Protectionnisme Protectionnisme ou librelibre-échange : Quel choix pour les économies africaines ? Par: Darly kambamba Benedict konso Université de Kinshasa Département d’économie Analystes sur Libreafrique.org Courriels : [email protected] [email protected] Les points de vue développés dans cet article n’engagent nullement les institutions d’appartenance des auteurs. Depuis les classiques jusqu’aux économistes contemporains en passant par les keynésiens, le choix entre le libre-échange et le protectionnisme a toujours fait l’objet d’un débat houleux et sans fin entre économistes de différents horizons. Il suffit, pour s’en convaincre, de jeter un coup d’œil sur les titres d’ouvrages, articles et thèses universitaires publiés à ce sujet. L’objectif de ce travail n’est pas de répondre de manière tranchée et absolue à cette question cruciale pour le devenir de l’Afrique. Néanmoins, nous voulons apporter notre modeste contribution à ce débat aux vues des évolutions théoriques et empiriques développées quant à ce –qui par ailleurs est loin d’être clos de manière définitive– sans avoir la prétention de vouloir épuiser le sujet, étant donné une certaine dose de subjectivité et de dogmatisme, si minime soit-elle, dont aucun de nous ne peut totalement se départir sur une question aussi délicate que passionnante. Il n’est, en effet, un secret pour aucun économiste sérieux que la majorité des économies africaines sont dans un état embryonnaire sur plusieurs plans. La plupart des économies africaines doivent donc pouvoir protéger certain de leur secteurs naissants mais aussi ouvrir au même moment leurs marchés au commerce international, ce à quoi les institutions de Bretton Woods subordonnent largement leur aide financière. Face à un tel dilemme, quel arbitrage pour l’Afrique ? Cette question est essentielle pour mieux comprendre les difficultés que rencontre le continent noir. Ce qui nous est familier n’est pas pour autant connu, disait le philosophe allemand Hegel. Le protectionnisme se définit, en substance, comme une doctrine économique, qui se propose de protéger la production nationale de la concurrence des entreprises étrangères. Cette politique économique est aussi vieille que la civilisation. On la retrouve en Europe chez les mercantilistes des 16 et 17ème siècles avec comme précurseur le Français Antoine de Mont-chrétien. Par ailleurs, le libre-échange renvoie à un système de commerce international reposant sur l’absence de barrières douanières et non-douanières à la circulation des biens et services. Le principe des avantages comparatifs note Gilles Koléda (2008) est le suivant : « L’échange international est générateur de gains lorsque les pays se spécialisent dans la production des biens pour lesquels leurs coûts relatifs de production sont les plus faibles et importent les biens qui supportent les coûts relatifs de production les plus élevés ». Au stade actuel, protectionnisme est la meilleure protection pour l’Afrique. En fait, les industries africaines sont d’enfance, elles n’ont pas atteint le stade de maturité qui leur permettrait de s’ouvrir au libre-échange au surplus d’une division internationale du travail (OIT) qui leur est défavorable. Où nous avons d’une part le bloc des pays dit riche acheteurs de ces produits de base, ainsi développant leur industrie manufacturière, etc. Il sied de rappeler ici que tous les pays qualifiés, à tort ou à raison, de développés aujourd’hui ont eu à recourir aux politiques protectionnismes à un moment donné de leur histoire. Ce que note bien l’économiste français Marcel Jeanneney qui dans son ouvrage « Pour un nouveau protectionnisme » (1978) observe qu’à la fin de la première guerre mondiale ,puis la grande dépression de 1929 imposant des solutions protectionnistes dans la plupart des pays développés. D’ailleurs, on constate que même présentement les champions du libre-échange sont les plus grands fervents du protectionnisme. Inutile de rappeler que les Etats-Unis et l’UE sont parmi les plus gros distributeurs de subvention à la production ou à l’exportation. Par exemple toujours aux Etats-Unis, les marchés publics sont réservés aux nationaux. Bien sûr, il est difficile à l’Afrique d’appliquer une telle politique : ou encore de subventionner ses exportations à concurrence de l’UE par exemple. Toujours est-il que les institutions de Bretton Woods sont là en criant : « politique budgétaire restrictive…». Le protectionnisme est important pour l’Afrique surtout que ces économies n’ont pas encore décollées voire même certains préalables du décollage n’ont guère été rempli et ce, pour les préserver des effets négatifs du libre-échange sur les industries locales à long terme. Voilà qui corrobore bien la thèse de l’économiste allemand Friedrich List. Des politiques protectionnistes sur le continent permettraient aux Etats africains de protéger l’emploi dans certains secteurs farouchement touchés par la concurrence internationale ce qui serait un soutien au pouvoir d’achat à court terme ainsi limiter le déficit