Le sommeil r duit les capacit s de pr diction du cerveau

Paris, mardi 3 mars 2015
Le sommeil réduit les capacités de prédiction du cerveau
Pourquoi ne prenons-nous pas conscience des bruits extérieurs pendant notre sommeil ? Une
étude, réalisée à Neurospin (CEA/Inserm), en collaboration avec le centre du sommeil et de la
vigilance de l’Hôtel-Dieu à Paris (AP-HP), l’Institut du cerveau et de la moelle épinière (ICM),
Collège de France et les Universités Paris-Sud et Paris-Descartes, montre que même si les
sons pénètrent toujours dans le cortex auditif, le sommeil perturbe la capacité du cerveau à les
anticiper. Les chercheurs ont démontré que le cerveau n’est plus capable d’élaborer des
prédictions dans le sommeil, car les signaux prédictifs en provenance des aires corticales
supérieures semblent abolis. Ces résultats sont publiés dans la revue américaine PNAS du 2
Mars 2015.
A l’écoute d’une mélodie, le cerveau à l’état de veille utilise les régularités de la séquence de sons
pour prédire les sons à venir. Cette capacité de prédiction s’appuie sur un fonctionnement
hiérarchique d’un ensemble d’aires cérébrales. Si un son rompt la régularité de la séquence, le
cerveau génère alors une série de signaux d’erreurs de prédiction responsables entre autres des
réactions à la nouveauté ou des réactions de surprise. Des études antérieures en électro-
encéphalographie ont permis de décrire au moins deux signaux d’erreur successifs : la Mismatch
Négativité (MMN) et la P300. La MMN a déjà été observée chez des sujets à l’état non conscient (y
compris en état de coma), alors que la P300 serait spécifique du traitement conscient, car elle reflète
l’intégration de l’information à travers un vaste réseau cérébral au-delà des régions auditives.
Au cours du sommeil, les sons de l’environnement ne sont pas consciemment perçus. Cependant,
on ne sait pas à quel niveau s’interrompt l’intégration de ces sons par le cerveau, et si il est toujours
capable d’en extraire les régularités et de les anticiper. Cet aspect particulier du fonctionnement du
cerveau a été testé par une équipe de Neurospin (Inserm/CEA), en collaboration avec le centre du
sommeil et de la vigilance de l’Hôtel-Dieu à Paris (AP-HP), l’Institut du cerveau et de la moelle
épinière (ICM), Collège de France et les Universités Paris-Sud et Paris-Descartes. Les chercheurs ont
étudié, par électro et magnétoencéphalographie (E/MEG), les signaux d’erreurs de prédiction (la MMN
et la P300) chez des sujets éveillés et endormis.
Les chercheurs ont invité des volontaires à s’endormir à l’intérieur de la machine de magnéto-
encéphalographie de NeuroSpin, en présence de sons répétitifs. Les résultats ont confirmé que la
P300 est un marqueur spécifique du traitement conscient des sons, puisqu’elle disparaissait dès
l’endormissement, dès lors que les sujets n’étaient plus réactifs aux sons. Par contre, la MMN a été
observée dans tous les stades de sommeil (sommeil lent et sommeil paradoxal). Cependant, ce signal
n’est que partiellement maintenu puisque certaines aires cérébrales, qui normalement s’activent à
l’état éveillé, ne répondent plus au stimulus sonore. En effet, le pic d’activité qui résulte d’une erreur
de prédiction chez un individu éveillé disparaît pendant le sommeil. Seuls persistent des phénomènes
passifs d’adaptation sensorielle, localisés aux aires auditives primaires.
Les chercheurs ont donc démontré que, par un défaut de communication entre les aires
cérébrales, le cerveau n’est plus capable d’élaborer des prédictions dans le sommeil. Il reste
cependant capable de représenter les sons au sein des aires auditives et de s’y habituer s’ils sont
fréquents, ce qui explique pourquoi une alarme nous réveille, mais pas le bruit régulier de l’horloge.
Reconstruction des sources cérébrales des signaux d’erreurs à partir des enregistrements en
magnétoencéphalographie. Les signaux témoignant d’une erreur de prédiction, la partie intermédiaire
de la MMN et la P300, disparaissent dans le sommeil. Seuls les mécanismes passifs d’adaptation
sensorielle (les parties précoces et tardives de la MMN), confinés aux aires auditives, persistent. (Les
différents temps sont exprimés en millisecondes, ils mesurent le délai de réponse au son.
Référence de l’article
« Disruption of hierarchical predictive coding during sleep », Melanie Strauss, Jacobo D. Sitt, Jean-
Remi King, Maxime Elbaz, Leila Azizi, Marco Buiatti, Lionel Naccache, Virginie van Wassenhove and
Stanislas Dehaene, in Proceedings of the National Academy of Science (PNAS), mars 2015,
www.pnas.org/cgi/doi/10.1073/pnas.1501026112
Contacts presse
François Legrand I francois.legrand@cea.fr I 01 64 50 27 53
Tuline Laeser I [email protected] I 01 64 50 20 97
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