Caractéristiques de l’élève de Cycle 2 en EPS Stage Circo H.G. 16/01 J‐jacques Gravier Rappel : les étapes de la construction motrice chez l’enfant et l’ordre des acquisitions correspondantes ­ Etape 1 de 1 à 2 ans : Comportements élémentaires ou habiletés de base apparaissant au cours de la 1ère année et se perfectionnant pendant la deuxième ­ Etape 2 de 2/3 ans à 6/7ans : Comportements ou habiletés fondamentales ou actions de base ­ Etape 3 de 7 à 10 ans : Comportements ou habiletés spécialisées ­ Etape 4 de 10 à 12/13 ans : Habiletés complexes et habiletés à forte exigence ­ et 4 bis de la puberté à l’adulte : Habiletés expertes de haut niveau Chaque étape est conditionnée par l’étape précédente et conditionne directement l’étape qui suit La deuxième étape de 3 à 7ans : Période où se détermine, le devenir moteur du sujet, où se constituent les habiletés fondamentales ou comportements de base : « basic motor skills ou fundamental motor skills ou abilities » sur la base des comportements moteurs élémentaires de la période précédente. Plus tard ces habiletés fondamentales constituent la base sur laquelle se construiront toutes les formes, d’habiletés et d’actions hautement spécialisées et complexes (en particulier celles mobilisées par les pratiques sportives (gymnastique, athlétisme…) et par la motricité usuelle (cf. la notion de disponibilité motrice) . Dit d’une autre façon l’habileté exigée par beaucoup de sports correspond bien aux schémas des mouvements fondamentaux qui se mettent en place à cette période. Les actions motrices fondamentales sont classées en 3 catégories : 1) les différentes formes de locomotion : marcher, courir, sauter (vers le bas d’abord, vers le haut, puis vers l’avant), ramper, marcher à 4 pattes et grimper, déplacements combinés (galop, cloche‐pied, pas chassés)… 2) Les différentes formes de manipulation et d’action sur les objets pour les orienter et leur transmettre une force (lancer, attraper, frapper de la main, schooter, lancer de grande amplitude…) 3) Les actions d’équilibration, de stabilisation et de changements de position 1 qui intègrent les actions permettant aussi d’adopter une posture ou une attitude préparatoire à l’action de locomotion ou de préhension. tourner sur soi‐même, se balancer, se suspendre, tirer, pousser, porter… Ces actions fondamentales sont acquises dans la période de 2/3 à 7 ans selon 3 stades : ‐ Stade initial : premières manifestations entre 2 et 3 ans en moyenne Ebauche de l’habileté, actions limitées au membre concerné, les autres suivant plus ou moins. Enchainement d’actions impossible (action « séquentialisée »), ou approximatif et incomplet. Amplitude du geste très limitée. Faible vitesse gestuelle. ‐ Stade intermédiaire : 4 à 5ans La coordination des séquences de l’action s’améliore et le contrôle moteur s’améliore ; les synergies musculaires s’affinent et les déplacements gagnent en amplitude. Mais les mouvements ou actions restent étriqués et maladroits et leur enchaînement manque de fluidité. ‐ Stade final : 6 à 7ans Acquisition de l’habileté ou mouvement : les actions s’enchaînent de manière coordonnée et fluide, les synergies sont établies, les actions deviennent amples et fluides. Le modèle (pattern) des mouvements constitutifs du comportement moteur (programme moteur) est solidement établi : l’enfant améliore rapidement ses performances : il court de + en + vite, saute de + en + loin, lance de… A 6ans 90 à 95% des dimensions et de l’organisation du cerveau adulte sont établies et la myélinisation des fibres nerveuses voies afférentes et efférentes est achevée : d’où ‐ une très grande amélioration de la capacité de prise et de traitement de l’information ; ‐ un accroissement de la vitesse de conduction du signal (amélioration importante du temps de réaction) ; ‐ une amélioration du contrôle moteur en général et de la précision des mouvements. Vers 5/7 ans premières modifications morphologiques (allongement des extrémités par rapport au tronc et réduction du prototype : « grosse tête, tronc long et extrémités courtes ») Etape caractérisée par : ‐ un énorme besoin de mouvement et de jeu : besoin d’activités motrices variées pratiquées sous une forme ludique et joyeuse. Goût du mouvement et disponibilité pour l’apprentissage très marquée à cet âge incitent à orienter l’éducation motrice vers l’acquisition d’une base étendue d’habiletés motrices grâce à une diversité d’exercices élémentaires mettant l’enfant en situation d’apprentissage appropriées. L’auto‐résolution des tâches motrices (« apprentissages spontanés ») contribue à enrichir le répertoire moteur et à favoriser la créativité gestuelle et les expériences motrices personnelles. 