ACTUALITÉS RECHERCHE Une souris pour un espoir thérapeutique contre l’hépatite C !

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ACTUALITÉS RECHERCHE
Rédigé par
M. Chamaillard, Inserm U1019, CHRU de Lille
Une souris pour un espoir thérapeutique
contre l’hépatite C !
Alors que plus de 3 millions de nouveaux cas d’infection par le virus de l’hépatite C (VHC)
sont diagnostiqués chaque année, près de la moitié des patients infectés ne répondent
pas à la bithérapie, et aucun vaccin n’est disponible à ce jour. Une des limites majeures
au développement de nouvelles stratégies thérapeutiques et vaccinales est l’absence de
modèle expérimental chez la souris, qui ne tolère pas l’infection par ce virus. La différence
de permissivité à l’infection par VHC entre l’homme et ce petit animal semble être due à
des variations génétiques au niveau de protéines jouant un rôle clé dans l’entrée de ce virus
dans la cellule humaine, à savoir CD81, l’occludine, la claudine 1 et SCARB1. Cet obstacle
vient d’être levé par l’équipe américaine dirigée par le Pr A. Ploss, de l’université Rockefeller
à New York. À travers une publication dans la revue Nature, cette équipe vient de révéler
que l’expression adénovirale des protéines humaines CD81 et occludine chez la souris suffit
à la rendre permissive à l’infection par le VHC. Cette permissivité est accrue par l’expression
conjointe de la claudine 1 et de SCARB1, et est dépendante de l’expression endogène de
SCARB1, mais pas du génotype viral. Durant les premiers jours de l’infection, ce nouveau
modèle murin a déclenché une robuste réponse antivirale, accompagnée d’un infiltrat de
cellules NK, ce qui lui a permis d’éliminer ce virus au bout de 72 heures postinfection. Avec
élégance, les auteurs ont également pu valider in vivo l’efficacité de l’immunisation passive
avec des anticorps anti-CD81 et l’effet prophylactique d’un potentiel vaccin viral exprimant
des protéines recombinantes du VHC grâce à leur modèle de souris nouvellement développé.
Commentaire
Cette découverte apporte désormais une preuve
conceptuelle de ce que le modèle murin peut enfin
représenter une alternative fiable à l’exploration
de la pathophysiologie de l’infection par le VHC
et au développement de nouvelles thérapies vers
la vaccination et/ou la prophylaxie de l’hépatite C.
Une deuxième génération de souris exprimant
constitutivement les facteurs clés du mécanisme
d’entrée des cellules humaines par le VHC est en
cours de développement. Cette approche élégante
pourrait également ouvrir de nouvelles perspectives pour le développement de nouveaux modèles
d’étude concernant d’autres processus infectieux.
Référence
Dorner M, Horwitz JA, Robbins JB et al. A genetically humanized mouse model for hepatitis C virus infection. Nature
2011;474(7350):208-11. doi: 10.1038/nature10168. PubMed PMID: 21654804.
De la constellation des Gémeaux
à celle du microbiote de la RCH !
La rectocolite hémorragique (RCH) est une maladie polygénique influencée par certains
facteurs de risque environnementaux, comme certains germes de la flore digestive. Les
études moléculaires et microbiologiques ont révélé une diversité réduite de la flore de
ces patients atteints de RCH, un phénomène communément appelé dysbiose. Dans un
modèle spontané de RCH chez la souris, le transfert d’une certaine composante de sa
flore est capable de déclencher la survenue de signes cliniques de la maladie chez un hôte
immunocompétent, ce qui suggère l’existence de souches colitogéniques, dont l’héritabilité et la vraisemblance restaient à valider chez l’homme. Un travail allemand mené par le
Pr S. Schreiber et publié dans Gastroenterology vient d’apporter les premières réponses en
étudiant le microbiote de jumeaux atteints ou non de RCH. Au sein des paires discordantes
de jumeaux monozygotes, la maladie est corrélée à une forte prévalence d’Actinobacteria
et de Proteobacteria combinée à une faible représentation de certains micro-organismes
appartenant au genre des Bacteroidetes (p = 0,046), comme les Prevotellacae. Dans cette
étude, il est à noter que les stéroïdes et l’azathioprine influençaient la diversité de la flore
digestive de ces patients. À l’inverse, la flore des jumeaux sains ayant un frère ou une sœur
atteint de RCH se caractérisait par une plus forte prévalence de micro-organismes de la famille
des Ruminococcaceae et des Lachnospiraceae, suggérant un rôle protecteur de ces bactéries
chez ces individus. Au niveau de la muqueuse des vrais jumeaux sains, des corrélations ont
pu être mises en évidence entre la prévalence de certains germes et le profil d’expression
de gènes impliqués dans la réponse immunitaire et dans le stress cellulaire. Le fait que la
majorité de ces corrélations étaient absentes chez les jumeaux monozygotes discordants en
dépit de leur patrimoine génétique commun confirme un lien entre la maladie et certaines
altérations du dialogue entre la muqueuse intestinale et sa propre flore.
132 | La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XIV - n° 3 - mai-juin 2011
Commentaire
Même si le postulat de Koch n’est pas encore validé
chez le patient atteint de RCH, mais également
chez son jumeau sain, une perte de la réponse
intestinale vis-à-vis de certains germes de leur
propre flore a pu être observée pour la première
fois. Néanmoins, pour des raisons encore inconnues, la discordance entre ces jumeaux semble être
liée à la présence de certaines bactéries “protectrices” (ou symbiontes) chez le sujet sain et de
certaines bactéries “colitogènes” (ou pathobiontes)
chez le patient. L’influence encore inexpliquée du
traitement sur la diversité de la flore des patients
est à noter. Cette observation appelle cependant
à être confirmée par des études ancillaires dans les
essais thérapeutiques en cours et à venir.
Référence
Lepage P, Häsler R, Spehlmann ME et al. Twin study indicates loss of interaction between microbiota and mucosa of patients with ulcerative colitis. Gastroenterology
2011;[Epub ahead of print] PubMed PMID: 2.
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