre la faisabilité de l’implémentation d’un protocole de RAAC en situation d’urgence avec une compliance toutefois plus faible que celle observée pour la chirurgie élective (57% vs 77% pour l’ensemble des mesures). Dans cette étude, les mesures les plus respectées sont les mesures peropératoires (77% vs 86% pour un protocole en chirurgie colique élective). Cette étude montre par ailleurs qu’une durée de séjour réduite n’est pas associée à un taux de réadmission élevé puisque celui n’était que de 4% dans cette série de 28 patients opérés d’une chirurgie colique en urgence. Une étude cas-témoin a comparé les résultats d’un programme de RAAC à une prise en charge traditionnelle pour des patients opérés en urgence d’un cancer colorectal en occlusion. Il s’agit là aussi d’une étude à faible effectif (20 patients programme RAAC appariés à 40 patients programme « classique »). Cette étude montre qu’un programme RAAC dans cette situation permet de diminuée la durée de séjour de 2 jours (5,5 vs 7,5 jours, p=0,009) sans augmenter de taux de réadmission, et de réduire la durée de reprise du transit et de la réalimentation orale. On notait dans cette étude une tendance pour une morbidité moindre dans le groupe RAAC mais non significative probablement par manque d’effectif (25% vs 48%, p=0,094). Autre élément intéressant dans cette étude dans un contexte oncologique, l’intervalle de temps entre la chirurgie et la mise en route d’une chimiothérapie adjuvante qui était plus court dans le groupe RAAC (37 jours vs 49 jours, p=0,009) témoignant d’une convalescence postopératoire plus rapide avec l’impact bénéfique potentiel en terme de survie suggéré par certaines études 11 . Une étude randomisée a comparé les résultats d’un programme RAAC à une prise en charge classique pour la chirurgie de l’ulcère gastroduodénal perforé 12 . Cette étude montre la aussi la faisabilité d’un programme RAAC en situation d’urgence et le bénéfice potentiel pour le patient (et l’hôpital) : diminution de la durée de séjour (3,8 vs 6,9 jours, p=0,001) et reprise de l’alimentation orale plus rapide (1,55 vs 4,82 jours, p=0,001), sans modification de la morbidité, du taux de fistules postopératoires, du taux de réadmissions ou de réinterventions. Cette étude montre par ailleurs, comme c’est souvent le cas avec la mise en place d’un programme de RAAC, la possibilité d’aller à l’encontre de certains dogmes puisque dans cette étude bien que concernant des patients atteints d’un ulcère gastroduodénal perforé, dans le groupe RAAC la sonde nasogastrique était retirée en fin de bloc après aspiration du contenu gastrique et les patients étaient réalimentés précocement dès J1 avec des liquides puis des semi-liquides à J2 et des solides à J3. Il parait donc clairement possible de mettre en place des programmes de RAAC dans le cadre de la chirurgie d’urgence abdominale. A l’instar de la chirurgie élective, les programmes de RAAC en chirurgie d’urgence semblent accélérer la prise en charge des patients sans compromettre leur sécurité (voire diminuer la morbidité post-opératoire). Les spécificités de certaines pathologies ou l’état du patient limitent l’application de certaines mesures du protocole mais ne contre-indiquent pas l’ensemble du protocole. Des programmes spécifiques pour chaque pathologie d’urgence abdominale doivent être mis en place avec un suivi en temps réel de la compliance aux différentes mesures afin de maintenir la qualité de la prise en charge dans le temps. La formation des équipes prenant en charge les urgences abdominales à ces programmes de RAAC semble indispensable pour améliorer la compliance globale du programme et notamment pour accepter l’abandon de certains dogmes chirurgicaux ou anesthésiques. Les données scientifiques démontrant l’efficacité des programmes de RAAC en situation d’urgence sont limitées et des études randomisées de grandes envergures seraient utiles pour les valider. Références 1- Kehlet H, Wilmore DW. Evidence-based surgical care and the evolution of fast-track surgery. Ann Surg. 2008;248:189-98 2- Alfonsi P et al. French guidelines for enhanced recovery after elective colorectal surgery. J Visc Surg. 2014;151(1):65-79 3- Greco M, Capretti G, Beretta L, Gemma M, Pecorelli N, Braga M. Enhanced recovery program in colorectal surgery: a meta-analysis of randomized controlled trials. World J Surg. 2014; 38(6):1531-41 4- Zhuang CL, Ye XZ, Zhang XD, Chen BC, Yu Z. Enhanced recovery after surgery programs versus traditional care for colorectal surgery: a meta-analysis of randomized controlled trials. Dis Colon Rectum. 2013; 56(5): 667-78 5- Chen ZX, Liu AH, Cen Y. Fast-track program vs traditional care in surgery for gastric cancer. World J Gastroenterol. 