2 ‐ une grande curiosité pour l’inconnu (âge des questions) et facilité à l’affabulation : la sollicitation de l’enfant repose sur la mise en place de situations nouvelles, nombreuses et variées que l’élève investit massivement, affectivement et sans grand discernement. ‐ une grande disponibilité affective pour les apprentissages, c’est‐à‐dire que l’enfant est prêt à consentir les efforts nécessaires pour acquérir de nouvelles habiletés, construire de nouveaux savoir‐faire (prix à payer pour apprendre c’est des essais nombreux, beaucoup d’échecs ou la chute acceptée…) De plus les compétences motrices et les savoir‐faire moteurs jouent un rôle dans le processus d’interactions sociales : prestige reconnu au coureur, au lanceur, au nageur, à l’esquiveur, à l’attrapeur, au grimpeur, au lutteur… par rapport à ses pairs. A cet âge la maîtrise motrice, incarnée dans quelques habiletés de référence : ‐ réduit le risque d’exclusion sociale (et la souffrance qui en résulte) ‐ augmente la capacité d’intégration sociale (réduction de l’exclusion) ‐ valorise l’élève développe l’estime de soi et la confiance en soi et dans sa capacité à apprendre ; et son image par rapport à ses pairs. Mais il subsiste une faible capacité de concentration liée à la prépondérance des processus d’excitation cérébraux sur ceux d’inhibition. Pensée intuitive, concrète, pratique étroitement liée aux expériences personnelles et empreintes d’une grande émotivité. L’intelligence se développe sous l’influence des jeux, des actions motrices pratiques et par l’expérience du mouvement : la restriction ludique et motrice a un effet négatif sur son développement intellectuel. Période idéale pour le développement moteur : on parle d’« âge d’or de l’enfance». 3 raisons principales à cela : ‐ cette période coïncide avec un développement musculaire marqué : il en résulte un potentiel d’action très favorable ‐ l’enfant dispose d’une énergie débordante et aime jouer. Les actions motrices globales ‐ celles qui sollicitent les grandes masses musculaires du corps ‐ constituent un moyen privilégié à la fois de satisfaire le besoin d’activité, de découvrir des potentialités d’actions accrues sur son environnement physique et humain, et d’acquérir de nouveaux savoir‐faire qui intègre le répertoire. ‐ la période est unique et « critique », (période pendant laquelle une habileté peut être apprise avec un maximum de facilité et d’efficacité, dont le début correspond au moment où les organes d’exécution et de contrôle de cette habileté ont atteint leur pleine maturité physiologique. Baldwin, 67 Avant, les progrès attribués à l‘entrainement sont lents et de faible amplitude. Après, le sujet n’atteindra jamais le niveau auquel il aurait pu prétendre : déficit acquis) Période critique pour l’intégration des schémas d’organisation des habiletés motrices et surtout pour passer du stade intermédiaire d’apprentissage au stade final. 3 Selon GALLAHUE, 97 « l’accès au stade intermédiaire ne pose pas en général de problème étant largement réglé par la maturation. En revanche la maîtrise d’une habileté (correspondant au 3ème stade ou stade final) repose nécessairement sur une sollicitation méthodique ». Si donc la période de 5 à 7 ans n’est pas mise à profit, l’enfant aura du mal à rattraper le retard. Le déficit acquis à cette période qui porte sur les conduites élémentaires est directement responsable des difficultés rencontrées par l’adulte malhabile. Autrement dit il n’y a aucune raison pour qu’un élève bénéficiant d’une sollicitation normale ‐ l’EPS scolaire doit jouer pleinement son rôle ‐ soit foncièrement maladroit ou incoordonné pour ce qui concerne les actions motrices fondamentales : si tel est le cas, c’est dû à une éducation motrice insuffisante. Par ailleurs il est illusoire d’espérer que l’enfant se développe par lui‐même sans qu’il soit nécessaire d’intervenir : livré à lui‐même l’élève évolue peu sur le plan moteur (ou au mieux dans les activités qu’il affectionne) et constitue des carences dans toutes les autres. Par ex. il sera adroit en bricolage manuel mais malhabile pour attraper un ballon ; ou adroit en glisse mais incapable d’enchaîner de manière coordonnée une course et un lancer etc… Nécessité d’un contexte éducatif structuré par un éducateur attentif et attentionné. 3 enseignements à retenir : ‐ Tout enfant (hors trauma, troubles ou déficiences) a le potentiel pour acquérir les comportements moteurs fondamentaux selon l’ordre défini ‐ Il existe des moments très favorables à l’apprentissage de ces comportements (période critique) ‐ L’enfant doit être sollicité pour agir, disposer d’une quantité d’actions importante et être encouragé et soutenu par son entourage : quantité d’actions, qualité des actions et diversité des actions s’incarnant dans un environnement physique et humain sécurisant, tolérant, valorisant, stimulant, adapté et donc favorable. 4