ACTUALITÉs sCIeNCes Coordonné par e. Bacon (Inserm et clinique psychiatrique, Strasbourg) // JAMA Psychiatry // PLoS One // Lancet // Schizophrenia Bulletin // Journal of Psychiatric Research Éventuels retentissements des critères du DsM-5 sur les estimations de prévalence de l’autisme Durkin et plusieurs autres villes des États-Unis Les troubles du spectre autistique (TSA) constituent un groupe de troubles du développement caractérisés par des déficiences dans les interactions sociales et la communication, ainsi que des comportements répétitifs et des intérêts restreints. L’American Psychiatric Association (APA) a décrit pour la première fois l’autisme infantile comme un syndrome distinct dans le DSM-III, et a également introduit la catégorie des troubles envahissants du développement (TED). En 1987, l’APA a révisé le diagnostic d’autisme infantile et l’a requalifié en trouble autistique, en élargissant légèrement les critères diagnostiques du DSM-III-R. En 1994, l’APA a inclus plusieurs sous-types de cette pathologie dans le DSM-IV : le trouble autistique, le syndrome d’Asperger, le syndrome de Rett, le trouble désintégratif de l’enfance, et le TED non autrement spécifié. Les critères décrits dans le DSM-IV-TR publié en 2000 étaient en grande partie inchangés par rapport à ceux présentés dans le DSM-IV. Bien que le terme “trouble du spectre autistique” n’était pas présent dans le DSM-IV-TR, il était largement utilisé par les psychiatres. Les rapports concernant les pays développés montrent une augmentation substantielle de la prévalence des TSA depuis le milieu des années 1990. Le DSM-5, publié en 2013, a modifié les critères diagnostiques des TSA par rapport au DSM-IV. Les éventuelles répercussions des nouveaux critères sur la prévalence des TSA ne sont pas claires. Certains experts suggèrent que le diagnostic de TSA selon les critères du DSM-5 requiert un niveau plus élevé de symptômes. Plusieurs équipes américaines se sont donc associées pour réaliser une large étude multicentrique afin d’évaluer les effets que les critères révisés du diagnostic de TSA pourraient avoir sur la prévalence du TSA dans une population d’enfants de 8 ans. L’étude s’est faite sur 14 sites géographiques et incluait près de 650 000 enfants, parmi lesquels 6 577 remplissaient les critères de TSA selon le DSM-IV-TR. Ils se sont notamment intéressés à la proportion d’enfants répondant aux critères d’autisme et de TED selon le DSM-IV-TR qui remplissaient également les critères du DSM-5. Les chercheurs ont ainsi pu constater que 81 % des enfants diagnostiqués comme présentant ce type de pathologie selon le DSM-IV-TR l’étaient également d’après le DSM-5. Ce pourcentage était similaire chez les garçons et les filles, mais il était plus élevé chez les enfants présentant une déficience intellectuelle (87 % de garçons et 73 % de filles). Les 20 % des enfants qui ne remplissaient pas les critères du DSM-5 (304 individus) étaient cependant assez près de présenter les conditions nécessaires et, en général, il leur manquait seulement 1 symptôme. Les enfants présentant un trouble autistique ou un TED étaient plus susceptibles de répondre aux critères du DSM-5 s’ils avaient des antécédents de régression développementale, une déficience intellectuelle, ou si le diagnostic de TSA avait été posé par un spécialiste non hospitalier ou ayant reçu une formation spéciale, ou les 2. Sur la base de ces résultats, la prévalence des TSA aurait été de 10 pour 1 000 en 2008 selon les critères du DSM-5, mais de 11,3 % selon le DSM-IV-TR ! La prévalence des TSA devrait donc être plus faible à l’avenir si l’estimation se fait à partir des critères du DSM-5. Toutefois, cet effet pourrait être tempéré par l’adaptation future aux nouveaux critères des pratiques de diagnostic des psychiatres et/ou par une façon différente de considérer les symptômes. > Maenner MJ, Rice CE, Arneson CL et al. Potential impact of DSM-5 criteria on autism spectrum disorder prevalence estimates. JAMA Psychiatry 2014;71(3):292-300. soigner soi-même sa dépression avec Internet ou à l’aide d’un livre ? Plusieurs villes du Royaume-Uni et de Suède La dépression constitue un problème de santé publique majeur, perturbe la qualité de vie des patients et représente un coût élevé pour la société. Selon le Collège royal anglais de psychiatrie, 1 individu sur 5 est susceptible de