2014 Jan 14;20(2):578-83 6- Coolsen MM, van Dam RM, van der Wilt AA, Slim K, Lassen K, Dejong CH. Systematic review and meta-analysis of enhanced recovery after pancreatic surgery with particular emphasis on pancreaticoduodenectomies. World J Surg. 2013 Aug; 37(8):1909-18. 7- Coolsen MM, Wong-Lun-Hing EM, van Dam RM, van der Wilt AA, Slim K, Lassen K, Dejong CH. A systematic review of outcomes in patients undergoing liver surgery in an enhanced recovery after surgery pathways. HPB (Oxford). 2013 Apr; 15(4):245-51. 8- Lemanu DP et al. Randomized clinical trial of enhanced recovery versus standard care after laparoscopic sleeve gastrectomy. Br J Surg. 2013 Mar; 100(4):482-9. 9- Gustafsson UO1, Hausel J, Thorell A, Ljungqvist O, Soop M, Nygren J; Enhanced Recovery After Surgery Study Group. Adherence to the enhanced recovery after surgery protocol and outcomes after colorectal cancer surgery. Arch Surg. 2011 May; 146(5):5717. 10- Roulin D, Blanc C, Muradbegovic M, Hahnloser D, Demartines N, Hübner M. Enhanced recovery pathway for urgent colectomy. World J Surg. 2014 Aug; 38(8):2153-9. 11- Biagi JJ, Raphael MJ, Mackillop WJ, Kong W, King WD, Booth CM. Association between time to initiation of adjuvant chemotherapy and survival in colorectal cancer: a systematic review and meta-analysis. JAMA. 2011 Jun 8; 305(22):2335-42. 12- Gonenc M et al. Enhanced postoperative recovery pathways in emergency surgery: a randomised controlled clinical trial. Am J Surg. 2014 Jun; 207(6):807-14. Comment raccourcir la durée de prise en charge dans le cadre des urgences abdominales : le concept de la spécialité de chirurgie d’urgence ou « acute care surgery ». Pr Olivier Monneuse, Hôpital Edouard Herriot, Lyon. La chirurgie d’urgence est confrontée à deux grands groupes de pathologies : les urgences chirurgicales traumatiques et les urgences chirurgicales non traumatiques. Concernant l’urgence traumatique : le trauma center est un concept intéressant mais en pleine évolution. Le concept de trauma center est un concept né aux États Unis permettant de prendre en charge un patient polytraumatisé quelque soit l’endroit où survienne ce traumatisme sur le territoire américain. Il répond ainsi a une double contrainte : immensité du territoire et nécessité économique 1 d’une centralisation des moyens . Le trauma center est donc constitué de 2 entités indispensables : Une structure hospitalière de différents niveaux de technicité : Niveau 1 de plus haute technicité, comportant une structure accueillant les urgences traumatiques viscérales, orthopédiques, neurochirurgicales et cardiologiques comportant également une possibilité de prise en charge des femmes enceintes polytraumatisées ainsi que les patients brûles. Cette structure prend également en charge les patients traumatisés « simples » de proximité. Niveau 2 de moindre technicité mais permettant néanmoins un conditionnement chirurgical en vue d’une évacuation des patients une fois conditionnés vers les trauma centers de niveau 1. Niveau 3 les plus éloignés des centres de grande concentration de population, de technicité minimale, permettant essentiellement un conditionnement minimal au transport, le plus souvent héliporté. A signaler que l’accueil et la gestion initiale sont réalisés par le Trauma Team Leader, véritable chef d’orchestre de la prise en charge diagnostique et thérapeutique du patient, qui est dans la plupart des cas un chirurgien et non un anesthésiste réanimateur. Un maillage, réseau constitué entre ces différentes structures : Il permet aux patients de bénéficier d’un accès au centre de niveau 1 dans des délais extrêmement courts et à l’inverse de permettre un dégagement des lits de trauma center de niveau 1 par un retour des patients traités dans les centres intermédiaires les ayant référencés. Ce retour profite à tous sur le plan organisationnel : les trauma center de niveau 1 bénéficiant de capacités d’accueil non saturées, les hôpitaux référençant les patients bénéficiant d’un retour du patient stabilisé mais nécessitant parfois des gestes complémentaires. Sur le plan chirurgical, l’hyperspécialisation précoce dans la formation des jeunes chirurgiens a conduit à la création d’une sur-spécialité de « Trauma Surgeon ». Limites du concept de trauma center / Evolution aux Etats Unis : 2 Deux problèmes sont régulièrement soulevés dans ces structures : Une sous occupation des équipes dédiées uniquement à l’urgence traumatique : seuls quelques centres hyperspécialisés dans des bassins de population très denses et vastes avec une criminalité importante (mortalité par plaies par armes à feu quasi équivalente à la mortalité par accidents de la voie publique aux USA) justifient d’une activité traumatologique de recours intense. A l’inverse une activité de pointe souvent importante (plusieurs victimes à traiter en même temps), justifiant le plus souvent des fonctionnements