commercial. Les revenus de la protection financeraient la croissance économique, selon P. Bairoch. Selon la théorie du public choice le protectionnisme offre aux hommes politiques dans ce cas-ci l’élite dirigeante africaine l’occasion de gagner des voix lors des élections. A ce niveau, il convient de se demander si le libre-échange serait à l’origine de tous les maux en Afrique ? Avec la théorie des avantages absolus, A. Smith, l’un des pères fondateurs des sciences économiques signe sa marque sur la théorie du libre-échange. Depuis, cette théorie justifie la domination politique et économique des pays riches sur les pays en voie de développement. Notons que cet avis est partagé par la plupart des économistes d’inspiration marxiste. Les pays développés ont intérêt à promouvoir le libre-échange car cela renforce leur emprise sur l’Afrique mais également le reste du monde. Le cas de l’Inde et du Royaume-Uni vers fin 19ème siècle est un exemple frappant. Des exemples allant dans ce sens sont légions. Pour revenir à un fait déjà mentionné, l’Afrique vend essentiellement des produits de base et achètent des produits industriels à forte valeur ajoutée. Tel est le cas de pays comme la République Démocratique du Congo (RDC), qui d’ailleurs a décidé depuis 2010 d’intégrer la zone libre-échange SADC en sigle anglais (communauté de développement d’Afrique australe en français), nous nous demandons si ce pays va échanger quoi concrètement avec les autres Etats membres de ladite organisation régionale ( !) surtout qu’elle ne produit presque rien de tout ce que sa population consomme, la RDC est fortement dépendante des importations. De ce fait, toute dégradation de termes de l’échange crée la croissance appauvrissante, plus d’endettement dans le pays exportateur des produits de base telle est la triste réalité de la plupart des économies africaines. Dans le même registre, l’économiste coréen Ha-Joon Chang observe que les pays les plus riches ont pratiqué le protectionnisme pour se développer, puis une fois arrivés au sommet, ils ont enlevé l’échelle pour que les autres ne puissent plus grimper, autrement dit, ils ont instauré le libre-échange. Le récit de cet auteur vient confirmer ce que l’ONG internationale « Christian aid » avance l’imposition du libre-échange en échange des aides par les pays occidentaux a coûté quelque 217 milliards € à l’Afrique en 20 ans. Ces pays, en dépit de multiples accords de libre -échange qu’ils négocient ici et là et surtout avec les Pays sous-développés, ils ont continué et continuent au jour d’aujourd’hui de protéger certains secteurs ou domaines vitaux de leur économie à cause de leur impact sur l’emploi et la qualité de l’environnement. Prenons, le cas d’un autre pays africain à savoir le Mali, l’un des pays d’Afrique spécialisés dans la production du coton. Si la consommation du coton sur les marchés internationaux baissent, il ne sera plus en mesure d’importer les biens nécessaires à la satisfaction des besoins de sa population et sur développement est ainsi compromis. Le libre-échange est donc facteur d’inégalités. Le contraste est que c’est en grande partie grâce au libre-échange que les dragons asiatiques (Chine, Indonésie, Hong-Kong, etc) sont présentement entrain de bousculer la suprématie occidentale dans le commerce internationale dans un élan sans précédent de Mondialisation. Sur le continent noir, le libre-échange favoriserait les pays qui exploitent le plus leur main d’œuvre notamment en accueillant les firmes multinationales (FMN) qui recherche de coût de production moindre en se délocalisant. Ce qui est de toute évidence loin d’être le cas de la plupart des pays africains, qui restent de moins en moins concerné par les Investissements Directs Etrangers (IDE). Somme toute, le libre-échange pour l’Afrique est un peu osé et assez invraisemblable. Ces industries d’enfance évoluent dans un contexte économique délétère avec des sociétés qui ne tendent pas vers la consommation de masse. A la lumière de ce qui précède, le protectionnisme est une facette du libre-échange autrement dit, il s’agit pour les économies africaines de pouvoir protéger certains de leur secteur naissant encore fragile contre une concurrence déloyale qui proviendrait d’autres acteurs sur le plan international. Protection des secteurs naissant, est-ce à dire fermeture durable des frontières ? Non, une fermeture durable peut aussi être destructrice qu’une ouverture brutale. Les africains devront se dire que la protection est un processus avec un horizon lointain ou proche, l’essentiel étant de booster une dynamique de progrès sur le continent. Ainsi, l’Afrique pourrait conquérir des marchés grâce au libre-échange mais en se protégeant d’adversaires déloyaux car « le protectionnisme est notre voie, le libre-échange est notre but », Friedrich List. Read more: http://www.lecongolais.cd/protectionnisme-ou-libre-echangequel-choix-pour-les-economies-africaines/#ixzz2Up73RvPx http: http://www.allafrica //www.allafrica.com/stories/201302260537.html allafrica