présenter un épisode dépressif à un moment de son existence. Selon certains psychiatres, les antidépresseurs seraient prescrits trop facilement, sur des périodes trop longues, et seraient moins efficaces qu’on ne le pense. Par ailleurs, la psychothérapie dynamique et la thérapie L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts. La Lettre du Psychiatre • Vol. X - no 2 - mars-avril 2014 | LPSY 02-2014_mars-avril.indd 65 65 29/04/14 10:36 ACTUALITÉs sCIeNCes cognitivo-comportementale sont efficaces dans le traitement de la dépression, mais l’accès à ce type de soins est souvent limité. Le journal en ligne Plos One a publié récemment plusieurs articles décrivant les effets bénéfiques de thérapies de ce type, fondées soit sur l’utilisation directement par les patients d’un service sur Internet (1), soit sur l’utilisation d’un livre de développement personnel (2), qui l’une et l’autre permettraient d’améliorer l’accès des patients à ce type de soins. Ces méthodes sont en outre présentées comme peu onéreuses et n’exposent pas les patients aux effets indésirables propres aux antidépresseurs (perte de la libido, constipation, etc.). Dans l’étude portant sur Internet, un groupe de chercheurs suédois a inclus une centaine de patients dépressifs : la moitié avait observé un traitement médicamenteux classique, l’autre moitié, un traitement individuel de psychoéducation proposé sur Internet. Le suivi a duré 10 mois. Le traitement psychodynamique était administré par l’intermédiaire d’un guide d’autotraitement fourni chaque semaine. Il comportait 9 modules, l’ensemble totalisant 167 pages. Les patients avaient accès aux modules de manière graduelle, et pouvaient bénéficier en permanence du soutien en ligne d’un thérapeute, grâce à un système de messagerie protégé. Les modules étaient largement inspirés d’un ouvrage de F. Silverberg (Make the leap, “Faites le saut”) [3]. Le traitement cherchait principalement à apprendre au patient à considérer et à briser les schémas affectifs, cognitifs et comportementaux négatifs. Les résultats de l’étude montrent que les participants traités sans médicaments via Internet présentaient une amélioration importante de leurs symptômes dépressifs, qui était supérieure à celle obtenue avec un traitement pharmacologique. L’étude “livre”, quant à elle, a été menée par des chercheurs de plusieurs laboratoires écossais. Dans cet essai randomisé, une partie des patients utilisaient une auto assistance constituée par un guide de thérapie cognitivocomportementale (Overcoming depression, “Dépasser la dépression” [4]), et bénéficiaient en outre de 3 ou 4 sessions de soutien en face-à-face avec un psychologue, cependant que les autres suivaient un traitement classique (médicament + psychothérapie). Des 280 patients inclus initialement dans cette étude, seuls 72 % y participaient encore au bout de 4 mois. À ce stade, les personnes qui recouraient au livre se sentaient beaucoup moins déprimées que celles traitées par les méthodes habituelles, et cette observation restait valable au bout de 12 mois. Se tourner vers la littérature et Internet pourrait donc aider les patients à traiter leur dépression ? Des études complémentaires devraient encore être engagées pour le confirmer. Les auteurs de la première étude signalent quelques limitations : les participants à leur étude provenaient de la population générale et n’étaient pas suivis en hôpital psychiatrique, ils étaient d’un niveau d’étude relativement élevé, et 25 % d’entre eux prenaient des médicaments. Selon l’étude “livre”, certains des patients utilisant l’ouvrage étaient également sous médication. En outre, le premier auteur de l’article de Plos one était l’auteur de l’ouvrage Dépasser la dépression ! Ce type d’aide peut se révéler utile dans certaines circonstances, mais ne convient probablement pas à tous les patients souffrant de dépression. 1. Johansson R, Ekbladh S, Hebert A et al. Psychodynamic guided self-help for adult depression through the internet: a randomised controlled trial. PLoS One. 2012;7(5):e38021. 2. Williams C, Wilson P, Morrison J et al. Guided self-help cognitive behavioural therapy for depression in primary care: a randomised controlled trial. PLoS One 2013; 8, e52735. doi:10.1371/journal. pone.0052735. 3. Silverberg F. Make the leap: a practical guide to breaking the patterns that hold you back. New York: Marlowe & Co, 2005. 