par association de trauma center de niveau 1 3 permettant de lisser cette activité de pointe et de ne pas être dépassé en terme de moyens. Les très bons résultats observés dans la prise en charge des urgences traumatiques sur la base de leur centralisation, associée à une « sous occupation » des équipes chirurgicales spécialisées ont conduit les équipes américaines à une extension du concept traumatique vers la prise en charge des pathologies chirurgicales urgentes non traumatiques 45 : l’acute care surgery étant le prolongement logique de l’organisation du trauma center. Ainsi on constate un nombre croissant de publications montrant l’intérêt pour le patient d’une prise 6 en charge spécialisée dans le domaine de l’urgence chirurgicale (appendicite, cholécystite etc...) . Application du concept « d’acute care surgery » à l’activité chirurgicale en France : La France ne présente pas les mêmes difficultés de prise en charge géographique que les Etats Unis. Même à l’heure des « déserts médicaux », la répartition de l’offre de soin reste très présente avec une proximité restant en général de moins de 150 km. Par ailleurs concernant la formation chirurgicale, même si l’orientation est celle d’une surspécialisation de plus en plus précoce avec les avantages et les inconvénients qui lui sont associés, la chirurgie d’urgence reste un des piliers de l’apprentissage des jeunes chirurgiens français. Néanmoins ce système Nord Américain par son organisation en réseau, permet d’améliorer la prise en charge des patients les plus lourds notamment via la vitesse de prise en charge. En effet, l’intégration de l’urgence chirurgicale notamment lourde est difficile dans les équipes aux programmes opératoires réglés saturés. Il n’est pas rare que l’urgence arrivée en début de matinée soit décalée à la fin du programme opératoire réglé retardant ainsi la prise en charge urgente. Ce décalage peut s’accompagner d’une augmentation artificielle de la durée de séjour, la prise en charge en fin d’après midi ne permettant pas forcément une sortie le jour même. Le centralisation des plateaux techniques les plus lourds (et d’ailleurs les plus couteux dans leur mode de fonctionnement) permet de rassembler les patients les plus lourds en terme de nécessité de moyens médicaux utiles à leur traitement, au sein de ces centres de haut niveau de technicité, libérant du temps dans les centres adressant ces patients. La centralisation de la pathologie chirurgicale urgente au sein d’un service présente également l’avantage d’une centralisation de pathologies rares, avec une amélioration des résultats de prise en charge 7. En conclusion, le concept d’une nouvelle organisation de la chirurgie d’urgence, basée sur celle des trauma center américains ne réponds pas au même cahier des charges lorsqu’il est transposé directement à l’activité française, raison probable de quelques réticences à son application. Or le fonctionnement d’un plateau technique étendu et complet fonctionnant 24h/24h et des différentes spécialités qui lui sont attenantes (médicales, chirurgicales, radiologiques …) a montré depuis plus de 20 ans, la preuve de son efficacité thérapeutique, notamment pour les patients polytraumatisés. La concentration des patients sur ces centres de recours et donc l’application du système américain au sens de réseaux de soins en urgence est probablement le gage d’une viabilité sur le plan médico-économique. Enfin sur le plan médical, malgré l’évolution vers une hyperspécialisation précoce dans la formation, la thérapeutique chirurgicale de l’urgence reste un plaidoyer pour une formation généraliste dans la spécialité. Références bibliographiques : 1. Lerner EB, Maio RF, Garrison HG, et al. Economic value of out-of-hospital emergency care: a structured literature review. Ann Emerg Med 2006; 47(6):515- 24. 2. Lerner EB. Studies evaluating current field triage: 1966-2005. Prehosp Emerg Care 2006; 10(3):303-6. 3. Diaz JJ, Jr., Norris PR, Gunter OL, et al. Does regionalization of acute care surgery decrease mortality? J Trauma 2011; 71(2):442-6. 4. Austin MT, Diaz JJ, Jr., Feurer ID, et al. Creating an emergency general surgery service enhances the productivity of trauma surgeons, general surgeons and the hospital. J Trauma 2005; 58(5):906-10. 5. Pryor JP, Reilly PM, Schwab CW, et al. Integrating emergency general surgery with a trauma service: impact on the care of injured patients. J Trauma 2004; 57(3):467-71; discussion 471-3. 6. Curtis K, Chong S, Mitchell R, et al. Outcomes of severely injured adult trauma patients in an Australian health service: does trauma center level make a difference? World J Surg 2011; 35(10):2332-40. 7. Monneuse O, Tissot E, Gruner L, et al. Diagnosis and treatment of spontaneous group A streptococcal peritonitis. Br J Surg 2010; 97(1):104-8.