Cours n°7
AFFINER LA LOGIQUE :
DE LA LOGIQUE INTUITIONNISTE A LA LOGIQUE LINEAIRE
1 - Le calcul des séquents classique
1.1. Le calcul des séquents comme méthode de décision
Bien que la méthode des tables de vérité ne puisse pas s’y appliquer, on peut démontrer que la
logique propositionnelle intuitionniste est décidable. La méthode de décision repose alors sur
une nouvelle présentation de la logique (nouvelle par rapport aux deux que nous avons vues
jusqu’à présent : une axiomatisation « à la Hilbert » et une présentation de type « déduction
naturelle »), due à Gerhart Gentzen dans les années trente, que l’on appelle le « calcul des
séquents ». Ce calcul fut en réalité inventé par Gentzen dans le cadre de la démonstration de
la complétude de la logique des prédicats du premier ordre. Intuitivement, pour prouver la
complétude d’un système, il faut prouver que toute thèse est démontrable, donc montrer que
connaissant une thèse, on peut construire sa démonstration. La bonne méthode pour y arriver
consiste à se munir d’un système général de recherche de preuves. Gentzen travaille sur des
relations de déduction entre séries de formules.
Prenons l’exemple suivant. On sait qu’il est possible de déduire B de la suite de formules C, C
⇒ A, ¬A ∨ B. On peut écrire cette relation déductive entre une suite de formules et une
formule sous la forme :
C, C ⇒ A, ¬A ∨ B → B
où la flèche (→) sépare la suite de prémisses de la conclusion.
Si on nous demande de prouver, en logique classique, cette relation de déduction, nous
pouvons utiliser une méthode à base de valeurs de vérité en raisonnant de la manière
suivante : supposons que ce ne soit pas le cas, c’est-à-dire que C, C ⇒ A, ¬A ∨ B ne permette
pas de déduire B, alors cela signifierait qu’il existe au moins une assignation de valeurs de
vérité aux propositions atomiques A, B, C telle que :
• C, C ⇒ A, ¬A ∨ B soient vraies (= 1)
• B soit fausse (= 0)
Alors cela entraînerait que, en ce qui concerne la formule C ⇒ A :
• ou bien C est fausse (0)
• ou bien A est vraie (1)
Mais étant donné que C est vraie, la première éventualité nous conduit à une contradiction :
nous stoppons la recherche de démonstration sur cette voie.
Il reste l’éventualité que A soit vraie. En ce cas, pour ce qui concerne la formule ¬A ∨ B,
puisqu’elle est vraie, cela ne peut être que parce que :
• ou bien ¬A est vraie, donc A est fausse,
• ou bien B est vraie
Dans la première éventualité, nous stoppons la recherche de preuve également puisqu’on
obtient une contradiction entre A vraie et A fausse.
Reste la dernière éventualité : B vraie, mais au début de notre raisonnement, nous avons
supposé que B était fausse, donc là encore, nous stoppons la recherche de démonstration. Il
n’y a plus alors d’autre voie à explorer. Toutes les voies nous ayant ainsi conduit à une
contradiction, c’est que l’hypothèse d’où nous sommes partis conduit à une absurdité, et nous
devons conclure que la suite de formules C, C ⇒ A, ¬A ∨ B permet bien de déduire B.
Nous pouvons représenter l’ensemble de ce raisonnement par un tableau, ou plutôt une suite
de lignes, que nous lisons en remontant de la dernière ligne (racine d’un arbre) vers les
premières (feuilles en même temps qu’axiomes). Dans cette représentation, la flèche « → »