4. Williams CJ. Overcoming depression: A five areas approach. London: Hodder Arnold, 2001. efficacité de divers agents anti-inflammatoires pour le traitement de la schizophrénie : une méta-analyse fait le point Munich, (Allemagne) et Utrecht (Pays-Bas) Il y a 40 ans déjà, E. Torrey et M. Peterson avaient suspecté que les processus inflammatoires pouvaient jouer un rôle clé dans la pathophysiologie de la schizophrénie. Par la suite, un certain nombre de travaux ont amené à proposer la possibilité de l’existence d’un état pro-inflammatoire dans le cerveau des patients. Cette hypothèse inflammatoire déjà ancienne connaît depuis peu un regain d’intérêt du fait de l’accumulation de données impliquant un rôle du système immunitaire dans la patho- génie de la schizophrénie. En outre, un certain nombre de médicaments utilisés en psychiatrie, comme les antipsychotiques, le lithium, l’acide valproïque et les inhibiteurs sélectifs de recapture de la sérotonine possèdent certaines propriétés anti-inflammatoires. Si l’augmentation de l’inflammation du cerveau contribue aux symptômes de la schizophrénie, la réduction de l’état inflammatoire devrait pouvoir améliorer le tableau clinique, et récemment, plusieurs essais destinés à évaluer le potentiel des agents anti-inflammatoires sur l’amélioration des symptômes de la schizophrénie ont été réalisés. Une méta-analyse quantitative fait le point à cet égard sur l’efficacité des divers agents anti-inflammatoires. Les chercheurs ont effectué une recherche sur plusieurs sites Internet (PubMed, Embase, Cochrane Database of Systematic Reviews, etc.). Ils n’ont retenu que les études randomisées effectuées en double aveugle avec groupe placebo et décrivant des résultats cliniques. Vingt-six études remplissaient tous ces critères d’inclusion, et fournissaient des informations concernant l’efficacité des composés suivants sur la sévérité des symptômes : l’aspirine, un anti-inflammatoire non stéroïdien, le célécoxib, une molécule à action neuroprotectrice, le davunétide, des acides gras tels que les acides éicosapentanénoïque et docosahexaénoïque, des estrogènes, la minocycline (une tétracycline) et la N-acétylcystéine (NAC). Parmi ces composés, seuls l’aspirine, les estrogènes et la NAC ont montré des effets significatifs sur les symptômes. Les 2 études utilisant l’aspirine l’ont administrée à des doses de 1 000 mg/j pendant 3 et 4 mois. Sept études se sont intéressées aux estrogènes, utilisés à des doses allant de 0,05 mg/j à 2 mg/j. Dans l’unique étude menée avec la NAC, la molécule était administrée à la dose de 2 g/j pendant 6 mois. Seules 5 des 26 études ont fourni des données concernant les effets cognitifs potentiels de ces molécules. Parmi elles, seule l’étude menée avec la minocycline a observé des effets bénéfiques. Toutefois, l’intérêt de ces études est entaché par l’hétérogénéité des tâches cognitives mises en œuvre, qui ne permet pas d’aboutir à de véritables conclusions. Les résultats bénéfiques sur les symptômes de la schizophrénie obtenus avec l’aspirine, les estrogènes et la NAC semblent prometteurs, mais 66 | La Lettre du Psychiatre • Vol. X - no 2 - mars-avril 2014 LPSY 02-2014_mars-avril.indd 66 29/04/14 10:36 MISE AU POINT Annoncez vous ! les auteurs font cependant remarquer qu’il est trop tôt pour tirer des conclusions e nitives xièmdéfi deud’autres Unete que de ces observations, recherches uite Ils atrésultats. ion grces sont nécessaires ertpréciser inspour rappellent notammentpque ourles 3 substances qui ont permis d’améliorer de façon significative les symptômes des patients sont des molécules possédant par ailleurs des effets thérapeutiques spécifiques et puissants, et Contactez Valérie Glatin au 01 46 67 62 77 qu’il n’est pas certain à ce jour que leurs effets bénéfiques sur lesou faites parvenir symptômes psychotiques votre annonce par mail soient véritablement le résultat de leur action à [email protected] anti-inflammatoire. À suivre… és les abonn > Torrey EF, Peterson MR. Slow and latent viruses in schizophrenia. Lancet 1973;2(7819):22-4. > Sommer IE, van Westrhenen R, Begemann MJ et al. Efficacy of anti-inflammatory agents to improve symptoms in patients with schizophrenia: an update. Schizophr Bull 2014;40(1):181-91. Altérations de la connectivité fonctionnelle dans les réseaux cérébraux impliqués dans la conscience de soi chez les usagers chroniques de cannabis Barcelone (Espagne) et plusieurs villes d’Espagne, des États-Unis, d’Australie et du Brésil Les drogues récréatives modifiant l’expérience consciente sont consommées pour des raisons diverses, incluant la curiosité, le goût du risque et la pression des proches. Toutefois, la raison la Annoncez vous ! Annoncez vous ! plus souvent invoquée par les consommateurs de cannabis à un moment où le sujet n’était s annodenclaesubstance, chroniques de cannabis est le soulagement pas sous et répétées Desl’emprise s e ll e n n de la tension ou de l’anxiété. Comme nombre après o 1 mois d’abstinence. Les résultats révèlent pr fessio s if s s e r d’autres substances psychoactives, le cannabis que, chez les consommateurs de cannabis, la s dég gratuite r présente un certain nombre d’effets secondaires connectivité fonctionnelle est accrue dans le pou r poupar s é potentiels. Outre la possibilité d’engendrer une noyau du réseau défaut et dans le réseau llectivit leset cdeodéclencher toxicomanie la survenue d’une de l’insula, et que l’anticorrélation fonctionnelle psychose chez les sujets à risque, la consomentre les 2 réseaux augmente de manière sélecmation chronique de cannabis est susceptible tive. Par ailleurs, une diminution de la connectiContactez Valérie Glatin Contactez Valérie Glatin Contactez Valérie Glatin au 01 46 67 62 77 au 01 46 67 62 77 au 01 46 67 62 77 d’altérer la cognition. Parmi les fonctions cognivité fonctionnelle a été observée dans les zones ou faites parvenir tives, c’est la mémoire qui est plus souvent où cesou faites parvenir réseaux se superposent à d’autres. ou faites parvenir Les votre annonce par mail votre annonce par mail votre annonce par mail signalée à [email protected] par les usagers de cannabis comme changements observés étaient associés à des à [email protected] à [email protected] altérée, bien que cette perturbation soit plutôt modifications de certains scores de comportemodérée si aucune autre substance n’est ment, suggérant une réduction de l’anxiété et consommée en même temps. Par ailleurs, les une interférence avec les performances de la recherches en neuro-imagerie contribuent de mémoire. Les altérations observées persistaient façon essentielle à la compréhension des fondeen partie après 1 mois d’abstinence. La consomments biologiques des bandeaux états mentaux. Des chermation chronique de cannabis a donc des effets à placer en pied cheurs se sont attachés à vérifi er l’hypothèse dans la petite colonne significatifs sur les réseaux cérébraux impliqués que la consommation de cannabis en tant que dans la conscience de soi, réseaux qui sont à composé psychoactif est associée à des altéraleur tour intégrés dans les systèmes cérébraux tions de l’activité spontanée dans les réseaux du gérant le stockage de l’expérience personcerveau correspondant à la conscience de soi, nelle et le comportement motivé. Les résultats et que ces changements éventuels sont liés à rapportent que des mécanismes potentiellement l’anxiété et à des perturbations de la mémoire. impliqués dans l’action des drogues récréatives Selon demande de la secrétaire de rédaction La connectivité fonctionnelle a été évaluée par sur le choix du /des bandeau(x) à fairepourraient paraîtreinterférer avec les systèmes générant IRMf dans le réseau du mode par défaut et celui l’expérience consciente. de l’insula pendant une phase de repos chez 28 consommateurs de cannabis et 29 sujets > Pujol J, Blanco-Hinojo L, Batalla A et al. Functional connectitémoins. Les évaluations sur l’imagerie ont été vity alterations in brain networks relevant to self-awareness in effectuées pendant la période de consommation chronic cannabis users. J Psychiatr Res 2014;51:68-78. Des tarifs nt les étudia s Annoncez vous ! bandeau à placer en pied sous les deux colonnes Annoncez-vous ! Les annonces professionnelles : un service fait pour vous ! ^ une deuxième insertion gratuite pour les abonnés ^ des tarifs dégressifs pour les collectivités ^ des annonces professionnelles gratuites pour les étudiants Contactez Valérie Glatin au 01 46 67 62 77 ou faites parvenir votre annonce par mail à [email protected] La Lettre du Rhumatologue • Supplément 1 au n° 344 - septembre 2008 La Lettre du Psychiatre • Vol. X - no 2 - mars-avril 2014 | LPSY 02-2014_mars-avril.indd 67 | 33 67 29/04/14 10:36